Pour permettre aux agriculteurs de vivre décemment de leur métier et nourrir enfin suffisamment les sénégalais, il est indispensable de développer durablement le secteur sans confondre augmentation de la production et développement de l’agriculture. Cette confusion des deux concepts est à l’origine de l’échec de plusieurs bonnes initiatives prises depuis 2000. On peut rappeler en passant que c'est pendant les années 80 à 2000 que la politique agricole du Président Senghor a été abandonnée sous la pression des partenaires.
Le développement de l’agriculture passe d'abord par une augmentation de la production avec nécessairement une amélioration de la productivité et donc des rendements. Plusieurs facteurs interdépendants influent sur la production agricole : eau, main d’œuvre, surfaces cultivées, qualité des semences, engrais, matériel agricole, crédit, protection des cultures, encadrement des acteurs, etc.
Depuis 2000, des efforts louables ont été faits pour booster la production agricole pour les différentes spéculations. Au moment du bilan, force a été de constater que les paysans ne nourrissent toujours pas suffisamment les sénégalais.
Après l’alternance de 2012, le nouveau régime a poursuit en l’intensifiant la politique d’augmentation de la production agricole enclenchée par l’ancien. Le constat est toujours là , l’autosuffisance alimentaire reste toujours un vœu lointain.
Ceux qui connaissent les sciences agricoles savent qu’une augmentation de la production agricole en amont peut être un facteur d’appauvrissement des paysans si, en aval, il n’y a pas de système de commercialisation fiable et une industrie agroalimentaire en mesure de transformer les produits. Une augmentation de la production agricole tous azimut provoque souvent une inondation du marché entraînant alors une chute vertigineuse des prix, les paysans vendant dans ces conditions à perte ou presque. Ce phénomène se produit fréquemment en Europe et les paysans, fortement syndiqués, réagissent souvent violemment.
Il est évident alors qu’augmenter la production agricole ne peut pas être une stratégie isolée dans une perspective de développement de l’agriculture. Pour être durable et productrice de richesse, l’augmentation de la production agricole doit être obligatoirement accompagnée de dispositifs permettant une bonne commercialisation des produits, des infrastructures de conservation aux normes et une industrie de transformations des produits dynamique.
En matière de commercialisation et de conservation des produits agricoles, l’Etat a fait des efforts significatifs même s’il reste encore beaucoup à faire. Dans des publications antérieures, nous avons donné notre point de vue sur ces 2 préalables à l’augmentation de la production agricole avec des propositions concrètes.
L’industrie agroalimentaire est un facteur incontournable pour toute politique visant à faire de l’agriculture une activité productrice de richesse, créatrice d’emplois et assurant une sécurité alimentaire à tous les citoyens.
Un état des lieux des principales industries agroalimentaires utilisant des produits agricoles locaux pourrait permettre de mieux comprendre pourquoi l’agriculture ne nourrit pas son homme, ne crée pas beaucoup d'emplois, n'assure pas la sécurité alimentaire aux sénégalais. Les principales industries agroalimentaires utilisant des matières premières locales sont les suivantes : industries des matières grasses, industries laitières, industrie sucrière, petites industries céréalières, filière viande, filière riz.
I Industries des matières grasses
Les industries des matières grasses sont constituées essentiellement d'huileries : SUNEOR, NOVASEN, CAIT. Ces entreprises utilisent les graines d'arachides comme matière première pour produire de l'huile. Elles dépendent donc de la production nationale d'arachide pour faire fonctionner leurs unités industrielles de trituration. Cette dépendance aurait dû inciter ces huiliers à nouer une collaboration gagnant-gagnant avec les paysans en leur apportant un encadrement et un soutien technique au niveau de tous les maillons constituant la chaîne de production de l'arachide.
Les industries agroalimentaires fonctionnent généralement sous ce format. L’absence totale de collaboration entre les huileries et les producteurs d'arachide est une des causes de la faiblesse de la filière arachidière et des difficultés de la SUNEOR, la première huilerie du Sénégal, avec 4 usines. La privatisation de la SUNEOR a été une catastrophe pour le pays, en particulier pour les producteurs d'arachide. En se transformant en vendeur d'huile végétale importée, la SUNEOR a oublié sa mission initiale la fondant qui est de promouvoir la filière arachidière pour le développement du pays.
La SUNEOR, dès sa privation, s'est transformée en « Bana Bana ». Elle attend la récolte, achète quelques graines selon le cours mondial de l’arachide, les triture, exporte l’huile, vend aux consommateurs sénégalais de l'huile végétale importée et attend l'année suivante pour recommencer. Avec cette politique « banaanaiste », la SUNEOR n’a apporté aucun soutien aux arachiculteurs et n’a investi dans aucune de ses usines. Conséquence, la filière arachidière a reculé et les usines industrielles de trituration sont en état de dégradation très avancée. Face à cet échec de la SUNEOR, l’Etat devrait, sans délai, commanditer un audit technique des unités industrielles et du patrimoine de l’ex SONACOS et en tirer toutes les conséquences.
L’Etat du Sénégal a bien compris que l’actionnaire majoritaire de la SUNEOR était en train de TUER la filière arachidière et de déstructurer les unités industrielles de trituration. Une séparation à l'amiable ou non avec M. Jabert est une des meilleures décisions de l’Etat du Sénégal pour l’année 2015. Cette décision très opportune va permettre enfin de relancer la culture de l'arachide et de réhabiliter les usines de l’ex SONACOS, mises en mal par M. Jabert.
L’Etat est à la recherche d'un repreneur de la SUNEOR avec l'objectif clairement décliné de relancer la filière arachidière, un levier créateur d'emplois et de croissance. Le cahier de charges sur la base duquel les candidats repreneurs vont soumissionner devra éviter les erreurs grossières commises lors de la privation ratée de l’ex SONOCAS. L’Etat ne devrait pas perdre de vue que la filière arachidière est un des piliers de l’économie sénégalaise et que les unités industrielles constituent un patrimoine national à préserver. Le futur repreneur devra comprendre que la SUNEOR a entre autres missions de :
- Tirer la filière arachidière en triturant la production arachidière des paysans ;
- Assister et encadrer les arachiculteurs dans le cadre de relations de coopération dans le but de relancer la filière arachidière ;
- Réhabiliter les points de collecte de l’arachide de l’ex SONACONAS sur l’étendue du territoire ;
- Moderniser les 4 usines de trituration avec des investissements conséquents, si nécessaire avec l’aide l’Etat ;
- Vendre l'huile obtenue au Sénégal et n'exporter que l'excédent ;
- Mettre en place un cadre de concertation permanent arachiculteurs-huiliers-Etat-syndicats agricoles-instituts de recherche ;
- Reprendre la production d’aliments du bétail et du savon.
La filière arachidière est un des plus puissants leviers de développement économique et social du pays si elle est adossée à une industrie de trituration performante. Cette vision devra guider les experts qui vont travailler sur le dossier de la reprise de la SUNEOR qui devra vite changer de nom. Le nom SUNEOR est trop chargé négativement pour les acteurs de la filière arachidière.
II Industries laitières
Le Sénégal a une industrie laitière dynamique mais malheureuse qui n'utilise que de la matière première importée. La seule unité industrielle de fabrication de produits laitiers à base de lait local se trouve à Richard Toll. Il s’agit de la Laiterie du Berger créée par un jeune vétérinaire sénégalais avec l’appui de la multinationale Danone. Cette laiterie produit des laits fermentés à partir de lait local collecté sur un rayon de 50 km. La ferme Wayembam, située dans les Niayes, dans la banlieue de Dakar, utilise également du lait local pour certaines de ses fabrications. Avec un équipement adéquat, la ferme traite 6 000 litres de lait par jour, le stabilise et le distribue à travers un réseau de 300 kiosques implantés dans la région de Dakar.
A côté de ces deux unités industrielles modernes, il existe à travers le pays, des mini laiteries plus ou moins fonctionnelles, traitant globalement une quantité de lait local limitée à cause de leur faible capacité. Depuis quelques années, l’entreprise agroalimentaire KIRENE expérimente l’utilisation du lait local dans la fabrication du Grand lait Candia. C’est une belle initiative à encourager.
L’industrie laitière sénégalaise est certes dynamique mais elle n’utilise que très peu le lait local. Elle importe pour plusieurs dizaines de milliards de FCA de la poudre de lait pour la redistribuer aux consommateurs après ensachage. C’est avec la poudre importée que les laiteries reconstituent du lait liquide pour la fabrication de divers produits fermentés.
Le lait est un produit de première nécessité dont une rupture ou une hausse de prix peut entrainer des émeutes dans les agglomérations. Sans doute c’est pour cela que les importateurs ont des privilèges qui les empêchent pour la grande majorité de s’intéresser au lait local. Il est curieux et aberrant de constater que les producteurs à base de lait local paient plus de taxes que les importateurs de la poudre de lait.
Pour que l’élevage bovin contribue davantage à l’effort de développement du pays, il est temps que les industries laitières soient incitées par l’Etat à s’intéresser au lait local. A cette fin, une politique nationale d’augmentation de la production laitière pourrait être élaborée en étroite collaboration avec les industries laitières et les éleveurs. Le Sénégal, avec un tissu industriel laitier dense et dynamique, ne devrait pas continuer à importer de la poudre de lait sans une ambition à terme d’autosuffisance en ce produit essentiel. Une incitation des industriels à utiliser le lait local dans leur process entraînerait une accélération de la modernisation de l’élevage.
III La Compagnie Sucrière Sénégalaise
La Compagnie Sucrière Sénégalaise a la mission de fournir aux consommateurs sénégalais la quantité de sucre dont ils ont besoin, de façon permanente. Pour y arriver, la CSS a une usine d'extraction et de raffinage du sucre et des champs de canne dans la zone de Richard Toll. C'est un format qui, si tous les obstacles qui entravent le bon fonctionnement du dispositif sont levés, peut garantir au Sénégal une sécurité totale en fourniture de sucre en qualité et en quantité. La CSS rencontre un certain nombre difficultés qui entravent son envol même si elle arrive à couvrir 75% des besoins du pays en sucre. Ces difficultés sont entre autres :
- La fraude au niveau des frontières gambienne et mauritanienne. Ces fraudes causent un manque à gagner très important de nature à remettre en cause la viabilité de la CSS ;
- La campagne de dénigrement gratuit de la compagnie avec des motivations purement politiciennes, aux antipodes de l'intérêt du pays. Ces campagnes peuvent ternir l'image de l'entreprise et retarder les investissements et les réformes nécessaires à la modernisation de la sucrerie ;
- La campagne de charme ou d'intoxication souvent doublée de menaces envers les autorités étatiques pour obtenir la libéralisation totale de l’importation du sucre, synonyme de la disparition certaine de la CSS. Cette demande incessante de libéralisation de l'importation du sucre peut semer le doute sur les intentions des autorités étatiques et empêcher l'entreprise d'avoir une stratégie à long termes.
La CSS est un exemple qui montre les liens de dépendance qui doivent exister entre la production et l'industrie de transformation. Une production agricole sans industries de transformation a l’aval ne peut être ni durable, ni créateur d’emplois encore moins de croissance. Investir dans la production sans tissus industriel de transformation est contre-productif.
La CSS a créé beaucoup d'emplois et peut en créer encore beaucoup plus si elle est rassurée. Elle a déjà effectué des investissements stratégiques qui lui ont permis d'augmenter sa production de sucre quantitativement et qualitativement.
La pérennisation de la CSS repose sur une lutte féroce contre la fraude de sucre et un refus net clair de la part de l’Etat de toute libéralisation future de l’importation de sucre.
La CSS doit de son côté se hâter pour atteindre une production de sucre raffiné couvrant la totalité de nos besoins et améliorer la qualité de son produit. Cet objectif est un engagement de la CSS lors de sa création.
IV Petites industries céréalières
Suite à la dévaluation du Franc CFA des années 90, le pouvoir d'achat des sénégalais avait brutalement et significativement baissé. Certains consommateurs se sont alors remis à rechercher et à consommer les céréales locales. C'est dans ce contexte que des sénégalais, principalement des femmes, appuyés par l’ONG Enda, ont commencé à produire et à commercialiser les produits céréaliers classiques tels que le couscous, le arraw, le sankhal et le thiakry. Depuis cette période, les artisans céréaliers se sont installés dans tous les coins et recoins du Sénégal et écoulent leurs produits avec succès.
La fabrication de produits céréaliers manufacturés même artisanalement est la première valorisation industrielle des céréales locales au Sénégal, céréales jadis oubliés par les autorités. Les artisans céréaliers, avec peu de moyens, sont en train de faire la promotion des céréales locales. Des emplois et de la richesse sont créés avec les unités artisanales de fabrication de couscous, de sankhal, de arraw et de thiakry, démontrant ainsi que nos céréales sont aussi des cultures à la fois vivrières et de rente.
Pour tirer davantage la culture des céréales, il est souhaitable que l’Etat appuie les artisans céréaliers pour la modernisation de leurs unités de production, la formation de leurs employés et mettre à leur disposition une ligne de crédit suffisamment fournie.
L’Etat et les associations de consommateurs devraient également aider les artisans céréaliers à mieux vendre leurs produits grâce à une communication et une publicité axées sur l’impérieuse nécessité pour les sénégalais de diversifier leur alimentation. Consommer du riz tout le temps, tous les jours, à toutes les occasions, est TRES mauvais pour la santé. L’« autosuffisance en riz » pourrait être avantageusement rebaptisée « autosuffisance en céréales »
V Filière viande
1 Les abattoirs
L’essentiel de la viande consommée au Sénégal est produite localement. Les animaux abattus proviennent pour l’essentiel de l’élevage national et l’autre partie de plus importante est importée du Mali. Le Sénégal n’est plus autosuffisant en viande et c’est inquiétant dans le contexte actuel de recherche de l’autosuffisance alimentaire en ceci ou en cela.
Journellement, des milliers de bovins, ovins, caprins, porcins et autres volailles sont abattus dans des abattoirs officiels ou clandestinement pour satisfaire la demande des consommateurs en viande. Cette activité fait travailler plusieurs centaines de milliers de personnes à travers le pays, en amont et en aval de l’abattage des animaux. Une politique mieux élaborée et plus ambitieuse pour la production de viande pourrait augmenter le nombre d’emplois créée par la filière et entraîner une baisse du prix de la viande qui est actuellement anormalement trop élevé.
Les infrastructures d’abattage des animaux sont globalement non conformes. Les abattages se font dans de mauvaises conditions d’hygiène avec des infrastructures de conservation hors normes. La modernisation des abattoirs est une impérieuse nécessité dans ce contexte de l’engagement de l’Etat à garantir aux consommateurs la sécurité sanitaire des aliments.
La filière de la viande est un secteur potentiellement créateur de beaucoup d’emplois et réducteur de la pauvreté en milieu rural notamment. Sa faiblesse est le manque de traçabilité de la viande qui handicape fortement la filière. Certains restaurants VIP, les hôtels et la restauration aérienne importent leur viande à cause de la non-traçabilité de la viande sénégalaise.
La filière viande doit retenir davantage l’attention des autorités. Elle constitue un levier de développement de l’élevage, de production de richesse, d’amélioration de l’alimentation des sénégalais et créateur d’emplois divers.
L’autosuffisance en viande doit être un objectif à cours terme comme l’autosuffisance en riz ou en sucre. L’importation de bovins et d’ovins ne doit pas être considérée comme une solution définitive à notre déficit en viande.
Concernant la Tabaski, garantir aux sénégalais qu’ils auront leurs montons quelque soit leur provenance n’est pas acceptable pour un pays d’élevage comme le nôtre. L’autosuffisance en moutons à terme doit être un objectif avec une stratégie pour l’atteindre.
2 Filière avicole
Les sénégalais sont de grands consommateurs de poulets et d’œufs. Pour satisfaire cette forte demande, une filière avicole très dynamique s’est installée dans la banlieue de Dakar. Les fermes avicoles sont de tailles différentes mais se caractérisent toutes par un certain professionnalisme. L’aviculture est une activité à haut risque économique et sanitaire. Le risque économique est lié aux maladies dévastatrices que peuvent attraper les poulets mais aussi à la quantité de nourriture que nécessitent la croissance et le développement des poussins. Tout poulet perdu est un manque à gagner à déduire du bénéfice de l’exploitant. Pour minimiser le risque économique, l’exploitant doit obligatoirement faire preuve de professionnalisme.
Le risque sanitaire est lié aux maladies que peuvent attraper les travailleurs dans les poulaillers. Une bonne pratique avicole et un respect des règles élémentaires d’hygiène s’imposent aux exploitants et à leurs employés.
La filière assure l’autosuffisance en poulets et œufs aux consommateurs sénégalais depuis l’arrêt des importations de produits avicoles suite à l’épidémie de la grippe aviaire.
Le secteur a créé des milliers d’emplois directs et indirects et contribuent au développement des usines de production d’aliments du bétail.
La filière avicole mérite un soutien plus franc des autorités. Un cadre de concertation Etat-Aviculteurs-producteur d’aliments-Consommateurs permettrait de mieux identifier les forces et faiblesses de la filière pour accélérer son développement car ses potentialités sont très élevées.
Pour réduire la pauvreté en milieu rural, l’Etat devrait appuyer et encourager les paysans à s’adonner davantage à l’aviculture familiale. L’appui consisterait à concevoir un poulailler artisanal sécurisé accessible aux paysans et à les former à la prévention et aux traitements des maladies aviaires qui déciment les poulets en milieux rural. Une avicule rurale prospère permettrait de réduire la pauvreté et la mal nutrition dans le monde rural.
VI Filière riz
L’Etat du Sénégal a pris l’engagement public que notre pays sera autosuffisant en riz en 2017. Techniquement c’est possible et nous y croyons. L’augmentation de la production de riz dépend de quelques facteurs maitrisables : eau, des terres à emblaver, semences de qualités, exploitants motivés et qualifiés, encadrement des exploitants, intrants, matériel agricole. Ces facteurs étant maîtrisés pour certains et maîtrisables pour d’autres, l’autosuffisance en riz est véritablement possible en 2017.
Pour que cette autosuffisance en riz soit durable avec un produit de qualité du point de vue organoleptique, nutritionnel et sanitaire, des infrastructures à l’aval de la production sont OBLIGATOIRES.
Les infrastructures minimales pour une autosuffisance en riz sont :
1 Unités de décorticage du riz : Le nombre d’unités de décorticage du riz doit être proportionnel à la quantité de riz récoltée. Tout déficit dans ce domaine va entraîner une non qualité que va payer le consommateur, le producteur et finalement l’Etat. Le retard dans le décorticage du riz va entraîner une dégradation des graines en attente avec une forte probabilité de développement d’Aspergilus flavus et donc production d’aflatoxines, mycotoxine fortement toxique et cancérigène.
2 Infrastructures de conservation : Le riz provenant des unités de décorticage, avant livraison aux commerçants, doit être stocké dans des infrastructures respectant les normes en la matière. Parallèlement à l’augmentation de la production, il est obligatoire de mettre en place des infrastructures capables de contenir le riz en instance de livraison.
Ces infrastructures doivent permettre des conditions de températures et d’humidité requises pour une bonne conservation du riz. La non maitrise des températures et l’humidité peut entrainer une dégradation des graines de riz pouvant porter atteinte à la santé des consommateurs.
VII Conclusion
L’agriculture est un pilier essentiel et primordial pour le développement économique et social du Sénégal. Plus que tout autre secteur, elle est, directement et indirectement, créatrice d’emplois, de richesse et de croissance. Tout effort allant dans le sens du développement du secteur aura un impact réel et visible sur le niveau de développement du pays.
L’action inverse fera reculer notre pays en matière de développement économique et social.
Le développement de l’agriculture à deux dimensions : augmenter la production, créer des industries de transformation, les 2 étant interdépendantes.
Prendre en compte ces 2 dimensions du développement de l’agriculture s’est s’engager dans la voie de la réussite de la politique agricole du pays.
L’accélération de l’agriculture, c’est d’augmenter la production agricole et de disposer d’industries agroalimentaires fonctionnelles ou d’en créer.
L’Etat devrait donc avoir un regard vigilent sur les industries agroalimentaires notamment la SUNEOR, la CSS, les abattoirs, les petites industries céréalières, les industries de décorticage du riz, les industries laitières. Ces industries sont les principaux facteurs accélérateurs de l’agriculture au Sénégal.
La très dynamique filière horticole mérite le soutien de l’Etat qui pourrait se traduire par la mise en place d’unités de transformation des produits non exportés.
Pr Demba Sow
Ecole Supérieure Polytechnique de l’UCAD
Le développement de l’agriculture passe d'abord par une augmentation de la production avec nécessairement une amélioration de la productivité et donc des rendements. Plusieurs facteurs interdépendants influent sur la production agricole : eau, main d’œuvre, surfaces cultivées, qualité des semences, engrais, matériel agricole, crédit, protection des cultures, encadrement des acteurs, etc.
Depuis 2000, des efforts louables ont été faits pour booster la production agricole pour les différentes spéculations. Au moment du bilan, force a été de constater que les paysans ne nourrissent toujours pas suffisamment les sénégalais.
Après l’alternance de 2012, le nouveau régime a poursuit en l’intensifiant la politique d’augmentation de la production agricole enclenchée par l’ancien. Le constat est toujours là , l’autosuffisance alimentaire reste toujours un vœu lointain.
Ceux qui connaissent les sciences agricoles savent qu’une augmentation de la production agricole en amont peut être un facteur d’appauvrissement des paysans si, en aval, il n’y a pas de système de commercialisation fiable et une industrie agroalimentaire en mesure de transformer les produits. Une augmentation de la production agricole tous azimut provoque souvent une inondation du marché entraînant alors une chute vertigineuse des prix, les paysans vendant dans ces conditions à perte ou presque. Ce phénomène se produit fréquemment en Europe et les paysans, fortement syndiqués, réagissent souvent violemment.
Il est évident alors qu’augmenter la production agricole ne peut pas être une stratégie isolée dans une perspective de développement de l’agriculture. Pour être durable et productrice de richesse, l’augmentation de la production agricole doit être obligatoirement accompagnée de dispositifs permettant une bonne commercialisation des produits, des infrastructures de conservation aux normes et une industrie de transformations des produits dynamique.
En matière de commercialisation et de conservation des produits agricoles, l’Etat a fait des efforts significatifs même s’il reste encore beaucoup à faire. Dans des publications antérieures, nous avons donné notre point de vue sur ces 2 préalables à l’augmentation de la production agricole avec des propositions concrètes.
L’industrie agroalimentaire est un facteur incontournable pour toute politique visant à faire de l’agriculture une activité productrice de richesse, créatrice d’emplois et assurant une sécurité alimentaire à tous les citoyens.
Un état des lieux des principales industries agroalimentaires utilisant des produits agricoles locaux pourrait permettre de mieux comprendre pourquoi l’agriculture ne nourrit pas son homme, ne crée pas beaucoup d'emplois, n'assure pas la sécurité alimentaire aux sénégalais. Les principales industries agroalimentaires utilisant des matières premières locales sont les suivantes : industries des matières grasses, industries laitières, industrie sucrière, petites industries céréalières, filière viande, filière riz.
I Industries des matières grasses
Les industries des matières grasses sont constituées essentiellement d'huileries : SUNEOR, NOVASEN, CAIT. Ces entreprises utilisent les graines d'arachides comme matière première pour produire de l'huile. Elles dépendent donc de la production nationale d'arachide pour faire fonctionner leurs unités industrielles de trituration. Cette dépendance aurait dû inciter ces huiliers à nouer une collaboration gagnant-gagnant avec les paysans en leur apportant un encadrement et un soutien technique au niveau de tous les maillons constituant la chaîne de production de l'arachide.
Les industries agroalimentaires fonctionnent généralement sous ce format. L’absence totale de collaboration entre les huileries et les producteurs d'arachide est une des causes de la faiblesse de la filière arachidière et des difficultés de la SUNEOR, la première huilerie du Sénégal, avec 4 usines. La privatisation de la SUNEOR a été une catastrophe pour le pays, en particulier pour les producteurs d'arachide. En se transformant en vendeur d'huile végétale importée, la SUNEOR a oublié sa mission initiale la fondant qui est de promouvoir la filière arachidière pour le développement du pays.
La SUNEOR, dès sa privation, s'est transformée en « Bana Bana ». Elle attend la récolte, achète quelques graines selon le cours mondial de l’arachide, les triture, exporte l’huile, vend aux consommateurs sénégalais de l'huile végétale importée et attend l'année suivante pour recommencer. Avec cette politique « banaanaiste », la SUNEOR n’a apporté aucun soutien aux arachiculteurs et n’a investi dans aucune de ses usines. Conséquence, la filière arachidière a reculé et les usines industrielles de trituration sont en état de dégradation très avancée. Face à cet échec de la SUNEOR, l’Etat devrait, sans délai, commanditer un audit technique des unités industrielles et du patrimoine de l’ex SONACOS et en tirer toutes les conséquences.
L’Etat du Sénégal a bien compris que l’actionnaire majoritaire de la SUNEOR était en train de TUER la filière arachidière et de déstructurer les unités industrielles de trituration. Une séparation à l'amiable ou non avec M. Jabert est une des meilleures décisions de l’Etat du Sénégal pour l’année 2015. Cette décision très opportune va permettre enfin de relancer la culture de l'arachide et de réhabiliter les usines de l’ex SONACOS, mises en mal par M. Jabert.
L’Etat est à la recherche d'un repreneur de la SUNEOR avec l'objectif clairement décliné de relancer la filière arachidière, un levier créateur d'emplois et de croissance. Le cahier de charges sur la base duquel les candidats repreneurs vont soumissionner devra éviter les erreurs grossières commises lors de la privation ratée de l’ex SONOCAS. L’Etat ne devrait pas perdre de vue que la filière arachidière est un des piliers de l’économie sénégalaise et que les unités industrielles constituent un patrimoine national à préserver. Le futur repreneur devra comprendre que la SUNEOR a entre autres missions de :
- Tirer la filière arachidière en triturant la production arachidière des paysans ;
- Assister et encadrer les arachiculteurs dans le cadre de relations de coopération dans le but de relancer la filière arachidière ;
- Réhabiliter les points de collecte de l’arachide de l’ex SONACONAS sur l’étendue du territoire ;
- Moderniser les 4 usines de trituration avec des investissements conséquents, si nécessaire avec l’aide l’Etat ;
- Vendre l'huile obtenue au Sénégal et n'exporter que l'excédent ;
- Mettre en place un cadre de concertation permanent arachiculteurs-huiliers-Etat-syndicats agricoles-instituts de recherche ;
- Reprendre la production d’aliments du bétail et du savon.
La filière arachidière est un des plus puissants leviers de développement économique et social du pays si elle est adossée à une industrie de trituration performante. Cette vision devra guider les experts qui vont travailler sur le dossier de la reprise de la SUNEOR qui devra vite changer de nom. Le nom SUNEOR est trop chargé négativement pour les acteurs de la filière arachidière.
II Industries laitières
Le Sénégal a une industrie laitière dynamique mais malheureuse qui n'utilise que de la matière première importée. La seule unité industrielle de fabrication de produits laitiers à base de lait local se trouve à Richard Toll. Il s’agit de la Laiterie du Berger créée par un jeune vétérinaire sénégalais avec l’appui de la multinationale Danone. Cette laiterie produit des laits fermentés à partir de lait local collecté sur un rayon de 50 km. La ferme Wayembam, située dans les Niayes, dans la banlieue de Dakar, utilise également du lait local pour certaines de ses fabrications. Avec un équipement adéquat, la ferme traite 6 000 litres de lait par jour, le stabilise et le distribue à travers un réseau de 300 kiosques implantés dans la région de Dakar.
A côté de ces deux unités industrielles modernes, il existe à travers le pays, des mini laiteries plus ou moins fonctionnelles, traitant globalement une quantité de lait local limitée à cause de leur faible capacité. Depuis quelques années, l’entreprise agroalimentaire KIRENE expérimente l’utilisation du lait local dans la fabrication du Grand lait Candia. C’est une belle initiative à encourager.
L’industrie laitière sénégalaise est certes dynamique mais elle n’utilise que très peu le lait local. Elle importe pour plusieurs dizaines de milliards de FCA de la poudre de lait pour la redistribuer aux consommateurs après ensachage. C’est avec la poudre importée que les laiteries reconstituent du lait liquide pour la fabrication de divers produits fermentés.
Le lait est un produit de première nécessité dont une rupture ou une hausse de prix peut entrainer des émeutes dans les agglomérations. Sans doute c’est pour cela que les importateurs ont des privilèges qui les empêchent pour la grande majorité de s’intéresser au lait local. Il est curieux et aberrant de constater que les producteurs à base de lait local paient plus de taxes que les importateurs de la poudre de lait.
Pour que l’élevage bovin contribue davantage à l’effort de développement du pays, il est temps que les industries laitières soient incitées par l’Etat à s’intéresser au lait local. A cette fin, une politique nationale d’augmentation de la production laitière pourrait être élaborée en étroite collaboration avec les industries laitières et les éleveurs. Le Sénégal, avec un tissu industriel laitier dense et dynamique, ne devrait pas continuer à importer de la poudre de lait sans une ambition à terme d’autosuffisance en ce produit essentiel. Une incitation des industriels à utiliser le lait local dans leur process entraînerait une accélération de la modernisation de l’élevage.
III La Compagnie Sucrière Sénégalaise
La Compagnie Sucrière Sénégalaise a la mission de fournir aux consommateurs sénégalais la quantité de sucre dont ils ont besoin, de façon permanente. Pour y arriver, la CSS a une usine d'extraction et de raffinage du sucre et des champs de canne dans la zone de Richard Toll. C'est un format qui, si tous les obstacles qui entravent le bon fonctionnement du dispositif sont levés, peut garantir au Sénégal une sécurité totale en fourniture de sucre en qualité et en quantité. La CSS rencontre un certain nombre difficultés qui entravent son envol même si elle arrive à couvrir 75% des besoins du pays en sucre. Ces difficultés sont entre autres :
- La fraude au niveau des frontières gambienne et mauritanienne. Ces fraudes causent un manque à gagner très important de nature à remettre en cause la viabilité de la CSS ;
- La campagne de dénigrement gratuit de la compagnie avec des motivations purement politiciennes, aux antipodes de l'intérêt du pays. Ces campagnes peuvent ternir l'image de l'entreprise et retarder les investissements et les réformes nécessaires à la modernisation de la sucrerie ;
- La campagne de charme ou d'intoxication souvent doublée de menaces envers les autorités étatiques pour obtenir la libéralisation totale de l’importation du sucre, synonyme de la disparition certaine de la CSS. Cette demande incessante de libéralisation de l'importation du sucre peut semer le doute sur les intentions des autorités étatiques et empêcher l'entreprise d'avoir une stratégie à long termes.
La CSS est un exemple qui montre les liens de dépendance qui doivent exister entre la production et l'industrie de transformation. Une production agricole sans industries de transformation a l’aval ne peut être ni durable, ni créateur d’emplois encore moins de croissance. Investir dans la production sans tissus industriel de transformation est contre-productif.
La CSS a créé beaucoup d'emplois et peut en créer encore beaucoup plus si elle est rassurée. Elle a déjà effectué des investissements stratégiques qui lui ont permis d'augmenter sa production de sucre quantitativement et qualitativement.
La pérennisation de la CSS repose sur une lutte féroce contre la fraude de sucre et un refus net clair de la part de l’Etat de toute libéralisation future de l’importation de sucre.
La CSS doit de son côté se hâter pour atteindre une production de sucre raffiné couvrant la totalité de nos besoins et améliorer la qualité de son produit. Cet objectif est un engagement de la CSS lors de sa création.
IV Petites industries céréalières
Suite à la dévaluation du Franc CFA des années 90, le pouvoir d'achat des sénégalais avait brutalement et significativement baissé. Certains consommateurs se sont alors remis à rechercher et à consommer les céréales locales. C'est dans ce contexte que des sénégalais, principalement des femmes, appuyés par l’ONG Enda, ont commencé à produire et à commercialiser les produits céréaliers classiques tels que le couscous, le arraw, le sankhal et le thiakry. Depuis cette période, les artisans céréaliers se sont installés dans tous les coins et recoins du Sénégal et écoulent leurs produits avec succès.
La fabrication de produits céréaliers manufacturés même artisanalement est la première valorisation industrielle des céréales locales au Sénégal, céréales jadis oubliés par les autorités. Les artisans céréaliers, avec peu de moyens, sont en train de faire la promotion des céréales locales. Des emplois et de la richesse sont créés avec les unités artisanales de fabrication de couscous, de sankhal, de arraw et de thiakry, démontrant ainsi que nos céréales sont aussi des cultures à la fois vivrières et de rente.
Pour tirer davantage la culture des céréales, il est souhaitable que l’Etat appuie les artisans céréaliers pour la modernisation de leurs unités de production, la formation de leurs employés et mettre à leur disposition une ligne de crédit suffisamment fournie.
L’Etat et les associations de consommateurs devraient également aider les artisans céréaliers à mieux vendre leurs produits grâce à une communication et une publicité axées sur l’impérieuse nécessité pour les sénégalais de diversifier leur alimentation. Consommer du riz tout le temps, tous les jours, à toutes les occasions, est TRES mauvais pour la santé. L’« autosuffisance en riz » pourrait être avantageusement rebaptisée « autosuffisance en céréales »
V Filière viande
1 Les abattoirs
L’essentiel de la viande consommée au Sénégal est produite localement. Les animaux abattus proviennent pour l’essentiel de l’élevage national et l’autre partie de plus importante est importée du Mali. Le Sénégal n’est plus autosuffisant en viande et c’est inquiétant dans le contexte actuel de recherche de l’autosuffisance alimentaire en ceci ou en cela.
Journellement, des milliers de bovins, ovins, caprins, porcins et autres volailles sont abattus dans des abattoirs officiels ou clandestinement pour satisfaire la demande des consommateurs en viande. Cette activité fait travailler plusieurs centaines de milliers de personnes à travers le pays, en amont et en aval de l’abattage des animaux. Une politique mieux élaborée et plus ambitieuse pour la production de viande pourrait augmenter le nombre d’emplois créée par la filière et entraîner une baisse du prix de la viande qui est actuellement anormalement trop élevé.
Les infrastructures d’abattage des animaux sont globalement non conformes. Les abattages se font dans de mauvaises conditions d’hygiène avec des infrastructures de conservation hors normes. La modernisation des abattoirs est une impérieuse nécessité dans ce contexte de l’engagement de l’Etat à garantir aux consommateurs la sécurité sanitaire des aliments.
La filière de la viande est un secteur potentiellement créateur de beaucoup d’emplois et réducteur de la pauvreté en milieu rural notamment. Sa faiblesse est le manque de traçabilité de la viande qui handicape fortement la filière. Certains restaurants VIP, les hôtels et la restauration aérienne importent leur viande à cause de la non-traçabilité de la viande sénégalaise.
La filière viande doit retenir davantage l’attention des autorités. Elle constitue un levier de développement de l’élevage, de production de richesse, d’amélioration de l’alimentation des sénégalais et créateur d’emplois divers.
L’autosuffisance en viande doit être un objectif à cours terme comme l’autosuffisance en riz ou en sucre. L’importation de bovins et d’ovins ne doit pas être considérée comme une solution définitive à notre déficit en viande.
Concernant la Tabaski, garantir aux sénégalais qu’ils auront leurs montons quelque soit leur provenance n’est pas acceptable pour un pays d’élevage comme le nôtre. L’autosuffisance en moutons à terme doit être un objectif avec une stratégie pour l’atteindre.
2 Filière avicole
Les sénégalais sont de grands consommateurs de poulets et d’œufs. Pour satisfaire cette forte demande, une filière avicole très dynamique s’est installée dans la banlieue de Dakar. Les fermes avicoles sont de tailles différentes mais se caractérisent toutes par un certain professionnalisme. L’aviculture est une activité à haut risque économique et sanitaire. Le risque économique est lié aux maladies dévastatrices que peuvent attraper les poulets mais aussi à la quantité de nourriture que nécessitent la croissance et le développement des poussins. Tout poulet perdu est un manque à gagner à déduire du bénéfice de l’exploitant. Pour minimiser le risque économique, l’exploitant doit obligatoirement faire preuve de professionnalisme.
Le risque sanitaire est lié aux maladies que peuvent attraper les travailleurs dans les poulaillers. Une bonne pratique avicole et un respect des règles élémentaires d’hygiène s’imposent aux exploitants et à leurs employés.
La filière assure l’autosuffisance en poulets et œufs aux consommateurs sénégalais depuis l’arrêt des importations de produits avicoles suite à l’épidémie de la grippe aviaire.
Le secteur a créé des milliers d’emplois directs et indirects et contribuent au développement des usines de production d’aliments du bétail.
La filière avicole mérite un soutien plus franc des autorités. Un cadre de concertation Etat-Aviculteurs-producteur d’aliments-Consommateurs permettrait de mieux identifier les forces et faiblesses de la filière pour accélérer son développement car ses potentialités sont très élevées.
Pour réduire la pauvreté en milieu rural, l’Etat devrait appuyer et encourager les paysans à s’adonner davantage à l’aviculture familiale. L’appui consisterait à concevoir un poulailler artisanal sécurisé accessible aux paysans et à les former à la prévention et aux traitements des maladies aviaires qui déciment les poulets en milieux rural. Une avicule rurale prospère permettrait de réduire la pauvreté et la mal nutrition dans le monde rural.
VI Filière riz
L’Etat du Sénégal a pris l’engagement public que notre pays sera autosuffisant en riz en 2017. Techniquement c’est possible et nous y croyons. L’augmentation de la production de riz dépend de quelques facteurs maitrisables : eau, des terres à emblaver, semences de qualités, exploitants motivés et qualifiés, encadrement des exploitants, intrants, matériel agricole. Ces facteurs étant maîtrisés pour certains et maîtrisables pour d’autres, l’autosuffisance en riz est véritablement possible en 2017.
Pour que cette autosuffisance en riz soit durable avec un produit de qualité du point de vue organoleptique, nutritionnel et sanitaire, des infrastructures à l’aval de la production sont OBLIGATOIRES.
Les infrastructures minimales pour une autosuffisance en riz sont :
1 Unités de décorticage du riz : Le nombre d’unités de décorticage du riz doit être proportionnel à la quantité de riz récoltée. Tout déficit dans ce domaine va entraîner une non qualité que va payer le consommateur, le producteur et finalement l’Etat. Le retard dans le décorticage du riz va entraîner une dégradation des graines en attente avec une forte probabilité de développement d’Aspergilus flavus et donc production d’aflatoxines, mycotoxine fortement toxique et cancérigène.
2 Infrastructures de conservation : Le riz provenant des unités de décorticage, avant livraison aux commerçants, doit être stocké dans des infrastructures respectant les normes en la matière. Parallèlement à l’augmentation de la production, il est obligatoire de mettre en place des infrastructures capables de contenir le riz en instance de livraison.
Ces infrastructures doivent permettre des conditions de températures et d’humidité requises pour une bonne conservation du riz. La non maitrise des températures et l’humidité peut entrainer une dégradation des graines de riz pouvant porter atteinte à la santé des consommateurs.
VII Conclusion
L’agriculture est un pilier essentiel et primordial pour le développement économique et social du Sénégal. Plus que tout autre secteur, elle est, directement et indirectement, créatrice d’emplois, de richesse et de croissance. Tout effort allant dans le sens du développement du secteur aura un impact réel et visible sur le niveau de développement du pays.
L’action inverse fera reculer notre pays en matière de développement économique et social.
Le développement de l’agriculture à deux dimensions : augmenter la production, créer des industries de transformation, les 2 étant interdépendantes.
Prendre en compte ces 2 dimensions du développement de l’agriculture s’est s’engager dans la voie de la réussite de la politique agricole du pays.
L’accélération de l’agriculture, c’est d’augmenter la production agricole et de disposer d’industries agroalimentaires fonctionnelles ou d’en créer.
L’Etat devrait donc avoir un regard vigilent sur les industries agroalimentaires notamment la SUNEOR, la CSS, les abattoirs, les petites industries céréalières, les industries de décorticage du riz, les industries laitières. Ces industries sont les principaux facteurs accélérateurs de l’agriculture au Sénégal.
La très dynamique filière horticole mérite le soutien de l’Etat qui pourrait se traduire par la mise en place d’unités de transformation des produits non exportés.
Pr Demba Sow
Ecole Supérieure Polytechnique de l’UCAD