« Le prix du kilogramme à l’exportation est meilleur que le prix des industriels locaux. C’est pourquoi nous préférons de loin vendre nos productions aux exportateurs qu’aux tenants des unités de transformations locales ». Ces propos sont de Gilbert Sadio, un des producteurs de la filière anacarde basé au village de Sorance, dans la commune de Bambali (département de Sédhiou). Il s’exprimait ainsi hier à l’occasion du lancement du projet d’appui à la compétitivité de l’anacarde sénégalaise (PACAS).
Pour les autorités de la chambre de commerce, d'agriculture et d’industrie, cette course effrénée vers le profit a fini de tuer l’industrie locale. Les quelques unités de transformations implantées dans les zones de productions, n’arrivent plus à trouver de la matière première. « Toutes les graines sont mobilisées pour l’exportation au détriment de l’industrie locale » a dit Moussa Souané, président de cette chambre consulaire.
Entre 2020 et 2021, révèle le coordonnateur du PACAS, le volume des exportations a été estimé à 209.970 tonnes pour une valeur financière de 125 milliards 609 millions. Une manne financière attrayante et excitante qui pousse tous les producteurs à tourner le dos aux consommateurs locaux.
L’occasion faisant le larron, les différents acteurs de la filière ont passé au peigne fin les autres contraintes majeures qui freinent le secteur. En effet, conscients que la filière anacarde est en passe de supplanter toutes les autres activités économiques en ce qu’elle occupe les 20% des ménages ruraux, chefs de service départementaux et producteurs ont égrené un chapelet de doléances allant de la production à la commercialisation.
L’accès à la terre, l’enclavement des zones de production, le déficit de formation des acteurs en techniques agricoles, le défaut de protection des plantes, les difficultés d’accès au crédit, le manque d’infrastructures de stockage, constituent, les principaux maux qui compromettent les rendements annuels dans le secteur.
Au niveau de la transformation, les industriels ont décrié la fuite de la matière première vers l’Extérieur, l’absence d’unités de transformation dans le département de Goudomp, première zone productrice d’anacardes, l’absence d’un financement conséquent pour tels investissements.
Enfin, les derniers chancres qui rongent les producteurs à l’étape de l’exportation, ce sont le manque de logistique roulante, la lenteur des rotations du bateau, les coups des frets et souvent la qualité des noix.
Selon les autorités du ministère et du PACAS, la structuration du secteur qui prend petit à petit forme, va apporter une réponse adéquate aux préoccupations des acteurs. Déjà , l’idée de faire de cette interprofessionnelle une coopérative, à quoi s’ajoutent la mise en place d’une variété performante adaptée aux conditions climatiques des zones d’exploitation et l’implication de l’Etat qui a injecté une enveloppe d’un milliard 600 millions dans le secteur, vont constituer un grand pas vers la prise en charge des préoccupations des producteurs.