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Mamadou K. Baldé, Ancien de la 3e Cie du Bataillon des Parachutistes, sur l’affaire du CEMAT Général Souleymane Kandé


Rédigé le Vendredi 7 Juin 2024 à 11:31 | Lu 214 fois | 2 commentaire(s)




Dans cette affaire, ce que je déplore, avant tout, à l’instar des affaires judiciaires récentes et autres convocations de journalistes, c’est une sortie de route du nouveau pouvoir. Car les Sénégalais, des deux bords, qui ont voté le 24 mars, si on leur avait demandé quel serait le débat national le 24 mai 2024 ; aucun Sénégalais, personne, ne vous répondrait « dossiers Ba Diakhaté, Imam C Tidiane Ndao, encore moins affaire général Souleymane Kandé Â».

En cela, nos autorités doivent se ressaisir. Nos préoccupations de citoyens sont vraiment ailleurs. Evitons la digression. Maintenant sur l’affaire, le postulat de base est faussé, on se focalise sur la personne et non sur la fonction et l’emploi. Or, c’est là où cette décision est non conforme aux règles et standards militaires. Quoique que l'aura du personnage puisse susciter l'intérêt public.

Le président de la République et chef suprême des Armées, a bien sûr le pouvoir de relever le Cemat, là n’est pas le débat (pourvu que la décision ne soit animée que de l’intérêt des armées et par conséquent, de la nation …). Cependant, le Président ne peut faire migrer un Cemat vers un emploi inférieur. Pour la compréhension du civil, vous ne pouvez pas démettre un gouverneur pour l’affecter comme sous-préfet. Dans le privé, un DAF, DRH, etc., en chef d’agence départementale. Et pour ce qui est du duo de notre Exécutif, le directeur des Domaines ou des Impôts, ne peut se retrouver chef d'un service fiscal départemental ou régional.

Des syndicalistes, de surcroît, accepteraient-ils pareil arbitraire, si ça tombait sur leur collègue ? C’est tout le quiproquo de cette décision. Dans une armée respectable, il y a des normes et des règles, entre grades, fonctions et emplois ; à défaut, vous devenez une armée tik-tok ou une milice habillée, c’est-à-dire une armée « mexicaine ».

Le Cemat, après le Cemga et son adjoint, est le numéro 3 de l’armée, verticalement ; l’IGFA et le Cempar sont à l’horizontal (à la présidence). Dans quelle armée sérieuse, exile-t-on son numéro 3 dans un obscur poste d'attaché militaire, pour y relever un ancien chef de corps ? Le général Kandé ne peut être affecté qu’à un emploi égal ou supérieur, au précédent. Ceux qui nous disent que le Président a tous les droits et pouvoirs, il n’a qu’à donc le nommer comme son chauffeur ? Ceux qui nous expliquent que l’Inde est une puissance, réclamons la réciprocité et on verra si New Delhi nous enverra son Cemat. Inde, USA, Chine, peu importe, la donne ne change pas.

La question n’est ni le rang du pays d’accueil, ni le grade de l’intéressé, c’est sa fonction ; l’emploi tenu. Et un escalier, c'est dans les deux sens, mettons-nous à nommer des chefs de corps, com-zone, sous-cem, cemat, cemair, cemarine. Dans un pays proche, frontalier, l’IGFA y est passé de chef de corps (commandant de bataillon) à Inspecteur général des forces armées, sans escale. Des colonels commandants de compagnies, lieutenant-colonel infirmier, des officiers montant la garde en planton... Ce genre d'armées existe pas loin de nous. Et en suivant toujours la logique, après le Gal Kandé Cemat, le Cemga, le Sous-Cemga et l’IGFA suivront et être nommés attachés militaires chez les trois premières puissances (USA, Russie, Chine).

Ainsi, plus de débat. Même les pays européens, vassaux-supplétifs des américains dans l’Otan, n’envoient pas, même, les adjoints de leurs Cemat, comme attachés-défense, chez leur maître à Washington.

Attaché Militaire / Attaché Défense

Et des arguments du genre, qu’un général peut être nommé attaché-militaire ; oui, dans des pays avec des armées de grandes tailles, avec des centaines voire le millier de généraux, et en tenant compte du niveau de représentation-pays, c’est souvent la règle. Vous avez un général attaché-défense (souvent général de division), avec des adjoints attachés militaires (terre-air-mer), qui sont des colonels et tantôt général de brigade. En plus d'assistants administratifs, personnel technique, un véritable staff. Ceci n’est pas encore le cas du format sénégalais. Et dans certaines de ces armées, ces attachés relèvent d'un Sous-cem, relations internationales, qui, lui, est en-deçà, en grade et emploi, du Cemat.

La Forme et l’Alternative

Dans le cadre de la rupture et du changement systémique prônés, le Sénégal pourrait décider de renverser ou de balancer sa coopération militaire. Et à ce titre, il crée une nouvelle zone (recoupant, en partie, les Brics et ce sud global, qui serait en réalité plus asiatique). Du proche et moyen-orient, en englobant la Turquie et la Russie, jusqu’en Chine, on décide de mettre sur pied une structure de coopération militaire et industrielle (nécessité de transferts de technologies). Et à sa tête, on place un officier général qui aurait quatre colonels comme adjoints (terre-air-mer-logistique et services) et le staff de soutien. Ce bureau installé (à Pékin, Ankara, ou Ryad, New Delhi…) aurait autorité sur tous les attachés militaires de sa zone.

Dans ce cas, un Cemat relevé et reçu par ses supérieurs pour lui notifier et le briefer de sa nouvelle mission, pourquoi refuserait-il ? D’autant plus, pour renforcer son niveau de représentation face à ses interlocuteurs (autorités militaires et politiques), vous le nommez général de division. Le général Amadou Kane a été relevé Cemat pour être numéro 2 de la Minusma au Mali. Le général Mamadou Gaye, Sous-Cemga à la Minusma comme adjoint, lui aussi, et à la fin, il assuma le commandement de la force après un intérim.

A son retour, ancien Sous-Cemga, il n’y a que trois fonctions où le nommer (Cemga, IGFA, Cempar), ou lui trouver une entité nouvelle, ou ad hoc, équivalente à son dernier emploi. Dans la même veine, de ceux qui soutiennent, en faux, que le général Kandé doit rejoindre l’Inde comme simple attaché-militaire. Ce poste d'attaché n'est même pas fait pour son adjoint, dans les normes. Et nous avons N autres officiers disponibles pour ce poste d’attaché.

Méconnaissance et Jalousie

Dans le débat, des officiers, à la retraite, sont intervenus dans les médias et réseaux sociaux, et certains racontent le pôle nord, avec une mesquine jalousie mal dissimulée.

Un haut Com-Gen-adjoint de la gendarmerie, ne peut tomber attaché militaire ; que l’intéressé l’ait accepté ne saurait faire jurisprudence. De même qu’un général ne peut être un aide-de-camp. Ou encore le cas du général T. Niang qu’on évoque, aucun de ces cas n’est pertinent. Le monde se construit avec ce qui est bon, mais pas avec les mauvais exemples ; les incongruités et les hérésies ne doivent nullement faire tache d’huile. Certains s'expriment dans le sens, peut-être, de plaire aux autorités ?

Et quand on court-circuite sa hiérarchie, pour saisir directement le président de la République et dénoncer son chef direct. Quand on écrit deux livres pour vilipender son corps d’appartenance, sur la place publique, on n’est pas la personne indiquée pour donner des leçons d’obéissance. Et je regrette, mais sur la question des forces spéciales, un déficit de culture militaire générale peut expliquer une ignorance du pourquoi ?

Dans le contexte militaire sénégalais actuel, le Cemat, et ancien officier commandant de ces forces spéciales, peut bien cumuler la fonction de coordination de ces dites forces avec son emploi de Cemat. Parce que, entre autres raisons, il y a une articulation entre les forces spéciales, à trois branches, qui sont le premier cercle et les forces de deuxième et de troisième cercles ; or vu leur jeunesse il y a déficit de colonels issus de leurs rangs, pouvant assumer cette mission. La matière militaire est, permettez-le-moi, une « vastitude ». Un univers dans lequel, l’armée sénégalaise n’est qu’une petite planète. Vous pouvez être officier et bien connaître les armées sénégalaises, mais cela n’est pas suffisant pour une culture militaire générale « universelle ». Valable aussi pour tout officier de tout pays.

Le général Souleymane Kandé que les civils découvrent, colonel com-zone, en Casamance, a connu célébrité et gloire, au sein de l’armée, étant jeune lieutenant parachutiste, en Guinée-Bissau, lors de l’opération Gabou. C’est son courage et ses faits d’armes, au combat, qui ont construit sa légende. Officier instructeur parachutiste, il a gravi tous les échelons jusqu’à commander le bataillon ; avec un break pour aller créer et diriger les forces spéciales. Soldat dans l’âme, c’est le premier officier général qu’on a vu faire un saut en para. C’est son mérite sur ses anciens, qui l’a fait passer général (à l’exception du colonel Cheikh Tidiane Mbodji) ? Et si les militaires élisaient, eux aussi, leur chef, le Général Kandé passerait, au premier tour, avec au moins 70% des voix.

A l’assaut

Que reproche-t-on au Général Kandé ? A-t-il voulu vendre notre matériel de guerre au parc lambaye ou vendre le camp Dial Diop à un courtier de Thiaroye ou de vouloir être maire de Ndiaganiao en 2027 ? Sinon tout ce qu’on peut lui reprocher, hypothétiquement, on peut reprocher plus à d'autres officiers. Une entrevue, au palais, ou une "accointance" avec l'ancien président ? Que dire donc des officiers de l'armée et du gouverneur militaire du palais, encore en poste, qui étaient dans la proximité du président Macky ?

Tous ces officiers qu'un avocat a, par confusion des esprits, mis, par infâmie, dans sa liste de la CPI. Or ils n'étaient qu'au service, régalien, d'un président, faisant leur travail professionnellement et ce sont des officiers aux qualités humaines reconnues. Qu’on soit mécontent du Général Kandé, qu’il s’est opposé à ses supérieurs, peu importe, le relever oui, mais le nommer attaché non et non. Le président, plus le ministre et le Cemga réunis, n’ont ni ce pouvoir, ni cette autorité, sauf à violer, sciemment, les règles. Et pour des victimes ayant subi l’injustice, encore toute fraîche, qu’ils évitent de gouverner par l’injustice et l’arbitraire.

Risques et Conséquences

Le risque que nous courons, c’est de dévaloriser notre armée. Si demain, une mission se présentait pour une force multinationale ou onusienne dans un cadre X ou Y, les pays qui postuleraient au commandement, vont présenter leurs généraux, dont la dernière fonction était chef d’état-major de … commandants opérationnels de … Le Sénégal n’aurait aucune chance de voir son attaché-militaire de général se voir confier la tête de la mission à côté d’officiers qui viennent de commandements fonctionnels ou organiques.

En 2017, pour la mission en Gambie, on avait un général libre sous la main, mais nos partenaires l’auraient peut-être refusé. Parce que si par légèreté, en violant les standards, on octroie les étoiles de général à un colonel, officier d’armes, qui n’a pas fait l’école de guerre, qui n’a même pas le DEM ; aucune armée un peu raisonnable ne met ses troupes sous le commandement opérationnel de votre général non breveté de l’EMS. Si quasi concomitamment, à une époque, trois généraux sénégalais ont dirigé trois missions de l’Onu.

Le général Babacar Gaye (Monusco-Congo), le général Abdoulaye Fall (Onuci-Côte d’Ivoire), le général Mouhamadou Kandji superviseur du retrait des troupes syriennes au Liban. Les généraux Gaye et Fall remplaçaient les généraux Mountaga Diallo et Papa K. Fall. Sur environ dix missions dans le monde, 197 pays membres, le Sénégal rafle, exceptionnellement, trois postes. C’est la qualité de la ressource humaine, la compétence et le sérieux de son armée, qui nous ont valu ça. Si on se met, pour une cuisine interne, à nous dévaloriser, par des pratiques, choix et décisions erratiques, on se tire une balle au ventre. Ceux qui croient ou espèrent humilier le Gal Kandé, si telle est la motivation de cette décision, se trompent lourdement, c’est l’armée sénégalaise qu’ils tirent dans le caniveau.

Déjà pour des raisons purement politiques, ou de proximité ou autres, avec un grand commandement taiseux, nos présidents ont pris des décisions de nominations qui relèvent de la fantaisie (avec les étoiles). La règle militaire qui dit que la fonction prime sur le grade, devient très difficilement applicable. Car depuis le président Diouf (cela s’est amplifié avec ses successeurs) nous avons eu des chefs d’états-majors d’armées, des directeurs de services rattachés à l’EMGA, voire des Sous-cem, mieux ou pire des Sous-Cemga, qui sont ou qui étaient des colonels mais qui, dans leurs rangs, ont des généraux parmi leurs subordonnés, eh oui, des généraux ; et ça continue. On ne disserte point sur la qualité ou la pertinence du choix des concernés à épingler les étoiles ; toutefois, ces nominations cavalières et éparses, nonobstant le fait de pouvoir engendrer ressentiments et frustrations, refoulés, créent des gênes et incohérences dans nos structures de commandement.

Qu'on nous explique, aussi, comment la garde et le porte-étendard du drapeau national, soient assumés par la gendarmerie (le 4 avril ou la journée des Forces armées) ? Ce drapeau national revient, légitimement, à l’armée, et au premier bataillon d’infanterie, le creuset, l’unité-mère, de nos armées, gardien de nos traditions et armoiries. Ou encore, une journée des forces armées qu’avec des écoles d’officiers ? Où est l’Ensoa et ses homologues, où est le contingent, l’armée ce sont ses trois catégories représentées.

Des dépôts de gerbes qu’avec des soldates porteuses, cela trahit le symbole. Car l’esprit et l’historique des monuments aux morts, est de rendre hommage, d’abord, aux militaires tombés sur le champ d’honneur. Combien de soldat(es) tuées au combat ? Comment pouvons-nous rendre hommage à nos morts, en l’absence même d'un frère d’armes porteur, dont certains ont assisté aux derniers soupirs de ces disparus ? Nos officiers experts des plateaux devraient s'en saisir pour nous éclairer et nous faire conformer à une certaine orthodoxie militaire.

Mamadou K. Baldé, Ancien de la 3e Cie du Bataillon des Parachutistes (Kanak) Jambar Leegui-Leegui Para 1 Jour- Para Pour Toujours (Béret Beige, Haut, dans le Ciel)


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