Après le suicide présumé survenu à Tivaouane emportant trois membres d’une famille, avec le dernier crime en date, celui commis par le colonel de la douane Mouhamad Sall sur sa fille, des faits horribles et inexplicable, un volet mystique s’est dessiné. Ce crime surprenant d’autant que ce dernier est décrit par son entourage comme quelqu’un de très équilibré. Leral s’est intéressé à ce reportage du Quotidien « L’As » où cette dernière attitude a poussé certains à évoquer une «main étrangère» avec le «Habtal».
Interrogés sur cette pratique, des guérisseurs éclairent la lanterne de nos lecteurs sur cette notion.
En droit, on dit souvent qu’il faut trois éléments pour constituer ne infraction : l’élément légal, l’élément matériel et l’élément moral. Mais au Sénégal, ne faut-il pas en rajouter l’élément ‘’mystique’’ ?
En effet, sur les mobiles des crimes qui sont perpétrés ces derniers jours, surtout celui du colonel de la Douane, les langues se délient pour parler d’une possibilité de «main étrangère».
En tout cas, les propos que ce haut cadre de l’administration sénégalaise aurait tenus après son forfait sont démentiels : «Même si je vous explique mon acte, vous n’allez pas comprendre».
A la lumière de cet acte de barbarie commis par cet officier de la Douane décrit par son entourage comme quelqu’un de pieux et de très lucide, certains pensent aux pratiques mystiques.
«Est-ce que Habtalouniouko, poste bi mou nek port dafa stratégique dé (Ndlr : ne serait-ce pas le fait d’une tierce personne ? car il occupe un poste très convoité au port)», se demandent certains Sénégalais depuis que l’affaire a éclaté.
En fait, c’est quoi le «Habtal» ? «C’est un terme qui signifie pousser quelqu’un par des pratiques occultes et mystiques à faire quelque chose de blâmable», explique Cheikh Ibrahima Sow, maître coranique et guide religieux basé à Keur Massar. Et notre interlocuteur d’ajouter : «Sous l’emprise de cette pratique, l’individu ne sera conscient de son acte qu’après l’avoir commis.»
Reconnaissant l’existence du «Habtal», il estime qu’au Sénégal, de nombreuses personnes sont très expertes dans ce domaine.
A l’image de quelqu’un qui a bu beaucoup de l’alcool ou fumé du chanvre indien, explique le sieur Sow, la personne victime de «Habtal» ne fait jamais le mal consciemment.
Abondant dans le même sens, Serigne Makhtar, guérisseur basé à Dakar, va plus loin dans ses propos.
De son avis, l’hypothèse d’une «main étrangère» dans le meurtre commis par le Douanier n’est pas à écarter. «Le Port de Dakar est la vache laitière du pays et c’est un secteur stratégique. Et parmi les gens qui y travaillent, il y en a qui sont prêts à tout pour ne pas quitter ce juteux secteur», révèle- t-il.
Dévoilant certaines pratiques mystiques qui font légion dans le pays, il ajoute : «Parfois on peut ne pas être le destinataire du «Habtal» et en être malencontreusement victime, parce qu’on n’est pas blindé mystiquement». Pour le marabout, une personne aussi influente qu’un colonel des Douanes suscite de la jalousie.
«Et qu’il soit atteint mystiquement est une probabilité à ne pas exclure parce que cela existe», affirme-t-il. Par ailleurs, il précise que contrairement à certains marabouts d’aujourd’hui qui, moyennant de l’argent, utilisent cette pratique pour détruire une personne, le «habtal» était autrefois une arme pour se venger.
«Dans les villages, les anciens n’utilisaient cette pratique que quand on leur faisait du tort et qu’ils n’avaient pas la possibilité de riposter. Ils faisaient recours au «Habtal» qui peut pousser la personne à tomber dans un puits par exemple ou à commettre un forfait qui va le faire partir de la localité», renseigne le guérisseur.
Toutefois, il demande de ne pas subordonner le «habtal» à tous les crimes perpétrés. «Même si c’est une pratique qui existe, il ne faut pas la confondre avec les infractions commises souvent par les jeunes à cause de la drogue. Il ne faut pas généraliser le ‘’habtal‘’ à tous les crimes, parce que la drogue et l’alcool peuvent pousser l’individu à commettre des actes incompréhensibles et répréhensibles», précise Serigne Makhtar.