À cet égard, ne nous laissons pas divertir par le débat sur le 3e mandat, la 3e candidature ou le second mandat de 5 ans, qui semble être une grande diversion organisée à dessein, dans un amalgame hétéroclite surfant sur l’actualité de la sous-région, l’anti-CFA, la Françafrique, morte de sa belle mort depuis et une nouvelle souveraineté bâtie sur les épaules de Wagner.
Face à l’agenda caché religieux, celui de l’extrémisme, de l’intolérance et du radicalisme de triste réputation dans les camps de jihadiste et les pépinières de moudjahid (soldats du Califat), le 3e mandat reste toujours une ligne de fracture, mais une peccadille au regard d’un pire danger. Avec du réalisme (realpolitik), du dialogue (hiwar) politique et de la sagesse (ikhma), il est possible de venir à bout de cette question.
Cette peste islamiste menace davantage la stabilité de la République, la cohésion sociale de la Nation et la Démocratie, que ne peut le faire le débat politique sur le mandat. Dans tous les pays où elle a sévi et continue de sévir, le chaos qu’elle a créé dans l’Etat et la Société, a fait s’effondrer les structures organisées (Syrie, Irak, Afghanistan...) ou menace de le faire (Sahel).
Le vrai débat, c’est la question de la tentation salafiste, de la terreur, de l’insurrection dans une démocratie, de la prise en otage de la liberté des citoyens et des commerçants, à laquelle la société n’est pas prête à consentir. Car c’est méconnaître notre africanité que de jouer avec ces allumettes, qui ont fini de faire long feu en Algérie, au Maroc, en Mauritanie, en Égypte (assassinat du Président Sadate par les salafistes) et en Tunisie, pour s’en arrêter à notre continent.
Les vrais enjeux sont environnementaux, sont liés à l’équité sociale et territoriale, à l’égalité des citoyens, entre autres. Le vrai débat qui nous interpelle face à cette forme d’opposition, dont le visage est sombre, radical et subversif et qui avance encagoulée, c’est son projet de société. Ce qui interroge, c’est le projet de société porté par l’agenda religieux de ces nouvelles forces qui ont fait irruption dans le paysage politique sénégalais. Un agenda en contradiction avec les valeurs sociales, religieuses, sociétales et sociologiques sénégalaises.
Que signifient pour nous autres Sénégalais, croyants ou pas, musulmans, chrétiens, juifs, animistes, ou sans obédience religieuse, les termes da’wa (prosélytisme et activité de propagande basée sur la séduction et la démagogie), émir (celui qui donne les ordres), ansar (chevalier), califat (État soumis à la charia), revenir à la religion pure des anciens (salafisme), faire de l’Islam une idéologie politique figée dans la Charia (islamisme), opérer une rupture complète et intransigeante avec le passé institutionnel et politique (radicalisme), revenir aveuglément au texte originel pur (fondamentalisme), y compris quand cela va à l’encontre des lois et de la laïcité, déclarée comme le plus grand péché (shirk), celui d’idolâtrie et de polythéisme (mushrikin). Cela ne signifie pas grand chose ou alors, rien de rassurant.
Dans le discours actuel que l’on peut voir sur les réseaux sociaux, le projet porté par des apprentis sorciers, qu’on croirait venus du Moyen-Âge, veut faire croire que les Sénégalais seraient des mécréants (kouffar), c’est à dire des gens qui croient mal ou qui ne croient pas à l’Islam, parce que nous pratiquons l’islam sunnite de rite malékite, parce que nous adhérons librement à nos confréries, parce que nous aimons et respectons nos guides religieux.
Alors que ces terroristes religieux, eux, n’aimeraient qu’Allah (SWT) et pourfendraient les vices, débauches et turpitudes de leurs concitoyens malgré eux. Ils ne sont pas à une contradiction près, car ils adoreraient aussi ces créatures maléfiques créchant dans des lupanar où l’on masse, tout ce qui est en dehors de Dieu (taghout). Ils respecteraient la femme licite (alzawaj) mais à l’occasion, ils ne cracheraient pas sur un butin de guerre (gnanimah) en chair et en rondeurs. En quelque sorte, ils seraient les farouches gardiens de nos mœurs, us et coutumes. Une rhétorique propagandiste que ledit apprenti-sorcier lui-même, a tenté d’atténuer à une autre occasion. Mais le mal est rendu, ce qui est dit est dit, et n’est pas tombé dans l’oreille de sourds.
Cet argumentaire spécieux basé sur le mythe fondateur de la libération du monde arabo-musulman, est, du reste, accrédité par d’autres faits et actes, qui laissent conclure au lien entre Pastef et le jihadisme radical islamiste.
Primo. Me Ngagne Demba Touré, greffier au Tribunal de Dakar, Secrétaire général de Pastef Grand-Yoff et Imam a dévoilé le projet de Pastef, le 12 février 2023: « Elire Ousmane Sonko à la magistrature suprême n’est qu’une étape du projet de Pastef, le but ultime consiste à changer radicalement le visage du Sénégal. Pour savoir les tenants et les aboutissants du projet, référez-vous aux statuts du parti dans son article 5 ou son préambule. Je l’avais dit à Pikine et je le répète, vous allez voir que la conduite de Pastef a pour finalité, d’éveiller les êtres humains pour qu’ils cessent de vénérer les humains comme eux au profit exclusif du Créateur (Dieu). Autrement dit, faire de telle sorte que le pays soit souverain sur le plan politique, économique et militaire. En réalité, notre projet, c’est de mettre fin à la vénération de l’homme, pour la vénération exclusive de Dieu et point final. »
Dans cette harangue, le mot arabe « Da’wa » de Pastef pose problème, car il est, ici, manifestement dirigé, contre les foyers religieux de notre pays, les talibés et leurs vénérés guides religieux et la communauté chrétienne. Voici ce qu’on peut lire dans l’Article 5 des statuts du Pastef intitulé Doctrine politique: « PASTEF/-LES PATRIOTES s’attache à promouvoir, en puisant dans les valeurs africaines positives, une doctrine politique centrée sur la défense constante et prioritaire des peuples, dans le respect des orientations et exigences suivantes: la garantie de la cohésion sociale et de l’épanouissement de tous; la souveraineté, le panafricanisme, la solidarité internationale contre l’impérialisme ».
Secundo. Le théologien suisse adepte d’un islam rigoriste, Tarik Ramadan, petit-fils du fondateur des Frères musulmans, Hassan el-Banna, soutient le Président de Pastef englué dans des affaires de justice, dans un post Facebook daté du 8 mars 2021: « La France est historiquement une habituée de l’élimination juridique, médiatique et même parfois physique, des personnalités politiques qui la gênent. On sait ce qu’il est advenu de certains leaders, de Lumumba à Ben Barka, ou à Sankara…Voilà que le Sénégal, bon élève et aux ordres, suit les traces de son ancien et continuel colonisateur. Ce n’est pas le calme au Sénégal qui est en jeu, c’est surtout les intérêts de l’État français ou de PDG de multinationales, comme Bolloré, qui sont à risques. Le reste, c’est de la mise en scène pour l’écarter… ou peut-être pire, même s’il continue de clamer tout haut son innocence ».
Il sera jugé ce premier semestre 2023, pour viol par la justice genevoise, et est également accusé de violences sexuelles par plusieurs femmes, faits pour lesquels il est actuellement mis en examen et menacé d’un procès aux assises en France. À Dakar, ses conférences faisaient salle comble autrefois.
Tertio. L’absence du Maire à la commémoration des 20 ans du naufrage du Joola, la première sous son magistère débuté en janvier 2022. Le 26 septembre de la même année, marquant la commémoration de cette tragédie maritime qui a anéanti ses administrés, le premier magistrat de Ziguinchor, ville dont sont originaires l’essentiel des 1 863 victimes officielles, est aux abonnés absents. Il a plutôt pris part à la Conférence de presse des leaders de Yewwi à Dakar et se fait représenter par son adjoint. La philosophie qui sous-tend cette absence, est la même que celle qui a conduit à la destruction des mausolées de Tombouctou…Vénérer ou même visiter des tombeaux serait Haram comme l’est la lecture de livres (Book) occidentaux, selon Boko Haram (Book are Haram).
Quarto. Ibrahima Louis Mango, professeur de Lettres modernes et père du plus jeune bachelier (14 ans) du Sénégal, issu de la génération de Ousmane Sonko, Yérim Seck, Mounirou Sy et Abdourahmane Diouf à l’UGB (première promotion dite Sanar 1) et actuellement membre du MPCL/Luy Jot Jotna, témoigne, sur la plateforme Facebook-Youtube de "En direct de Pikine", de la réalité politique des leaders du futur Pastef germée à ses débuts dans le terreau de la violence, l'intolérance et le sectarisme.
La violence de ces talibans (étudiants), actuels noyaux durs du Pastef, s'exercera selon le témoin Mango, contre le dahira Tidiane des étudiants de l'université, véritables bêtes noires de leur islamisme radical. « Sonko et compagnie ont violemment empêché leurs camarades Tidianes, d’effectuer leur wazifa, considérant que c’était du « bida ». Sonko et compagnie n’étaient ni Mourides ni Tidianes, ils leur étaient opposés et pratiquaient déjà du radicalisme islamiste. Les étudiants Mourides sont alors venus au secours de leurs frères Tidianes dès le lendemain, armés de leur « kourou Baye Fall » (gourdins de Baye Fall) et les ont invités à faire leur wazifa sur leur lieu de prière situé sur le terrain de basket. Face à la détermination des étudiants Mourides à protéger leurs camarades Tidianes, le groupe religieux de Sonko avait reculé, mais le mal était déjà fait et l’affaire avait fait grand bruit à l’époque.»
Parmi les actes, des déclarations publiques de testament (wasiyah) de martyrs (chahid), prêtant allégeance non pas au Prophète Muhammad (PSL) mais à leur émir du moment, qui s’apprêtent à livrer combat (quital) et à mourir en son nom, contre les fausses religions de la démocratie et la laïcité, à l’encontre de notre libre arbitre. Une véritable secte d’adeptes du schisme politico-religieux, de la guerre civile, de la division des musulmans (fitna). Les fondamentalistes wahabites et salafistes considèrent comme hérésie, la vénération des « saints », des mausolées, des mosquées et des manuscrits anciens. Selon leur définition, il ne peut y avoir de vénération que d’Allah (SWT) et il n’y a pas d’élus de Dieu ni d’intermédiaire entre le croyant et le Tout-Puissant. Ainsi, ils considèrent le fait de commémorer l’anniversaire du Prophète Muhammad (PSL) comme une hérésie. Alors, si on ne célèbre pas le Meilleur des hommes, comme nous le croyons ici au Sénégal, il n’y aurait aucune raison de commémorer de « simples » naufragés.
Bien au contraire, il y a bien des élus de Dieu et des intermédiaires pour la guidance intérieure des âmes sur ordre divin, si l’on en croit ces sourates et versets du Coran: Sourate Les Femmes (An-Nisâ), verset 59 « Ô vous les croyants, obéissez à Dieu et obéissez à Son Prophète et à ceux d’entre vous qui détiennent le pouvoir »; Sourate Le Butin (Al-Anfâl), verset 33 « Dieu ne va pas les châtier, alors que tu es parmi eux », le pronom tu désignant un prophète ou un imam. « Car Dieu retient Son châtiment contre les gens de la terre, quand il y a en elle un prophète et un iman ». Le Coran dit aussi dans la Sourate Les Prophètes (Al-Anbiyâ), verset 73 « Nous les fîmes des imams qui guident par Notre Commandement ». Plusieurs traditions ont été rapportées, qui insistent sur la nécessité d’un imam pour diriger les hommes et la création. « Tant que des hommes vivront sur la terre, il est indispensable qu’il y ait une preuve de Dieu, c’est-à-dire un représentant de Dieu pour eux, afin qu’il leur enseigne les règles de la foi, de la pensée et de la société. »
À Tombouctou, en 2012, les jihadiste ont détruit la cité des 333 saints, consacrés par les populations comme « élus de Dieu et dépositaires de sa miséricorde et de sa bienfaisance », réduisant en poussière 24 mausolées datant du XIV ème siècle pour les plus anciens, et dont 16 sont classés au patrimoine mondial de l’UNESCO. Ces mausolées qui témoignent du passé prestigieux de Tombouctou, jouent par ailleurs un grand rôle social car ils constituent un rempart psychologique pour les Tombouctiens.
Nous, au Sénégal, notre projet est le suivant: partager un commun vouloir de vie commune, choisir la paix, le pacifisme, la tolérance, la concorde religieuse, le respect de la différence et de la dignité d’autrui, la communion, l’hospitalité, l’ouverture dans l’enracinement, le culte de la mère et, à travers elle, celui de toutes les femmes, le droit au pardon, à l’erreur, au repentir sincère, la main tendue, la liberté de presse et d’expression…..Au-delà de sa différence, l’autre est un autre soi-même.
Nous faisons nôtres les valeurs de l’Islam, religion majoritaire au Sénégal, nôtres aussi les valeurs de la Chrétienté, religion minoritaire mais ô combien utile et nécessaire à l’expression complète de notre projet de société. Quelles que soient nos différences, nous nous entendons, une obligation de par notre Constitution par ailleurs, sur le fait de ne pas établir de discrimination entre nous, Sénégalais et hôtes étrangers qui vivent parmi nous. Avant l’irruption de cette tentative d’apostasie politico-religieuse, notre entente sociale, ethnique, religieuse, politique a toujours reposé sur toutes ces valeurs communes, socle de notre projet humain de base. Un peuple, un but, une foi: le Sénégal fonctionne comme une seule tête, on ne peut la couper ni la diviser, alors dans la pirogue Sunugal, mieux vaut ramer dans la même direction.
Vouloir s’attaquer à ce fondement philosophique et à ces fondations religieuses, relève d’une vaste blague de potaches islamistes. Chaque génération de post-adolescents a bien droit à son frisson insurrectionnel du rite initiatique traditionnel. Après, il faudrait grandir en sagesse et revenir sur terre. Patience et persévérance font le lit des endurants. Le courant des Frères musulmans ne peut pas s’implanter au Sénégal comme il a pu le faire en Égypte dans les années 20. Nos réalités nationales et intrinsèques jurent d’avec les aspects de la pensée salafiste arabe.
Ce que les Anciens ont créé sur la terre sénégalaise, pendant des siècles et des siècles de syncrétisme religieux et de brassage-absorption-fusion de populations, de cultures et de cultes, personne ne peut le déraciner, pas même des apprentis salafistes encagoulés (tiens, tiens….).
Cette longue et patiente formation de strates démographiques, culturelles, sociales et religieuses, nous vaut aujourd’hui de nous distinguer, en Afrique et ailleurs, comme le pays de la Teranga où tous veulent investir et tenir leurs activités de réflexion (séminaires et ateliers) ou sportives et culturelles, au grand bonheur des réceptifs hôteliers, des sociétés de services, des restaurants, des lieux de loisirs, bref du tourisme et de l’économie en général.
Heureusement pour son propre intérêt, le Sénégal ne vend pas de la violence physique et verbale, des émeutes, des manifestations violentes, des fake news, des comportements antirépublicains, de la terreur, du racisme, du sectarisme, de l’antiféminisme, de la misogynie, de l’enfermement et autres bâches idéologiques. Le Sénégal défend plutôt le respect de la différence dans tous les domaines, du sutura, du jom, du fiit, des valeurs de la philosophie de notre ancêtre Kocc Barma, du pacte ceddo, des recommandations des Livres (Coran, Bible, Torah, Bouddhisme) et de Dieu, dans le respect, encore une fois, des différences.
Le Sénégal protège aussi la tolérance sexuelle dans le respect de la dignité et des valeurs communes: carnet de santé pour les travailleurs du sexe, place de pionnier dans la lutte contre le sida et la recherche sur le premier vaccin mondial, salons de « massage » et tutti quanti. Le Sénégal préserve l’accès libre et responsable aux breuvages non-sucrés: la plus grande brasserie de boissons non-halal est implantée à Dakar, dans un pays peuplé à de 95% de musulmans. Le Sénégal garantit la liberté d’expression, de culte et les libertés collectives dans le respect de la loi et de la responsabilité. C’est pourquoi des offres alternatives dans tous domaines y coexistent pacifiquement. Nous fêtons ensemble Tabaski, Korité, Noël, Pâques, Ascension, le Grand Bal de Youssou Ndour, notre ministre du Bonheur...
Les Sénégalais respectent et vénèrent leurs figures tutélaires et emblématiques de l’Islam noir, et notre archevêque, comme des pères et des grands-pères. Nous honorons Marie, Mame Diarra Bousso et Zeyda Mariama Niasse, entre autres, comme des mères et des grands-mères. Nous élevons Dethiefu Ndiogu et Diery Dior Ndella au Panthéon. Nous aimons et chérissons nos anciens Présidents de la République, qui ne commandent plus que la télécommande de la télé que leurs petits-enfants leur disputent. Libre à chacun de choisir son Khalife général, sa confrérie, son Gamou, son Magal, son Pèlerinage marial, son 15 août, son Église ou son Damel. Face à la croissance exponentielle de notre capitale et dans notre marche vers la modernité et l’émergence, ils nous sont, nos confréries (Layennes, Mouridiya, Tidjaniya et Qadriya), nos Khalifes généraux, notre Grand Serigne de Dakar et tous nos érudits, des acteurs essentiels de notre « dunya » et de notre « al alakhira ». Notre rapport au legs de nos grands érudits est émotif, oui. L’administration sénégalaise, intelligente et faisant preuve de résilience, en prend acte et délivre à qui la demande, une autorisation de s’absenter pour aller honorer sa confrérie ou son église. C’est un héritage dont tout Sénégalais est fier. Ceux qui ont un autre héritage, qu’ils le fructifient en respectant celui des autres.
Le rappel est utile au musulman. Il s’avère nécessaire de rappeler les fondamentaux lorsqu’il advient que des personnes deviennent amnésiques ou aveuglées par leur desiderata. Au Sénégal, le sauveur attendu de tous les musulmans et guidé par Dieu (El Mahdi), a déjà montré le chemin à la fin du XIXe siècle, à Yoff, en face de la mer. Il est célébré tous les ans par des milliers d’adeptes enthousiastes et sincères: les Layennes sont réputés « opposés au système des castes, connus pour leur souci de la propreté, aussi bien physique que morale, prônant un Islam propre et sincère ». Nous n’avons donc pas besoin d’être « sauvés » par des politiciens en perte de repère et avides de pouvoir et de femmes. Le Sénégal est un pays ouvert et c’est notre liberté d’avoir un islam noir, dans la pure tradition négro-africaine. Personne n’a le monopole de la vérité. Chacun pour soi dans l’islam confrérique ou l’islam réformiste et Dieu (SWT) pour tous. Dieu, et les FDS, sauvent le Sénégal !
DMF
Face à l’agenda caché religieux, celui de l’extrémisme, de l’intolérance et du radicalisme de triste réputation dans les camps de jihadiste et les pépinières de moudjahid (soldats du Califat), le 3e mandat reste toujours une ligne de fracture, mais une peccadille au regard d’un pire danger. Avec du réalisme (realpolitik), du dialogue (hiwar) politique et de la sagesse (ikhma), il est possible de venir à bout de cette question.
Cette peste islamiste menace davantage la stabilité de la République, la cohésion sociale de la Nation et la Démocratie, que ne peut le faire le débat politique sur le mandat. Dans tous les pays où elle a sévi et continue de sévir, le chaos qu’elle a créé dans l’Etat et la Société, a fait s’effondrer les structures organisées (Syrie, Irak, Afghanistan...) ou menace de le faire (Sahel).
Le vrai débat, c’est la question de la tentation salafiste, de la terreur, de l’insurrection dans une démocratie, de la prise en otage de la liberté des citoyens et des commerçants, à laquelle la société n’est pas prête à consentir. Car c’est méconnaître notre africanité que de jouer avec ces allumettes, qui ont fini de faire long feu en Algérie, au Maroc, en Mauritanie, en Égypte (assassinat du Président Sadate par les salafistes) et en Tunisie, pour s’en arrêter à notre continent.
Les vrais enjeux sont environnementaux, sont liés à l’équité sociale et territoriale, à l’égalité des citoyens, entre autres. Le vrai débat qui nous interpelle face à cette forme d’opposition, dont le visage est sombre, radical et subversif et qui avance encagoulée, c’est son projet de société. Ce qui interroge, c’est le projet de société porté par l’agenda religieux de ces nouvelles forces qui ont fait irruption dans le paysage politique sénégalais. Un agenda en contradiction avec les valeurs sociales, religieuses, sociétales et sociologiques sénégalaises.
Que signifient pour nous autres Sénégalais, croyants ou pas, musulmans, chrétiens, juifs, animistes, ou sans obédience religieuse, les termes da’wa (prosélytisme et activité de propagande basée sur la séduction et la démagogie), émir (celui qui donne les ordres), ansar (chevalier), califat (État soumis à la charia), revenir à la religion pure des anciens (salafisme), faire de l’Islam une idéologie politique figée dans la Charia (islamisme), opérer une rupture complète et intransigeante avec le passé institutionnel et politique (radicalisme), revenir aveuglément au texte originel pur (fondamentalisme), y compris quand cela va à l’encontre des lois et de la laïcité, déclarée comme le plus grand péché (shirk), celui d’idolâtrie et de polythéisme (mushrikin). Cela ne signifie pas grand chose ou alors, rien de rassurant.
Dans le discours actuel que l’on peut voir sur les réseaux sociaux, le projet porté par des apprentis sorciers, qu’on croirait venus du Moyen-Âge, veut faire croire que les Sénégalais seraient des mécréants (kouffar), c’est à dire des gens qui croient mal ou qui ne croient pas à l’Islam, parce que nous pratiquons l’islam sunnite de rite malékite, parce que nous adhérons librement à nos confréries, parce que nous aimons et respectons nos guides religieux.
Alors que ces terroristes religieux, eux, n’aimeraient qu’Allah (SWT) et pourfendraient les vices, débauches et turpitudes de leurs concitoyens malgré eux. Ils ne sont pas à une contradiction près, car ils adoreraient aussi ces créatures maléfiques créchant dans des lupanar où l’on masse, tout ce qui est en dehors de Dieu (taghout). Ils respecteraient la femme licite (alzawaj) mais à l’occasion, ils ne cracheraient pas sur un butin de guerre (gnanimah) en chair et en rondeurs. En quelque sorte, ils seraient les farouches gardiens de nos mœurs, us et coutumes. Une rhétorique propagandiste que ledit apprenti-sorcier lui-même, a tenté d’atténuer à une autre occasion. Mais le mal est rendu, ce qui est dit est dit, et n’est pas tombé dans l’oreille de sourds.
Cet argumentaire spécieux basé sur le mythe fondateur de la libération du monde arabo-musulman, est, du reste, accrédité par d’autres faits et actes, qui laissent conclure au lien entre Pastef et le jihadisme radical islamiste.
Primo. Me Ngagne Demba Touré, greffier au Tribunal de Dakar, Secrétaire général de Pastef Grand-Yoff et Imam a dévoilé le projet de Pastef, le 12 février 2023: « Elire Ousmane Sonko à la magistrature suprême n’est qu’une étape du projet de Pastef, le but ultime consiste à changer radicalement le visage du Sénégal. Pour savoir les tenants et les aboutissants du projet, référez-vous aux statuts du parti dans son article 5 ou son préambule. Je l’avais dit à Pikine et je le répète, vous allez voir que la conduite de Pastef a pour finalité, d’éveiller les êtres humains pour qu’ils cessent de vénérer les humains comme eux au profit exclusif du Créateur (Dieu). Autrement dit, faire de telle sorte que le pays soit souverain sur le plan politique, économique et militaire. En réalité, notre projet, c’est de mettre fin à la vénération de l’homme, pour la vénération exclusive de Dieu et point final. »
Dans cette harangue, le mot arabe « Da’wa » de Pastef pose problème, car il est, ici, manifestement dirigé, contre les foyers religieux de notre pays, les talibés et leurs vénérés guides religieux et la communauté chrétienne. Voici ce qu’on peut lire dans l’Article 5 des statuts du Pastef intitulé Doctrine politique: « PASTEF/-LES PATRIOTES s’attache à promouvoir, en puisant dans les valeurs africaines positives, une doctrine politique centrée sur la défense constante et prioritaire des peuples, dans le respect des orientations et exigences suivantes: la garantie de la cohésion sociale et de l’épanouissement de tous; la souveraineté, le panafricanisme, la solidarité internationale contre l’impérialisme ».
Secundo. Le théologien suisse adepte d’un islam rigoriste, Tarik Ramadan, petit-fils du fondateur des Frères musulmans, Hassan el-Banna, soutient le Président de Pastef englué dans des affaires de justice, dans un post Facebook daté du 8 mars 2021: « La France est historiquement une habituée de l’élimination juridique, médiatique et même parfois physique, des personnalités politiques qui la gênent. On sait ce qu’il est advenu de certains leaders, de Lumumba à Ben Barka, ou à Sankara…Voilà que le Sénégal, bon élève et aux ordres, suit les traces de son ancien et continuel colonisateur. Ce n’est pas le calme au Sénégal qui est en jeu, c’est surtout les intérêts de l’État français ou de PDG de multinationales, comme Bolloré, qui sont à risques. Le reste, c’est de la mise en scène pour l’écarter… ou peut-être pire, même s’il continue de clamer tout haut son innocence ».
Il sera jugé ce premier semestre 2023, pour viol par la justice genevoise, et est également accusé de violences sexuelles par plusieurs femmes, faits pour lesquels il est actuellement mis en examen et menacé d’un procès aux assises en France. À Dakar, ses conférences faisaient salle comble autrefois.
Tertio. L’absence du Maire à la commémoration des 20 ans du naufrage du Joola, la première sous son magistère débuté en janvier 2022. Le 26 septembre de la même année, marquant la commémoration de cette tragédie maritime qui a anéanti ses administrés, le premier magistrat de Ziguinchor, ville dont sont originaires l’essentiel des 1 863 victimes officielles, est aux abonnés absents. Il a plutôt pris part à la Conférence de presse des leaders de Yewwi à Dakar et se fait représenter par son adjoint. La philosophie qui sous-tend cette absence, est la même que celle qui a conduit à la destruction des mausolées de Tombouctou…Vénérer ou même visiter des tombeaux serait Haram comme l’est la lecture de livres (Book) occidentaux, selon Boko Haram (Book are Haram).
Quarto. Ibrahima Louis Mango, professeur de Lettres modernes et père du plus jeune bachelier (14 ans) du Sénégal, issu de la génération de Ousmane Sonko, Yérim Seck, Mounirou Sy et Abdourahmane Diouf à l’UGB (première promotion dite Sanar 1) et actuellement membre du MPCL/Luy Jot Jotna, témoigne, sur la plateforme Facebook-Youtube de "En direct de Pikine", de la réalité politique des leaders du futur Pastef germée à ses débuts dans le terreau de la violence, l'intolérance et le sectarisme.
La violence de ces talibans (étudiants), actuels noyaux durs du Pastef, s'exercera selon le témoin Mango, contre le dahira Tidiane des étudiants de l'université, véritables bêtes noires de leur islamisme radical. « Sonko et compagnie ont violemment empêché leurs camarades Tidianes, d’effectuer leur wazifa, considérant que c’était du « bida ». Sonko et compagnie n’étaient ni Mourides ni Tidianes, ils leur étaient opposés et pratiquaient déjà du radicalisme islamiste. Les étudiants Mourides sont alors venus au secours de leurs frères Tidianes dès le lendemain, armés de leur « kourou Baye Fall » (gourdins de Baye Fall) et les ont invités à faire leur wazifa sur leur lieu de prière situé sur le terrain de basket. Face à la détermination des étudiants Mourides à protéger leurs camarades Tidianes, le groupe religieux de Sonko avait reculé, mais le mal était déjà fait et l’affaire avait fait grand bruit à l’époque.»
Parmi les actes, des déclarations publiques de testament (wasiyah) de martyrs (chahid), prêtant allégeance non pas au Prophète Muhammad (PSL) mais à leur émir du moment, qui s’apprêtent à livrer combat (quital) et à mourir en son nom, contre les fausses religions de la démocratie et la laïcité, à l’encontre de notre libre arbitre. Une véritable secte d’adeptes du schisme politico-religieux, de la guerre civile, de la division des musulmans (fitna). Les fondamentalistes wahabites et salafistes considèrent comme hérésie, la vénération des « saints », des mausolées, des mosquées et des manuscrits anciens. Selon leur définition, il ne peut y avoir de vénération que d’Allah (SWT) et il n’y a pas d’élus de Dieu ni d’intermédiaire entre le croyant et le Tout-Puissant. Ainsi, ils considèrent le fait de commémorer l’anniversaire du Prophète Muhammad (PSL) comme une hérésie. Alors, si on ne célèbre pas le Meilleur des hommes, comme nous le croyons ici au Sénégal, il n’y aurait aucune raison de commémorer de « simples » naufragés.
Bien au contraire, il y a bien des élus de Dieu et des intermédiaires pour la guidance intérieure des âmes sur ordre divin, si l’on en croit ces sourates et versets du Coran: Sourate Les Femmes (An-Nisâ), verset 59 « Ô vous les croyants, obéissez à Dieu et obéissez à Son Prophète et à ceux d’entre vous qui détiennent le pouvoir »; Sourate Le Butin (Al-Anfâl), verset 33 « Dieu ne va pas les châtier, alors que tu es parmi eux », le pronom tu désignant un prophète ou un imam. « Car Dieu retient Son châtiment contre les gens de la terre, quand il y a en elle un prophète et un iman ». Le Coran dit aussi dans la Sourate Les Prophètes (Al-Anbiyâ), verset 73 « Nous les fîmes des imams qui guident par Notre Commandement ». Plusieurs traditions ont été rapportées, qui insistent sur la nécessité d’un imam pour diriger les hommes et la création. « Tant que des hommes vivront sur la terre, il est indispensable qu’il y ait une preuve de Dieu, c’est-à-dire un représentant de Dieu pour eux, afin qu’il leur enseigne les règles de la foi, de la pensée et de la société. »
À Tombouctou, en 2012, les jihadiste ont détruit la cité des 333 saints, consacrés par les populations comme « élus de Dieu et dépositaires de sa miséricorde et de sa bienfaisance », réduisant en poussière 24 mausolées datant du XIV ème siècle pour les plus anciens, et dont 16 sont classés au patrimoine mondial de l’UNESCO. Ces mausolées qui témoignent du passé prestigieux de Tombouctou, jouent par ailleurs un grand rôle social car ils constituent un rempart psychologique pour les Tombouctiens.
Nous, au Sénégal, notre projet est le suivant: partager un commun vouloir de vie commune, choisir la paix, le pacifisme, la tolérance, la concorde religieuse, le respect de la différence et de la dignité d’autrui, la communion, l’hospitalité, l’ouverture dans l’enracinement, le culte de la mère et, à travers elle, celui de toutes les femmes, le droit au pardon, à l’erreur, au repentir sincère, la main tendue, la liberté de presse et d’expression…..Au-delà de sa différence, l’autre est un autre soi-même.
Nous faisons nôtres les valeurs de l’Islam, religion majoritaire au Sénégal, nôtres aussi les valeurs de la Chrétienté, religion minoritaire mais ô combien utile et nécessaire à l’expression complète de notre projet de société. Quelles que soient nos différences, nous nous entendons, une obligation de par notre Constitution par ailleurs, sur le fait de ne pas établir de discrimination entre nous, Sénégalais et hôtes étrangers qui vivent parmi nous. Avant l’irruption de cette tentative d’apostasie politico-religieuse, notre entente sociale, ethnique, religieuse, politique a toujours reposé sur toutes ces valeurs communes, socle de notre projet humain de base. Un peuple, un but, une foi: le Sénégal fonctionne comme une seule tête, on ne peut la couper ni la diviser, alors dans la pirogue Sunugal, mieux vaut ramer dans la même direction.
Vouloir s’attaquer à ce fondement philosophique et à ces fondations religieuses, relève d’une vaste blague de potaches islamistes. Chaque génération de post-adolescents a bien droit à son frisson insurrectionnel du rite initiatique traditionnel. Après, il faudrait grandir en sagesse et revenir sur terre. Patience et persévérance font le lit des endurants. Le courant des Frères musulmans ne peut pas s’implanter au Sénégal comme il a pu le faire en Égypte dans les années 20. Nos réalités nationales et intrinsèques jurent d’avec les aspects de la pensée salafiste arabe.
Ce que les Anciens ont créé sur la terre sénégalaise, pendant des siècles et des siècles de syncrétisme religieux et de brassage-absorption-fusion de populations, de cultures et de cultes, personne ne peut le déraciner, pas même des apprentis salafistes encagoulés (tiens, tiens….).
Cette longue et patiente formation de strates démographiques, culturelles, sociales et religieuses, nous vaut aujourd’hui de nous distinguer, en Afrique et ailleurs, comme le pays de la Teranga où tous veulent investir et tenir leurs activités de réflexion (séminaires et ateliers) ou sportives et culturelles, au grand bonheur des réceptifs hôteliers, des sociétés de services, des restaurants, des lieux de loisirs, bref du tourisme et de l’économie en général.
Heureusement pour son propre intérêt, le Sénégal ne vend pas de la violence physique et verbale, des émeutes, des manifestations violentes, des fake news, des comportements antirépublicains, de la terreur, du racisme, du sectarisme, de l’antiféminisme, de la misogynie, de l’enfermement et autres bâches idéologiques. Le Sénégal défend plutôt le respect de la différence dans tous les domaines, du sutura, du jom, du fiit, des valeurs de la philosophie de notre ancêtre Kocc Barma, du pacte ceddo, des recommandations des Livres (Coran, Bible, Torah, Bouddhisme) et de Dieu, dans le respect, encore une fois, des différences.
Le Sénégal protège aussi la tolérance sexuelle dans le respect de la dignité et des valeurs communes: carnet de santé pour les travailleurs du sexe, place de pionnier dans la lutte contre le sida et la recherche sur le premier vaccin mondial, salons de « massage » et tutti quanti. Le Sénégal préserve l’accès libre et responsable aux breuvages non-sucrés: la plus grande brasserie de boissons non-halal est implantée à Dakar, dans un pays peuplé à de 95% de musulmans. Le Sénégal garantit la liberté d’expression, de culte et les libertés collectives dans le respect de la loi et de la responsabilité. C’est pourquoi des offres alternatives dans tous domaines y coexistent pacifiquement. Nous fêtons ensemble Tabaski, Korité, Noël, Pâques, Ascension, le Grand Bal de Youssou Ndour, notre ministre du Bonheur...
Les Sénégalais respectent et vénèrent leurs figures tutélaires et emblématiques de l’Islam noir, et notre archevêque, comme des pères et des grands-pères. Nous honorons Marie, Mame Diarra Bousso et Zeyda Mariama Niasse, entre autres, comme des mères et des grands-mères. Nous élevons Dethiefu Ndiogu et Diery Dior Ndella au Panthéon. Nous aimons et chérissons nos anciens Présidents de la République, qui ne commandent plus que la télécommande de la télé que leurs petits-enfants leur disputent. Libre à chacun de choisir son Khalife général, sa confrérie, son Gamou, son Magal, son Pèlerinage marial, son 15 août, son Église ou son Damel. Face à la croissance exponentielle de notre capitale et dans notre marche vers la modernité et l’émergence, ils nous sont, nos confréries (Layennes, Mouridiya, Tidjaniya et Qadriya), nos Khalifes généraux, notre Grand Serigne de Dakar et tous nos érudits, des acteurs essentiels de notre « dunya » et de notre « al alakhira ». Notre rapport au legs de nos grands érudits est émotif, oui. L’administration sénégalaise, intelligente et faisant preuve de résilience, en prend acte et délivre à qui la demande, une autorisation de s’absenter pour aller honorer sa confrérie ou son église. C’est un héritage dont tout Sénégalais est fier. Ceux qui ont un autre héritage, qu’ils le fructifient en respectant celui des autres.
Le rappel est utile au musulman. Il s’avère nécessaire de rappeler les fondamentaux lorsqu’il advient que des personnes deviennent amnésiques ou aveuglées par leur desiderata. Au Sénégal, le sauveur attendu de tous les musulmans et guidé par Dieu (El Mahdi), a déjà montré le chemin à la fin du XIXe siècle, à Yoff, en face de la mer. Il est célébré tous les ans par des milliers d’adeptes enthousiastes et sincères: les Layennes sont réputés « opposés au système des castes, connus pour leur souci de la propreté, aussi bien physique que morale, prônant un Islam propre et sincère ». Nous n’avons donc pas besoin d’être « sauvés » par des politiciens en perte de repère et avides de pouvoir et de femmes. Le Sénégal est un pays ouvert et c’est notre liberté d’avoir un islam noir, dans la pure tradition négro-africaine. Personne n’a le monopole de la vérité. Chacun pour soi dans l’islam confrérique ou l’islam réformiste et Dieu (SWT) pour tous. Dieu, et les FDS, sauvent le Sénégal !
DMF