Le Sénégal, longtemps considéré comme un modèle démocratique en Afrique de l’Ouest, fait aujourd’hui face à une dérive inquiétante qui suscite des préoccupations au sein de la région. L’éditorial paru dans Le Monde ce mardi 8 août 2023 souligne la série de décisions controversées prises par le président Macky Sall, remettant en question la stabilité politique et la démocratie du pays.
Selon le journal français, la décision de dissoudre le parti de l’opposant principal, Ousmane Sonko, est un exemple manifeste de cette dérive. Alors que le président Sall avait annoncé qu’il ne briguerait pas un troisième mandat lors de l’élection présidentielle de février 2024, cette mesure exceptionnelle risque de ternir son image et de susciter des critiques quant à sa réelle volonté de respecter les principes démocratiques, alarme le texte.
Ousmane Sonko, figure de l’opposition, n’est pas exempt de controverses. Le Monde le décrit comme un nationaliste et traditionaliste, qui a gagné en popularité en dénonçant la “corruption” des élites liées aux intérêts étrangers et en adoptant des positions anti-Françaises et anti-homosexuelles. Il rappelle que les accusations de viol et ses appels à la révolte ont déclenché des émeutes meurtrières dans le pays, jetant un voile d’incertitude sur sa candidature à la présidentielle de 2024.
À en croire l’éditorial, la dissolution du parti de Sonko, les Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef), est perçue par de nombreux observateurs comme une tentative de limiter sa capacité à se présenter aux élections. Cette action s’ajoute, toujours selon le texte, à une série de charges et de condamnations qui pourraient sérieusement compromettre sa candidature.
La décision du président Macky Sall de s’écarter de la course présidentielle ne signifie pas pour autant qu’il a renoncé à manipuler le jeu politique, estime le texte. Le quotidien français du soir indique que l’adoption de dispositions législatives permettant à d’autres figures de l’opposition d’être éligibles suggère une tentative de diviser et de contrôler l’opposition pour garantir un résultat favorable à son camp.
Les récents événements, y compris l’arrestation rocambolesque de l’avocat Juan Branco en Mauritanie et les accusations portées contre lui à Dakar, soulignent, selon Le Monde, une tendance à la répression et au raidissement en cours au Sénégal. Cela remet en question l’image d’un pays qui se considère comme un exemple de démocratie en Afrique, ajoute le texte.
Alors que de nombreux pays de la région sont en proie à des coups d’État militaires et à des troubles politiques, le Sénégal semble également emprunter un chemin périlleux, à en croire l’édito. L’enjeu ne se limite pas à ce pays seul, mais s’étend à toute l’Afrique de l’Ouest, alerte-t-il. « Les États démocratiques de la région doivent faire face à des défis de taille pour résister aux tendances totalitaires et préserver les principes démocratiques fondamentaux ».
Les questions d’inégalités, de corruption et de relations internationales, en particulier avec la France, agitent les populations de la région. La situation au Sénégal est cruciale pour déterminer si la démocratie peut prévaloir sur d’autres formes de régimes autoritaires. L’Afrique de l’Ouest observe avec attention, car l’avenir du Sénégal pourrait avoir un impact déterminant sur l’ensemble de la région, conclut l’éditorial.