Situation de l’habitat au Sénégal
L’habitat fait partie de la branche « construction » du sous-secteur « bâtiments et travaux publics (BTP) » du secteur de l’industrie. Les BTP représentent 10,8% du PIB au Sénégal. Les investissements dans l’habitat ont des effets d’entraînement sur l’économie et la société. C’est un bien, source de croissance et d’externalités positives. L’accès au logement contribue à avoir une meilleure santé, une meilleure éducation et une productivité du travail améliorée.
L’habitat social est identifié par son faible coût d’accès. Il est réservé aux ménages disposant de revenus modestes. La pertinence de l’investissement dans l’habitat est avérée dans la mesure où l’habitat a le plus grand coefficient d’emplois et de stimulation de l’économie locale.
En outre, la construction de logements contribue à la réduction de la pauvreté et donc à la soutenabilité sociale des réformes du PSE. Cette soutenabilité est indispensable à la réussite des réformes. Soulignons qu’une lecture trop rapide des difficultés des pays africains s’est focalisée sur les aspects financiers, notamment dans leurs dimensions budgétaires et de crise des paiements. Ainsi, la récurrence de la question sociale et de la pauvreté a été reléguée au second plan. D’où l’échec des réformes dans ces pays.
Principaux acteurs de l’habitat au Sénégal: Ministères, SICAP, SN-HLM, collectivités locales, BHS, Caisse des Dépôts et Consignations, fonds roulant pour l’habitat social, promoteurs privés, bailleurs de fonds, ONG, coopératives d’habitat, opérateurs étrangers en partenariat public-privé (PPP), émigrés.
Caractéristiques : matrice institutionnelle (ensemble de règles) dense et complexe, quasi inaccessible au commun des Sénégalais; déséquilibre structurel entre l’offre et la demande ; trois types d’habitat : régulier, irrégulier (spontané), villageois ; prolifération de l’informel, de l’autopromotion; opacité ; inégalités ; deux types d’occupation : location et propriété.
Difficultés : coût élevé et qualité faible des matériaux de construction, rareté de terres viabilisées, problèmes fonciers, planification urbaine inadéquate, financements inadaptés, déficit d’organisation, prolifération de l’informel, non respect du code de l’urbanisme, peu de recours aux spécialistes du bâtiment, retards des paiements par l’État aux entreprises de construction, présence sur le marché de promoteurs véreux, qualification insuffisante des sociétés locales, peu d’incitations en faveur de l’épargne logement, détournement d’une partie des fonds de migrants par des intermédiaires, soupçons de blanchiment d’argent à Dakar notamment, occupation anarchique de l’espace, habitat précaire, problèmes d’hygiène et de santé publique entraînés par les inondations, insécurité liée à la mal-urbanisation.
Origines du déséquilibre structurel entre l’offre et la demande de logements
La population sénégalaise, 14 672 557 d’habitants, est répartie sur une superficie de 192 530 km2 avec un taux de croissance annuel de 3,1% et une densité de 76,2 personnes par km2 du territoire. Elle est concentrée au centre et à l’ouest du pays avec Dakar qui couvre 0,3% du territoire national tout en regroupant près de 25% de la population totale et près de 80 % des services et sièges sociaux de sociétés.
Sur l’axe Dakar-Thiès se trouvent 38% des Sénégalais sur une superficie de 3,7% du territoire national. La région de Tambacounda est la plus vaste région du pays avec 31% de la superficie totale mais accueille le plus faible nombre d’habitants avec seulement 5% ; elle est mal pourvue en infrastructures et en termes de promotion des ressources naturelles.
Par ailleurs, la création de richesses vient des services pour 59% du PIB contre 24% pour l’industrie et 17% seulement pour l’agriculture qui concerne pourtant 57% de la population.
Notons aussi que l’accès aux services sociaux est inégal selon les régions : Dakar, Ziguinchor et Diourbel sont les mieux servis alors que Kaffrine et Kolda ferment la marche
La poussée démographique, les inégalités dans la distribution spatiale de la population, dans la production sectorielle de richesses et dans l’accès aux services sociaux expliquent l’exode rural et l’urbanisation massive (52,5 % de la population sénégalaise vivra en ville d’ici 2030) et son corollaire, l’explosion de la demande de logements.
L’offre de logements n’a pas suivi l’évolution fulgurante de cette demande à cause de politiques inappropriées et d’un
déficit notoire de vision et de volonté politique ferme pour servir réellement les populations aux revenus modestes.
Les politiques de l’habitat au Sénégal de 1960 à 2013
Deux périodes peuvent êtres distinguées : 1960-1999 et 2000-2013
Période 1960-1999
La politique de l’habitat est celle du régime socialiste avec deux sous-périodes 1960-1979 et 1980-1999, sans aucune politique pertinente d’aménagement du territoire national.
1960-1979: La politique de l’habitat est en droite ligne de la politique économique d’expansion avec la planification et l’intervention de l’Etat dans tous les secteurs de l’activité économique.
Avec des financements à faible taux d’intérêt de banques et de bailleurs de fonds, les acteurs publics de l’immobilier, OHLM et SICAP, arrivent à satisfaire l’essentiel de la demande de logements. Les prix sont accessibles au plus grand nombre, surtout dans les centres urbains.
Le choc pétrolier de 1973 change la donne avec la raréfaction des financements. S’y ajoute la décision de la Caisse Centrale de Coopération Economique de ne plus financer l’habitat. D’où le recours aux banques privées avec des taux d’intérêt moins incitatifs.
Les conséquences se déclinent alors en termes de baisse drastique de l’offre de logements avec des prix en nette hausse à cause de l’inflation, de développement rapide de l’habitat spontané et de la spéculation foncière.
Ces difficultés amènent l’Etat à créer la Banque de l’Habitat du Sénégal (BHS) en 1979.
1980-1999 : Pour mieux solutionner ces difficultés, sont mises en place la société immobilière spécialisée dans la préfabrication de logements (HAMO) en 1981, la société centrale d’aménagement des terrains urbains (SCAT URBAM) en1988, les coopératives d’habitat. La législation est aussi renforcée.
En 1989, promotion accrue de l’habitat social avec le lancement de vastes projets : parcelles assainies, zones d’aménagement concertées (ZAC), lotissements publics et privés.
Période 2000-2013
Le nouveau régime libéral se fixe comme objectif de produire 12 000 logements par an. Pour cela, sont renforcés les dispositifs hérités du régime socialiste avec encouragement et soutien accrus à l’initiative privée sur la base d’une législation plus adaptée. Autres mesures : implication de banques commerciales dans le financement de l’habitat, nouvelles facilités de la BHS en faveur de ses clients, aménagement par la SN-HLM de centaines d’hectares à Keur Massar et à Rufisque, création en 2006 du plan Jaxaay pour lutter contre les inondations et les bidonvilles avec la construction de 3 000 logement sociaux dans une première phase.
Le plan Jaxaay, unique trace sociale du régime libéral après douze ans de règne, a finalement, été détourné de ses objectifs initiaux pour aboutir à de graves fautes de gestion.
Autre échec du régime libéral : en 2000, la SN-HLM a réalisé 20 immeubles aux Maristes, de qualité douteuse, nécessitant l’évacuation et le relogement d’habitants ; razzia et spéculation foncières de grande ampleur au détriment de la collectivité, à Dakar en particulier
En 2013, Son Excellence Monsieur le Président de la République Macky Sall a fait de l’accès au logement une priorité, notamment le logement social. A cet effet, il a lancé le projet Tawfekh Yakaar à Tivaouane Peulh Niague. Près de 2 800 logements y sont déjà construits pour un objectif de 4 000 au profit de familles victimes des inondations à Dakar. Ils sont attribués avec transparence pour un coût unitaire de 11 millions de francs CFA dont 3,5 millions seulement sont à la charge du bénéficiaire, le solde étant supporté par l’Etat du Sénégal.
Autre mesure : lancement en 2012 du plan décennal de lutte contre les inondations avec des ouvrages structurants à Dakar, dans les régions et les villes religieuses.
La politique de l’habitat dans le PSE
- Lancé en 2014, le PSE ambitionne d’apporter une solution structurelle à la problématique de l’habitat. Pour cela sont promus de nouveaux pôles de développement, de nouveaux pôles urbains, bien aménagés, dans un cadre de vie attractif, avec une dimension sociale soutenue, accompagnés d’infrastructures structurantes dans les domaines de l’industrie, de l’agriculture, des transports et d’autres services avec des universités, lycées, écoles, structures de santé et d’administration.
Un tel modèle concerne tout le Sénégal. Il est en cohérence avec les autres projets du PSE, le PUDC et l’Acte 3 de la décentralisation. Il s’agit là d’une rupture historique. Dans les prochaines années, le gap entre l’offre et la demande de logements sera résorbé.
Aujourd’hui, ce modèle est illustré par le pôle urbain de Diamniadio qui est une nouvelle ville avec les infrastructures suivantes : 40 000 logements, parc industriel, deuxième université de Dakar, résidences universitaires, cité administrative avec des sièges de ministères, hôpitaux, infrastructures pour accéder aux services sociaux de base, centre de conférence Abdou Diouf, centre international d’échanges (Foire), hôtels, stade, centre commercial, lieux de culte, espaces verts, etc.
D’autres pôles urbains, comme ceux du Lac Rose, de Diass et de Bambilor, vont s’ajouter à la nouvelle cité de Diamniadio.
- Construction de la Cité de l’Emergence avec 28 tours de 10 étages chacune sur le site de Pompier à Dakar. Elle est formée de logements de plusieurs standings et de bureaux.
- Création d’au moins 15 000 logements par an.
Autres résultats et objectifs du PSE
Le PSE enregistre de bons résultats, meilleurs que ceux de l’ancien régime libéral, comme en attestent les indicateurs suivants selon les données de Word Macroecomic Research 1970-2014 relatives à la branche « construction » au Sénégal :
-Valeur ajoutée par habitant ($ US aux prix courants) :
2014 : 49 (valeur maximale de 1970 Ã 2014) contre 45 en 2013 ; 39 en 2010 ; 25 en 2003.
-Moyenne de la valeur ajoutée par habitant ($ US aux prix courants) :
2012-2014 : 45,0 contre 42,3 en 2009-2011 et 38,2 en 2003-2010.
- Valeur ajoutée en milliards de $ US (prix courants) :
2014 : 0,64 contre 0,62 en 2013 ; 0,55 en 2012 ; 0,5 en 2010 ; 0,27 en 2003.
- Valeur ajoutée en milliards de $ US (prix de 1970) :
2014 : 0,14 contre 0,13 en 2013 ; 0,12 en 2012 ; 0,11 en 2010 ; 0,07 en 2003.
- Croissance en % (prix constants) :
2014 : 9,8 contre 11,2 en 2013 ; -0,83 en 2012 ; 4,7 en 2010 ; 4,0 en 2003.
- Taux moyen de croissance annuel 2012-2014 (prix constants): 6,7%
- Taux moyen de croissance annuel 2009-2011 (prix constants) : 2,5%
Autres objectifs et acquis :
- Harmonisation des plans d’urbanisme et d’aménagement urbains.
- Développement de l’habitat social et d’un écosystème de la construction.
- Favoriser une gestion urbaine à la fois pragmatique et inclusive.
- Assurer une meilleure planification et gestion de l'espace des villes et autres agglomérations.
- Logements en faveur des enseignants et des étudiants.
- Réduction des inondations á travers des infrastructures adéquates.
- Améliorer la qualité du cadre de vie en milieux urbain et rural.
- Contrats d’objectifs et de moyens entre l’Etat, la SICAP et la SN-HLM.
- Assouplissement des conditions du FONGIP d’accès au logement social en faveur des Sénégalais du secteur informel et de la diaspora notamment avec désormais la possibilité d’obtenir des prêts bancaires.
- Aucun apport initial pour le logement social. Réduction du coût du loyer.
- Structuration d’une filière de production de matériaux de construction par le développement d’un écosystème local de production de matériaux à bas coût et l’émergence d’acteurs nationaux de la construction « low-cost ».
- Développement de filières domestiques de matériaux de construction.
Préconisations
- Instituer une autorité de régulation de l’habitat.
Il s’agit d’une autorité indépendante du pouvoir politique et de l’administration. Elle doit, entre autres, veiller au respect des bonnes règles sur le marché du logement, mettre un terme à la prolifération de l’informel dans l’habitat et aux abus et dérives observés, comme dans les coopératives d’habitat et sur le marché locatif.
- Former, renforcer les capacités des acteurs de l’habitat : ouvriers, ingénieurs, urbanistes, architectes, géographes et sociologues notamment.
- Encourages les institutions financières à accorder plus de crédits aux particuliers dont l’essentiel des crédits reçus sont versés par la BHS et la SGBS.
- Mobiliser des ressources à moyen et long terme au profit du logement pour doter des structures comme le FONGIP, la Caisse des Dépôts et Consignations.
- Mieux rémunérer les comptes épargne logement et faciliter l’accès au crédit de moyen et long terme. Bonifier les taux d’intérêt bancaires. Pratiquer une fiscalité incitative pour les promoteurs. Promouvoir la bancarisation des Sénégalais pour leur faciliter l’accès au crédit.
- Mieux gérer l’espace urbain. Rénover le code de la construction.
- Favoriser et sécuriser l’accès à la terre pour les promoteurs immobiliers et les particuliers.
- Capitaliser les liens entre restructuration urbaine (habitat), école (inégalités scolaires) et emplois.
- Moraliser et renforcer la gouvernance des coopératives d’habitat.
- Rechercher et promouvoir les technologies propres et alternatives au ciment afin de réduire le coût de construction.
- Renforcer les capacités des institutions publiques concernées par la problématique du logement.
- Renforcer la lutte contre le blanchiment d’argent.
- Impliquer davantage la diaspora sénégalaise dans la définition et l’exécution de la politique d’habitat dédiée à cette communauté.
Dr Omar NDIAYE
Économiste
Convergence des Cadres Républicains / CCR-France
Coordonnateur Adjoint de la section APR de Tours
omarndiaye441@gmail.com
L’habitat fait partie de la branche « construction » du sous-secteur « bâtiments et travaux publics (BTP) » du secteur de l’industrie. Les BTP représentent 10,8% du PIB au Sénégal. Les investissements dans l’habitat ont des effets d’entraînement sur l’économie et la société. C’est un bien, source de croissance et d’externalités positives. L’accès au logement contribue à avoir une meilleure santé, une meilleure éducation et une productivité du travail améliorée.
L’habitat social est identifié par son faible coût d’accès. Il est réservé aux ménages disposant de revenus modestes. La pertinence de l’investissement dans l’habitat est avérée dans la mesure où l’habitat a le plus grand coefficient d’emplois et de stimulation de l’économie locale.
En outre, la construction de logements contribue à la réduction de la pauvreté et donc à la soutenabilité sociale des réformes du PSE. Cette soutenabilité est indispensable à la réussite des réformes. Soulignons qu’une lecture trop rapide des difficultés des pays africains s’est focalisée sur les aspects financiers, notamment dans leurs dimensions budgétaires et de crise des paiements. Ainsi, la récurrence de la question sociale et de la pauvreté a été reléguée au second plan. D’où l’échec des réformes dans ces pays.
Principaux acteurs de l’habitat au Sénégal: Ministères, SICAP, SN-HLM, collectivités locales, BHS, Caisse des Dépôts et Consignations, fonds roulant pour l’habitat social, promoteurs privés, bailleurs de fonds, ONG, coopératives d’habitat, opérateurs étrangers en partenariat public-privé (PPP), émigrés.
Caractéristiques : matrice institutionnelle (ensemble de règles) dense et complexe, quasi inaccessible au commun des Sénégalais; déséquilibre structurel entre l’offre et la demande ; trois types d’habitat : régulier, irrégulier (spontané), villageois ; prolifération de l’informel, de l’autopromotion; opacité ; inégalités ; deux types d’occupation : location et propriété.
Difficultés : coût élevé et qualité faible des matériaux de construction, rareté de terres viabilisées, problèmes fonciers, planification urbaine inadéquate, financements inadaptés, déficit d’organisation, prolifération de l’informel, non respect du code de l’urbanisme, peu de recours aux spécialistes du bâtiment, retards des paiements par l’État aux entreprises de construction, présence sur le marché de promoteurs véreux, qualification insuffisante des sociétés locales, peu d’incitations en faveur de l’épargne logement, détournement d’une partie des fonds de migrants par des intermédiaires, soupçons de blanchiment d’argent à Dakar notamment, occupation anarchique de l’espace, habitat précaire, problèmes d’hygiène et de santé publique entraînés par les inondations, insécurité liée à la mal-urbanisation.
Origines du déséquilibre structurel entre l’offre et la demande de logements
La population sénégalaise, 14 672 557 d’habitants, est répartie sur une superficie de 192 530 km2 avec un taux de croissance annuel de 3,1% et une densité de 76,2 personnes par km2 du territoire. Elle est concentrée au centre et à l’ouest du pays avec Dakar qui couvre 0,3% du territoire national tout en regroupant près de 25% de la population totale et près de 80 % des services et sièges sociaux de sociétés.
Sur l’axe Dakar-Thiès se trouvent 38% des Sénégalais sur une superficie de 3,7% du territoire national. La région de Tambacounda est la plus vaste région du pays avec 31% de la superficie totale mais accueille le plus faible nombre d’habitants avec seulement 5% ; elle est mal pourvue en infrastructures et en termes de promotion des ressources naturelles.
Par ailleurs, la création de richesses vient des services pour 59% du PIB contre 24% pour l’industrie et 17% seulement pour l’agriculture qui concerne pourtant 57% de la population.
Notons aussi que l’accès aux services sociaux est inégal selon les régions : Dakar, Ziguinchor et Diourbel sont les mieux servis alors que Kaffrine et Kolda ferment la marche
La poussée démographique, les inégalités dans la distribution spatiale de la population, dans la production sectorielle de richesses et dans l’accès aux services sociaux expliquent l’exode rural et l’urbanisation massive (52,5 % de la population sénégalaise vivra en ville d’ici 2030) et son corollaire, l’explosion de la demande de logements.
L’offre de logements n’a pas suivi l’évolution fulgurante de cette demande à cause de politiques inappropriées et d’un
déficit notoire de vision et de volonté politique ferme pour servir réellement les populations aux revenus modestes.
Les politiques de l’habitat au Sénégal de 1960 à 2013
Deux périodes peuvent êtres distinguées : 1960-1999 et 2000-2013
Période 1960-1999
La politique de l’habitat est celle du régime socialiste avec deux sous-périodes 1960-1979 et 1980-1999, sans aucune politique pertinente d’aménagement du territoire national.
1960-1979: La politique de l’habitat est en droite ligne de la politique économique d’expansion avec la planification et l’intervention de l’Etat dans tous les secteurs de l’activité économique.
Avec des financements à faible taux d’intérêt de banques et de bailleurs de fonds, les acteurs publics de l’immobilier, OHLM et SICAP, arrivent à satisfaire l’essentiel de la demande de logements. Les prix sont accessibles au plus grand nombre, surtout dans les centres urbains.
Le choc pétrolier de 1973 change la donne avec la raréfaction des financements. S’y ajoute la décision de la Caisse Centrale de Coopération Economique de ne plus financer l’habitat. D’où le recours aux banques privées avec des taux d’intérêt moins incitatifs.
Les conséquences se déclinent alors en termes de baisse drastique de l’offre de logements avec des prix en nette hausse à cause de l’inflation, de développement rapide de l’habitat spontané et de la spéculation foncière.
Ces difficultés amènent l’Etat à créer la Banque de l’Habitat du Sénégal (BHS) en 1979.
1980-1999 : Pour mieux solutionner ces difficultés, sont mises en place la société immobilière spécialisée dans la préfabrication de logements (HAMO) en 1981, la société centrale d’aménagement des terrains urbains (SCAT URBAM) en1988, les coopératives d’habitat. La législation est aussi renforcée.
En 1989, promotion accrue de l’habitat social avec le lancement de vastes projets : parcelles assainies, zones d’aménagement concertées (ZAC), lotissements publics et privés.
Période 2000-2013
Le nouveau régime libéral se fixe comme objectif de produire 12 000 logements par an. Pour cela, sont renforcés les dispositifs hérités du régime socialiste avec encouragement et soutien accrus à l’initiative privée sur la base d’une législation plus adaptée. Autres mesures : implication de banques commerciales dans le financement de l’habitat, nouvelles facilités de la BHS en faveur de ses clients, aménagement par la SN-HLM de centaines d’hectares à Keur Massar et à Rufisque, création en 2006 du plan Jaxaay pour lutter contre les inondations et les bidonvilles avec la construction de 3 000 logement sociaux dans une première phase.
Le plan Jaxaay, unique trace sociale du régime libéral après douze ans de règne, a finalement, été détourné de ses objectifs initiaux pour aboutir à de graves fautes de gestion.
Autre échec du régime libéral : en 2000, la SN-HLM a réalisé 20 immeubles aux Maristes, de qualité douteuse, nécessitant l’évacuation et le relogement d’habitants ; razzia et spéculation foncières de grande ampleur au détriment de la collectivité, à Dakar en particulier
En 2013, Son Excellence Monsieur le Président de la République Macky Sall a fait de l’accès au logement une priorité, notamment le logement social. A cet effet, il a lancé le projet Tawfekh Yakaar à Tivaouane Peulh Niague. Près de 2 800 logements y sont déjà construits pour un objectif de 4 000 au profit de familles victimes des inondations à Dakar. Ils sont attribués avec transparence pour un coût unitaire de 11 millions de francs CFA dont 3,5 millions seulement sont à la charge du bénéficiaire, le solde étant supporté par l’Etat du Sénégal.
Autre mesure : lancement en 2012 du plan décennal de lutte contre les inondations avec des ouvrages structurants à Dakar, dans les régions et les villes religieuses.
La politique de l’habitat dans le PSE
- Lancé en 2014, le PSE ambitionne d’apporter une solution structurelle à la problématique de l’habitat. Pour cela sont promus de nouveaux pôles de développement, de nouveaux pôles urbains, bien aménagés, dans un cadre de vie attractif, avec une dimension sociale soutenue, accompagnés d’infrastructures structurantes dans les domaines de l’industrie, de l’agriculture, des transports et d’autres services avec des universités, lycées, écoles, structures de santé et d’administration.
Un tel modèle concerne tout le Sénégal. Il est en cohérence avec les autres projets du PSE, le PUDC et l’Acte 3 de la décentralisation. Il s’agit là d’une rupture historique. Dans les prochaines années, le gap entre l’offre et la demande de logements sera résorbé.
Aujourd’hui, ce modèle est illustré par le pôle urbain de Diamniadio qui est une nouvelle ville avec les infrastructures suivantes : 40 000 logements, parc industriel, deuxième université de Dakar, résidences universitaires, cité administrative avec des sièges de ministères, hôpitaux, infrastructures pour accéder aux services sociaux de base, centre de conférence Abdou Diouf, centre international d’échanges (Foire), hôtels, stade, centre commercial, lieux de culte, espaces verts, etc.
D’autres pôles urbains, comme ceux du Lac Rose, de Diass et de Bambilor, vont s’ajouter à la nouvelle cité de Diamniadio.
- Construction de la Cité de l’Emergence avec 28 tours de 10 étages chacune sur le site de Pompier à Dakar. Elle est formée de logements de plusieurs standings et de bureaux.
- Création d’au moins 15 000 logements par an.
Autres résultats et objectifs du PSE
Le PSE enregistre de bons résultats, meilleurs que ceux de l’ancien régime libéral, comme en attestent les indicateurs suivants selon les données de Word Macroecomic Research 1970-2014 relatives à la branche « construction » au Sénégal :
-Valeur ajoutée par habitant ($ US aux prix courants) :
2014 : 49 (valeur maximale de 1970 Ã 2014) contre 45 en 2013 ; 39 en 2010 ; 25 en 2003.
-Moyenne de la valeur ajoutée par habitant ($ US aux prix courants) :
2012-2014 : 45,0 contre 42,3 en 2009-2011 et 38,2 en 2003-2010.
- Valeur ajoutée en milliards de $ US (prix courants) :
2014 : 0,64 contre 0,62 en 2013 ; 0,55 en 2012 ; 0,5 en 2010 ; 0,27 en 2003.
- Valeur ajoutée en milliards de $ US (prix de 1970) :
2014 : 0,14 contre 0,13 en 2013 ; 0,12 en 2012 ; 0,11 en 2010 ; 0,07 en 2003.
- Croissance en % (prix constants) :
2014 : 9,8 contre 11,2 en 2013 ; -0,83 en 2012 ; 4,7 en 2010 ; 4,0 en 2003.
- Taux moyen de croissance annuel 2012-2014 (prix constants): 6,7%
- Taux moyen de croissance annuel 2009-2011 (prix constants) : 2,5%
Autres objectifs et acquis :
- Harmonisation des plans d’urbanisme et d’aménagement urbains.
- Développement de l’habitat social et d’un écosystème de la construction.
- Favoriser une gestion urbaine à la fois pragmatique et inclusive.
- Assurer une meilleure planification et gestion de l'espace des villes et autres agglomérations.
- Logements en faveur des enseignants et des étudiants.
- Réduction des inondations á travers des infrastructures adéquates.
- Améliorer la qualité du cadre de vie en milieux urbain et rural.
- Contrats d’objectifs et de moyens entre l’Etat, la SICAP et la SN-HLM.
- Assouplissement des conditions du FONGIP d’accès au logement social en faveur des Sénégalais du secteur informel et de la diaspora notamment avec désormais la possibilité d’obtenir des prêts bancaires.
- Aucun apport initial pour le logement social. Réduction du coût du loyer.
- Structuration d’une filière de production de matériaux de construction par le développement d’un écosystème local de production de matériaux à bas coût et l’émergence d’acteurs nationaux de la construction « low-cost ».
- Développement de filières domestiques de matériaux de construction.
Préconisations
- Instituer une autorité de régulation de l’habitat.
Il s’agit d’une autorité indépendante du pouvoir politique et de l’administration. Elle doit, entre autres, veiller au respect des bonnes règles sur le marché du logement, mettre un terme à la prolifération de l’informel dans l’habitat et aux abus et dérives observés, comme dans les coopératives d’habitat et sur le marché locatif.
- Former, renforcer les capacités des acteurs de l’habitat : ouvriers, ingénieurs, urbanistes, architectes, géographes et sociologues notamment.
- Encourages les institutions financières à accorder plus de crédits aux particuliers dont l’essentiel des crédits reçus sont versés par la BHS et la SGBS.
- Mobiliser des ressources à moyen et long terme au profit du logement pour doter des structures comme le FONGIP, la Caisse des Dépôts et Consignations.
- Mieux rémunérer les comptes épargne logement et faciliter l’accès au crédit de moyen et long terme. Bonifier les taux d’intérêt bancaires. Pratiquer une fiscalité incitative pour les promoteurs. Promouvoir la bancarisation des Sénégalais pour leur faciliter l’accès au crédit.
- Mieux gérer l’espace urbain. Rénover le code de la construction.
- Favoriser et sécuriser l’accès à la terre pour les promoteurs immobiliers et les particuliers.
- Capitaliser les liens entre restructuration urbaine (habitat), école (inégalités scolaires) et emplois.
- Moraliser et renforcer la gouvernance des coopératives d’habitat.
- Rechercher et promouvoir les technologies propres et alternatives au ciment afin de réduire le coût de construction.
- Renforcer les capacités des institutions publiques concernées par la problématique du logement.
- Renforcer la lutte contre le blanchiment d’argent.
- Impliquer davantage la diaspora sénégalaise dans la définition et l’exécution de la politique d’habitat dédiée à cette communauté.
Dr Omar NDIAYE
Économiste
Convergence des Cadres Républicains / CCR-France
Coordonnateur Adjoint de la section APR de Tours
omarndiaye441@gmail.com