Par Dienka NIASSY Sage-femmes, travailleurs de la santé et de l’action sociale ont tous décidé de ranger les blouses aujourd’hui, en décrétant une grève générale, privant ainsi les citoyens de soins. Une façon de hausser le ton suite au décès de Mme Astou Sokhna à l’hôpital Amadou Sakhir Mbaye. En effet, cet incident a secoué le monde de la santé, occasionnant l’arrestation de quatre sages-femmes, placées sous mandat de dépôt jusqu’au 27 avril. Ce que l’Association nationale dessagesfemmes d’Etat du Sénégal (Ansfes) ne veut pas entendre. En conférence de presse hier, l’association que dirige Bigué Ba Mbodj est montée au créneau pour fustiger la décision de justice appliquée sur leurs quatre collègues seulement. Ainsi pour marquer leur «soutien indéfectible», les sages-femmes du Sénégal ont décrété une «maternité sans sage-femme» ce jeudi 21 avril 2022. Selon la présidente de l’association, Bigue Ba Mbodj, «nos collègues de Louga ne doivent pas être les agneaux du sacrifice». Car, précise-t-elle, dans cette affaire, on ne peut pas emprisonner que les sages-femmes et laisser les autres. « La césarienne n’est pas du domaine de la sage-femme. On ne comprend pas pourquoi elles sont les seules à subir les foudres de dame justice et à être pointées du doigt », s’est-elle interrogée. Pour elle, les sages-femmes subissent ces derniers jours « un lynchage en série ». Ce qu’elle trouve anormale et interpelle le ministre de la Santé, Abdoulaye Diouf Sarr, qu’elle accuse d’être responsable de tout ce qui adviendra aux sages-femmes. «Les responsabilités incombent exclusivement et entièrement le ministre de la Santé qui, sans état d’âme, s’est substitué à la justice en condamnant lors d’une audience publique 6 sagesfemmes de la plus infâme des crimes», a-t-elle déclaré, avant de corser le ton : «Abdoulaye Diouf Sarr est responsable de tout ce qui arrivera aux sagesfemmes ». D’après la président de l’Association nationale des sages-femmes du Sénégal, «sa sortie inopinée et les réactions dans les réseaux sociaux ont fait que toutes les sages-femmes, partout où ellesse trouvent,se sentent menacées» et ne jouissent «d’aucune garantie sécuritaire» dans l’exercice de leur travail. Elle souligne, par ailleurs, que cela a suscité une «vindicte populaire» envers les sages-femmes, même si ellesrestent toujours fidèles à leur engagement qui est de lutter contre les décès évitables des mères et des nouveau-nés. Elles ont profité de l’occasion, en tant que mères, pours’incliner devant la mémoire de toutes les femmes qui ont perdu la vie en donnant la vie. Pendant ce temps, les travailleurs de la santé décrètent une grève générale Comme s’il s’étaient donnés le mot, le Collectif destravailleurs de la santé et de l'action sociale (Ctsas) qui regroupe des organisations syndicales du secteur et des associations de corps de métiers du même secteur s’y met. Ledit collectif a, lui aussi, regrettant le «lynchage médiatique» contre le personnel socio-sanitaire, a également décrété une grève générale de 24 heures, aujourd’hui, jeudi sur toute l’étendue du territoire avec le respect des urgences et du service minimum. « Nous estimons qu'il est injuste de vouer aux gémonies toute une catégorie socio-professionnelle. Le personnel de la santé et de l'action sociale s'attendait à un minimum de sérénité et de discernement de la part de nos autorités étatiques et des professionnels de la communication. Hélas ! nous avons constaté face à la clameur populaire, une volonté des autorités étatiques de trouver rapidement un ou des coupables à sacrifier en lieu et place de la présomption d'innocence », s’est indigné Dr Yéry Kamara, porte-parole du jour du Collectif des travailleurs de la santé et de l’action sociale. Et de poursuivre : « pourtant, depuis deux ans, les agents de santé et les sages-femmes en particulier font l'objet d'agressions verbales, physiques voire de viols sans aucune mesure de protection de la tutelle ni aucun émoi de la population malgré la marche nationale de l'association des sages-femmes ». Il demande ainsi aux agents des différents syndicats de «travailler la main dans la main» pour lutter contre «le manque d'équité» dans le traitement des agents de la fonction de l'Etat au détriment des agents de santé, tout en rappelant le nombre infime d’agents de santé par rapport à l’ensemble desfonctionnaires. «Les personnels de santé ne sont que 8 600 agents sur 150 000 fonctionnaires. Ilstravaillent dans des conditions extrêmement difficiles qui ont pour noms insuffisance de personnel, surcharge de travail, manque d'équipements, mauvaise gouvernance, absence de motivation », a indiqué Dr Kamara. Il a indiqué part cependant que la durée de la lutte dépendra du sérieux dans le traitement de cette affaire et celui de leurs plateformes revendicatives par l'Etat du Sénégal. « Nous nous battrons pour nos droits, notre dignité et le respect de notre noble métier ». Le Collectif suit non seulement avec beaucoup d'attention la situation à Louga, mais apporte son soutien total à l'intersyndical, tout en rappelant que «ce premier plan national sera suivi par d'autres plus dures et plus sévères jusqu'à ce qu'un traitement équitable soit obtenu pour leurs camarades»
lii quotidien