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Benoît Sambou sur les accusations de l'ancien PM : « Idy, un dealer qui parle de deal »


Rédigé le Lundi 27 Juin 2016 à 18:23 | Lu 132 fois | 2 commentaire(s)



Dans son bureau logé au centre-ville de Dakar, le ministre conseiller du président de la République, Benoit Sambou souffle le chaud pour répliquer à Idrissa Seck qui qualifie de «deal international» la grâce présidentielle accordée à Karim Wade. «C’est un habitué des deals qui voit partout des deals», assène-t-il. De même, ce responsable de l’Apr à Ziguinchor tempère les ardeurs du Parti démocratique sénégalais qui réclame l’amnistie pour son candidat en 2019. Convaincu que l’ancien ministre d’Etat est un des grands acteurs des détournements durant le régime de Wade, Benoit Sambou ne voit pas «comment et pourquoi Karim devrait être amnistié».


Benoît Sambou sur les accusations de l'ancien PM : « Idy, un dealer qui parle de deal »
Quelle appréciation faites-vous de la libération de Karim Wade dans la nuit du jeudi à vendredi dernier ? 

Nous avons toujours réclamé la traduction devant la Justice de Karim Wade qui est un des grands acteurs des détournements durant le régime de Wade. Il a été jugé et condamné et des amendes ont été prononcées à son encontre. Du point de vue de la politique de bonne gouvernance instaurée par le président de la République, et du principe de reddition des comptes, nous avons atteint nos objectifs. De la même manière, nous considérons que Karim Wade est un justiciable comme tout le monde, nous devons comprendre et accepter qu’il puisse bénéficier d’une grâce comme tout condamné ou personne entre les liens de la détention. Le président de la République accorde chaque année sa grâce à des milliers de détenus. Pour moi, cette libération est un non évènement. 

Libéré la nuit, Karim part illico presto au Qatar par jet privé. D’aucuns soupçonnent un deal… 

Il faut dire que beaucoup de personnes ont plaidé pour l’élargissement de prison de Karim Wade. On peut citer les chefs religieux, des avocats de l’Etat entre autres… Le Président a accédé à la demande de ces personnalités. Il faut savoir qu’il ne s’agissait pas de gracier un prisonnier pour qu’il puisse troubler l’ordre public. Je pense que Karim a eu l’intelligence de quitter le pays pour comprendre que si le Président a la grandeur d’esprit de le gracier, il fallait en retour qu’il ait du respect pour toutes ces personnes qui sont intervenues en sa faveur. Il a eu la sagesse de s’en aller parce que je rappelle que Karim Wade a causé énormément de tort au peuple sénégalais. 

Le pouvoir n’a-t-il pas négocié son départ vers le Qatar ? 

Le pouvoir ne négocie pas. Il faut comprendre une chose : dans cette affaire, beaucoup de gens sont intervenus pour demander une grâce du président de la République en faveur de Karim. Si le Président accepte, en retour nous sommes en droit d’exiger que Karim ne trouble pas l’ordre public. 
Et pourtant Idrissa Seck est convaincu que la libération de Karim constitue un «deal international ignoble sur le dos des Sénégalais»… 
Les propos de Idrissa Seck sont incompréhensibles. Sa sortie est illogique et dépourvue de raison. C’est à la limite une insulte à toutes ces personnalités qui sont intervenues en faveur de l’élargissement de Karim Wade. Nous devons avoir du respect pour ces gens, notamment nos chefs religieux qui ont pensé que gracier Karim Wade pourrait concourir à ce que notre pays puisse évoluer dans la sérénité. 

La présence du procureur du Qatar, une libération nocturne et le départ express de Karim Wade ne sont-ils pas autant de faits qui justifient la réflexion de Idrissa Seck ? 

Si ceux qui ont plaidé dans le sens de la libération de Karim Wade se sont organisés afin d’éviter des manifestations gênantes et des comportements tendant à dire que le Président aurait tort de le gracier, je n’y vois pas de deal. Tous les jours, des gens sortent de prison et leurs parents organisent leur accueil. 

La présence du procureur général du Qatar n’est-elle pas suspecte ? 

C’est une information que la presse a relayée. Je considère que c’est un envoyé de l’émir du Qatar. 

Finalement, Doha n’aurait-il pas négocié la libération de Karim ? 

Doha à travers son émir, comme d’autres bonnes volontés, est intervenue sur la libération de Karim Wade. Ils ont sollicité la magnanimité du président de la Répu­blique, Macky Sall. Maint­enant Idrissa Seck, en tant qu’habitué des deals, voit des deals partout. 

Certains pensent que l’élargissement de Karim serait un «Protocole de Rebeuss bis»… 

Pas du tout. Justement, Idrissa Seck devrait nous édifier sur ce fameux protocole au lieu d’entrer dans des supputations infantiles et totalement dénuées de sens. 

On se rappelle que le Groupe de travail de l’Onu sur la détention arbitraire avait demandé la libération de Karim. Dakar n’aurait-il pas cédé face à une pression internationale ? 

Bien sûr que non. L’affaire Karim Wade n’est pas une chose spéciale. Karim Wade est un justiciable comme tous les autres Sénégalais. De la même manière qu’on puisse voir Karim traduit devant les tribunaux, jugé et condamné, de la même manière, on doit accepter de le voir bénéficier d’une grâce. Nous n’avons subi aucune pression ni nationale, ni internationale. 

Depuis Doha, Karim Wade a sonné la grande mobilisation au niveau des troupes du Pds pour les prochaines Législatives de 2017. Ne craignez-vous pas que son incarcération ne soit un dividende en sa faveur, sur le plan politique ? 

Il est dans son rôle. Devant la déception de ses partisans de le voir partir en catimini, il ne peut que s’exprimer ainsi. 

N’avez-vous pas peur pour son retour ? 

Absolument pas ! 

Il pourrait jouer sur la victimisation ou de «martyr» du pouvoir actuel… 

Au temps de la splendeur de son père, Karim, tout puissant ministre avait perdu dans son bureau de vote au Point E. 
Vous parlez de la situation de 2009. Entre temps, beaucoup de choses ont changé et il est aujourd’hui le candidat du Pds pour 2019. 
En quoi Karim Wade est-il un foudre de guerre ? Il n’a jamais démontré aux Sénégalais sa capacité de mobiliser des foules ou un pouvoir de susciter un engouement à son égard. 

Dans cette libération, Touba a semble-t-il pesé de son influence ? 

(Agacé) Il n’y a pas d’influence. Il ne faut pas prendre les choses sous cet angle. Les autorités de Touba ont sollicité, au même titre que d’autres personnes, la libération de Karim auprès du président de la République. Ce dernier a accepté. Il faut savoir que la finalité de la Justice n’est pas de maintenir des gens en prison. Il ne faudrait pas que les gens se scandalisent outre mesure. 

Avec cette libération de Karim Wade, ne risque-t-on d’assister à une promotion de l’impunité en faveur de ceux qui jouent avec les deniers publics ? 

(Irrité) Il faut arrêter ! Comment, parce qu’un détenu, fut-il Karim Wade, est libéré par une grâce, c’est la promotion de la prévarication des deniers publics ? Chaque année, le président de la République gracie des centaines de prisonniers qui vont retrouver leurs foyers. Il ne faut pas se faire une fixation sur cette affaire de Karim Wade. 

Avec cette libération de Karim Wade, doit-on s’attendre à voir réhabiliter les députés Oumar Sarr et Abdoulaye Baldé qui ont vu leur immunité parlementaire levée pour des poursuites judicaires ? 

Je ne me suis jamais mêlé du fonctionnement de la Justice. Il faut poser cette question au procureur ou au ministre de la Justice. Nous nous sommes toujours battus pour avoir une justice libre et indépendante par rapport au pouvoir exécutif. Je crois que la justice fait son travail. 

Est-ce que ce n’est pas parce que le président de la République a mis son coude, comme il le dit, sur certains dossiers ? 

(Irrité) Il faut arrêter ce débat. Ce n’est pas bon. 

Mais c’est le Président qui le dit ? 

Laissez la justice suivre son cours ! 

Dès l’annonce de la grâce pour Karim Wade, dans les rangs de votre coalition Benno bokk yaakaar, des voix se sont élevées comme celles de Mamadou Ndoye de la Ld et de Ibrahima Sène du Pit, pour fustiger cette décision du président de la République, évoquant un « mauvais signal » envoyé dans la lutte contre la mal gouvernance. Ce cas Karim ne risque-t-il pas de diviser la coalition au pouvoir ? 

Pourquoi vous pensez que chaque fois que quelqu’un a une opinion contraire à celle du président de la République, c’est une catastrophe ? On n’est pas dans un régime de pensée unique. Il faut laisser les Sénégalais s’exprimer. 

Il est agité l’idée d’amnistier Karim Wade. Est-ce une bonne idée ? 

Encore une fois je ne fais pas de fixation sur Karim Wade. C’est un faux débat. 

Peut-il être amnistié ? 

(Énervé) Il est hors de question de faire une chose pareille. D’abord je ne vois pas comment et pourquoi il devrait être amnistié. Karim est un délinquant coupable d’enrichissement illicite. Ce débat d’amnistie ne se pose même pas à notre niveau. 

La semaine dernière, l’opposition a boudé les discussions portant sur la revue du Code électoral, car le ministre de l’Intérieur a soumis deux projets de loi sur la table de la commission technique de l’Assemblée nationale, relatifs à la refonte du fichier électoral et le Code électoral. Leurs arguments sont-ils recevables ? 

L’opposition est dans son rôle. Ce sont des procédés que nous avions utilisés lorsque nous étions dans l’opposition. Chaque fois que nous considérions qu’il y a un acte qui n’entrait pas dans le cadre de la compréhension que nous avions des choses, on posait un acte politique. Cela a été le cas. Ce fut une manière aussi de faire de la communication. C’est de bonne guerre ! Moi-même, le jour où ils se sont retirés, je leur avais dit qu’ils posaient des actes politiques pour s’affirmer. Je considère que même avec les débats, le Gouvernement pouvait mettre sur la table de la commission des lois de l’Assemblée nationale, ces projets de loi. Ce sont deux procédés différents. 

Ah bon ? Alors les discussions entre partis politiques et la Cena vont donc servir à quoi ? 

Cela ne pose aucun problème. Le Gouvernement a soumis à notre approbation un document, nous avions la latitude de réagir pendant 4 jours. Le Direction de l’automatisation du fichier nous a expliqué tous les contours de la refonte du fichier et personne n’a émis des réserves orales ou écrites. Si le Gouvernement considère que c’est un acquis et compte tenu des délais qui nous étaient impartis, décide de le soumettre à l’As­semblée nationale qui était en session, il n’y a aucun problème. 

Pourtant le Gouver­ne­ment a reculé en décidant de retirer les projets de loi… 

Ce n’est pas un recul. Je salue la démarche du Gouvernement dans sa capacité à comprendre les choses. Le gouvernement a posé cet acte car il ne voulait pas installer une sorte de confusion entre les acteurs. Je pense qu’il y a un petit déficit de communication entre le ministère de l‘Intérieur et la commission des lois de l’Assemblée nationale. Mais cela nécessitait que l’opposition suspende ses activités au niveau des concertations. J’ai bon espoir qu’ils vont revenir. Informé du retrait de l’opposition, le ministre a demandé que le texte soit retiré. Donc, l’opposition en quittant les travaux était au courant. Mais ils vont voulu marquer un coup politique. 

Cet acte ne risque-t-il pas d’installer un déficit de confiance entre pouvoir et opposition ? 

Pas du tout. On a l’habitude de voir ce genre d’actes. Il y aura d’autres incidents entre pouvoir et opposition. Maintenant, il faut savoir que nous avons des délais à respecter. Nous devons finir ce travail avant décembre pour nous conformer aux directives de la Cedeao qui veulent qu’on ne touche pas au fichier électoral 6 mois avant les élections. 

Le Quotidien



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