Entre 2012 et 2020, le Sénégal a fait un bond considérable en matière d’électrification rurale, affirme M. Baba Diallo, directeur général de l’Agence sénégalaise d’électrification rurale (Aser). En effet, entre 2000 et 2012, le taux d’électrification rurale est passé de 3 à 24 % et il a atteint 58% en fin 2020 Dans cette interview exclusive au Journal de l’économie sénégalaise (Lejecos), il a précisé que sur 21 444 villages et hameaux, 5 300 sont électrifiés et plus de 3 700 autres sont inscrits dans les différents programmes et projets en cours de réalisation. Des résultats importants obtenus, selon lui, grâce à l’engagement du gouvernement et l’appui des partenaires techniques et financiers. Nommé directeur général de l’Aser depuis 2016, Baba Diallo est un ingénieur en génie électrique. Cet ancien haut cadre de la Senelec a, à son actif, près de 30 ans d’expériences professionnelles dans les domaines de la gestion commerciale, de la maintenance de centrale électrique, de la planification de systèmes électriques, de la modélisation économique et financière, de la gestion de projets et de la régulation au niveau du service public de l’électricité du Sénégal et du Système d’échanges d’énergie électrique ouest africain basé à Cotonou au Bénin. Entretien.
Source : https://www.lejecos.com/Baba-Diallo-directeur-gene...
Quelles sont les missions de l’Agence sénégalaise d’électrification rurale (Aser) et son cadre d’intervention ?
L’Agence sénégalaise d’électrification rurale (Aser) a été créée, en 1999, par loi n° 98-29, à la suite de la réforme du secteur de l’électricité. Cette loi avait pour objectif principal d’inviter le secteur privé à participer à l’exploitation et aux investissements du secteur de l’électricité.
Je rappelle que l’une des innovations de ce texte, c’est la création d’une agence dédiée à l’électrification rurale et d’une commission de régulation du secteur de l’électricité, qui a en charge la viabilité économique et financière de tous les opérateurs du secteur de l’électricité, mais également la fixation des tarifs. A l’époque, le Sénégal avait un taux d’électrification rurale de 3 % et il était question de voir comment accélérer l’électrification avec cette agence dédiée à l’électrification rurale comme maître d’ouvrage délégué de l’électrification rurale.
La stratégie d’électrification repose essentiellement sur la neutralité technologique, c’est-à -dire l’Aser doit rechercher le moindre coût. Par conséquent, on essaie toujours d’avoir la solution adaptée pour les besoins des populations rurales et qui représente l’optimum économique. L’autre volet de la stratégie consiste à accompagner le développement économique par des plateformes énergétiques multisectorielles, qui doivent alléger les travaux des femmes en milieu rural et contribuer au développement des activités génératrices de revenus, nonobstant les partenariats public-privé à mettre en place. C’est dans ce cadre d’ailleurs, que des concessions ont été développées pour promouvoir l’électrification rurale grâce à l’appui du gouvernement et des subventions des partenaires au développement.
De 3 % en 1998, le taux d’électrification rurale est passé à 58 % en 2020. Qu’est-ce qui explique ce bond ?
Ce bond s’explique par l’engagement du gouvernement du Sénégal. Entre 2000 et 2012, on est passé de 3 à 24 % sur la base de conventions d’électrification rurale favorisées par le gouvernement à travers le budget consolidé d’investissement. Cette politique a permis d’électrifier les chefs de lieu de communes et des villages considérés comme des pôles de développement.
Sous le magistère du président Macky Sall, nous avons changé d’échelle pour accélérer l’électrification rurale au Sénégal. C’est pourquoi le programme national d’urgence d’électrification rurale a été lancé avec deux objectifs principaux. Le premier visait à atteindre un taux d’électrification de 60 % au plan national et le second consistait à rechercher une performance d’au moins 30 % dans chacun des départements. Au-delà de l’électrification rurale, le but poursuivi était de gommer les disparités territoriales au nom de la justice sociale et de l’équité territoriale. D’où l’objectif minimal de 30 % par département et un taux d’électrification rurale de 60 % à l’échelle nationale. Cela s’est traduit par des dorsales électriques, en réalisant le maximum de lignes moyenne tension et le maillage du territoire national. Ainsi, toutes les localités situées à un kilomètre du réseau ont été électrifiées. L’Etat a eu à consacrer une enveloppe de 110 milliards de FCFA à travers l’Aser qui était dotée de près de 70 milliards de FCFA et le Programme d’urgence de développement communautaire (PUDC) qui avait une enveloppe de 40 milliards de FCFA. Toutes ces actions combinées ont permis de booster le taux d’électrification rurale et d’atteindre un taux de 58 % en fin 2020.
Quelle est la part de l’Aser dans l’élargissement de l’accès à l’électricité ?
L’enveloppe de 70 milliards de FCFA a permis de réaliser près de 1000 kilomètres de dorsales électriques à travers le pays, avec le raccordement de nombreuses localités. Du nord au sud et au centre pays, nous avons réalisé plusieurs dorsales. Dans le département de Podor (région Saint-Louis), la dorsale part de Cas-cas à Pathé Gallo. Elle a permis d’électrifier tous les villages dans le Dandé Mayo avec des localités importantes comme Demet, Walaldé... Des dorsales ont été réalisées dans les régions de Louga et Kaffrine qui ont permis d’électrifier le centre du pays. Au Sud, entre Kolda et Diaobé, nous avons réalisé près de 100 kilomètres de dorsale et près de 200 kilomètres dans la région de Kédougou jusqu’à la frontière malienne. Ce maillage du territoire national a permis d’électrifier de nombreuses localités et fouetter l’électrification dans les régions qui avaient un important réseau comme Thiès, Kaolack, Fatick et Diourbel. Ces régions ont bénéficié de programmes d’électrification de villages situés à moins d’un kilomètre du réseau. En combinant toutes ces actions, l’Aser a pu électrifier beaucoup de villages entre 2015 et 2020, en attendant le développement d’autres technologies comme les mini centrales que nous sommes en train de déployer.
Au rythme où vont les choses, pensez-vous que l’accès universel à l’électricité sera atteint en 2025 ?
L’accès universel est un objectif ambitieux décliné dans le cadre du plan opérationnel pour l’accès universel à l’horizon 2025, élaboré en fin 2018. L’idée était de mobiliser des ressources dès 2019 et 2020 pour développer l’électrification rurale. Malheureusement, il y a eu la Covid-19 et la table ronde prévue avec les partenaires techniques et financiers n’a pu se tenir qu’en avril 2021. Entre 2018 et 2021, nous avons perdu trois années. Nous sommes en train de mettre les bouchées doubles pour atteindre l’accès universel. Mais à l’horizon 2025, nous travaillons à avoir la couverture la plus satisfaisante possible avec un taux de près de 90 % et atteindre l’accès universel entre 2025 et 2027.
Quelle est la stratégie développée par l’Aser pour électrifier les villages situés hors réseaux et excentrés ?
L’Aser essaie de promouvoir la neutralité technologique. Nous misons d’abord sur l’extension du réseau électrique qui est la voie principale pour électrifier les villages. Nous avons réussi un important maillage du territoire. La deuxième stratégie consiste à utiliser des mini centrales solaires pour électrifier les localités situées à plus de dix kilomètres du réseau électrique et ayant une population entre 100 et 1200 habitants. Dans des zones qui ne sont pas densément peuplées et qui ont des habitats dispersés comme les hameaux, nous avons prévu d’installer des systèmes solaires individuels. En combinant système solaire individuel, mini centrale solaire et extension du réseau, nous allons faire en sorte d’atteindre le maximum de populations sénégalaises. De ce point de vue nous avons bénéficié de l’accompagnement des partenaires techniques et financiers comme l’Union européenne, la Banque ouest africaine de développement (Boad), le Fonds d'Abu Dhabi. Nous déroulons actuellement un important projet avec la KfW-IPEX dans le cadre de la coopération avec l’Allemagne qui nous permettra d’électrifier près de 700 localités avec les contributions des projets Union Européenne, BID, BOAD et Fonds d’Abu Dhabi. Le Fonds vert climat est venu se joindre à ces actions avec près de 80 millions de dollars, ce qui nous permettra d’électrifier 500 localités avec la technologie des mini centrales solaires.
Vous déroulez un programme de 1200 localités à électrifier. Quelles sont les zones cibles et quels sont les critères de sélection ?
Nous visons les zones éloignées du réseau. Dakar et la zone centre plus les régions de Ziguinchor et Sédhiou sont dotées d’un important réseau électrique. Les autres régions du pays où il n’y a pas suffisamment de réseau, sont les zones de prédilection des mini centrales solaires. La technologie mini centrale solaire sera déployée au centre du pays, au nord et au sud précisément dans les régions de Saint-Louis, Louga, Kaffrine, Tambacounda, Kédougou et Kolda.
Le Sénégal est à combien de villages électrifiés ?
Nous avons 21 400 villages et hameaux disséminés à l’échelle du pays. Parmi lesquels, près 5 300 sont électrifiés et 3 700 autres sont inscrits dans les différents programmes en cours de réalisation. Cela fait environ 10 000 localités. Mais si on regarde les localités électrifiées, elles concentrent le plus grand nombre de populations puisque le critère démographique a été longtemps mis en avant. En nombre, si les localités électrifiées peuvent paraitre moins importantes, en termes de population, elles concentrent plus des deux tiers. Autrement dit, avec un tiers des localités électrifiées, nous couvrons près de deux tiers de la population rurale.
Les ménages en milieu rural ont des revenus modestes. Quelle est la politique menée pour leur faciliter l’accès à l’électricité ?
L’électricité est un secteur marchand avec des tarifs qui sont fixés par la Commission de régulation du secteur de l’électricité pour permettre aux opérateurs d’assurer leur viabilité économique et financière. Cependant, l’Etat vient en appui avec des compensations pour permettre aux opérateurs d’appliquer des tarifs inférieurs. L’Aser et tous les acteurs qui participent à l’électrification rurale essaient d’alléger les charges des ménages en milieu rural en réalisant les installations intérieures qui coûtent chères et qui constituent un frein à l’accès. Dans les nouveaux projets, nous essayons de mettre l’accent sur la réalisation des installations intérieures en mettant les prises et les lampes nécessaires. Cette politique permet aux ménages ruraux d’accéder à l’électricité dans des conditions favorables. Au plan tarifaire, l’Etat accompagne avec les compensations de tarifs et en subventionnant le consommateur.
Comment faites-vous pour trouver les moyens nécessaires pour mener à bien votre mission ?
Les ressources proviennent essentiellement de la bonne signature de l’Etat du Sénégal, de la qualité de ses relations avec les partenaires techniques et financiers. La Banque mondiale, la Banque africaine de développement, la Kfw, la Banque ouest africaine de développement, l’Agence française de développement, le Fonds d'Abu Dhabi, l’Union européenne accompagnent l’Etat du Sénégal pour réaliser ses ambitions pour l’accès universel à l’électricité. A travers le budget consolidé d’investissement, l’Etat du Sénégal met également la main à la poche en apportant une contribution financière substantielle, qui permet de développer l’électrification rurale. Les ressources sont rares mais les partenaires au développement et les partenaires techniques et financiers accompagnent en sus de la contribution de l’Etat du Sénégal. Les concessionnaires d’électrification rurale participent aussi en mobilisant les financements nécessaires, sans oublier également la solidarité entre les consommateurs du fait de la redevance d’électrification instituée par la loi depuis 2006 et appliquée depuis 2019. Cette redevance permet de contribuer au financement de l’électrification rurale avec un prélèvement de 0,7 franc par kilowatt/heure pour l’ensemble des ménages raccordés et qui consomment de l’électricité. Cette mesure a permis de mobiliser des ressources autour de 1,8 à 2 milliards de FCFA par an. Cette somme n’est pas négligeable dans la réalisation de l’électrification rurale.
Le sous-secteur de l’électrification rurale est caractérisé par une multiplicité des acteurs. Existe-t-il un cadre de coordination ?
Effectivement plusieurs acteurs interviennent dans l’électrification rurale. Il y a l’Aser qui est l’agence dédiée ; Senelec qui a vu son périmètre élargi aux zones rurales depuis 2018, les concessionnaires d’électrification rurale (Comasel, Era, Scl) et récemment le Pudc et le Puma. Toutes ces actions méritent d’être coordonnées et planifiées pour que l’objectif soit réalisé dans les meilleures conditions. Le secrétariat permanent à l’électricité logé au ministère du Pétrole et des Energies assure la coordination à travers le comité de suivi des raccordements et de la mise en œuvre des projets d’électrification rurale. Ce comité se réunit régulièrement et suit les localités à électrifier par les différents projets. Le Millenium Challenge Account va aussi électrifier 354 localités ; ce qui n’est pas négligeable.
Quels sont les projets à court terme et les perspectives ?
Les perspectives sont bonnes. L’ensemble des acteurs ont d’importants portefeuilles. L’Aser déroule une multitude de projets avec les mini centrales d’énergie propre, quant au Pudc il est sur le projet de 2000 villages à électrifier ; sans oublier la Senelec avec différentes actions ; le Millenium Challenge Account, etc. Le gouvernement reste engagé pour la réalisation de l’accès universel à l’électricité. Des ressources additionnelles vont être mobilisées et de nouveaux projets vont être bientôt ficelés pour accélérer la mise en œuvre du programme accès universel à l’électricité.
Votre mot de la fin ?
Nous saluons la vision du président Macky Sall qui a travers le PSE a mis l’accès universel comme un des objectifs principaux et a instruit le gouvernement à travers le Ministère du Pétrole et des Energies, le Ministère des Finances et du Budget, le Ministère de l’Economie et du Plan d’œuvrer quotidiennement pour la réalisation des projets d’électrification rurale. L’Aser pour sa part, est mobilisée pour répondre au quotidien aux attentes du gouvernement et des populations rurales. La même préoccupation anime les autres acteurs (Senelec, Pudc, Puma et les concessionnaires d’électrification rurale). Nous remercions les uns et les autres pour leur collaboration et leur engagement pour faire de l’électrification rurale une réalité partout au Sénégal.
Lejecos Magazine
L’Agence sénégalaise d’électrification rurale (Aser) a été créée, en 1999, par loi n° 98-29, à la suite de la réforme du secteur de l’électricité. Cette loi avait pour objectif principal d’inviter le secteur privé à participer à l’exploitation et aux investissements du secteur de l’électricité.
Je rappelle que l’une des innovations de ce texte, c’est la création d’une agence dédiée à l’électrification rurale et d’une commission de régulation du secteur de l’électricité, qui a en charge la viabilité économique et financière de tous les opérateurs du secteur de l’électricité, mais également la fixation des tarifs. A l’époque, le Sénégal avait un taux d’électrification rurale de 3 % et il était question de voir comment accélérer l’électrification avec cette agence dédiée à l’électrification rurale comme maître d’ouvrage délégué de l’électrification rurale.
La stratégie d’électrification repose essentiellement sur la neutralité technologique, c’est-à -dire l’Aser doit rechercher le moindre coût. Par conséquent, on essaie toujours d’avoir la solution adaptée pour les besoins des populations rurales et qui représente l’optimum économique. L’autre volet de la stratégie consiste à accompagner le développement économique par des plateformes énergétiques multisectorielles, qui doivent alléger les travaux des femmes en milieu rural et contribuer au développement des activités génératrices de revenus, nonobstant les partenariats public-privé à mettre en place. C’est dans ce cadre d’ailleurs, que des concessions ont été développées pour promouvoir l’électrification rurale grâce à l’appui du gouvernement et des subventions des partenaires au développement.
De 3 % en 1998, le taux d’électrification rurale est passé à 58 % en 2020. Qu’est-ce qui explique ce bond ?
Ce bond s’explique par l’engagement du gouvernement du Sénégal. Entre 2000 et 2012, on est passé de 3 à 24 % sur la base de conventions d’électrification rurale favorisées par le gouvernement à travers le budget consolidé d’investissement. Cette politique a permis d’électrifier les chefs de lieu de communes et des villages considérés comme des pôles de développement.
Sous le magistère du président Macky Sall, nous avons changé d’échelle pour accélérer l’électrification rurale au Sénégal. C’est pourquoi le programme national d’urgence d’électrification rurale a été lancé avec deux objectifs principaux. Le premier visait à atteindre un taux d’électrification de 60 % au plan national et le second consistait à rechercher une performance d’au moins 30 % dans chacun des départements. Au-delà de l’électrification rurale, le but poursuivi était de gommer les disparités territoriales au nom de la justice sociale et de l’équité territoriale. D’où l’objectif minimal de 30 % par département et un taux d’électrification rurale de 60 % à l’échelle nationale. Cela s’est traduit par des dorsales électriques, en réalisant le maximum de lignes moyenne tension et le maillage du territoire national. Ainsi, toutes les localités situées à un kilomètre du réseau ont été électrifiées. L’Etat a eu à consacrer une enveloppe de 110 milliards de FCFA à travers l’Aser qui était dotée de près de 70 milliards de FCFA et le Programme d’urgence de développement communautaire (PUDC) qui avait une enveloppe de 40 milliards de FCFA. Toutes ces actions combinées ont permis de booster le taux d’électrification rurale et d’atteindre un taux de 58 % en fin 2020.
Quelle est la part de l’Aser dans l’élargissement de l’accès à l’électricité ?
L’enveloppe de 70 milliards de FCFA a permis de réaliser près de 1000 kilomètres de dorsales électriques à travers le pays, avec le raccordement de nombreuses localités. Du nord au sud et au centre pays, nous avons réalisé plusieurs dorsales. Dans le département de Podor (région Saint-Louis), la dorsale part de Cas-cas à Pathé Gallo. Elle a permis d’électrifier tous les villages dans le Dandé Mayo avec des localités importantes comme Demet, Walaldé... Des dorsales ont été réalisées dans les régions de Louga et Kaffrine qui ont permis d’électrifier le centre du pays. Au Sud, entre Kolda et Diaobé, nous avons réalisé près de 100 kilomètres de dorsale et près de 200 kilomètres dans la région de Kédougou jusqu’à la frontière malienne. Ce maillage du territoire national a permis d’électrifier de nombreuses localités et fouetter l’électrification dans les régions qui avaient un important réseau comme Thiès, Kaolack, Fatick et Diourbel. Ces régions ont bénéficié de programmes d’électrification de villages situés à moins d’un kilomètre du réseau. En combinant toutes ces actions, l’Aser a pu électrifier beaucoup de villages entre 2015 et 2020, en attendant le développement d’autres technologies comme les mini centrales que nous sommes en train de déployer.
Au rythme où vont les choses, pensez-vous que l’accès universel à l’électricité sera atteint en 2025 ?
L’accès universel est un objectif ambitieux décliné dans le cadre du plan opérationnel pour l’accès universel à l’horizon 2025, élaboré en fin 2018. L’idée était de mobiliser des ressources dès 2019 et 2020 pour développer l’électrification rurale. Malheureusement, il y a eu la Covid-19 et la table ronde prévue avec les partenaires techniques et financiers n’a pu se tenir qu’en avril 2021. Entre 2018 et 2021, nous avons perdu trois années. Nous sommes en train de mettre les bouchées doubles pour atteindre l’accès universel. Mais à l’horizon 2025, nous travaillons à avoir la couverture la plus satisfaisante possible avec un taux de près de 90 % et atteindre l’accès universel entre 2025 et 2027.
Quelle est la stratégie développée par l’Aser pour électrifier les villages situés hors réseaux et excentrés ?
L’Aser essaie de promouvoir la neutralité technologique. Nous misons d’abord sur l’extension du réseau électrique qui est la voie principale pour électrifier les villages. Nous avons réussi un important maillage du territoire. La deuxième stratégie consiste à utiliser des mini centrales solaires pour électrifier les localités situées à plus de dix kilomètres du réseau électrique et ayant une population entre 100 et 1200 habitants. Dans des zones qui ne sont pas densément peuplées et qui ont des habitats dispersés comme les hameaux, nous avons prévu d’installer des systèmes solaires individuels. En combinant système solaire individuel, mini centrale solaire et extension du réseau, nous allons faire en sorte d’atteindre le maximum de populations sénégalaises. De ce point de vue nous avons bénéficié de l’accompagnement des partenaires techniques et financiers comme l’Union européenne, la Banque ouest africaine de développement (Boad), le Fonds d'Abu Dhabi. Nous déroulons actuellement un important projet avec la KfW-IPEX dans le cadre de la coopération avec l’Allemagne qui nous permettra d’électrifier près de 700 localités avec les contributions des projets Union Européenne, BID, BOAD et Fonds d’Abu Dhabi. Le Fonds vert climat est venu se joindre à ces actions avec près de 80 millions de dollars, ce qui nous permettra d’électrifier 500 localités avec la technologie des mini centrales solaires.
Vous déroulez un programme de 1200 localités à électrifier. Quelles sont les zones cibles et quels sont les critères de sélection ?
Nous visons les zones éloignées du réseau. Dakar et la zone centre plus les régions de Ziguinchor et Sédhiou sont dotées d’un important réseau électrique. Les autres régions du pays où il n’y a pas suffisamment de réseau, sont les zones de prédilection des mini centrales solaires. La technologie mini centrale solaire sera déployée au centre du pays, au nord et au sud précisément dans les régions de Saint-Louis, Louga, Kaffrine, Tambacounda, Kédougou et Kolda.
Le Sénégal est à combien de villages électrifiés ?
Nous avons 21 400 villages et hameaux disséminés à l’échelle du pays. Parmi lesquels, près 5 300 sont électrifiés et 3 700 autres sont inscrits dans les différents programmes en cours de réalisation. Cela fait environ 10 000 localités. Mais si on regarde les localités électrifiées, elles concentrent le plus grand nombre de populations puisque le critère démographique a été longtemps mis en avant. En nombre, si les localités électrifiées peuvent paraitre moins importantes, en termes de population, elles concentrent plus des deux tiers. Autrement dit, avec un tiers des localités électrifiées, nous couvrons près de deux tiers de la population rurale.
Les ménages en milieu rural ont des revenus modestes. Quelle est la politique menée pour leur faciliter l’accès à l’électricité ?
L’électricité est un secteur marchand avec des tarifs qui sont fixés par la Commission de régulation du secteur de l’électricité pour permettre aux opérateurs d’assurer leur viabilité économique et financière. Cependant, l’Etat vient en appui avec des compensations pour permettre aux opérateurs d’appliquer des tarifs inférieurs. L’Aser et tous les acteurs qui participent à l’électrification rurale essaient d’alléger les charges des ménages en milieu rural en réalisant les installations intérieures qui coûtent chères et qui constituent un frein à l’accès. Dans les nouveaux projets, nous essayons de mettre l’accent sur la réalisation des installations intérieures en mettant les prises et les lampes nécessaires. Cette politique permet aux ménages ruraux d’accéder à l’électricité dans des conditions favorables. Au plan tarifaire, l’Etat accompagne avec les compensations de tarifs et en subventionnant le consommateur.
Comment faites-vous pour trouver les moyens nécessaires pour mener à bien votre mission ?
Les ressources proviennent essentiellement de la bonne signature de l’Etat du Sénégal, de la qualité de ses relations avec les partenaires techniques et financiers. La Banque mondiale, la Banque africaine de développement, la Kfw, la Banque ouest africaine de développement, l’Agence française de développement, le Fonds d'Abu Dhabi, l’Union européenne accompagnent l’Etat du Sénégal pour réaliser ses ambitions pour l’accès universel à l’électricité. A travers le budget consolidé d’investissement, l’Etat du Sénégal met également la main à la poche en apportant une contribution financière substantielle, qui permet de développer l’électrification rurale. Les ressources sont rares mais les partenaires au développement et les partenaires techniques et financiers accompagnent en sus de la contribution de l’Etat du Sénégal. Les concessionnaires d’électrification rurale participent aussi en mobilisant les financements nécessaires, sans oublier également la solidarité entre les consommateurs du fait de la redevance d’électrification instituée par la loi depuis 2006 et appliquée depuis 2019. Cette redevance permet de contribuer au financement de l’électrification rurale avec un prélèvement de 0,7 franc par kilowatt/heure pour l’ensemble des ménages raccordés et qui consomment de l’électricité. Cette mesure a permis de mobiliser des ressources autour de 1,8 à 2 milliards de FCFA par an. Cette somme n’est pas négligeable dans la réalisation de l’électrification rurale.
Le sous-secteur de l’électrification rurale est caractérisé par une multiplicité des acteurs. Existe-t-il un cadre de coordination ?
Effectivement plusieurs acteurs interviennent dans l’électrification rurale. Il y a l’Aser qui est l’agence dédiée ; Senelec qui a vu son périmètre élargi aux zones rurales depuis 2018, les concessionnaires d’électrification rurale (Comasel, Era, Scl) et récemment le Pudc et le Puma. Toutes ces actions méritent d’être coordonnées et planifiées pour que l’objectif soit réalisé dans les meilleures conditions. Le secrétariat permanent à l’électricité logé au ministère du Pétrole et des Energies assure la coordination à travers le comité de suivi des raccordements et de la mise en œuvre des projets d’électrification rurale. Ce comité se réunit régulièrement et suit les localités à électrifier par les différents projets. Le Millenium Challenge Account va aussi électrifier 354 localités ; ce qui n’est pas négligeable.
Quels sont les projets à court terme et les perspectives ?
Les perspectives sont bonnes. L’ensemble des acteurs ont d’importants portefeuilles. L’Aser déroule une multitude de projets avec les mini centrales d’énergie propre, quant au Pudc il est sur le projet de 2000 villages à électrifier ; sans oublier la Senelec avec différentes actions ; le Millenium Challenge Account, etc. Le gouvernement reste engagé pour la réalisation de l’accès universel à l’électricité. Des ressources additionnelles vont être mobilisées et de nouveaux projets vont être bientôt ficelés pour accélérer la mise en œuvre du programme accès universel à l’électricité.
Votre mot de la fin ?
Nous saluons la vision du président Macky Sall qui a travers le PSE a mis l’accès universel comme un des objectifs principaux et a instruit le gouvernement à travers le Ministère du Pétrole et des Energies, le Ministère des Finances et du Budget, le Ministère de l’Economie et du Plan d’œuvrer quotidiennement pour la réalisation des projets d’électrification rurale. L’Aser pour sa part, est mobilisée pour répondre au quotidien aux attentes du gouvernement et des populations rurales. La même préoccupation anime les autres acteurs (Senelec, Pudc, Puma et les concessionnaires d’électrification rurale). Nous remercions les uns et les autres pour leur collaboration et leur engagement pour faire de l’électrification rurale une réalité partout au Sénégal.
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Source : https://www.lejecos.com/Baba-Diallo-directeur-gene...