ous êtes un guide religieux, leader d’un parti politique et d’un mouvement social. Pourquoi ces trois casquettes ?
Je voudrais d’abord vous remercier de nous avoir ouvert vos colonnes. Je dois d’abord rendre un vibrant hommage à Cheikh Ahmadou Bamba qui est notre guide et notre référence. Vous avez énumérez trois casquettes que je porte, mais je dois vous dire que faire partie de la famille de Serigne Touba est plus important que toute autre casquette. Je porte la casquette de guide religieux. Et j’exerce mon statut de guide religieux à travers les structures et les mouvements religieux que je dirige. Nous en remercions infiniment Cheikh Ahmadou Bamba qui est notre référence. Dieu recommande aux hommes sur terre de choisir comme référence les personnes qui ont accès à lui. Bamba est présent partout. Et nous matérialisons davantage cette présence à travers le mouvement « Bamba Fepp ». Partout dans le monde, des maisons dédiées à Serigne Touba sont construites. Ces maisons rassemblent des Sénégalais et des non Sénégalais qui y suivent la doctrine du saint homme. Cheikh Ahmadou Bamba représente tout pour eux.
Vous privilégiez la casquette de guide religieux, mais on ne vous voit pas souvent célébrer des mariages et participer à des funérailles comme le font les Imams…
Ce qu’on attend d’un guide religieux, c’est sa présence aux côtés des fidèles lors des baptêmes, des mariages et des funérailles. C’est ce que font les imams. Je suis tout à fait d’accord, mais je ne peux pas dire que je ne suis pas présent aux côtés des fidèles lors des cérémonies. J’ai fait cela pendant des années. Maintenant, j’ai des gens qui le font à ma place. Mes frères et mes fils ont grandi. Ils peuvent assurer ces tâches et me représenter pendant ces cérémonies. C’est l’occasion pour moi de remercier ces personnes qui me représentent : Borom Darou et Serigne Abass. Les autres membres de la famille, Sokhna Maye et Sokhna Ndické me représentent pour les cérémonies qui concernent les femmes. C’est pourquoi, les gens ne doivent pas être surpris de ne pas me voir dans ces cérémonies.
La majeure partie de vos talibés est jeune. Comment expliquez-vous cela ?
J’ai beaucoup de talibés jeunes. Cela, je le dois à Cheikh Ahmadou Bamba. Les représentants du Saint homme sont partout. Et chacun draine une foule de talibés. Nous devons cela à Cheikh Ahmadou Bamba. Nous sommes de la famille de Mame Thierno Birahim Mbacké. Tout le monde sait que Mame Thierno est le premier compagnon de Cheikh Ahmadou Bamba.
Qu’est-ce que le mouvement « Bamba Fepp » apporte de plus dans la divulgation de l’œuvre de Cheikh Ahmadou Bamba ?
Nous sommes sur un nouveau chemin. Le concept nous plait. Nous le véhiculons. Le mouvement tend vers l’universalité. Il va dépasser les frontières sénégalaises. Cheikh Bamba était un grand éducateur. Il enseignait le Coran et poussait la jeunesse à épouser des comportements exempts de tout reproche. Il avait une vision multidimensionnelle qui touche tous les rouages de la société. Bamba avait dit qu’un jour les Blancs et les Noirs répondront à son appel. Il a dit cela et nous y croyons. C’est pourquoi, nous estimons que nous avons un rôle à jouer. Nous avons choisi le concept. Je veux, à travers le monde, divulguer son message. Nous avons choisi d’utiliser une démarche qui répond aux réalités du moment. Comment faire pour que les Blancs répondent positivement à la voie tracée par Cheikh Ahmadou ? Nous allons utiliser divers canaux de communication, notamment les artistes internationaux pour véhiculer le message.
Après l’annonce de « Bamba Fepp », vous aviez annoncé votre décision d’aller en exil suite notamment aux propos que vous aviez tenus lors du Magal sur le Califat dans la communauté mouride. Qu’en est-il réellement ?
Le but de cet exil est de me permettre de mieux me concentrer sur ma mission. Je m’apprête à accomplir une mission très difficile : chercher à faire réaliser les enseignements et les prédictions de Cheikh Ahmadou Bamba qui avait déclaré que les Blancs répondront à son appel. J’estime que pour mieux véhiculer le message de Cheikh Bamba, les artistes ont un grand rôle à jouer. Nous ciblons tous les pays où nous pouvons trouver des artistes capables de véhiculer les enseignements du saint homme. Nous voulons que les messages soient véhiculés dans les langues des pays ciblés. Il me sera difficile d’assumer cette lourde charge. Les multiples sollicitations peuvent gêner le travail que je veux accomplir. Je veux bien me concentrer sur le projet pour vulgariser le message du saint homme partout. L’exil ne va pas durer des années. C’est juste pour quelque temps.
Autrement dit, vous ne partez plus…
J’ai choisi volontairement le mot exil. Mais cela ne veut pas dire que je vais quitter le pays pour m’installer ailleurs. J’ai utilisé le mot exil en référence à l’exil du Saint homme, mais ce sera une retraite spirituelle qui sera un moment de méditation et d’introspection. Et pour le moment, je n’ai pas encore décidé de la date à laquelle je vais le faire. Quand j’ai parlé du califat, je faisais un peu référence au travail que je compte accomplir pour faire connaître partout dans le monde l’œuvre de Cheikh Ahmadou Bamba. Le but final de cela est la préservation de la paix au Sénégal et dans le monde. Je n’ai jamais eu l’intention de heurter qui que ce soit. J’œuvre pour la paix dans ce pays. Tous les actes que je pose visent la paix. Du reste, la visite que j’ai effectuée auprès du khalife général des Mourides, le vénéré Serigne Cheikh Maty Leye Mbacké a permis de lever les équivoques, incompréhensions qui ont pu résulter d’une mauvaise interprétation de mes propos. Et tous les nuages ont été dissipés.
Pourquoi en plus d’avoir créé un mouvement de pérennisation de l’œuvre de Bamba, vous avez décidé de donner une nouvelle orientation à votre parti ?
L’objectif que nous visons, c’est d’enseigner les comportements et les attitudes. Un nouveau mode de vie empreint de paix. C’est pourquoi j’ai demandé aux responsables de ne plus se contenter de dire Parti de la vérité pour le développement. Cet acronyme est lourd. Nous voulons maintenant faire jouer à notre parti le rôle d’apôtre de la paix. C’est pour cette raison qu’il faut maintenant dire parti de la vérité pour le développement « Jama guène aye ». Sans la paix, personne ne peut réussir. Nous voulons aussi que les gens comprennent que nous n’avons pas un parti religieux. C’est un parti ouvert à tous les citoyens du pays. Nous avons un Etat laïc. Nous sommes en phase avec cette laïcité. Je veux que les gens comprennent que mon combat est orienté vers la paix et le développement. Cheikh Ahmadou a beaucoup enseigné sur le paix et le développement par la bonne intention, la bonne parole et la bonne action.
Est-ce que vous avez eu des échos positifs après le lancement du nouveau concept ?
Nous venons de lancer le concept. Et les jeunes travaillent à le vulgariser et à faire en sorte que les citoyens se l’approprient. Quand nous communiquerons sur ce nouveau concept, les gens comprendront davantage que nous inscrivons notre action dans la paix. Nous ne voulons pas que les mauvaises langues nous diabolisent en disant que nous avons un parti religieux.
Vous avez des milliers de talibés, mais malgré cela, votre parti n’a eu que deux députés lors des élections législatives. Comment expliquez-vous cela ?
Ce score est lié à la manière dont l’élection a été organisée. Ce score ne reflète pas la réalité de notre parti. Nous pesons plus que ce que nous avons eu lors des élections. Mais l’important est que c’est la première fois qu’un couple accède à l’Assemblée nationale. Sokhna Dieng Mbacké nous représente à l’Assemblée nationale. Si vous faites une bonne lecture des dernières élections, vous comprendrez que nous n’avons pas fait comme les autres partis. J’étais à Darou Mousty pendant les élections. J’ai juste fait une sortie à Dakar pour communier avec les militants. J’avais même demandé à ce que le parti ne participe pas aux élections, mais puisque nous sommes en démocratie, la majorité a demandé qu’on aille aux élections. J’avais aussi demandé de ne pas figurer sur les listes, les militants ont estimé que ma présence était essentielle. Globalement, le parti n’a pas battu campagne.
Est-ce que vos talibés sont forcément vos militants ?
Non. Nous sommes en démocratie. Mes talibés sont partout. Mes talibés sont dans tous les partis. Quand j’ai créé le Pvd, certains qui étaient dans d’autres partis politiques ont voulu quitter ces formations politiques pour nous rejoindre, mais je leur ai demandé de rester dans leurs partis. Avec la démocratie, on laisse à chaque talibé la latitude de faire ce que sa conscience lui dicte. L’essentiel est, pour moi, d’avoir des talibés qui sont sur le droit chemin.
Votre parti participera-t-il aux prochaines élections ?
Les responsables du parti y travaillent. Le parti doit organiser, très prochainement, un grand rassemblement. Il se peut que je préside cette rencontre. Les élections locales concernent principalement les territoires locaux. Les responsables du parti vont prendre leurs dispositions pour avoir une coalition solide qui prend en compte les intérêts du parti et qui permet aux responsables de participer à la gestion locale.
Nous avons la mouvance présidentielle et l’opposition. Quel camp ciblez-vous pour une alliance ?
Le Parti de la vérité est une formation politique de régulation. On voit souvent des alliances qui cherchent à accomplir une mission bien déterminée. Si c’est une alliance qui ne concerne que les élections, on peut aller en coalition avec n’importe quel parti. Une telle alliance permet juste de traverser une étape. Après cette étape, ceux qui ont les mêmes convictions et le même combat pourraient aller ensemble.
Quels rapports entretenez-vous avec le nouveau régime ?
J’entretiens avec le nouveau régime les mêmes rapports que tous les responsables entretiennent avec lui. Je suis un guide religieux et en même temps leader d’un parti politique. J’ai des rapports normaux avec le régime. Quand on parle de régime, on fait référence au leader de ce régime, le président de la République. Je vous ai dit que j’ai des talibés au sein de l’Etat.
Quelles sont vos relations avec Macky Sall ?
Il est le chef de l’Etat. Je suis un guide religieux. Nous avons des rapports qui cadrent avec ce qui pourrait guider les relations entre les religieux et l’Etat. S’il s’agit de rapports personnels, je m’abstiens de révéler ce qui me lie au président Sall.
Vous parlez de développement. Le régime vient de lancer le Plan Sénégal émergent. Quelle appréciation faites-vous de ce plan ?
C’est une bonne initiative. Quand un président de la République, avec l’appui de ses collaborateurs, lance un projet qui a pour objectif de faire progresser le pays, tout responsable doit avoir un rôle à jouer. Nous avons le nôtre dans le Plan Sénégal émergent. Le Pse a un volet lié à l’agriculture. Nous nous activons déjà dans ce domaine. C’est pourquoi la participation à la réalisation de ce projet doit être élargie à tous les leaders d’opinion qui acceptent de travailler pour le développement du pays.
Etes-vous prêt à engager vos hommes dans ce projet ?
Nous avons 1000 hectares à Mbane. Nous avons aussi des terres dans d’autres zones. Si l’Etat appuie les jeunes, ils pourraient avoir des résultats probants pouvant aider le président de la République. La réussite du président Macky Sall, doit interpeller tous les citoyens du pays. S’il réussit, c’est tout le Sénégal qui y gagne. S’il échoue, c’est tout le pays qui perd. Si chacun joue son rôle et essaie d’être un bon citoyen, le pays pourra décoller. Le président est juste un capitaine d’équipe. Etre un capitaine ne veut pas dire que l’équipe va gagner. Il faut la participation de tout le monde. Nous sommes déjà sur le terrain. On ne peut pas tout attendre de l’Etat. Nous sommes en train d’élaborer des projets agricoles avec l’assistance de mon conseiller, Mamadou Abass Bâ, ancien ministre. Nous sommes prêts à accompagner le président pour un Sénégal émergent.
Avez-vous le sentiment que le nouveau régime est sur la bonne voie ?
Je ne peux pas répondre pleinement à cette question. Personne ne peut nier la bravoure du président, Macky Sall. La vérité est qu’il est brave, mais la gestion du pays ne lui incombe pas à lui seul. Il a des collaborateurs. Certes, certains travaillent pour l’intérêt du pays, mais d’autres travaillent pour leur propre compte. Il ne faut pas oublier que Macky Sall est dans une coalition. Et ses alliés étaient ses adversaires, il y a quelques années de cela, mais on doit les féliciter d’avoir accepté d’être ensemble. C’est pourquoi j’estime que Macky Sall et ses alliés doivent essayer de consolider leur compagnonnage. S’ils renforcent leur collaboration dans un climat de vérité absolue qui met en avant les intérêts du pays, ils peuvent être ensemble le plus longtemps possible. Un pays est composé de plusieurs leaders d’opinion. Le rôle de l’Etat est de chercher parmi ces leaders, les personnes de développement pour collaborer avec eux. Macky Sall peut trouver ces personnes dans tous les secteurs d’activité et dans toutes les couches sociales. Il doit essayer d’avoir en dehors de son camp, des collaborateurs de l’ombre. Un président a besoin de grands hommes qui travaillent dans l’ombre pour l’aider à réussir sa mission. Il peut trouver ces hommes partout.
Vous faites partie de cette catégorie de citoyens…
Je fais partie de toutes les catégories. Je suis un guide religieux. Vous me voyez souvent jouer au piano. Je fais le tour. Je suis un citoyen du monde. Avant que Macky Sall ne soit président, nous avions de bons rapports. Mais un président de la République est différent du citoyen lambda. Quand un citoyen est élu, il arbore un vêtement qui s’appelle Etat. Si vous portez cet habit, ce n’est pas tous les jours que vous l’enlevez. Il y a beaucoup de manquements dans les relations entre nous, mais je n’ai aucun reproche à formuler à son endroit. Je suis un citoyen. Je connais quelque chose sur la gestion d’un Etat.
Je connais les contraintes liées à la gestion de la chose publique surtout au niveau du chef de l’Etat qui est la clé de voûte des institutions. C’est pourquoi, je n’ai aucun reproche à formuler à son encontre, bien au contraire. Mais je lui apporte mon soutien à ma manière sans qu’il ne soit au courant. C’est lui le chef suprême. Si je fais quelque chose qui peut aider le pays à progresser, Macky Sall y gagne en tant que chef de l’Etat. C’est mon rôle. Je lui souhaite une grande réussite. Il est arrivé à la tête du pays à un moment très difficile. Il y a eu beaucoup de difficultés et surtout de nombreux défis à relever. C’est pourquoi, je dis qu’il est brave. Mais pour qu’il réussisse, il faut que tous les Sénégalais jouent leur rôle.
Comment comptez-vous jouer votre rôle ?
Tous les jours, je joue mon rôle pour la paix et la stabilité dans ce pays. Le président a appelé les gens au travail. Nous sommes déjà sur le terrain. Nous sommes dans le domaine agricole. Nos jeunes sont dans l’agriculture. Je vous ai dit que nous sommes prêts à accompagner le président pour un Sénégal émergent.
Vous avez reçu le titre d’ambassadeur international au cours d’une conférence tenue au siège de l’Unesco à Paris. Comment exercez-vous cette mission ?
Quand on vous donne un diplôme et que vous n’essayiez pas de porter le combat pour la paix, cela n’a pas de sens. Plusieurs personnalités ont reçu cette distinction. Ceux qui m’ont nommé ambassadeur ont peut-être vu ce que je fais pour la paix et la culture. Nous menons beaucoup d’activités sociales à travers le pays et cela n’a pas échappé à ceux qui ont décerné cette distinction. Je profite de l’occasion pour remercier Ibrahima Sall, l’actuel directeur de la Sicap qui a joué un rôle important dans la délivrance de cette distinction. Je dois également remercier l’Etat du Sénégal. Sur mon passeport diplomatique, l’Etat a énuméré mon statut d’ambassadeur international de la paix.
La presse a récemment fait état de difficultés que vous auriez rencontrées pour avoir un passeport diplomatique...
Ce n’est pas un problème. La période de renouvellement de mon passeport a coïncidé avec l’annonce de mon exil. Les autorités chargées de me délivrer ce sésame avaient voyagé. C’est pourquoi, il y a eu des lenteurs. J’ai aussi renouvelé mon passeport ordinaire. Cela n’a rien à voir avec la question du passeport diplomatique. Je suis délibérément parti renouveler mon passeport ordinaire qui était arrivé à expiration.
Le Soleil
Je voudrais d’abord vous remercier de nous avoir ouvert vos colonnes. Je dois d’abord rendre un vibrant hommage à Cheikh Ahmadou Bamba qui est notre guide et notre référence. Vous avez énumérez trois casquettes que je porte, mais je dois vous dire que faire partie de la famille de Serigne Touba est plus important que toute autre casquette. Je porte la casquette de guide religieux. Et j’exerce mon statut de guide religieux à travers les structures et les mouvements religieux que je dirige. Nous en remercions infiniment Cheikh Ahmadou Bamba qui est notre référence. Dieu recommande aux hommes sur terre de choisir comme référence les personnes qui ont accès à lui. Bamba est présent partout. Et nous matérialisons davantage cette présence à travers le mouvement « Bamba Fepp ». Partout dans le monde, des maisons dédiées à Serigne Touba sont construites. Ces maisons rassemblent des Sénégalais et des non Sénégalais qui y suivent la doctrine du saint homme. Cheikh Ahmadou Bamba représente tout pour eux.
Vous privilégiez la casquette de guide religieux, mais on ne vous voit pas souvent célébrer des mariages et participer à des funérailles comme le font les Imams…
Ce qu’on attend d’un guide religieux, c’est sa présence aux côtés des fidèles lors des baptêmes, des mariages et des funérailles. C’est ce que font les imams. Je suis tout à fait d’accord, mais je ne peux pas dire que je ne suis pas présent aux côtés des fidèles lors des cérémonies. J’ai fait cela pendant des années. Maintenant, j’ai des gens qui le font à ma place. Mes frères et mes fils ont grandi. Ils peuvent assurer ces tâches et me représenter pendant ces cérémonies. C’est l’occasion pour moi de remercier ces personnes qui me représentent : Borom Darou et Serigne Abass. Les autres membres de la famille, Sokhna Maye et Sokhna Ndické me représentent pour les cérémonies qui concernent les femmes. C’est pourquoi, les gens ne doivent pas être surpris de ne pas me voir dans ces cérémonies.
La majeure partie de vos talibés est jeune. Comment expliquez-vous cela ?
J’ai beaucoup de talibés jeunes. Cela, je le dois à Cheikh Ahmadou Bamba. Les représentants du Saint homme sont partout. Et chacun draine une foule de talibés. Nous devons cela à Cheikh Ahmadou Bamba. Nous sommes de la famille de Mame Thierno Birahim Mbacké. Tout le monde sait que Mame Thierno est le premier compagnon de Cheikh Ahmadou Bamba.
Qu’est-ce que le mouvement « Bamba Fepp » apporte de plus dans la divulgation de l’œuvre de Cheikh Ahmadou Bamba ?
Nous sommes sur un nouveau chemin. Le concept nous plait. Nous le véhiculons. Le mouvement tend vers l’universalité. Il va dépasser les frontières sénégalaises. Cheikh Bamba était un grand éducateur. Il enseignait le Coran et poussait la jeunesse à épouser des comportements exempts de tout reproche. Il avait une vision multidimensionnelle qui touche tous les rouages de la société. Bamba avait dit qu’un jour les Blancs et les Noirs répondront à son appel. Il a dit cela et nous y croyons. C’est pourquoi, nous estimons que nous avons un rôle à jouer. Nous avons choisi le concept. Je veux, à travers le monde, divulguer son message. Nous avons choisi d’utiliser une démarche qui répond aux réalités du moment. Comment faire pour que les Blancs répondent positivement à la voie tracée par Cheikh Ahmadou ? Nous allons utiliser divers canaux de communication, notamment les artistes internationaux pour véhiculer le message.
Après l’annonce de « Bamba Fepp », vous aviez annoncé votre décision d’aller en exil suite notamment aux propos que vous aviez tenus lors du Magal sur le Califat dans la communauté mouride. Qu’en est-il réellement ?
Le but de cet exil est de me permettre de mieux me concentrer sur ma mission. Je m’apprête à accomplir une mission très difficile : chercher à faire réaliser les enseignements et les prédictions de Cheikh Ahmadou Bamba qui avait déclaré que les Blancs répondront à son appel. J’estime que pour mieux véhiculer le message de Cheikh Bamba, les artistes ont un grand rôle à jouer. Nous ciblons tous les pays où nous pouvons trouver des artistes capables de véhiculer les enseignements du saint homme. Nous voulons que les messages soient véhiculés dans les langues des pays ciblés. Il me sera difficile d’assumer cette lourde charge. Les multiples sollicitations peuvent gêner le travail que je veux accomplir. Je veux bien me concentrer sur le projet pour vulgariser le message du saint homme partout. L’exil ne va pas durer des années. C’est juste pour quelque temps.
Autrement dit, vous ne partez plus…
J’ai choisi volontairement le mot exil. Mais cela ne veut pas dire que je vais quitter le pays pour m’installer ailleurs. J’ai utilisé le mot exil en référence à l’exil du Saint homme, mais ce sera une retraite spirituelle qui sera un moment de méditation et d’introspection. Et pour le moment, je n’ai pas encore décidé de la date à laquelle je vais le faire. Quand j’ai parlé du califat, je faisais un peu référence au travail que je compte accomplir pour faire connaître partout dans le monde l’œuvre de Cheikh Ahmadou Bamba. Le but final de cela est la préservation de la paix au Sénégal et dans le monde. Je n’ai jamais eu l’intention de heurter qui que ce soit. J’œuvre pour la paix dans ce pays. Tous les actes que je pose visent la paix. Du reste, la visite que j’ai effectuée auprès du khalife général des Mourides, le vénéré Serigne Cheikh Maty Leye Mbacké a permis de lever les équivoques, incompréhensions qui ont pu résulter d’une mauvaise interprétation de mes propos. Et tous les nuages ont été dissipés.
Pourquoi en plus d’avoir créé un mouvement de pérennisation de l’œuvre de Bamba, vous avez décidé de donner une nouvelle orientation à votre parti ?
L’objectif que nous visons, c’est d’enseigner les comportements et les attitudes. Un nouveau mode de vie empreint de paix. C’est pourquoi j’ai demandé aux responsables de ne plus se contenter de dire Parti de la vérité pour le développement. Cet acronyme est lourd. Nous voulons maintenant faire jouer à notre parti le rôle d’apôtre de la paix. C’est pour cette raison qu’il faut maintenant dire parti de la vérité pour le développement « Jama guène aye ». Sans la paix, personne ne peut réussir. Nous voulons aussi que les gens comprennent que nous n’avons pas un parti religieux. C’est un parti ouvert à tous les citoyens du pays. Nous avons un Etat laïc. Nous sommes en phase avec cette laïcité. Je veux que les gens comprennent que mon combat est orienté vers la paix et le développement. Cheikh Ahmadou a beaucoup enseigné sur le paix et le développement par la bonne intention, la bonne parole et la bonne action.
Est-ce que vous avez eu des échos positifs après le lancement du nouveau concept ?
Nous venons de lancer le concept. Et les jeunes travaillent à le vulgariser et à faire en sorte que les citoyens se l’approprient. Quand nous communiquerons sur ce nouveau concept, les gens comprendront davantage que nous inscrivons notre action dans la paix. Nous ne voulons pas que les mauvaises langues nous diabolisent en disant que nous avons un parti religieux.
Vous avez des milliers de talibés, mais malgré cela, votre parti n’a eu que deux députés lors des élections législatives. Comment expliquez-vous cela ?
Ce score est lié à la manière dont l’élection a été organisée. Ce score ne reflète pas la réalité de notre parti. Nous pesons plus que ce que nous avons eu lors des élections. Mais l’important est que c’est la première fois qu’un couple accède à l’Assemblée nationale. Sokhna Dieng Mbacké nous représente à l’Assemblée nationale. Si vous faites une bonne lecture des dernières élections, vous comprendrez que nous n’avons pas fait comme les autres partis. J’étais à Darou Mousty pendant les élections. J’ai juste fait une sortie à Dakar pour communier avec les militants. J’avais même demandé à ce que le parti ne participe pas aux élections, mais puisque nous sommes en démocratie, la majorité a demandé qu’on aille aux élections. J’avais aussi demandé de ne pas figurer sur les listes, les militants ont estimé que ma présence était essentielle. Globalement, le parti n’a pas battu campagne.
Est-ce que vos talibés sont forcément vos militants ?
Non. Nous sommes en démocratie. Mes talibés sont partout. Mes talibés sont dans tous les partis. Quand j’ai créé le Pvd, certains qui étaient dans d’autres partis politiques ont voulu quitter ces formations politiques pour nous rejoindre, mais je leur ai demandé de rester dans leurs partis. Avec la démocratie, on laisse à chaque talibé la latitude de faire ce que sa conscience lui dicte. L’essentiel est, pour moi, d’avoir des talibés qui sont sur le droit chemin.
Votre parti participera-t-il aux prochaines élections ?
Les responsables du parti y travaillent. Le parti doit organiser, très prochainement, un grand rassemblement. Il se peut que je préside cette rencontre. Les élections locales concernent principalement les territoires locaux. Les responsables du parti vont prendre leurs dispositions pour avoir une coalition solide qui prend en compte les intérêts du parti et qui permet aux responsables de participer à la gestion locale.
Nous avons la mouvance présidentielle et l’opposition. Quel camp ciblez-vous pour une alliance ?
Le Parti de la vérité est une formation politique de régulation. On voit souvent des alliances qui cherchent à accomplir une mission bien déterminée. Si c’est une alliance qui ne concerne que les élections, on peut aller en coalition avec n’importe quel parti. Une telle alliance permet juste de traverser une étape. Après cette étape, ceux qui ont les mêmes convictions et le même combat pourraient aller ensemble.
Quels rapports entretenez-vous avec le nouveau régime ?
J’entretiens avec le nouveau régime les mêmes rapports que tous les responsables entretiennent avec lui. Je suis un guide religieux et en même temps leader d’un parti politique. J’ai des rapports normaux avec le régime. Quand on parle de régime, on fait référence au leader de ce régime, le président de la République. Je vous ai dit que j’ai des talibés au sein de l’Etat.
Quelles sont vos relations avec Macky Sall ?
Il est le chef de l’Etat. Je suis un guide religieux. Nous avons des rapports qui cadrent avec ce qui pourrait guider les relations entre les religieux et l’Etat. S’il s’agit de rapports personnels, je m’abstiens de révéler ce qui me lie au président Sall.
Vous parlez de développement. Le régime vient de lancer le Plan Sénégal émergent. Quelle appréciation faites-vous de ce plan ?
C’est une bonne initiative. Quand un président de la République, avec l’appui de ses collaborateurs, lance un projet qui a pour objectif de faire progresser le pays, tout responsable doit avoir un rôle à jouer. Nous avons le nôtre dans le Plan Sénégal émergent. Le Pse a un volet lié à l’agriculture. Nous nous activons déjà dans ce domaine. C’est pourquoi la participation à la réalisation de ce projet doit être élargie à tous les leaders d’opinion qui acceptent de travailler pour le développement du pays.
Etes-vous prêt à engager vos hommes dans ce projet ?
Nous avons 1000 hectares à Mbane. Nous avons aussi des terres dans d’autres zones. Si l’Etat appuie les jeunes, ils pourraient avoir des résultats probants pouvant aider le président de la République. La réussite du président Macky Sall, doit interpeller tous les citoyens du pays. S’il réussit, c’est tout le Sénégal qui y gagne. S’il échoue, c’est tout le pays qui perd. Si chacun joue son rôle et essaie d’être un bon citoyen, le pays pourra décoller. Le président est juste un capitaine d’équipe. Etre un capitaine ne veut pas dire que l’équipe va gagner. Il faut la participation de tout le monde. Nous sommes déjà sur le terrain. On ne peut pas tout attendre de l’Etat. Nous sommes en train d’élaborer des projets agricoles avec l’assistance de mon conseiller, Mamadou Abass Bâ, ancien ministre. Nous sommes prêts à accompagner le président pour un Sénégal émergent.
Avez-vous le sentiment que le nouveau régime est sur la bonne voie ?
Je ne peux pas répondre pleinement à cette question. Personne ne peut nier la bravoure du président, Macky Sall. La vérité est qu’il est brave, mais la gestion du pays ne lui incombe pas à lui seul. Il a des collaborateurs. Certes, certains travaillent pour l’intérêt du pays, mais d’autres travaillent pour leur propre compte. Il ne faut pas oublier que Macky Sall est dans une coalition. Et ses alliés étaient ses adversaires, il y a quelques années de cela, mais on doit les féliciter d’avoir accepté d’être ensemble. C’est pourquoi j’estime que Macky Sall et ses alliés doivent essayer de consolider leur compagnonnage. S’ils renforcent leur collaboration dans un climat de vérité absolue qui met en avant les intérêts du pays, ils peuvent être ensemble le plus longtemps possible. Un pays est composé de plusieurs leaders d’opinion. Le rôle de l’Etat est de chercher parmi ces leaders, les personnes de développement pour collaborer avec eux. Macky Sall peut trouver ces personnes dans tous les secteurs d’activité et dans toutes les couches sociales. Il doit essayer d’avoir en dehors de son camp, des collaborateurs de l’ombre. Un président a besoin de grands hommes qui travaillent dans l’ombre pour l’aider à réussir sa mission. Il peut trouver ces hommes partout.
Vous faites partie de cette catégorie de citoyens…
Je fais partie de toutes les catégories. Je suis un guide religieux. Vous me voyez souvent jouer au piano. Je fais le tour. Je suis un citoyen du monde. Avant que Macky Sall ne soit président, nous avions de bons rapports. Mais un président de la République est différent du citoyen lambda. Quand un citoyen est élu, il arbore un vêtement qui s’appelle Etat. Si vous portez cet habit, ce n’est pas tous les jours que vous l’enlevez. Il y a beaucoup de manquements dans les relations entre nous, mais je n’ai aucun reproche à formuler à son endroit. Je suis un citoyen. Je connais quelque chose sur la gestion d’un Etat.
Je connais les contraintes liées à la gestion de la chose publique surtout au niveau du chef de l’Etat qui est la clé de voûte des institutions. C’est pourquoi, je n’ai aucun reproche à formuler à son encontre, bien au contraire. Mais je lui apporte mon soutien à ma manière sans qu’il ne soit au courant. C’est lui le chef suprême. Si je fais quelque chose qui peut aider le pays à progresser, Macky Sall y gagne en tant que chef de l’Etat. C’est mon rôle. Je lui souhaite une grande réussite. Il est arrivé à la tête du pays à un moment très difficile. Il y a eu beaucoup de difficultés et surtout de nombreux défis à relever. C’est pourquoi, je dis qu’il est brave. Mais pour qu’il réussisse, il faut que tous les Sénégalais jouent leur rôle.
Comment comptez-vous jouer votre rôle ?
Tous les jours, je joue mon rôle pour la paix et la stabilité dans ce pays. Le président a appelé les gens au travail. Nous sommes déjà sur le terrain. Nous sommes dans le domaine agricole. Nos jeunes sont dans l’agriculture. Je vous ai dit que nous sommes prêts à accompagner le président pour un Sénégal émergent.
Vous avez reçu le titre d’ambassadeur international au cours d’une conférence tenue au siège de l’Unesco à Paris. Comment exercez-vous cette mission ?
Quand on vous donne un diplôme et que vous n’essayiez pas de porter le combat pour la paix, cela n’a pas de sens. Plusieurs personnalités ont reçu cette distinction. Ceux qui m’ont nommé ambassadeur ont peut-être vu ce que je fais pour la paix et la culture. Nous menons beaucoup d’activités sociales à travers le pays et cela n’a pas échappé à ceux qui ont décerné cette distinction. Je profite de l’occasion pour remercier Ibrahima Sall, l’actuel directeur de la Sicap qui a joué un rôle important dans la délivrance de cette distinction. Je dois également remercier l’Etat du Sénégal. Sur mon passeport diplomatique, l’Etat a énuméré mon statut d’ambassadeur international de la paix.
La presse a récemment fait état de difficultés que vous auriez rencontrées pour avoir un passeport diplomatique...
Ce n’est pas un problème. La période de renouvellement de mon passeport a coïncidé avec l’annonce de mon exil. Les autorités chargées de me délivrer ce sésame avaient voyagé. C’est pourquoi, il y a eu des lenteurs. J’ai aussi renouvelé mon passeport ordinaire. Cela n’a rien à voir avec la question du passeport diplomatique. Je suis délibérément parti renouveler mon passeport ordinaire qui était arrivé à expiration.
Le Soleil