Servitude du FCfa : Les arguments scientifiques des économistes


Rédigé le Mercredi 20 Décembre 2017 à 14:03 | Lu 50 fois | 0 commentaire(s)



Les économistes africains, ne voulant plus du Franc Cfa, décident de passer à la vitesse supérieure. Cet engagement consiste à pousser les dirigeants africains à prendre leurs responsabilités. Et, lesdits économistes contestataires réaffirment que le Franc Cfa est un symbole de la servitude monétaire des pays africains. Preuves scientifiques à l’appui, ils démontent les arguments des présidents, Alassane Ouattara, Macky Sall et le Ministre de l’Economie, des Finances et du Plan, Amadou Ba. (Partie III)


Servitude du FCfa : Les arguments scientifiques des économistes

Les détracteurs du franc Cfa sont déterminés à prouver aux décideurs de la zone FCfa que cette monnaie est celle de la servitude. Ils ont tenu à Dakar, une conférence internationale sur la question autour du thème, « Sortir l’Afrique de la servitude monétaire. A qui profite le franc Cfa ? ». L’objectif est d’apporter les preuves scientifiques comme demandé par certains dirigeants africains, dont Alassane Ouattara, Macky Sall et son Ministre des Finances, Amadou Ba qui défendent cette monnaie. 


Selon les combattants du Franc Cfa, cette monnaie est un échec du modèle néocolonial de développement et de tous les autres modèles, imposés au continent africain depuis les indépendances. Le changement en Afrique, disent-ils, doit passer par la rupture avec les politiques héritées de la colonisation, dont le franc Cfa est l’un des symboles les plus tenaces d’anciennes colonies françaises. 


Ainsi, le professeur Mamadou Coulibaly, ancien président de l’Assemblée nationale de la Cote d’Ivoire et ancien ministre des Finances de la Côte D’Ivoire, constate que le francs Cfa, arrimé à l’Euro n’arrange pas les pays africains. Selon l’économiste, les pays ayant cette monnaie doivent sortir de ce système. « On peut s’en sortir, on doit le faire. Les textes disent que tout Etat membre peut se retirer de l’Union. Ce n’est pas interdit. La décision doit être notifiée à la conférence des Chefs d’Etat de l’Union. Elle entre en vigueur de plein droit, 180 jours après. Si vous voulez, vous pouvez même abréger. Donc, ce n’est pas interdit.  Il faut regarder les textes pour voir comment y mettre fin. Ce n’est pas par la force ou par la guerre », a-t-il expliqué. 


Il souligne qu’il faut juste discuter les conventions et les traités qui ont été signés. Tous ces textes, insiste-t-il, doivent être dénoncés sur la base de la convention de Vienne de 1969, qui permet aux pays qui ont des difficultés avec les traités et les conventions internationales, d’aller se plaindre pour avoir un procès devant la Cour internationale de justice. « Donc, c’est possible. Ce sont les Chefs d’Etat qui décident. Donc, il faut les encourager », a-t-il exhorté. 


Et, il relève qu’il faut abandonner le complexe d’infériorité, de supériorité et le nationalisme. « Quand on veut avancer, on ne peut s’accrocher au prestige du passé. Le changement, il ne faut pas en avoir peur. Parfois, les africains se disent oui mais et les difficultés qui vont venir ? On vous montre une solution, vous voyez dans la solution, une difficulté déjà. Vous ne pouvez pas bouger. Le changement, bien sûr que cela va avoir des difficultés. Mais, ce ne sont pas ces difficultés qui devraient vous bloquer. Il faut donc, être optimiste et déterminé. Surtout, ne pas avoir des conditions qui ébranlent aux premières critiques. Il y en aura  toujours. C’est quand on a foi en ce changement, qu’on garde la détermination et on continue », a ajouté l’économiste ivoirien. 


Qui estime que les pays de la zone doivent se décider à sortir sans hésitation. Cela, argue-t-il, peu importe les difficultés qui se présenteront. Il estime que c’est faux de dire que l’inflation est maitrisée dans l’espace Uemoa, contrairement aux pays qui ont leur propre monnaie. « On nous dit souvent que dans la zone Uemoa, il y a la stabilité et qu’il n’y a pas d’inflation. Ce n’est pas vrai. S’il n’y avait pas d’inflation, les gens ne se plaindraient pas du coût de la vie », a-t-il relevé. 


L’inflation, renseigne-t-il, est calculée de telle façon qu’elle est toujours faible dans la zone franc Cfa. Le conférencier, répondant au Ministre de l’Economie, des Finances et du Plan, Amadou Ba, rappelle que les équipes techniques de la Bceao assurent que la monnaie n’explique pas l’inflation dans la zone Cfa. « Si, c’est neutralisé parce que le panier de la ménagère est bien calculé.  Quand on fait des enquêtes au Sénégal, on ne va pas à Tivaouane ou à Tambacounda pour chercher les flux. On regarde à Sandaga. Si c’est à Abidjan, on regarde à Treichville. Donc, le panier est calibré après. On nous dit qu’il n’y a pas d’inflation », démontre-t-il.   


Le FCfa, un système extractif 


L’économiste, Ndongo Sylla soutient que l’existence du système franc Cfa est une agression vis-à-vis du bon sens économique. Avant de regretter que le continent ait quatorze pays qui ont fait le choix de renoncer à leur souveraineté monétaire, à travers l’intégration dans deux blocs distincts. Lesquels ont également, fait le choix de renoncer à leur souveraineté monétaire, en optant pour une parité fixe avec l’euro. Ce qui est, à son avis, inédit dans l’histoire de l’économie mondiale.  


« Le franc Cfa est un système dysfonctionnel, il n’y a pas de politique économique politiquement autonome. L’ancrage à l’euro freine la compétitivité surtout, lorsque c’est couplé à la libéralisation commerciale. Et l’expression anti-intentionnée extrême, un concept qu’employaient des auteurs nécrotiques pèse négativement sur la croissance économique. Il y a une réfraction terrible du crédit, les banques sont sur le qui-vive, les économies sont sous-financés. Le ratio prévu à l’économie sur Pib est resté au même niveau en moyenne entre 1991 et 2016 », a-t-il dénoncé. 


A l’en croire, les banques de l’espace FCfa sont les plus rentables au monde. Malgré une faible inflation, le taux d’intérêt réel est très élevé. « Le franc Cfa est un mécanisme extractif. Les capitaux, associés à la convertibilité limitée, exposent les pays à une forte saignée en termes de flux financier illicite. Les pays de l’espace FCfa pèsent à peu près 11% du Pib de l’Afrique mais, 18% du flux financier illicite », clame-t-il.   


  

                                          « Il n’y a pas de monnaie nationale » 


Samir Amin, éminent professeur d’économie politique du développement, a soutenu qu’il n’y a pas de monnaie nationale en Afrique comme le prétend certains pays. Selon lui, le Fonds monétaire international (Fmi) est en réalité le Ministère des colonies de l’impérialisme collectif qui ne gère pas les relations entre le dollar, l’euro, livre sterling, le yuan et le yen


Mais, dit-il, c’est une institution financière internationale qui gère le cedi ghanéen, la naïra du Nigéria entre autres. « Pas mal de pays africains qui gèrent des monnaies dites nationale ou d’apparence nationale. Ce n’est pas une monnaie nationale. Ça reste une monnaie coloniale dans la mesure où leur politique économique est une politique d’assertion inconditionnelle dans la mondialisation impérialiste, telle qu’elle est aujourd’hui », a-t-il expliqué. 


Ainsi, il indique que ces monnaies dites nationales ne sont pas gérées réellement par les autorités nationales. Mais, par le Fonds monétaire international. Pourtant, insiste-t-il, l’indépendance monétaire est une exigence pour tous les pays du monde. Pis, il précise que c’est une situation qui met en aval une exigence plus fondamentale, celle d’avoir une politique de développement économique et sociale totalement indépendante. 


 « Si on ne remet pas en question les politiques économiques et sociales, il est inutile d’avoir une indépendance monétaire », dixit-il. Par conséquent, invite-t-il, il faut changer d’instrument. Et, il invite les africains à considérer l’indépendance monétaire comme partie d’un programme, d’un projet, d’une stratégie holistique qui prend en considération en amont, plus important que la dépendance monétaire que la tentative d’avancer dans cette indépendance économique et sociale réelle. 



O WADE Leral  

 



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