On est très loin des années 2000, où le rêve de chaque nymphe en âge de se marier était de trouver comme époux un émigré, pour souvent des intérêts pécuniaires. Les ‘’Modou Modou’’, comme on les appelle dans le jargon national, faisaient la pluie et le beau temps au sein de la gent féminine. Une dizaine d’années plus tard, la tendance a changé et les ‘’Modou Modou’’ n’ont plus la cote. Ainsi, s’il est un difficile d’avoir une idée précise du nombre d’épouses d’émigrés au niveau national, l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANDS) a révélé, après le Recensement Général de la Population et de l’Habitat, de l’Agriculture et de l’Elevage de 2013, qu’au cours des 5 dernières années, 156 676 Sénégalais sont partis à l’étranger, soit 1,2% de la population. Les principales destinations sont l’Europe (44,4%) et les pays de l’Afrique Centrale (27,5%). Les Sénégalais émigrent principalement pour quatre raisons : recherche de travail (73,4%), études et apprentissage (12,2%), raisons familiales (6,9%) et mariage (3,3%).
Quand le rêve vire au cauchemar
Etre femme de Modou-Modou est loin d’être une sinécure. En plus de passer plusieurs années sans voir l’ombre d’un mari, elles doivent gérer le stress quotidien lié à une belle-famille très exigeante, l’absence de sexualité, des enfants qui demandent le retour d’un père et l’argent de poche souvent insuffisant. La parole à des femmes meurtries.
Elles sont légion les femmes mariées qui restent plusieurs années seules. Si pour les unes, c’est la belle-famille qui leur mènent la vie dure, d’autres vivent un marasme économique jamais vécu dû à la crise économique qui secoue l’Europe depuis quelques années. Sans prendre de gants, des épouses de Modou-Modou triées sur le volet racontent leur calvaire. Aminatou*, une femme mariée depuis plus d’un quart de siècle, a gardé son charme et sa beauté juvénile. Même si ses yeux commencent à rougir, à chaque fois qu’elle plonge dans le passé. Un passé douloureux, selon ses propres mots. ‘’Cela fait plus de quinze ans que mon mari est parti en Europe. Depuis lors, je suis dans le ménage’’. La gérante de salon de coiffure révèle avoir vécu, plusieurs années à la maison des parents de son époux. Elle a fini par aller vivre de son côté. ‘’Je ne pouvais plus vivre avec eux, car il n’était pas question pour moi de rester très loin de mon mari et, de surcroît, vivre avec une belle-famille qui ne me supportait pas.’’
Ainsi, en accord avec son époux désireux de sauver son mariage, un consensus a été vite trouvé. Depuis, elle est allée vivre chez ses parents pour y attendre le retour de son tendre époux. N’empêche qu’elle se pose beaucoup de questions sur son avenir. ‘’Je ne peux pas vous dire ce que j’endurais dans cette maison avec ma belle-famille. Vous savez, nous sommes tous des humains et nous avons besoin de certaines choses (NDLR : chaleur humaine), sans oublier le fait que le temps passe vite et je ne suis plus loin de la ménopause. Mais je suis obligée de rester et de l’attendre tranquillement. A dire vrai, je me pose souvent la question de savoir si un jour il va rentrer au pays. C’est difficile, ce que nous vivons. Mais bon, je me dis que c’est une épreuve divine que je suis obligée d’endurer pour pouvoir en sortir haut la main’’, dit-elle, le cœur lourd.
‘’Mes enfants sont mon réconfort’’
Viviane*, par contre, a eu à vivre avec son ancien petit ami devenu son époux, avant qu’il ne s’envole quelques mois après vers l’Europe. Les premières années, le mari revenait au bercail, et pendant ces vacances, elle pouvait vivre des moments paradisiaques. ‘’Mais actuellement, cela fait plus de 10 ans, 12 ans plus précisément, qu’il n’est pas revenu au Sénégal, car il a eu des problèmes avec ses papiers, ensuite des démêlés judiciaires avec un natif du pays où il est établi », confie la dame qui se console avec ses enfants. ‘’A dire vrai, c’est certes difficile pour moi, mais mes enfants sont mon réconfort. Souvent, j’ai envie de claquer la porte. Ensuite, je me dis que mes enfants ne méritent pas cela’’, déclare Viviane plongée dans ses souvenirs, le regard dans le vide.
Le visage sévère, le foulard bien noué autour de sa tête qui laisse déborder quelques tresses, elle continue son récit sur un ton plus véhément. ‘’Imaginez ! Plus de 12 ans, pour une femme mariée qui a des enfants et sans une vie sexuelle. Il faut le vivre pour en mesurer les conséquences. Le mariage, ce n’est pas simplement des coups de téléphone et ou des appels via skype, viber, bref les réseaux sociaux. Mais, c’est le contact direct, le plaisir charnel. Ce n’est pas que je suis accro au sexe, mais ce n’est pas facile’’. D’ailleurs, son dernier enfant, une fille, qui est aujourd’hui très grande, ne cesse de poser des questions sur son père, surtout lors des fêtes religieuses, notamment, la tabaski. ‘’Souvent, quand elle le demande, j’ai des larmes aux yeux. Heureusement pour moi, côté finance, mon époux gère bien. Rien ne me manque, à part que des milliers de kilomètres nous séparent’’, conclut la dame au sourire ravageur.
‘’Je suis coincée et je ne sais pas quoi faire’’
Contrairement à Aminatou et Viviane, Ouly* n’a pas eu le bonheur de consommer son mariage. Elle n’a toujours pas revu son mari, depuis que le lien a été scellé. ‘’J’ai connu mon mari alors qu’il était à l’étranger. Nous sommes restés ensemble quelques années, avant de nous marier. Il voulait que je le rejoigne. Sauf que le Bon Dieu en a décidé autrement. On a remué terre et ciel pour obtenir un visa, en vain. Résultats des courses, je suis là . Et depuis 5 ans, je n’ai pas revu mon mari’’, se désole cette femme de ménage. ‘’Pire, on n’a même pas consommé notre mariage. Et je vis des conditions financières difficiles, car il est touché par la crise. Il m’envoie moins de 20 000 F CFA, par mois. Avec cette somme, je dois prendre en charge toutes mes dépenses, alors que vous savez que nous en avons beaucoup. Je suis obligée de faire de petits commerces pour arrondir mes fins du mois’’. Ouly va souffler sous peu ses trente bougies. Elle aussi se pose beaucoup de questions sur son avenir. ‘’Je ne peux pas divorcer, encore moins le rejoindre. Je me demande ce que je dois faire, face à ce dilemme. Je suis jeune, belle et je peux avoir le mari que je veux. Mais là , je suis coincée et je ne sais pas quoi faire’’, confie-t-elle.
Quand le rêve vire au cauchemar
Etre femme de Modou-Modou est loin d’être une sinécure. En plus de passer plusieurs années sans voir l’ombre d’un mari, elles doivent gérer le stress quotidien lié à une belle-famille très exigeante, l’absence de sexualité, des enfants qui demandent le retour d’un père et l’argent de poche souvent insuffisant. La parole à des femmes meurtries.
Elles sont légion les femmes mariées qui restent plusieurs années seules. Si pour les unes, c’est la belle-famille qui leur mènent la vie dure, d’autres vivent un marasme économique jamais vécu dû à la crise économique qui secoue l’Europe depuis quelques années. Sans prendre de gants, des épouses de Modou-Modou triées sur le volet racontent leur calvaire. Aminatou*, une femme mariée depuis plus d’un quart de siècle, a gardé son charme et sa beauté juvénile. Même si ses yeux commencent à rougir, à chaque fois qu’elle plonge dans le passé. Un passé douloureux, selon ses propres mots. ‘’Cela fait plus de quinze ans que mon mari est parti en Europe. Depuis lors, je suis dans le ménage’’. La gérante de salon de coiffure révèle avoir vécu, plusieurs années à la maison des parents de son époux. Elle a fini par aller vivre de son côté. ‘’Je ne pouvais plus vivre avec eux, car il n’était pas question pour moi de rester très loin de mon mari et, de surcroît, vivre avec une belle-famille qui ne me supportait pas.’’
Ainsi, en accord avec son époux désireux de sauver son mariage, un consensus a été vite trouvé. Depuis, elle est allée vivre chez ses parents pour y attendre le retour de son tendre époux. N’empêche qu’elle se pose beaucoup de questions sur son avenir. ‘’Je ne peux pas vous dire ce que j’endurais dans cette maison avec ma belle-famille. Vous savez, nous sommes tous des humains et nous avons besoin de certaines choses (NDLR : chaleur humaine), sans oublier le fait que le temps passe vite et je ne suis plus loin de la ménopause. Mais je suis obligée de rester et de l’attendre tranquillement. A dire vrai, je me pose souvent la question de savoir si un jour il va rentrer au pays. C’est difficile, ce que nous vivons. Mais bon, je me dis que c’est une épreuve divine que je suis obligée d’endurer pour pouvoir en sortir haut la main’’, dit-elle, le cœur lourd.
‘’Mes enfants sont mon réconfort’’
Viviane*, par contre, a eu à vivre avec son ancien petit ami devenu son époux, avant qu’il ne s’envole quelques mois après vers l’Europe. Les premières années, le mari revenait au bercail, et pendant ces vacances, elle pouvait vivre des moments paradisiaques. ‘’Mais actuellement, cela fait plus de 10 ans, 12 ans plus précisément, qu’il n’est pas revenu au Sénégal, car il a eu des problèmes avec ses papiers, ensuite des démêlés judiciaires avec un natif du pays où il est établi », confie la dame qui se console avec ses enfants. ‘’A dire vrai, c’est certes difficile pour moi, mais mes enfants sont mon réconfort. Souvent, j’ai envie de claquer la porte. Ensuite, je me dis que mes enfants ne méritent pas cela’’, déclare Viviane plongée dans ses souvenirs, le regard dans le vide.
Le visage sévère, le foulard bien noué autour de sa tête qui laisse déborder quelques tresses, elle continue son récit sur un ton plus véhément. ‘’Imaginez ! Plus de 12 ans, pour une femme mariée qui a des enfants et sans une vie sexuelle. Il faut le vivre pour en mesurer les conséquences. Le mariage, ce n’est pas simplement des coups de téléphone et ou des appels via skype, viber, bref les réseaux sociaux. Mais, c’est le contact direct, le plaisir charnel. Ce n’est pas que je suis accro au sexe, mais ce n’est pas facile’’. D’ailleurs, son dernier enfant, une fille, qui est aujourd’hui très grande, ne cesse de poser des questions sur son père, surtout lors des fêtes religieuses, notamment, la tabaski. ‘’Souvent, quand elle le demande, j’ai des larmes aux yeux. Heureusement pour moi, côté finance, mon époux gère bien. Rien ne me manque, à part que des milliers de kilomètres nous séparent’’, conclut la dame au sourire ravageur.
‘’Je suis coincée et je ne sais pas quoi faire’’
Contrairement à Aminatou et Viviane, Ouly* n’a pas eu le bonheur de consommer son mariage. Elle n’a toujours pas revu son mari, depuis que le lien a été scellé. ‘’J’ai connu mon mari alors qu’il était à l’étranger. Nous sommes restés ensemble quelques années, avant de nous marier. Il voulait que je le rejoigne. Sauf que le Bon Dieu en a décidé autrement. On a remué terre et ciel pour obtenir un visa, en vain. Résultats des courses, je suis là . Et depuis 5 ans, je n’ai pas revu mon mari’’, se désole cette femme de ménage. ‘’Pire, on n’a même pas consommé notre mariage. Et je vis des conditions financières difficiles, car il est touché par la crise. Il m’envoie moins de 20 000 F CFA, par mois. Avec cette somme, je dois prendre en charge toutes mes dépenses, alors que vous savez que nous en avons beaucoup. Je suis obligée de faire de petits commerces pour arrondir mes fins du mois’’. Ouly va souffler sous peu ses trente bougies. Elle aussi se pose beaucoup de questions sur son avenir. ‘’Je ne peux pas divorcer, encore moins le rejoindre. Je me demande ce que je dois faire, face à ce dilemme. Je suis jeune, belle et je peux avoir le mari que je veux. Mais là , je suis coincée et je ne sais pas quoi faire’’, confie-t-elle.