Senego
Quel est votre sentiment par rapport à l’annonce faite par Robert Sagna sur de futures négociations pour la paix en Casamance ? «Je n’ai pas encore rencontré Robert Sagna en ce qui concerne son club de réflexion (Groupe de réflexion pour la recherche de la paix en Casamance, ndlr). En novembre 2012, il voulait me rencontrer. Je lui avais posé comme condition de m’apporter un message officiel de la part du gouvernement sénégalais. N’ayant pas reçu ce message officiel, j’ai refusé de le recevoir quand il est revenu le 26 janvier 2013». L’issue de ces négociations ne vous donc incombe pas ? Vous n’avez pas eu votre mot à dire ? «Le président Macky Sall, lors de sa campagne électorale, s’est adressé aux combattants du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (Mfdc), mais jamais à moi en tant que secrétaire général. Ainsi, il préfère passer outre le bureau politique». Est-ce que ce ne sont pas là les fissions du Mfdc qui éclatent au grand jour ? «Ce sont les autorités sénégalaises qui sont la cause de ces fissions. Si elles pensent que négocier avec des fractions va ramener la paix, c’est tout ce que nous leur souhaitons. Une chose est sûre et je l’affirme en tant que chef suprême des combattants du Mfdc : il n y aura aucune paix si on exclue le bureau politique du mouvement. Je demande une négociation directe avec le président Macky Sall et pas avec des subalternes». Quel commentaire faites-vous des recommandations et propositions après l’intervention de Robert Sagna ? «Elles ne me concernent pas». Qui sont les concernés ? «Je ne sais pas. Lors de sa campagne électorale, à Ziguinchor, Macky Sall avait cité nommément les chefs militaires d’Atika, à commencer par Salif Sadio, suivi de César A. Badiane et de Niantang Diatta. Il les a désignés et choisis pour les négociations. Je rappelle que ce sont des combattants du Mfdc». Est-ce que ce fait de vous couper l’herbe sous les pieds n’est pas normal, vu l’importance des chefs militaires dans ce conflit ? «Moi, Mamadou Nkrumah Sané, secrétaire général du Mfdc, personne ne peut me couper l’herbe sous les pieds en Casamance. Tant que je resterais vivant, les autorités sénégalaises seront obligées de passer par moi». Quels rapports entretenez-vous avec Salif Sadio, César Badiane et Niantang Diatta ? «En tant que leur chef, je sais le rapport que j’entretiens avec eux. Je n’en dirai pas plus». D’aucuns disent qu’ils sont en train d’être des interlocuteurs plus crédibles… «C’est tout le mal que je leur souhaite. Ces trois personnes ne peuvent négocier que l’indépendance de la Casamance. C’est un repos tranquille pour moi». Est-ce qu’on peut s’attendre à ce que vous rejoigniez la table des négociations ? «Je ne rejoindrai pas la table de négociations tant que Macky Sall ne s’adressera pas directement aux autorités politiques du Mfdc. Je rappelle que, depuis 1991, le premier cessez-le-feu valablement signé en Guinée-Bissau entre les deux parties était à mon actif. Depuis que l’ex-président du Sénégal, Abdou Diouf, et son gouvernement m’ont expulsé, toutes les négociations n’ont abouti à aucun résultat». Avez-vous eu des contacts avec le président Macky Sall depuis son élection à la tête du Sénégal ? «Non, il n’y a pas encore eu de contacts directs». Comment interprétez-vous le fait que Robert Sagna dise que le Mfdc a accepté la main tendue ? «Macky Sall a fait de Salif Sadio, César Badiane et Niantang Diatta ses interlocuteurs. Ils ont éventuellement accepté la main tendue». Ne représentent-ils pas le Mfdc ? «Non, ce sont des combattants du Mfdc». Mais qui mieux qu’un combattant pour représenter légitimement une cause ? «Les combattants d’Atika ne peuvent pas négocier sans les institutions du Mfdc que je représente. Je suis le chef suprême. Si des négociations doivent avoir lieu, elles se passeront avec le bureau politique du Mfdc et son chef». Au delà de cette condition de prendre langue directement avec vous, y’ en a-t-il d’autres ? «Les conditions pour négocier avec le gouvernement du Sénégal ne datent pas d’hier. En 1991, l’accord signé en Guinée-Bissau aurait du être suivi d’une négociation. L’ex-président Diouf, avec son gouvernement dans lequel siégeait Abdoulaye Wade, avaient décidé de m’exclure de la Casamance. Il n y a pas eu de négociations par la suite. Pareil sous le régime de l’ancien président Wade car les rencontres organisées en Gambie et dans d’autres lieux n’avaient rien donné. L’actuel président, Macky Sall, dans sa déclaration de campagne électorale du 17 février 2012, avait dit que s’il était élu à la tête de l’Etat, la première mesure qu’il prendrait sur la Casamance est de décréter un cessez-le-feu immédiat. J’attends qu’il respecte sa promesse». Comment voyez-vous la suite de la situation ? «La crise casamançaise est politique. Ce sont des négociations politiques qui ramèneront la paix en Casamance».