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Macoumba Diouf, DG de l’horticulture, sur le prix de l’oignon : «Une spéculation inacceptable sur le dos du consommateur ! »


Rédigé le Mercredi 23 Août 2023 à 12:39 | Lu 58 fois | 0 commentaire(s)



Directeur général de l’Horticulture du Sénégal, Macoumba Diouf qui trouve injustifiée la flambée du prix de l’oignon, déclare qu’il s’agit d’une spéculation inacceptable organisée sur le dos du contribuable et du consommateur. Entretien avec Tribune


Le prix de l’oignon a atteint un prix jamais égalé au moment où l’on parle d’autosuffisance du pays en cette denrée. N’est-ce pas paradoxal ?

L’oignon est avec la pomme de terre et la carotte une légume de grande consommation. C’est une denrée qui fait l’objet d’une grande attention de la part de l’État. C’est pourquoi, à son arrivée au pouvoir en 2012, le Président Sall qui a décliné sa vision pour l’agriculture, a indiqué la voie à suivre pour une autosuffisance en ces légumes. Il a injecté des moyens pour l’accompagnement.

Ainsi, à partir de 2014, avec le programme de yonnu yokkuté, du Pse qui met audevant les jeunes et les femmes, et avec l’application des orientations contenues dans le Programme d’accélération de la cadence agricole du Sénégal (Pracas) pour la période 2014-2018, il y a eu des effets.

L’agriculture étant ciblée pour être le moteur de l’économie sénégalaise, avec la fixation d’objectifs pour 4 filières. Pour l’oignon qui en fait partie, il a été fixé un objectif de 350.000 tonnes en fin 2016 et un accroissement des importations des légumes pour un objectif de 157.000 tonnes.

En fin 2015, le Sénégal a produit 365.500 tonnes soit 17.500 de plus avant échéance. Cela veut dire que depuis 2015 le Sénégal est autosuffisant en oignons ? À l’époque, les besoins étaient de 250.000 tonnes. Avec l’augmentation de la population, les besoins ont augmenté et la production aussi.

Y-a-t-il eu entre temps une baisse de la production pouvant justifier cette inflation sur le prix de l’oignon ?

Entre 2015 et maintenant, la tendance à la hausse de la production a été maintenue. À 367.500 tonnes en 2015, on est passé à 420.000 tonnes l’année dernière et à 398.000 tonnes cette année. La moyenne des 5 dernières années étant donc de 400.000 tonnes par an pour des besoins actuels de 320.000 tonnes au plus. Même avec les pertes, on se retrouve avec une marge de 20.000 tonnes par an. Si le Sénégal continue d’exporter de l’oignon à partir du mois d’octobre jusqu’en décembre, c’est parce qu’on a un déficit en infrastructures de stockage.

L’année dernière, l’enfouissement de production d’oignons par des producteurs qui ne pouvaient pas la garder en est une preuve. Pendant 9 mois, le marché est approvisionné avec la production locale. Mais, si on ne règle pas la question du stockage on continuera à importer de l’oignon pendant 3 mois.
Qu’est-ce qui s’est passé pour que le prix flambe alors qu’on n’est pas en octobre ?
C’est une curiosité, car le prix n’a pas attendu cette période pour grimper. L’inflation a commencé avec la Tabaski pour un prix qui est allé jusqu’à 900 frs le Kg. Cela veut dire que cette hausse est programmée par les commerçants. Lors de la Tabaski où une hausse a été constatée, il y avait assez d’oignon pour un prix raisonnable.

Avec le ministre de l’Agriculture, Aly Ngouille Ndiaye, nous avons visité à Kirène une société qui s’appelle QVS qui disposait dans ses entrepôts de 5000 tonnes. La principale conclusion est que cette hausse du prix jusqu’à 1200 frs n’est rien d’autre que de la spéculation. Il y a aussi le fait que cette année, les producteurs qui évitent que leurs stocks d’invendus pourrissent entre leurs mains, ont exporté de l’oignon.

La spéculation est organisée en violation de la fourchette de prix qui a été retenue lors du conseil présidentiel sur la vie chère. Cette fourchette qui a été acceptée par tous les acteurs, du producteur au transporteur en passant par le grossiste et le détaillant, fixait le prix de l’oignon local entre un prix plancher de 300 frs et un prix plafond de 500 frs. Pour celui de l’oignon importé, c’est entre 400 frs et 600 frs. Cette fourchette gérait les intérêts de tout le monde, mais malheureusement, une spéculation a été organisée sur le dos du contribuable et du consommateur

Y’a-t-il moyen d’éviter cette inflation ?

Cela pose la question des solutions pour cette filière. Il nous faut davantage d’infrastructures de stockage de l’ordre de 150.000 tonnes par an. Ça permet de garder pendant la courte période de 3 mois, de l’oignon. Mais, il faut pour cela, l’implication du secteur privé.

Les infrastructures étant commerciales, l’État peut accompagner comme il le fait en consentant 85 milliards pour des infrastructures de conservation, mais il faut plus. Du grossiste au détaillant, ils ne stockent pas pour longtemps. Le stockage est un métier et permet à des pays comme la Hollande et le Maroc de nous vendre de l’oignon qu’ils conservent. L’État a amorcé le travail, mais il faut un partenariat public privé pour régler la situation.

L’autre solution capitale est le contrôle et la sanction pour éviter la spéculation. Il faut contrôler pour savoir qui spécule, avant de sanctionner. Les mêmes dispositions qui ont été prises sur le prix du sucre doivent être appliquées à l’oignon. Il faut, enfin, encourager la recherche scientifique pour des variétés qui permettent sa disponibilité pendant toute l’année.

Tribune
 
 


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