Cheikh Yérim Seck n’est pas franchement un frère. Mais il est un confrère. La quarantaine, journaliste, auteur, producteur, administrateur de site, homme public et, peut-être, homme politique, un jour… A deux ou trois reprises, nous l’avions invité à notre table. Sa conversation était éblouissante. Entre nous, il y avait une concurrence saine, une fine méfiance, enveloppée d’une cordialité empressée. Il téléphonait souvent pour échanger sur l’actualité nationale, jusqu’au jour où il a porté des informations graves et complètement infondées à notre endroit. Depuis lors… Mais bon, oublions!
Admirablement structuré, fort élégant, nettement brillant et [un peu trop] mondain, on le sentait heureux d’être célèbre et ravi d’être flatté. Il était au faîte de son prestige éditorial et se trouvait au sommet des sommets de son audience, lorsqu’il trébuchât scandaleusement sur la fille d’un magistrat, pieux et rigoureux. Une jeune étudiante pétulante et intelligente qui, depuis trois mois, poursuit, tranquillement, ses études en France. Aucune femme n’aime être prise d’assaut. C’est en oubliant cette règle de la stratégie d’approche que Cheikh Yérim se trouve, depuis trois mois, dans une cellule pour trois ans. Pourtant, ce gentleman n’est pas brutal. Son attrape-cœur avait seulement mal tourné.
Résidence médiatique. A présent, il tourne en rond à la prison du Camp pénal de Dakar. La faute à lui. Mais l’amplification et l’exagération, c’est nous. Ses journées sont notoirement blanches et ses nuits invariablement noires. Mais il est fort comme un roc et réconforte lui-même ses nombreux visiteurs. Levé aux aurores, il vit sa foi en l’Islam avec une érudition impeccable, tout en méditant sur la condition humaine. Sa cellule est une très modeste résidence d’écriture, à partir de laquelle se construit un nouveau Seck, habité par une nouvelle philosophie. Assurément, il ne sera plus le même homme et ne fera plus la même chose…
Ebriété médiatique. Il a mille fois raison de vouloir changer de profession et d’horizon. En vérité, dans la principauté journalistique, pris dans un état d’ébriété médiatique, nous tous avions, avec une violente sympathie, mitraillé, « rafalé », bombardé et fini par crucifier un de nos plus brillants confrères. Lorsqu’enfin, nous l’avons « accroché à un croc de boucher », le strip-tease a baissé ses rideaux… Mais pour combien de temps?
Parce que c’était excitant et jubilatoire pour la majeure partie des médias. Nous nous sommes comportés tels des chiens affamés devant une proie. Et pas seulement en cette affaire de mœurs, mais depuis quelques années, envers de très nombreuses personnalités de la vie publique et entre nous, de plus en plus d’ailleurs. Or « les loups ne se mangent pas entre eux ». Lorsque jeune stagiaire au journal le Matin, nous avions commis un article sur deux éléphants de la presse panafricaine, en l’occurrence, Béchir Ben Yahmed et Blaise-Pascal Talla, le directeur de publication de l’époque, l’écrivain Boubacar Boris Diop, nous a fait entrer dans son bureau pour nous apprendre ce précepte élémentaire dans toute corporation, aussi bien chez les médecins, les magistrats, les avocats, les notaires, les enseignants, les policiers que les boulangers.
Au demeurant, l’heure est venue de délibérer impitoyablement avec notre conscience professionnelle, d’évaluer sans complaisance notre traitement de l’actualité, y compris le feuilleton politico-judiciaire en cours et de garer brusquement notre puissante machine à broyer la vie des autres, afin de « photographier » la fumée nauséabonde qu’elle dégage. En vérité, ce n’est pas à la déontologie et à l’éthique de nous suivre, c’est à nous de suivre modestement les fondamentaux de ce métier [pourtant très noble à la base], appris à l’école ou acquis sur le terrain.
PS. Cheikh Yérim Seck est père de quatre enfants. Sa seconde épouse attend un événement heureux dans un contexte douloureux. La prison est faite pour méditer et s’amender. Et il a chèrement payé. Mlle Tall et famille n’oublieront jamais; mais il n’y a aucune douleur que le temps n’atténue. Pardonnez, bonnes gens, et surtout parce que nous sommes tous mendiants auprès de Dieu.
lesenegalais.net
CHEIKH DIALLO
Admirablement structuré, fort élégant, nettement brillant et [un peu trop] mondain, on le sentait heureux d’être célèbre et ravi d’être flatté. Il était au faîte de son prestige éditorial et se trouvait au sommet des sommets de son audience, lorsqu’il trébuchât scandaleusement sur la fille d’un magistrat, pieux et rigoureux. Une jeune étudiante pétulante et intelligente qui, depuis trois mois, poursuit, tranquillement, ses études en France. Aucune femme n’aime être prise d’assaut. C’est en oubliant cette règle de la stratégie d’approche que Cheikh Yérim se trouve, depuis trois mois, dans une cellule pour trois ans. Pourtant, ce gentleman n’est pas brutal. Son attrape-cœur avait seulement mal tourné.
Résidence médiatique. A présent, il tourne en rond à la prison du Camp pénal de Dakar. La faute à lui. Mais l’amplification et l’exagération, c’est nous. Ses journées sont notoirement blanches et ses nuits invariablement noires. Mais il est fort comme un roc et réconforte lui-même ses nombreux visiteurs. Levé aux aurores, il vit sa foi en l’Islam avec une érudition impeccable, tout en méditant sur la condition humaine. Sa cellule est une très modeste résidence d’écriture, à partir de laquelle se construit un nouveau Seck, habité par une nouvelle philosophie. Assurément, il ne sera plus le même homme et ne fera plus la même chose…
Ebriété médiatique. Il a mille fois raison de vouloir changer de profession et d’horizon. En vérité, dans la principauté journalistique, pris dans un état d’ébriété médiatique, nous tous avions, avec une violente sympathie, mitraillé, « rafalé », bombardé et fini par crucifier un de nos plus brillants confrères. Lorsqu’enfin, nous l’avons « accroché à un croc de boucher », le strip-tease a baissé ses rideaux… Mais pour combien de temps?
Parce que c’était excitant et jubilatoire pour la majeure partie des médias. Nous nous sommes comportés tels des chiens affamés devant une proie. Et pas seulement en cette affaire de mœurs, mais depuis quelques années, envers de très nombreuses personnalités de la vie publique et entre nous, de plus en plus d’ailleurs. Or « les loups ne se mangent pas entre eux ». Lorsque jeune stagiaire au journal le Matin, nous avions commis un article sur deux éléphants de la presse panafricaine, en l’occurrence, Béchir Ben Yahmed et Blaise-Pascal Talla, le directeur de publication de l’époque, l’écrivain Boubacar Boris Diop, nous a fait entrer dans son bureau pour nous apprendre ce précepte élémentaire dans toute corporation, aussi bien chez les médecins, les magistrats, les avocats, les notaires, les enseignants, les policiers que les boulangers.
Au demeurant, l’heure est venue de délibérer impitoyablement avec notre conscience professionnelle, d’évaluer sans complaisance notre traitement de l’actualité, y compris le feuilleton politico-judiciaire en cours et de garer brusquement notre puissante machine à broyer la vie des autres, afin de « photographier » la fumée nauséabonde qu’elle dégage. En vérité, ce n’est pas à la déontologie et à l’éthique de nous suivre, c’est à nous de suivre modestement les fondamentaux de ce métier [pourtant très noble à la base], appris à l’école ou acquis sur le terrain.
PS. Cheikh Yérim Seck est père de quatre enfants. Sa seconde épouse attend un événement heureux dans un contexte douloureux. La prison est faite pour méditer et s’amender. Et il a chèrement payé. Mlle Tall et famille n’oublieront jamais; mais il n’y a aucune douleur que le temps n’atténue. Pardonnez, bonnes gens, et surtout parce que nous sommes tous mendiants auprès de Dieu.
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CHEIKH DIALLO