Pour comprendre et corriger l’emprise de la Gambie sur le Sénégal, il faut s’interroger sur l’éclatante fascination des sénégalais pour l’actuel président gambien.
Dans quel pays pourrait-on voir un grand athlète rencontrer, dès le lendemain d’une victoire suivie par des millions de téléspectateurs, non seulement le président voisin mais un chef d’Etat coutumier d’exactions et d’intimidations envers le Sénégal ?
Dès le soir de son éclatante victoire sur Balla Gaye 2, Eumeu Sène, nouveau champion des arènes sénégalaises, s’est empressé de déclarer sur toutes les antennes sénégalaises avoir reçu un appel de Yaya Jammeh et décidé de s’y rendre très rapidement. Le surlendemain, on pouvait l’apercevoir sur le balcon de la résidence de Kanilaï tout sourire face à un président gambien dont les lunettes noires cachent mal la satisfaction de s’inviter à son aise et régulièrement dans le débat social sénégalais.
Même la langoureuse voix de Thione Seck, pour laquelle je confesse une tendresse particulière, a, non seulement chanté Yaya Jammeh, mais conseillé à tous de le laisser gouverner en paix ce pays dont la proximité avec le Sénégal est génératrice de constantes tensions socio-politiques. Et l’humoriste-vedette Kouthia est rentré dépité de Banjul, pleurant toutes les larmes de son corps parce que Yaya Jammeh ne lui aurait pas accordé ses largesses.
Des lutteurs aux artistes en passant par les chanteurs populaires sénégalais, le Voyage chez Yaya est devenu l’étape incontournable d’une carrière réussie dans le show-biz.
On aurait, cependant, tort de négliger l’influence grandissante que le président gambien exerce sur notre jeunesse et ainsi sur notre politique nationale et internationale.
D’abord parce que ces artistes et sportifs de haut niveau sont des véritables stars au Sénégal. Virtuoses du sport et de la musique, ils sont l’objet d’une admiration sans bornes de la jeunesse sénégalaise. De la lutte au Mbalax, c’est avec le cœur du Sénégal que le fantasque président gambien joue avec délectation depuis son arrivée au pouvoir le 22 juillet 1994. L’insérant systématiquement dans leurs chansons voire publicités, s’en vantant et rivalisant même sur les millions de Dalasi qui leur auraient été « généreusement » octroyés, ces stars sénégalais sont-elles dupes de la manipulation sournoise dont elles font l’objet ? L’argent et le succès justifient t-ils tout?
Ensuite parce que Yaya Jammeh devrait incarner tout ce que le Sénégal honni. Coutumier de frasques dénoncées par la communauté internationale mais aussi par des organisations de droits de l’homme africains, ce fils d’une diola de Kanilaï (village de Casamance), tient d’une main de fer un pays dont le destin est, malheureusement, inséparable de celui du Sénégal.
D’abord colonie portugaise puis anglaise, comme le Sénégal, ce plus petit pays d’Afrique, indépendant en 1965 a été présidé par Dawda Jawara que le Sénégal sauvera d’un coup d’Etat en 1981 en échange d’une confédération, la Sénégambie, dont il se retire huit ans plus tard.
Populiste, paranoïaque et dictatorial, Yaya Jammeh, en deux décennies, a fait de la Gambie une farce ambulante et du Sénégal son otage consentant.
La presse garrottée, la peine de mort non seulement rétablie mais soumise à ses humeurs, le mandat présidentiel à vie, l’anglais supprimé, les opposants et homosexuels « écrasés comme des vermines », le Sida guéri par ses admirables potions personnelles et la Casamançe captive, sont quelques-uns des hauts faits d’armes d’un chef d’Etat qui prospère sur un sentiment anticolonial dénué de rationalité.
Et les premiers à payer les pots cassés, ce sont les sénégalais. Casamançais ou du Nord, les voisins de la Gambie sont les premiers à souffrir des délires paranoïaques d’un chef d’Etat dont l’isolement peut conduire à pire. Que ce soit pour la traversée du fleuve Gambie, pour la dernière tentative de coup d’Etat dont Jammeh a soupçonné le Sénégal ou pour le soutien connu et reconnu de groupes de rebelles indépendantistes dans le conflit casamançais, le régime en place à Banjul ne cesse de jouer avec les nerfs des sénégalais.
Comment alors admettre ce qu’il faut bien appeler « corruption » de nos stars par Yaya Jammeh ? Pourquoi les autorités sénégalaises ne mettent pas le holà ? Comment peut -on continuer à laisser Yaya Jammeh s’installer tous les soirs dans nos salons et soirées et parader avec son boubou taché de sang ?
Il urge que les autorités sénégalaises au plus haut niveau, mais aussi celles de la lutte et celles de la culture, alertent et éduquent leurs membres sur les règles diplomatiques qui s’imposent lorsqu’on traverse une frontière ?
Karfa Sira Diallo (éditorialiste senenews)
Dans quel pays pourrait-on voir un grand athlète rencontrer, dès le lendemain d’une victoire suivie par des millions de téléspectateurs, non seulement le président voisin mais un chef d’Etat coutumier d’exactions et d’intimidations envers le Sénégal ?
Dès le soir de son éclatante victoire sur Balla Gaye 2, Eumeu Sène, nouveau champion des arènes sénégalaises, s’est empressé de déclarer sur toutes les antennes sénégalaises avoir reçu un appel de Yaya Jammeh et décidé de s’y rendre très rapidement. Le surlendemain, on pouvait l’apercevoir sur le balcon de la résidence de Kanilaï tout sourire face à un président gambien dont les lunettes noires cachent mal la satisfaction de s’inviter à son aise et régulièrement dans le débat social sénégalais.
Même la langoureuse voix de Thione Seck, pour laquelle je confesse une tendresse particulière, a, non seulement chanté Yaya Jammeh, mais conseillé à tous de le laisser gouverner en paix ce pays dont la proximité avec le Sénégal est génératrice de constantes tensions socio-politiques. Et l’humoriste-vedette Kouthia est rentré dépité de Banjul, pleurant toutes les larmes de son corps parce que Yaya Jammeh ne lui aurait pas accordé ses largesses.
Des lutteurs aux artistes en passant par les chanteurs populaires sénégalais, le Voyage chez Yaya est devenu l’étape incontournable d’une carrière réussie dans le show-biz.
On aurait, cependant, tort de négliger l’influence grandissante que le président gambien exerce sur notre jeunesse et ainsi sur notre politique nationale et internationale.
D’abord parce que ces artistes et sportifs de haut niveau sont des véritables stars au Sénégal. Virtuoses du sport et de la musique, ils sont l’objet d’une admiration sans bornes de la jeunesse sénégalaise. De la lutte au Mbalax, c’est avec le cœur du Sénégal que le fantasque président gambien joue avec délectation depuis son arrivée au pouvoir le 22 juillet 1994. L’insérant systématiquement dans leurs chansons voire publicités, s’en vantant et rivalisant même sur les millions de Dalasi qui leur auraient été « généreusement » octroyés, ces stars sénégalais sont-elles dupes de la manipulation sournoise dont elles font l’objet ? L’argent et le succès justifient t-ils tout?
Ensuite parce que Yaya Jammeh devrait incarner tout ce que le Sénégal honni. Coutumier de frasques dénoncées par la communauté internationale mais aussi par des organisations de droits de l’homme africains, ce fils d’une diola de Kanilaï (village de Casamance), tient d’une main de fer un pays dont le destin est, malheureusement, inséparable de celui du Sénégal.
D’abord colonie portugaise puis anglaise, comme le Sénégal, ce plus petit pays d’Afrique, indépendant en 1965 a été présidé par Dawda Jawara que le Sénégal sauvera d’un coup d’Etat en 1981 en échange d’une confédération, la Sénégambie, dont il se retire huit ans plus tard.
Populiste, paranoïaque et dictatorial, Yaya Jammeh, en deux décennies, a fait de la Gambie une farce ambulante et du Sénégal son otage consentant.
La presse garrottée, la peine de mort non seulement rétablie mais soumise à ses humeurs, le mandat présidentiel à vie, l’anglais supprimé, les opposants et homosexuels « écrasés comme des vermines », le Sida guéri par ses admirables potions personnelles et la Casamançe captive, sont quelques-uns des hauts faits d’armes d’un chef d’Etat qui prospère sur un sentiment anticolonial dénué de rationalité.
Et les premiers à payer les pots cassés, ce sont les sénégalais. Casamançais ou du Nord, les voisins de la Gambie sont les premiers à souffrir des délires paranoïaques d’un chef d’Etat dont l’isolement peut conduire à pire. Que ce soit pour la traversée du fleuve Gambie, pour la dernière tentative de coup d’Etat dont Jammeh a soupçonné le Sénégal ou pour le soutien connu et reconnu de groupes de rebelles indépendantistes dans le conflit casamançais, le régime en place à Banjul ne cesse de jouer avec les nerfs des sénégalais.
Comment alors admettre ce qu’il faut bien appeler « corruption » de nos stars par Yaya Jammeh ? Pourquoi les autorités sénégalaises ne mettent pas le holà ? Comment peut -on continuer à laisser Yaya Jammeh s’installer tous les soirs dans nos salons et soirées et parader avec son boubou taché de sang ?
Il urge que les autorités sénégalaises au plus haut niveau, mais aussi celles de la lutte et celles de la culture, alertent et éduquent leurs membres sur les règles diplomatiques qui s’imposent lorsqu’on traverse une frontière ?
Karfa Sira Diallo (éditorialiste senenews)