Au Cem Sébi Gare, niché dans la commune de Sébikhotane, tous les élèves ont été «évacués» d’urgence pour éviter une catastrophe. Des murs fissurés, des fers tordus, des blocs qui se détachent… En état de dégradation très avancée, l’infrastructure menace ruine.
Les débris de briques qui tombent régulièrement des murs ont fini par précipiter le déménagement des occupants. L’établissement d’excellence n’est plus un bon endroit pour accueillir ses occupants dont des candidats aux Bfem (Brevet de fin d’études moyennes).
« On était tout le temps stressés. Ce qui impacte sur nos études. On n’arrivait pas à se concentrer. Ce n’est pas une école.. Les résultats ont connu une baisse drastique. Beaucoup d’élèves étaient obligés de rater les cours. Nous avons eu peur », rappelle l’élève Ramatoulaye Ndione.
Les enseignants, eux, « jouaient » aux «guerriers», comme dit M. Savané, professeur de mathématiques dans ledit collège. « Les conditions ne permettaient pas d’enseigner la conscience tranquille», ditil. Lui et ses collègues étaient ainsi toujours aux aguets, près à s’éloigner des lieux en cas d’accident. Un petit bruit, même de loin, faisait sursauter tout le monde, présageant l’effondrement du bâtiment R+1. Ici, dès qu’on entendait le moindre bruit, tout le monde se préparait à un écroulement de l’édifice tout entier, à tout le moins d’un pan du mur.
« On avait peur même si on essayait de tout faire pour terminer l’année, mais dans des conditions très risquées», a expliqué notre interlocuteur. Mais tout est bien qui finit bien. Aujourd’hui, les enseignants pourront dispenser tranquillement les cours
Cependant, l’établissement risque de perdre l’équipement neuf qui est toujours à l’intérieur. Un équipement que personne ne songe à récupérer. Difficile d’accéder dans certaines classes de peur d’y laisser sa vie. Les dalles et les murs peuvent, en une fraction de seconde, s’écrouler. Certains ouvrages comme les établissements scolaires, comme dit le président du conseil départemental de Rufisque, doivent répondre à des normes.
« On a un passage pour faire entrer ou sortir le matériel. C’est un matériel neuf valant plusieurs millions à sauver d’urgence pour être mis dans un endroit sécurisé afin de pouvoir être réutilisé car l’école peut s’écrouler à tout moment. D’ailleurs, l’hivernage approche à grand pas. Il suffit qu’il y ait un orage pour que le vent fasse tomber le bâtiment. Si des gens s’y trouvent à ce moment-là, ce sera la catastrophe. Il faut des solutions avant qu’il ne soit trop tard », plaide Pape Waly Diouf.
Bref, au collège d’enseignement moyen de Sébi Gare, d’une capacité d’accueil de 600 élèves, les enseignements-apprentissages étaient dispensés dans des conditions très risquées. Et pourtant, cet établissement n’a été réceptionné qu’il y a six ans. Les travaux avaient démarré en 2016 et l’école livrée en 2018. Hélas, au bout de deux ans de fonctionnement seulement, l’état de l’établissement a commencé à inquiéter élèves et professeurs.
Sa dégradation a commencé en 2020, d’après le président du comité de pilotage dudit Cem, Habibou Dieng. Il confie que l’Association des parents d’élèves avait fait à l’époque toutes les démarches administratives (Ia, Ief, sous-préfecture comme gouvernance) nécessaires afin d’alerter, mais sans recevoir de suite favorable. «En tant que président de comité de pilotage, on est allé voir le maire.
Avec le préfet et le commandant de brigade, on a tenu une réunion. La première proposition, c’était de déloger les élèves des classes en état de dégradation très avancée. C’est par la suite qu’on a loué une école privée qui se trouve à côté, en raison de 250 000 francs par mois payés par la municipalité. C’était du temps du maire Abdoulaye Lô qui a pu payer les 750 000 francs. Soit trois mois de location.
Malheureusement, il y a eu les élections, et il a été remplacé par un nouveau maire. Du coup, le comité était obligé de prendre lui-même en charge la location. C’est ainsi qu’on a payé pour les mois d’avril et de mai», confie notre interlocuteur qui voudrait savoir quel sort va être réservé à ces élèves particulièrement ceux en classe d’examen.
Les professeurs et leurs élèves de même que l’administration de l’école n’étaient plus en sécurité dans cette école construite par une entreprise sénégalaise à l’enseigne de KFE (Kounta Fall entreprise), conçue par le cabinet architectural dirigé par Pathé Gaye et accompagné par l’Agétip qui est le maitre d’ouvrage, d’après Habib Dieng.
Ayant coûté environ 500 millions de francs, le Cem Sébi gare fait partie des huit Cem à vocation d’excellence au niveau national. Un autre, du même type architectural, situé pas très loin et se trouvant dans le village de Dougar, tient encore.
Est-ce une défaillance dans la construction ? A-t-il été bâti sur un mauvais sol ? En tous cas, la rapide dégradation du Cem de Sébi Gare ne cesse d’intriguer. D’autant que «les autres établissements ciblés ont été construits avec un budget plus modeste que l’enveloppe allouée pour la construction du Cem Sébi gare», confie encore M. Habib Dieng.
L’enveloppe de 500 millions va ainsi partir en fumée. «En faisant ce genre de construction qui accueille tous les jours du monde, on doit faire une étude sérieuse, surtout du sol. Un investissement de 500 millions risque de partir comme ça en fumée. C’est inadmissible ! Cette construction était de très mauvaise qualité ! » éructe-t-il.
Mais le grand problème, de l’avis de Malick Traoré, président de la commission Education au niveau de la Commune de Sébikotane, c’est le choix des sites devant abriter certaines infrastructures. «Investir et comment investir, c’est la mission régalienne de l’Etat.
Mais où investir ? C’est parfois là où le bât blesse.
Vu l’état du sol ou est construit le Cem de Sébi Gare, si l’étude avait été sérieusement menée, l’école n’allait jamais y être installée. Ce n’est qu’en 2016 que les travaux de construction ont été entamés pour terminer puis livré en 2018. Mais aujourd’hui, la situation de l’école pose le problème du montant dégagé. 500 millions, c’est une grosse somme d’argent. Tout le monde se demande où est passé l’argent?
Après, seulement quatre ans d’utilisation, tout est presque à terre. C’est un sol argileux. Il faudrait mettre les moyens. Les autorités étatiques, qui ont investi dans cette école, doivent réagir dare-dare. Si on demande à la population de céder des terres pour un lycée, elle va le faire sans problème», a-t-il rassuré tout en demandant de situer les responsabilités.
«Par A ou B, il doit y avoir des sanctions, parce que c’est du sabotage. Si une infrastructures qui devait tenir au moins pendant 50 ans menace ruine en moins de cinq, il y a un scandale et l’Etat doit réagir», estime Malick Traoré.
Comme le dit avec beaucoup de logique l’élève Soumaya Ciss, «si les fondements étaient bons, l’école n’aurait pas toutes ces fissures’’. Evidemment !
Le Témoin
Les débris de briques qui tombent régulièrement des murs ont fini par précipiter le déménagement des occupants. L’établissement d’excellence n’est plus un bon endroit pour accueillir ses occupants dont des candidats aux Bfem (Brevet de fin d’études moyennes).
« On était tout le temps stressés. Ce qui impacte sur nos études. On n’arrivait pas à se concentrer. Ce n’est pas une école.. Les résultats ont connu une baisse drastique. Beaucoup d’élèves étaient obligés de rater les cours. Nous avons eu peur », rappelle l’élève Ramatoulaye Ndione.
Les enseignants, eux, « jouaient » aux «guerriers», comme dit M. Savané, professeur de mathématiques dans ledit collège. « Les conditions ne permettaient pas d’enseigner la conscience tranquille», ditil. Lui et ses collègues étaient ainsi toujours aux aguets, près à s’éloigner des lieux en cas d’accident. Un petit bruit, même de loin, faisait sursauter tout le monde, présageant l’effondrement du bâtiment R+1. Ici, dès qu’on entendait le moindre bruit, tout le monde se préparait à un écroulement de l’édifice tout entier, à tout le moins d’un pan du mur.
« On avait peur même si on essayait de tout faire pour terminer l’année, mais dans des conditions très risquées», a expliqué notre interlocuteur. Mais tout est bien qui finit bien. Aujourd’hui, les enseignants pourront dispenser tranquillement les cours
Cependant, l’établissement risque de perdre l’équipement neuf qui est toujours à l’intérieur. Un équipement que personne ne songe à récupérer. Difficile d’accéder dans certaines classes de peur d’y laisser sa vie. Les dalles et les murs peuvent, en une fraction de seconde, s’écrouler. Certains ouvrages comme les établissements scolaires, comme dit le président du conseil départemental de Rufisque, doivent répondre à des normes.
« On a un passage pour faire entrer ou sortir le matériel. C’est un matériel neuf valant plusieurs millions à sauver d’urgence pour être mis dans un endroit sécurisé afin de pouvoir être réutilisé car l’école peut s’écrouler à tout moment. D’ailleurs, l’hivernage approche à grand pas. Il suffit qu’il y ait un orage pour que le vent fasse tomber le bâtiment. Si des gens s’y trouvent à ce moment-là, ce sera la catastrophe. Il faut des solutions avant qu’il ne soit trop tard », plaide Pape Waly Diouf.
Bref, au collège d’enseignement moyen de Sébi Gare, d’une capacité d’accueil de 600 élèves, les enseignements-apprentissages étaient dispensés dans des conditions très risquées. Et pourtant, cet établissement n’a été réceptionné qu’il y a six ans. Les travaux avaient démarré en 2016 et l’école livrée en 2018. Hélas, au bout de deux ans de fonctionnement seulement, l’état de l’établissement a commencé à inquiéter élèves et professeurs.
Sa dégradation a commencé en 2020, d’après le président du comité de pilotage dudit Cem, Habibou Dieng. Il confie que l’Association des parents d’élèves avait fait à l’époque toutes les démarches administratives (Ia, Ief, sous-préfecture comme gouvernance) nécessaires afin d’alerter, mais sans recevoir de suite favorable. «En tant que président de comité de pilotage, on est allé voir le maire.
Avec le préfet et le commandant de brigade, on a tenu une réunion. La première proposition, c’était de déloger les élèves des classes en état de dégradation très avancée. C’est par la suite qu’on a loué une école privée qui se trouve à côté, en raison de 250 000 francs par mois payés par la municipalité. C’était du temps du maire Abdoulaye Lô qui a pu payer les 750 000 francs. Soit trois mois de location.
Malheureusement, il y a eu les élections, et il a été remplacé par un nouveau maire. Du coup, le comité était obligé de prendre lui-même en charge la location. C’est ainsi qu’on a payé pour les mois d’avril et de mai», confie notre interlocuteur qui voudrait savoir quel sort va être réservé à ces élèves particulièrement ceux en classe d’examen.
Les professeurs et leurs élèves de même que l’administration de l’école n’étaient plus en sécurité dans cette école construite par une entreprise sénégalaise à l’enseigne de KFE (Kounta Fall entreprise), conçue par le cabinet architectural dirigé par Pathé Gaye et accompagné par l’Agétip qui est le maitre d’ouvrage, d’après Habib Dieng.
Ayant coûté environ 500 millions de francs, le Cem Sébi gare fait partie des huit Cem à vocation d’excellence au niveau national. Un autre, du même type architectural, situé pas très loin et se trouvant dans le village de Dougar, tient encore.
Est-ce une défaillance dans la construction ? A-t-il été bâti sur un mauvais sol ? En tous cas, la rapide dégradation du Cem de Sébi Gare ne cesse d’intriguer. D’autant que «les autres établissements ciblés ont été construits avec un budget plus modeste que l’enveloppe allouée pour la construction du Cem Sébi gare», confie encore M. Habib Dieng.
L’enveloppe de 500 millions va ainsi partir en fumée. «En faisant ce genre de construction qui accueille tous les jours du monde, on doit faire une étude sérieuse, surtout du sol. Un investissement de 500 millions risque de partir comme ça en fumée. C’est inadmissible ! Cette construction était de très mauvaise qualité ! » éructe-t-il.
Mais le grand problème, de l’avis de Malick Traoré, président de la commission Education au niveau de la Commune de Sébikotane, c’est le choix des sites devant abriter certaines infrastructures. «Investir et comment investir, c’est la mission régalienne de l’Etat.
Mais où investir ? C’est parfois là où le bât blesse.
Vu l’état du sol ou est construit le Cem de Sébi Gare, si l’étude avait été sérieusement menée, l’école n’allait jamais y être installée. Ce n’est qu’en 2016 que les travaux de construction ont été entamés pour terminer puis livré en 2018. Mais aujourd’hui, la situation de l’école pose le problème du montant dégagé. 500 millions, c’est une grosse somme d’argent. Tout le monde se demande où est passé l’argent?
Après, seulement quatre ans d’utilisation, tout est presque à terre. C’est un sol argileux. Il faudrait mettre les moyens. Les autorités étatiques, qui ont investi dans cette école, doivent réagir dare-dare. Si on demande à la population de céder des terres pour un lycée, elle va le faire sans problème», a-t-il rassuré tout en demandant de situer les responsabilités.
«Par A ou B, il doit y avoir des sanctions, parce que c’est du sabotage. Si une infrastructures qui devait tenir au moins pendant 50 ans menace ruine en moins de cinq, il y a un scandale et l’Etat doit réagir», estime Malick Traoré.
Comme le dit avec beaucoup de logique l’élève Soumaya Ciss, «si les fondements étaient bons, l’école n’aurait pas toutes ces fissures’’. Evidemment !
Le Témoin