Fabienne Kabou, condamnée pour le meurtre de sa fille qu’elle avait abandonnée sur une plage à marée haute, est jugée de nouveau en appel. Au démarrage du procès, hier, elle a plaidé non coupable, affirmant avoir été sous l’emprise d’une force maléfique contre laquelle elle a lutté en vain. Risquant cette fois-ci la réclusion criminelle à perpétuité, ses chances de se tirer d’affaire résident dans le degré de sa responsabilité pénale et sa culpabilité, car des psychiatres l’ont décrite comme une malade mentale. D’ailleurs, au premier procès, l’altération du discernement avait été retenue.
Condamnée en première instance, en 2016, à 20 ans de prison pour le meurtre de sa fille de 15 mois (abandonnée, à marée montante, sur une plage de Berk, en novembre 2013), la Sénégalaise Fabienne Kabou est de nouveau jugée en appel en France. Un procès qui a démarré hier, avec l’accusée qui a persisté dans le déni, soulignant avoir été possédée par une force maléfique. «Quelque chose, ou quelqu’un, a agi en moi pour assassiner ma fille. Un peu comme si quelqu’un avait commandité sa mort, par mes mains. Quelqu’un a assassiné ma fille avec mes mains», a-t-elle déclaré, après avoir plaidé «non coupable».
Les larmes aux yeux, Fabienne Kabou a souligné que, dès la première interpellation, dès le premier interrogatoire, elle avait expliqué aux enquêteurs, «être guidée par une énergie malveillante». Et de regretter que ces déclarations «n’aient pas été suffisamment exploitées». A l’en croire, cette force invisible l’a habitée depuis la naissance et qu’elle a lutté avec elle jusqu’à l’épuisement.
Elle évoque la sorcellerie pour justifier son crime, les psychiatres et son avocat la décrivent comme une malade mentale
L’altération du discernement ayant été retenue par le psychiatre Maroussia Wilquin, lors de son jugement en première instance, La responsabilité pénale et le degré de culpabilité de Fabienne Kabou, jugée «très intelligente» et «déroutante», sera au cœur de ce nouveau procès en appel. Pour Maroussia Wilquin, Fabienne Kabou est «malade mentale dans une très large mesure et souffre de délires chroniques et paranoïaques». Elle est appuyée par son collègue Daniel Zagury, pour qui Fabienne «n’est pas une petite menteuse», mais plutôt «une grande délirante».
Mais leur collègue Louis Roure, rame à contre-courant, affirmant que l’accusée ne souffre pas de «pathologie mentale». Pour lui, elle est victime d’une «adhésion à des croyances se situant dans un registre de la sorcellerie, ayant créé chez elle un trouble psychique».
Au premier procès, elle avait raconté comment elle était allée déposer sa fille, alors endormie, sur une plage de Berck, alors que la marée était montante. «Elle ne bouge pas, elle est silencieuse, alors je rebrousse chemin en courant», avait-elle raconté, évoquant la «sorcellerie». Mais hier, son avocat, Me Fabienne Roy-Nansion avance qu’elle «ne croit pas fondamentalement» à la sorcellerie. Seulement, «elle cherche l’explication à son geste dans ses racines culturelles, parce qu’elle ne veut pas se reconnaître malade mentale»
Triste fin pour une compatriote qui avait rallié la France après son Bac
Native de Dakar, où elle a grandi dans un milieu aisé, affectueux et où la religion catholique occupe une place centrale, Fabienne Kabou a rejoint la France après avoir obtenu son Bac. A Paris, elle a réussi à valider un Deug de philosophie. Mais elle a commencé à sombrer en 2011, après la naissance de sa fille. «Elle vit en vase clos, dans une solitude profonde avec le père de l’enfant, Michel Lafon, de trente ans son aîné. Elle a dissimulé sa grossesse puis son nouveau-né à ses proches en accouchant seule chez elle», relève l’enquête de personnalité. Mais son compagnon parle d’une «mère magnifique, qui s’est parfaitement occupée d’Adélaïde». Pour la présidente de la Cour Anne Cochaud-Doutreuwe, Fabienne Kabou «semblait avoir une vie en or au Sénégal et une fois arrivée en France, sa vie semble faite de ruptures et de solitude». Une remarque que conforte l’intéressée. «J’avais des problèmes et je préférais les circonscrire à ma propre personne, c’est pour ça que je me suis éloignée des gens. Je me sentais en danger», soutient Kabou.
Jotay.net