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DOSSIER SUR LE COTON : BACHIR DIOP, DG SODEFITEX BACHIR DIOP, DG SODEFITEX


Rédigé le Dimanche 5 Mai 2013 à 04:32 | Lu 1197 fois | 0 commentaire(s)



« Le coton est dans le top 10 des exportations au Sénégal », se réjouit Bachir Diop, le Directeur général de la Sodefitex, la société partenaire des cotonculteurs sénégalais. Après une crise au milieu des années 2000 qui a failli tuer le secteur, l’embellie s’est annoncée, avec notamment des revenus conséquents pour les acteurs de cette filière. Bachir Diop, Directeur général de la Sodefitex, raconte la saga du coton ces 15 dernières années.


DOSSIER SUR LE COTON : BACHIR DIOP, DG SODEFITEX BACHIR DIOP, DG SODEFITEX

SATISFECIT

Le coton représente en 2012 1, 4% du PIB du Sénégal, alors que l’agriculture pèse globalement pour 7, 4% du PIB. Le coton fait partie du « top 10 Â» des produits d’exportation de notre pays. En faisant le bilan de la campagne cotonnière 2012/2013, Bachir Diop le Directeur général de la Sodefitex, marque sa satisfaction. La filière cotonnière poursuit sa relance, relève-t-il. Ainsi, 32 248 tonnes de coton graine ont été collectées, soit une croissance de 27% de la production par rapport à la campagne 2011/2012 et de 23% par rapport à la moyenne des cinq campagnes précédentes. Le rendement agronomique moyen obtenu est de 957 kg/ha, supérieur de 12, 06% au rendement moyen des cinq dernières années. Cette production a permis de distribuer à 41 084 cotonculteurs appartenant à 23 855 exploitations agricoles familiales 5 212 110 603 FCFA de revenus, ce qui correspond à un revenu net à l’ha de 150 000 FCFA (après retrait du crédit agricole). Ces 32 248 tonnes de coton graine ont permis de produire dans les usines d’égrenage de Kahone, Kédougou, Tambacounda, Vélingara et Kolda, quelque 13 641 tonnes de fibre soigneusement conditionnées en 62 148 balles en tissu de coton, avec un rendement à l’égrenage de 42, 29%. Elles ont aussi donné au terme de l’égrenage 17 530 tonnes de graines de coton, dont la plus grande partie est un excellent aliment du bétail, riche en protéines et en énergie, qui contribue grandement à la valeur ajoutée du secteur de l’élevage sénégalais. Selon Bachir Diop, le Directeur général de la Sodefitex, une valeur de 4 177 000 000 FCFA d’intrants agricoles a été utilisée avec une subvention de 1 milliard de FCFA de l’Etat (soit 23, 94%). La subvention par l’Etat des intrants a permis de diminuer le coût du paquet technique à l’hectare, qui est passé de 101 900 FCFA en 2011/2012 à 96 395 FCFA en 2012/2013 (il aurait été de 119 470 FCFA sans subvention). L’Etat a, en outre, consenti un appui de 752 millions pour maintenir le prix au producteur à 255 FCFA/kg, malgré la baisse du cours mondial qui devait se traduire par une baisse du prix au producteur de 25 FCFA par kg, ce qui aurait brisé la dynamique de relance. Les 41 000 cotonculteurs ont apprécié à sa juste valeur cet appui de l’Etat qui a largement contribué à ces performances.

Mais au-delà des chiffres, la filière cotonnière fait vivre directement près de 250 000 personnes. Cinq usines d’égrenage sont les poumons économiques des villes de Kahone, Kédougou, Tambacounda, Vélingara et Kolda et emploient 270 permanents et près de 400 saisonniers. C’est une filière structurante qui, grâce à la mise en relation des agriculteurs avec le marché mondial, à leur accès au crédit agricole, constitue un facteur essentiel de modernisation des exploitations agricoles familiales. Elle a permis, grâce à l’alphabétisation et la formation professionnelle en langues nationales, la création de nouveaux métiers ruraux. Elle a un effet d’entraînement sur les céréales et l’élevage au sein des Exploitations agricoles familiales.

Le coton, une filière qui renaît

Il y a dix ans, la SODEFITEX et, de façon plus générale la filière cotonnière sénégalaise, sortaient de la plus grave crise de leur histoire. En 1998/99, l’invasion extrêmement virulente et irrésistible de la « mouche blanche Â», un parasite auparavant absent du faciès parasitaire sénégalais, a littéralement mis à genoux la filière cotonnière qui a enregistré les pires résultats techniques depuis la naissance de la SODEFITEX : 11 628 tonnes de coton graine, 240 kg de coton graine/ha ; 14 616 tonnes de coton graine et 682 kg de coton graine/ha l’année suivante. L’entreprise était littéralement en cessation de paiement. « Si ce n’était une entreprise publique, elle aurait été contrainte de déposer le bilan Â», révèle le Directeur général de la Sodefitex. La société avait perdu la confiance des cotonculteurs, des salariés, de ses clients et fournisseurs. C’est alors, qu’à la faveur de l’alternance politique de l’an 2000, les nouvelles autorités décident de changer le leadership de l’entreprise. Pour la première fois la SODEFITEX, autrefois dirigée par des hauts fonctionnaires extérieurs à l’entreprise, allait promouvoir un leadership issu de son personnel d’encadrement. Un plan d’urgence a été élaboré pour rétablir les fondamentaux : compression des charges non productives, concentration des ressources vers la relance de la production, approfondissement du partenariat avec les producteurs de coton, établissement d’un dialogue social avec les salariés et organisations syndicales et adoption d’un pacte social pour la relance, présence soutenue du management sur le terrain aux côtés des agriculteurs. Ce plan d’urgence pour l’année 2000/01 a permis d’obtenir une production de 20 400 tonnes, soit une progression de 39, 6%. Il a surtout permis de rétablir la confiance des producteurs, des salariés, des clients, des fournisseurs et des banques. Dès lors, les bases étaient posées pour le développement de la filière. Un plan stratégique consensuel a été élaboré entre la SODEFITEX et la Fédération Nationale des Professionnels du Coton (FNPC) autour duquel se sont mobilisés tous les acteurs de la filière. Ce plan stratégique intitulé « Programme de redressement et de relance de la filière coton au Sénégal Â» a été traduit en accord cadre Etat/SODEFITEX/FNPC, signé en juillet 2001 et visant la stabilisation de la production autour de 35 000 tonnes, puis la progression vers les 65 000 tonnes, saturation du potentiel industriel installé. La mise en oeuvre de ce plan stratégique a donné des résultats inespérés : dès 2003/2004, soit seulement deux ans après la signature de l’accord cadre, le record de production cotonnière sénégalaise est battu avec 51 640 tonnes en 2003/04, les rendements s’établissent au dessus de 1,1 tonne à l’hectare. Un nouveau record est battu en 2006/07 : 52 422 tonnes avec 1,2 tonne à l’hectare. C’est alors que les effets cumulés de la crise mondiale de la filière coton se traduisant par l’effondrement des cours et sa conséquence directe, la baisse du prix au producteur qui passe de 195 FCFA à 180 FCFA le kg de 1er choix, d’une pluviométrie calamiteuse et de la flambée du prix des intrants, ont entraîné la filière dans de graves difficultés. La campagne 2007/08 a été caractérisée par une pluviométrie déficitaire qui s’est installée très tardivement et qui, par la suite, a connu un arrêt brutal au 20 septembre 2007. Ce retard a occasionné un fort taux de semis tardifs, qui n’a pas permis aux cultures de boucler correctement leur cycle de production. « L’application mécanique et sans discernement de la caution solidaire a aspiré les ressources des producteurs performants ayant réalisé des rendements convenables au prix de gros efforts, malgré des conditions climatiques particulièrement défavorables Â», souligne Bachir Diop. Les cotonculteurs les plus performants se sont retrouvés, comme la majorité, sans revenus dans un contexte de déficit céréalier aigu. La campagne suivante, s’est installée une crise alimentaire généralisée qui a favorisé le développement de stratégies de survie, fondées sur de mauvaises pratiques  : détournements et trafic massifs d’intrants agricoles subventionnés. Ces pratiques ont accéléré la dégradation de la situation et l’enfoncement des exploitations cotonnières dans la spirale du surendettement. Ce même processus a frappé tous les pays africains, la production cotonnière africaine sapée par les affres de la crise, ayant baissé de moitié. Ceci a eu pour conséquence l’abandon massif de la culture cotonnière. La production chute : 36 700 tonnes en 2007/08, 26 200 tonnes en 2008/09, 18 500 tonnes en 2009/10. Dans le même temps, le nombre de producteurs de coton est passé de 60 429 à 33 604. En 2010, les acteurs de la filière élaborent un plan de relance et la production reprend une courbe ascendante soutenue par la remontée des cours mondiaux du coton, qui a permis d’augmenter le prix au producteur : 205 FCFA en 2010/11 (le seuil psychologique, véritable « inaccessible étoile Â» des 200 FCFA/kg, est franchi pour la première fois) et 255 FCFA en 2011/2012.

LE CASSE-TETE DU SURENDETTEMENT

Le secteur cotonnier est un secteur extrêmement concurrentiel confronté à une concurrence très rude et souvent déloyale sur le marché international. Il faut, sous pluie, entre 800 et 1 200 mm, pour que le cotonnier satisfasse correctement ses besoins en eau, ce qui limite l’aire de prédilection de cette plante dans notre pays. Le Sénégal, ne peut pas être un grand pays cotonnier en termes de quantité. La zone cotonnière du Mali dépasse la superficie du Sénégal tout entier, celle du Burkina en représente les trois quarts. C’est pour cela que la stratégie mise en oeuvre est de faire du coton sénégalais une référence mondiale pour la qualité. C’est ce qui explique que, depuis 8 ans, la SODEFITEX soit certifiée ISO 9001 et qu’elle soit bien engagée dans la conquête des certifications ISO 14 000 et OHSAS (environnement et sécurité). Le coton sénégalais est mondialement réputé pour sa qualité. Mais la qualité est une bataille sans fin, il faut sans cesse sur le métier remettre son ouvrage. Ceci nécessite un très important travail de formation et d’information des salariés et des agriculteurs sur les exigences du marché pour être en mesure de toujours mieux satisfaire les clients. La SODEFITEX consent de gigantesques efforts en ce sens, en alphabétisant en Pulaar, Mandinka et Wolof près de 60 000 agricultrices et agriculteurs. Sur la base des acquis de l’alphabétisation, la formation professionnelle aux nouveaux métiers ruraux émergents est assurée. Il s’agit des relais techniques en production cotonnière, des gestionnaires de groupements de producteurs, des moniteurs d’alphabétisation, etc. Ainsi s’est constitué un système original qui articule le dispositif d’ingénieurs et techniciens de la SODEFITEX, avec un réseau de plusieurs milliers de techniciens paysans dont les services sont rémunérés par des prélèvements sur la production. Ce dispositif utilise pour l’immatriculation individuelle des producteurs et des parcelles de cultures d’outils moderne (tablettes PC, GPS, système d’information géographique). Au-delà de l’USAID à travers le WACIP, d’autres bailleurs de fonds sont sollicités, car les besoins sont immenses et hors de portée de l’entreprise.

Le problème majeur qui doit être résolu pour que la filière parachève son redressement et atteigne la saturation du potentiel industriel installé (65 000 tonnes) voire plus, c’est la résolution de l’équation du surendettement des cotonculteurs. « Les cotonculteurs ont toujours historiquement assuré un taux de remboursement de 96% à 98% Â», indique Bachir Diop. « Les arriérés s’accumulent et en valeur absolue, deviennent de plus en plus insupportables. Ainsi, à partir de 2008/09, le taux de remboursement commence à baisser du fait des arriérés qui s’accumulent et des mauvais résultats des campagnes agricoles Â».

Il s’agit à présent d’inverser cette tendance, de reconquérir les producteurs laissés sur le quai et de restaurer la productivité qui plaçait le Sénégal parmi les meilleurs rendements de l’Afrique de l’Ouest et du Centre et les plus hauts revenus à l’hectare, pour les cotonculteurs. Toutes les dispositions sont prises pour qu’à l’avenir on n’ait plus de crise de surendettement. Il y a aussi la nécessité de la poursuite d’une politique intelligente et bien ciblée de subvention des intrants et du matériel agricole. Malgré tout, les cotonculteurs sont les agriculteurs les mieux lotis du pays en terme d’accès au crédit. Chaque année ils accèdent au crédit, sans apport personnel, jusqu’à près de 3 milliards de crédit intrants et environ 2 à 300 millions de crédit matériel agricole. Ils ont régulièrement remboursé près de 36 milliards de crédit agricole entre 2003 et nos jours. La crise a eu pour effet des arriérés de 1,8 milliards que les cotonculteurs essaient tant bien que mal de rembourser en plus de l’exigible annuel, grâce à un moratoire consenti par la CNCAS. La question des Organismes Génétiquement Modifiés est au coeur des préoccupations de certains agriculteurs. Bachir Diop indique à ce propos : « Nous n’avons pas de position idéologique ni de principe concernant les OGM.

Les OGM sont comme toutes les innovations technologiques des outils, des moyens. Notre objectif est de produire un coton d’excellente qualité, apprécié des clients, rémunérant correctement les producteurs et permettant une bonne rentabilité de l’entreprise. Actuellement deux pays africains utilisent du coton génétiquement modifié, le Burkina Faso et l’Afrique du Sud. Nous sommes très attentifs aux expériences de ces pays et attendons que la législation sénégalaise autorise les OGM Â». Le coton a un avenir radieux dans le tiers sud du Sénégal, selon le DG de la Sodefitex, qui annonce que les acteurs de la filière vont travailler, d’ici le mois de juin, à l’élaboration du plan stratégique « Sodefitex horizon 2020 Â». Ils proposeront à l’Etat la signature d’un contrat de performance. Des négociations avec les partenaires sociaux de nouveaux accords collectifs d’établissement, sont également en vue. Avec comme finalité l’objectif de consolider le « Business Model Â» qui est un partenariat contractuel « gagnant-gagnant Â». Il est fondé sur la confiance et la solidarité pour un partage équitable de la richesse créée entre des milliers d’exploitations agricoles familiales polyculture élevage, des organisations professionnelles agricoles démocratiques et transparentes et une agro-industrie citoyenne rentable, enracinée dans la bonne gouvernance, innovatrice et à la pointe des exigences sociétales contemporaines.

Le coton au Sénégal est l’exemple d’une diversification réussie. Il y a 49 ans, l’Etat du Sénégal désirant sortir de la tyrannie de la monoculture arachidière, a commencé les premiers essais d’introduction de la culture cotonnière industrielle. En 2014, le Sénégal fêtera les 50 ans de l’introduction du coton sur son territoire et les 40 ans de la Sodefitex.

Pape Amadou FALL



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