Lors de la demi-finale de la Ligue des Champions, des supporters du PSG ont célébré la victoire de leur club au mépris des gestes barrières. Le match de dimanche fait craindre le pire aux médecins.
Embrassades, échanges survoltés sans masque ni distanciation sociale… La qualification du Paris-Saint-Germain en finale de la Ligue des Champions a donné lieu à des scènes de liesse, souvent au détriment des gestes barrières. Alors que les contaminations au Covid-19 progressent en France, le dispositif à mettre en place pour la finale de la compétition, dimanche, pose désormais question.
L'adjointe à la santé à la mairie de Paris, Anne Souyris, a ainsi demandé à la préfecture d’interdire ce jour-là les rassemblements de plus de dix personnes et de fermer les Champs-Elysées ou le Champ-de-Mars pour minimiser les risques que les Parisiens oublient les gestes barrières dans l’euphorie.
"Les gens peuvent être à leur fenêtre, avec des drapeaux s'ils veulent, a-t-elle réclamé mercredi sur BFMTV. Ils peuvent se réunir à quelques uns dans les cafés (...). Mais on ne doit pas être sur l'espace public à des milliers."
Célébrer "en responsabilité"
Au gouvernement, les rappels à l’ordre se font également pressants. La ministre déléguée aux Sports Roxana Maracineanu incite les supporters, "qui savent très bien que la première cause de contagion du virus sont les rassemblements", à prendre leurs responsabilités.
"J’en appelle à leur civisme et à leur capacité à s’adapter en célébrant différemment. Le sport doit rester une fête, mais en responsabilité", a-t-elle déclaré sur notre antenne mercredi.
Dans ce contexte, les images du match opposant l’Atalanta Bergame au club espagnol de Valence au mois de mars ressurgissent. "On sait d’un point de vue statistique que ce match de foot a fait flamber le nombre de cas dans toute la ville italienne", affirme sur BFMTV Jean-Michel Constantin, chef de service anesthésie-réanimation à la Pitié-Salpêtrière à Paris.
"Sur le plan médical, il faut se considérer comme contaminé ou à très haut risque jusqu’à preuve du contraire. Donc n’allez pas amplifier le cluster derrière", implore le médecin.
Pas de consensus
Mais les rassemblements de supporters représentent-ils vraiment un risque de cluster à grande échelle? Selon Anne Sénéquier, chercheuse et co-directrice de l'Observatoire de la Santé à l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), estime elle aussi qu'"on ne peut pas dire que les rassemblements en extérieur sont sans risque".
Elle affirme ainsi qu’aux États-Unis, "une augmentation drastique du nombre de cas de Covid-19" a été observée à partir de "mai dernier après la mort de George Floyd. Le mouvement Black Live Matter s’est développé, avec de nombreuses manifestations et rassemblements". Le lien entre ces manifestations et le coronavirus est cependant contesté par de nombreux experts en santé publique, notent les médias anglosaxons comme le Guardian et le Washington Post, et se voit également contredit par les statistiques: dans certains États où les mobilisations ont été fortes, le nombre de cas a même baissé dans les semaines qui ont suivies.
Pour le médecin Jérôme Marty, les contaminations en chaîne lors de grands événements ne sont ainsi pas une fatalité, mettant en avant de récents événements qui avaient aussi suscité la polémique en France pour le manque de respect des gestes barrières.
"Les exemples qu’on a vus précédemment, comme la Fête de la musique ou le concert de The Avener à Nice, n’ont pas donné lieu à des clusters car ils se sont passés en extérieur. Or, on sait que cette pathologie est une pathologie des lieux clos", avance-t-il.
Favoriser le test en cas de doute
Et d’ajouter: "C’est très difficile quand il y a un tel exploit sportif de dire aux gens de rester chez eux et de ne pas faire la fête. En tant que médecin, on cherche à minorer le risque, pas à l’éradiquer, ce qui serait une pure perte."
Comment, dans ces conditions, apprendre à vivre et festoyer avec le virus? Pour cela, "il faut prendre des précautions, ne pas se toucher, mettre le masque quand on est à moins d’un mètre, se laver les mains. Si on prend ces précautions, il n’y a aucune raison qu’un cluster naisse de ces réunions", développe le Pr Bruno Megarbane, chef du service réanimation de l’hôpital Lariboisière à Paris.
"L’idée n’est pas d’arriver à des interdictions des rassemblements de supporters mais de faire ça dans le respect des gestes barrières", poursuit le médecin. Et si ces consignes ne sont pas suivies, pour éviter les contaminations en chaîne, la Direction générale de la santé recommande à "chaque personne qui n’a pas respecté les mesures barrières de se faire dépister 5 à 7 jours après l’évènement".