UCAD : A la découverte du Centre de formation en Génomique appliquée et de Surveillance sanitaire


Rédigé le Vendredi 25 Février 2022 à 12:37 | Lu 134 fois | 3 commentaire(s)



Le nouveau Centre international de recherche et de formation en génomique appliquée et de surveillance sanitaire (Cigass), logé à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, est doté d’une technologie de dernière génération pour la recherche médicale. Avec un investissement de plusieurs milliards de FCfa, il vise, entre autres, à accompagner le système sanitaire pour la compréhension des maladies infectieuses émergentes et ré-émergentes.


Entre la Faculté de Médecine, de Pharmacie et d’Odontostomatologie et l’Agence comptable de l’Université Cheikh Anta Diop (Ucad) de Dakar, se dresse un bâtiment flambant neuf de cinq étages. Peint en couleurs noire et blanche, « celles de l’universel », pour reprendre les propos du Professeur Daouda Ndiaye, initiateur du projet, le Centre international de recherche et de formation en génomique appliquée et de surveillance sanitaire (Cigass) est entouré d’un espace pavé aux mêmes couleurs. Il est fonctionnel depuis quelques mois.

Pour y accéder, il faut montrer patte blanche pour des raisons de biosécurité. Dans les couloirs, les carreaux scintillent au reflet de la lumière tamisée. Nous trouvons le Professeur Ndiaye, Directeur dudit centre, en pleine visioconférence dans la grande salle du quatrième étage. Au même niveau, il y a une grande salle de conférences interconnectée et modulable, qui peut recevoir tous les séminaires.

Ce centre est bâti sur 2000 m2. Il est composé de deux bâtiments : un principal de cinq étages qui reçoit l’essentiel des services et une annexe de deux niveaux. Il y a des unités de formation avec des salles qui peuvent accueillir jusqu’à 80 personnes ainsi que des salles de conférence pouvant contenir jusqu’à 150 personnes.

Au premier étage, il y a l’unité P1 (laboratoire de biologie médicale de routine). Sur place, nous trouvons le chercheur El hadji Meïssa Bâ et son équipe en train de numéroter les échantillons venus du terrain. Cette unité est dotée de frigos avec une température allant de -80 à -150 degrés pour le stockage des prélèvements. Le Professeur Daouda Ndiaye qui nous fait visiter les lieux, nous confie « qu’il y a des prélèvements datant de 20 ans qu’on peut retrouver grâce à leur code et aux frigos ».
Au même étage, se trouvent aussi la salle de biologie médicale avec ses machines d’hémologie, celle de biochimie de dernière génération et la salle de microscopie. Toutes les machines sont connectées à des écrans surveillés par les chercheurs du laboratoire.

La biosécurité garantie

Le deuxième étage concentre l’essentiel des tâches de recherche. Dans l’unité de recherche, on trouve deux dames, les mains couvertes de gants et les visages masqués, en train d’extraire de l’Adn grâce à un robot extracteur. Pour nous rassurer, le Professeur Ndiaye confesse que « les salles sont sécurisées » et que « le centre est même plus sûr que nos maisons », même si on y manipule toute sorte de virus. L’environnement est stérilisé. Et grâce à la technologie du « Clinic air », qui purifie l’air en temps réel pour la biosécurité, « rien n’entre et rien ne sort des salles », dit-il. Il y a même, dans ces salles, un dispositif qui permet de rejeter l’air venant de l’extérieur à l’ouverture des portes. Toujours au deuxième étage, il y a la pièce de préparation des échantillons pour minimiser les risques et celle d’amplification.

Le Professeur Daouda Ndiaye est cependant plus fier de nous faire découvrir la salle de séquençage, « cœur du laboratoire », où on donne les résultats de la recherche. La machine qui permet d’interpréter ces résultats est « très chère ; elle coûte 100 millions de FCfa », informe-t-il.

Rapidement, nous laissons Mohamed et ses collègues concentrés, les yeux rivés sur les écrans de contrôle pour ne pas commettre d’erreur dans l’analyse des résultats, poursuivre le travail en toute sérénité. Quant au troisième niveau de l’immeuble, il est réservé à l’administration avec les unités de gestion des projets, de comptabilité et de gestion des données.

En dehors de ces équipements, le centre a un « Guest house » ou des appartements pour recevoir des scientifiques qui y sont hébergés avec tout le confort qu’il y a dans les hôtels. Le « Guest house » se trouve au cinquième étage où il y a aussi le restaurant Vip.

Plusieurs milliards de FCfa d’investissements

Le Professeur Daouda Ndiaye, Directeur du Centre international de recherche et de formation sur la génomique et de surveillance sanitaire (Cigass), rappelle que les travaux de la structure ont démarré en 2017 et ont été achevés en 2021.

Formé à l’Université Harvard de Boston, le Professeur Ndiaye, qui a constaté qu’il y a toutes les plateformes technologiques dans ces universités, s’est engagé pour que notre pays dispose de telles infrastructures. Il évalue le coût du centre à plusieurs milliards de FCfa, même s’il n’aime pas parler de chiffres. « Il y a des choses qu’on ne peut pas chiffrer. On a des machines qui coûtent pas moins de trois milliards de FCfa. Des salles spécifiques P3 (laboratoire conçu pour la manipulation des virus les plus dangereux), des salles P1 et P2 qui coûtent pas moins de 300 millions de FCfa jouent presque les mêmes rôles, révèle l’universitaire.
Depuis 2014, le Directeur Cigass a commencé à préparer des jeunes pour qu’ils puissent travailler dans un tel centre. Dans cette logique, au moins 15 scientifiques sénégalais formés à l’Ucad ont été envoyés parfaire leur formation (Masters) aux États-Unis pendant huit ans pour être performants en analyse des données génétiques.
En tant que conseiller spécial et Professeur associé à Harvard, il reconnait que cela a facilité la collaboration pour la formation des jeunes avec l’appui de l’Institut Broad à Boston, le Cdc-Atlanta, l’Université de Tulane, entre autres.

Une initiative citoyenne soutenue par l’État
Le Centre international de recherche et de formation sur la génomique et de surveillance sanitaire (Cigass) est une initiative citoyenne du Professeur Daouda Ndiaye. Mais, elle a été concrétisée grâce à l’accompagnement de l’État du Sénégal. « C’est un acte citoyen, mais j’ai voulu que ce soit une propriété de l’État du Sénégal et de l’Ucad, car nous avons une dette à payer à notre pays. Le Chef de l’État a eu même à participer pour la finalisation et l’achat des équipements », se réjouit M. Ndiaye.
Concrètement, ce centre sert à former et à faire de la recherche. Il permet aussi de faire le diagnostic des malades. « Le centre est là pour accompagner la santé de la population à travers l’expertise universitaire. Son objectif, c’est la compréhension des maladies infectieuses émergentes et ré-émergentes nouvellement connues ou anciennement connues. Il vise aussi à comprendre ces pathologies dans un domaine très précis de la génomique et de la génétique », explique le Directeur du Cigass.

Comprendre les maladies et les parasites

Les recherches du Centre international de recherche et de formation sur la génomique et de surveillance sanitaire (Cigass) sont axées principalement sur le paludisme, car, soutient le Professeur Daouda Ndiaye, on veut aller vers l’élimination, comprendre les parasites qui circulent dans notre pays, leur résistance par rapport aux médicaments utilisés, etc. « Tout cela repose sur de la génétique, la compréhension du profil génomique du parasite. Au-delà du paludisme, il y a toutes les maladies infectieuses parce que le microbe est partout. On travaille sur toutes les maladies humaines et animales », précise-t-il, espérant qu’avec ce centre, les étudiants qui étaient envoyés partout dans le monde pour des recherches vont faire leur travail à partir de l’Ucad.

L’annexe, espace de manipulation des virus les plus dangereux

Au niveau du Centre international de recherche et de formation sur la génomique et de surveillance sanitaire, il y a une annexe avec le laboratoire P3 où on manipule les virus les plus dangereux comme celui d’Ebola. L’entrée dans ce laboratoire est réglementée. Même pour les chercheurs, il faut porter un Équipement de protection individuelle (Epi). Le plus important, d’après le Professeur Daouda Ndiaye, c’est d’avoir un laboratoire de type P3 pour la gestion infectieuse hautement contagieuse et dangereuse avec des virus comme ceux d’Ebola qui peuvent y être manipulés en toute sécurité. « La Covid-19 peut être manipulée partout ; elle n’a pas besoin de laboratoire P3, on porte juste des masques. La Covid-19 est moins dangereuse qu’Ebola qui est une maladie hémorragique très contagieuse avec un taux de mortalité très important. Pour manipuler ces virus, nous avons une unité P3 conçue uniquement pour cela », souligne le Directeur du Cigass. Le Pr Daouda Ndiaye assure que quelle que soit l’épidémie qui existerait au Sénégal, ce centre, avec son unité P3, peut la prendre en charge. Dans le centre, il y a aussi des laboratoires P1 (biologie médicale de routine), et P2 (salle de culture cellulaire, de recherche sérologique, d’extraction Arn-Adn, salle Pcr, post Pcr, etc.).

Un hub médical en Afrique

En quelques mois d’existence, le Centre international de recherche et de formation sur la génomique et de surveillance sanitaire est devenu une structure importante non seulement pour le Sénégal mais aussi pour toute l’Afrique. Le Cigass a reçu ainsi des financements pour faire la surveillance du paludisme. D’après le Professeur Daouda Ndiaye, la structure vient de finaliser son érection en tant que centre de référence africain sur la génomique infectieuse appliquée au paludisme avec l’Usaid Pmi et le Cdc-Atlanta. Les travaux vont démarrer le 1er mars 2022 avec ces partenaires. « Les Américains ont compris l’importance de ce centre en faisant de lui un hub médical en Afrique. Tous ceux qui travaillent dans la génomique parasitaire du paludisme vont venir à Dakar pour être formés. C’est une reconnaissance internationale parce que ces structures sont des références dans le monde », confie l’universitaire. Selon le Pr Ndiaye, l’autre aspect est que l’Organisation mondiale de la santé (Oms) est en train de travailler avec le Cigass pour que le Fonds mondial puisse le prendre comme centre de référence pour l’Afrique par rapport à des formations d’accréditation sur le paludisme. Rapporte Vipeoples .



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