L’Alliance de crédit et d’épargne pour la production (Acep) est le système financier décentralisé (Sfd) le plus capitalisé de la zone Uemoa avec un taux de 60%. L’information est de Souleymane Sarr, directeur général adjoint de l’Acep. Dans l’entretien qu’il a accordé au « Journal de l’économie sénégalaise » (Lejecos), M. Sarr dresse le bilan de cette entreprise pionnière dans la microfinance qui totalise près de 30 ans d’existence, mais aussi revient sur les indicateurs de performance, les taux d’intérêt, l’éducation financière …
Source : https://www.lejecos.com/Souleymane-Sarr-Directeur-...
Monsieur le Directeur général adjoint, l’Alliance de crédit et d’épargne pour la production (Acep) fait partie des pionniers de la microfinance au Sénégal. Après une trentaine d’années d’existence dans l’écosystème financier, quel bilan faites-vous du parcours de l’ACEP, et quels sont vos défis ?
Après 30 ans d’existence en effet, l’Acep s’est positionnée comme un prestataire de services financiers de premier plan, et cela est aujourd’hui reconnu par ses clients membres et ses partenaires nationaux et internationaux. Notre offre est mature, viable et inclusive. Elle couvre l’ensemble du territoire national et compte prés de 80 agences, 350 000 membres, 50 000 prêts actifs aux micro petites et moyennes entreprises pour un volume de crédits octroyés de 100 milliards en 2022. Elle est tout aussi diversifiée, car on s’adresse à l’ensemble des secteurs économiques, allant de l’agriculture à l’industrie. Les objets financés sont l’investissement, les besoins en fonds de roulement et la trésorerie.
Les défis actuels sont notamment de passer à une échelle de production trois fois supérieure, en ciblant de nouveaux relais de croissance, d’une part, et d’autre part, en s’appuyant sur la finance digitale, de renforcer le dispositif de maîtrise des risques et la conformité, afin d’assoir une gestion du capital humain plus proactive et tournée vers la symétrie des attentions.
Votre institution se place parmi les grands réseaux les plus dynamiques du marché. Quels sont les principaux indicateurs de performance de l’Acep? Y a-t-il des zones de turbulence ?
L’objectif de pérennité financière qui avait été fixé à la Direction dès le début, a été vite atteint. En effet, nous avons compris très tôt, que la course à l’efficacité valait mieux qu’une course à la taille. Pour l’illustrer, je vous fais noter qu’en 2022, l’Acep présente un taux de capitalisation atteignant 60%, ce qui est le signe incontestable d’une bonne solidité financière. Ce qui fait d’elle, d’ailleurs le Sfd le plus capitalisé de la zone Uemoa. Cette forte capitalisation résulte d’un cumul des résultats bénéficiaires depuis 30 ans. Notre levier financier est de 1 sur 7 d’où une marge pour financer notre croissance. Au niveau rentabilité, notre Roa atteint 3% en 2022. Nous respectons tous les 9 ratios prudentiels indiqués par la Bceao.
L’essor de la microfinance reste encore un défi majeur face à la lancinante question du niveau élevé des taux d’intérêt et la faiblesse du niveau d’éducation financière des cibles. Quelle est la réponse apportée par l’Acep face à ces problématiques ?
L’Acep est aujourd’hui le système financier décentralisé qui présente sur la place la meilleure proposition de valeur. En plus c’est vérifiable, elle a la tarification la plus compétitive du marché du financement des Pme. Néanmoins, j’en conviens, la réflexion sur le niveau des taux d’intérêt ne saurait être déconnectée de celle du fonctionnement des marchés au plan économique. En effet, le niveau des taux d’intérêt est corrélé à plusieurs déterminants, dont notamment le déséquilibre entre l’offre de financement et la demande exacerbée par la stratégie d’évitement qu’observent les banques à l’égard des Pme, d’une part, et d’autre part, les coûts d’intermédiation de proximité, et d’autres coûts comme le coût des ressources induit par la rareté des ressources longues sur la place, et le coût du risque, qui est particulièrement élevé chez les Pme. Il faut relever aussi que les Sfd ne sont pas éligibles aux refinancement de la Bceao et donc empruntent auprès des banques commerciales.
A l’Acep, l’éducation financière est prise en charge durant notre processus d’instruction de la demande. Le chargé de prêt Pme sensibilise le client à toutes les étapes, sur les méfaits du surendettement en s’appuyant sur le rapport de crédit du BIC, les bénéfices à tirer de la mise en place d’une comptabilité simplifiée et la disponibilité de documents de gestion. Au demeurant, il faut reconnaitre que l’Etat et les partenaires comme le Giz ont entrepris d’importants programmes d’éducation financière à l’intention des Pme.
L’Acep est-elle impliquée dans le financement des projets structurants ? Quels sont les secteurs prioritaires ciblés dans ces projets ?
Acep participe à des projets de création et de consolidation d’emploi des jeunes. Pour cela elle allie deux composantes :
- une composante non financière qui comprend l’initiation à la culture entrepreneuriale, l’éducation financière, la gestion des activités génératrices de revenus, la création et la gestion de microentreprise, la dynamique organisationnelle.
- et une composante financement des projets ainsi incubés.
Je ne trouve pas une activité aussi structurante qu’un programme de création d’emplois pour les jeunes, qui du reste, est la finalité de toute politique économique.
Le secteur de la microfinance est caractérisé par un taux de pénétration et des financements à l’économie relativement faibles. Qu’elle est la place du modèle Acep dans les politiques de promotion de l’inclusion financière au Sénégal ? Comment la digitalisation des opérations a permis à l’Acep de renforcer l’accès et l’utilisation aux produits et services offerts ?
Le secteur de la microfinance s’est beaucoup développé au cours des 10 dernières années avec des performances qui le place à la tête des institutions de l’Uemoa.
Ainsi, au 21/12/2022 le rapport de la Drssfd/Dgsfc renseigne que le nombre de membres et clients s’établit à 4 034 538 soit un taux d’inclusion financière de 44% du secteur de la microfinance (base population active) contre 22% pour le secteur bancaire.
L’encours des dépôts ressort à 511,3 milliards FCFA correspondant à 3,1% du PIB et à 9,1% des dépôts bancaires ; l’encours de crédit a crû de 2,8% pour atteindre 617,3 milliards FCFA, représentant 11,9% des crédits à l’économie et 3,7% du Pib.
Dans le même temps, la qualité du portefeuille s’est améliorée avec un recul de 2 points de pourcentage et est ressortie à 7,2%. Ce ratio reste, toutefois, au-dessus de la norme de 3% maximum ; les fonds propres se sont dégradés de 3,0% en s’établissant à 181,9 milliards FCFA. Les emprunts ont régressé de 3,0% pour ressortir à 120,4 milliards FCFA.
Ce qu’il faut noter, c’est que le développement de la finance digitale a beaucoup contribué à l’obtention de ces résultats, avec notamment, le lancement aux niveaux des Sfd les plus en vue, de services financiers et de canaux de distribution digitaux comme, la banque 2 wallet, le réseau d’agents, le crédit scoring pour l’automatisation de la décision d’octroi.
Acep a densifié sa stratégie d’implantation à travers un maillage géographique et l’ouverture de plusieurs points de service, notamment en zones rurales, comment arrivez-vous à concilier viabilité sociale, expansion et rentabilité commerciale ?
Ce défi a été relevé depuis plus de 20 ans. Acep a su allier viabilité sociale, institutionnelle et financière grâce à son modèle économique. Celui-ci est en effet basé d’une part, sur l’efficacité dans l’utilisation des ressources, l’évaluation des performances individuelles et leur valorisation, et d’autre part, sur une culture intentionnelle basée sur les valeurs d’éthique, de rigueur et de l’engagement. Ce modèle a été implanté à Acep Cameroun, Acep Burkina Faso, Acep Madagascar et à Acep Niger par les cadres de Acep Sénégal. Ces institutions utilisent notre charte graphique, notre Sig et nos procédures et politiques.
Lejecos Magazine
Après 30 ans d’existence en effet, l’Acep s’est positionnée comme un prestataire de services financiers de premier plan, et cela est aujourd’hui reconnu par ses clients membres et ses partenaires nationaux et internationaux. Notre offre est mature, viable et inclusive. Elle couvre l’ensemble du territoire national et compte prés de 80 agences, 350 000 membres, 50 000 prêts actifs aux micro petites et moyennes entreprises pour un volume de crédits octroyés de 100 milliards en 2022. Elle est tout aussi diversifiée, car on s’adresse à l’ensemble des secteurs économiques, allant de l’agriculture à l’industrie. Les objets financés sont l’investissement, les besoins en fonds de roulement et la trésorerie.
Les défis actuels sont notamment de passer à une échelle de production trois fois supérieure, en ciblant de nouveaux relais de croissance, d’une part, et d’autre part, en s’appuyant sur la finance digitale, de renforcer le dispositif de maîtrise des risques et la conformité, afin d’assoir une gestion du capital humain plus proactive et tournée vers la symétrie des attentions.
Votre institution se place parmi les grands réseaux les plus dynamiques du marché. Quels sont les principaux indicateurs de performance de l’Acep? Y a-t-il des zones de turbulence ?
L’objectif de pérennité financière qui avait été fixé à la Direction dès le début, a été vite atteint. En effet, nous avons compris très tôt, que la course à l’efficacité valait mieux qu’une course à la taille. Pour l’illustrer, je vous fais noter qu’en 2022, l’Acep présente un taux de capitalisation atteignant 60%, ce qui est le signe incontestable d’une bonne solidité financière. Ce qui fait d’elle, d’ailleurs le Sfd le plus capitalisé de la zone Uemoa. Cette forte capitalisation résulte d’un cumul des résultats bénéficiaires depuis 30 ans. Notre levier financier est de 1 sur 7 d’où une marge pour financer notre croissance. Au niveau rentabilité, notre Roa atteint 3% en 2022. Nous respectons tous les 9 ratios prudentiels indiqués par la Bceao.
L’essor de la microfinance reste encore un défi majeur face à la lancinante question du niveau élevé des taux d’intérêt et la faiblesse du niveau d’éducation financière des cibles. Quelle est la réponse apportée par l’Acep face à ces problématiques ?
L’Acep est aujourd’hui le système financier décentralisé qui présente sur la place la meilleure proposition de valeur. En plus c’est vérifiable, elle a la tarification la plus compétitive du marché du financement des Pme. Néanmoins, j’en conviens, la réflexion sur le niveau des taux d’intérêt ne saurait être déconnectée de celle du fonctionnement des marchés au plan économique. En effet, le niveau des taux d’intérêt est corrélé à plusieurs déterminants, dont notamment le déséquilibre entre l’offre de financement et la demande exacerbée par la stratégie d’évitement qu’observent les banques à l’égard des Pme, d’une part, et d’autre part, les coûts d’intermédiation de proximité, et d’autres coûts comme le coût des ressources induit par la rareté des ressources longues sur la place, et le coût du risque, qui est particulièrement élevé chez les Pme. Il faut relever aussi que les Sfd ne sont pas éligibles aux refinancement de la Bceao et donc empruntent auprès des banques commerciales.
A l’Acep, l’éducation financière est prise en charge durant notre processus d’instruction de la demande. Le chargé de prêt Pme sensibilise le client à toutes les étapes, sur les méfaits du surendettement en s’appuyant sur le rapport de crédit du BIC, les bénéfices à tirer de la mise en place d’une comptabilité simplifiée et la disponibilité de documents de gestion. Au demeurant, il faut reconnaitre que l’Etat et les partenaires comme le Giz ont entrepris d’importants programmes d’éducation financière à l’intention des Pme.
L’Acep est-elle impliquée dans le financement des projets structurants ? Quels sont les secteurs prioritaires ciblés dans ces projets ?
Acep participe à des projets de création et de consolidation d’emploi des jeunes. Pour cela elle allie deux composantes :
- une composante non financière qui comprend l’initiation à la culture entrepreneuriale, l’éducation financière, la gestion des activités génératrices de revenus, la création et la gestion de microentreprise, la dynamique organisationnelle.
- et une composante financement des projets ainsi incubés.
Je ne trouve pas une activité aussi structurante qu’un programme de création d’emplois pour les jeunes, qui du reste, est la finalité de toute politique économique.
Le secteur de la microfinance est caractérisé par un taux de pénétration et des financements à l’économie relativement faibles. Qu’elle est la place du modèle Acep dans les politiques de promotion de l’inclusion financière au Sénégal ? Comment la digitalisation des opérations a permis à l’Acep de renforcer l’accès et l’utilisation aux produits et services offerts ?
Le secteur de la microfinance s’est beaucoup développé au cours des 10 dernières années avec des performances qui le place à la tête des institutions de l’Uemoa.
Ainsi, au 21/12/2022 le rapport de la Drssfd/Dgsfc renseigne que le nombre de membres et clients s’établit à 4 034 538 soit un taux d’inclusion financière de 44% du secteur de la microfinance (base population active) contre 22% pour le secteur bancaire.
L’encours des dépôts ressort à 511,3 milliards FCFA correspondant à 3,1% du PIB et à 9,1% des dépôts bancaires ; l’encours de crédit a crû de 2,8% pour atteindre 617,3 milliards FCFA, représentant 11,9% des crédits à l’économie et 3,7% du Pib.
Dans le même temps, la qualité du portefeuille s’est améliorée avec un recul de 2 points de pourcentage et est ressortie à 7,2%. Ce ratio reste, toutefois, au-dessus de la norme de 3% maximum ; les fonds propres se sont dégradés de 3,0% en s’établissant à 181,9 milliards FCFA. Les emprunts ont régressé de 3,0% pour ressortir à 120,4 milliards FCFA.
Ce qu’il faut noter, c’est que le développement de la finance digitale a beaucoup contribué à l’obtention de ces résultats, avec notamment, le lancement aux niveaux des Sfd les plus en vue, de services financiers et de canaux de distribution digitaux comme, la banque 2 wallet, le réseau d’agents, le crédit scoring pour l’automatisation de la décision d’octroi.
Acep a densifié sa stratégie d’implantation à travers un maillage géographique et l’ouverture de plusieurs points de service, notamment en zones rurales, comment arrivez-vous à concilier viabilité sociale, expansion et rentabilité commerciale ?
Ce défi a été relevé depuis plus de 20 ans. Acep a su allier viabilité sociale, institutionnelle et financière grâce à son modèle économique. Celui-ci est en effet basé d’une part, sur l’efficacité dans l’utilisation des ressources, l’évaluation des performances individuelles et leur valorisation, et d’autre part, sur une culture intentionnelle basée sur les valeurs d’éthique, de rigueur et de l’engagement. Ce modèle a été implanté à Acep Cameroun, Acep Burkina Faso, Acep Madagascar et à Acep Niger par les cadres de Acep Sénégal. Ces institutions utilisent notre charte graphique, notre Sig et nos procédures et politiques.
Lejecos Magazine
Source : https://www.lejecos.com/Souleymane-Sarr-Directeur-...