Les défenseurs commis d’office pour Hissein Habré n’ont pas seulement été au rendez-vous de cette dernière journée du procès de Hissein Habré, hier au Palais de justice Lat-Dior de Dakar. Ils ont été percutants, talentueux, offensifs et corrosifs dans l’épreuve fatidique des plaidoiries, là où les dernières énergies sont mobilisées pour faire pencher la balance de Dame justice.
Mes Mbaye Sène (à gauche) et Mounir Ballal
Tour à tour, avec dextérité et intelligence, Mes Mounir Ballal, Abdoul Gningue et Mbaye Sène ont essayé d’annihiler les témoignages et de réduire à néant les concepts à la base des accusations incriminant Hissein Habré : crimes contre l’humanité, crimes de guerre, actes de torture. Des charges pour lesquelles le Parquet général a requis la prison à vie pour leur client.
A l’entame, les avocats de l’ancien chef d’Etat tchadien ont mis en exergue des «éléments de contexte» pour justifier l’autorité avec laquelle Hissein Habré a gouverné un pays où «les particularismes ethniques sont naturellement placés au-dessus de l’intérêt national». Ce à quoi justement il souhaitait mettre un terme le plus rapidement possible.
Du reste, a expliqué Me Ballal, «l’intention de Habré n’a jamais été de faire de la DDS un instrument répressif car ce n’est qu’après six mois de présidence qu’il s’est rendu compte qu’il fallait mettre en place d’autres structures pour des raisons de sécurité intérieure.»
Histoires de viol à la présidence
Les conseils de la défense ont particulièrement fustigé les témoignages «capitaux» de l’accusation, à savoir celui de Khadija Hassan Zidane dite «Khadija la rouge», celui de Bichara Ahmat Hassan, sans oublier le rapport de la Commission nationale d’enquête dirigée par Mahamat Hassan Abacar. Ils leur ont donc dénié toute valeur probante.
Ainsi, «Khadija la rouge», après avoir dit «toute la vérité» lors de l’enquête préliminaire à Ndjamena, a «inventé» «quatre» actes de viol dont Hissein Habré se serait rendu coupable, s’est indigné Me Gningue. «Cette dame a été poussée à dire qu’elle a été violée dans une salle de la présidence de la république», a ajouté Me Sène.
Le dénommé Bichara, lui, aurait multiplié les «invraisemblances et les discordances» à propos du charnier de Ambing, de sa découverte et des circonstances dans lesquelles, blessé en plusieurs endroits du corps, il a réussi à échapper aux massacres de masse perpétrés dans ce village proche de Ndjamena, de même que sur la durée de sa détention.
Au sujet du rapport produit par la commission nationale d’enquête, les avocats de Habré le jugent «partial, non neutre et non indépendant» au regard des conditions dans lesquelles il a été produit sur instigation du président Idriss Deby. A leurs yeux, le constat est d’autant plus grave que ce document «a été la pierre angulaire de toute la procédure» intentée contre leur client, a souligné Me Ballal.
Entre témoignages strictement à charge, procès-verbaux de témoins sans signature, un nombre jugé faramineux de 40 000 victimes, ce document est «manifestement (dépourvu) de valeur scientifique», estiment les conseils de Habré. Me Mbaye Sène croit alors comprendre qu’il existait un «deal», un «pacte d’absolution» dont l’objectif était de pousser les trente agents de la DDS à se «défausser» sur Hissein Habré en échange d’une promesse de recyclage dans les arcanes du régime du président Idriss Deby. C’est pourquoi la chambre d’assise ne pourra se fonder que sur des éléments brandis et discutés devant la barre pour asseoir sa conviction, a plaidé Me Gningue.
Tutelle administrative et supérieur hiérarchique
D’autre part, le trio défenseur de Hissein Habré s’est ému des «tentatives infructueuses» de leurs confrères des parties civiles et du ministère public d’établir «un fil conducteur objectif» qui relierait par imputation des exactions à la personne de Hissein Habré. «Les dépositions de Mahamat Djibrine et Younouss Saleh devant la commission nationale d’enquête vont dans ce sens, a constaté Me Gningue. Mais le supérieur hiérarchique du chef de la DDS n’était pas Hissein Habré.»
Sur ce, Me Sène a rappelé, brandissant le décret de création de la Direction de la documentation et de la sécurité, que la tutelle administrative de cette institution relevait du ministre de l’Intérieur «par délégation permanente». En même temps, «il existait déjà une autorité chargée d’empêcher les massacres et les exactions en la personne de Idriss Deby. C’était lui le commandant en chef des forces armées», a tempêté Me Gningue. Non sans s’émouvoir de la propension des ONG, en l’occurrence Amnesty International et Human Rights Watch, à considérer les pièces retrouvées dans les archives de la DDS comme «un trésor de guerre» auquel il fallait impérativement donner un prolongement politique qui ne pouvait être que Habré.
Et pour montrer que l’autonomie d’action des agents pouvait être une réalité, Me Gningue a donné l’exemple de Baningar Kassala. Ce fonctionnaire en poste au sud du pays, face aux massacres de Ngalo, a tenté d’informer ses supérieurs hiérarchiques sur la gravité de la situation dans ce village. Il a fini par se réfugier à Ndjamena après avoir été menacé de mort.
«Preuves»
Par ailleurs, les avocats du prévenu ont dit avoir relevé plusieurs «zones d’ombre» et «inexactitudes» au cours de la procédure : l’absence de certificats médicaux pour les victimes présumées après la fuite du Président Habré vers le Sénégal, les exagérations liés au «Septembre noir» à la ferme de Déli, les transfèrements assimilés à des déportations, le principe de l’Entreprise criminelle commune (ECC), les «errements» d’un «comparateur d’écritures» présenté à l’origine comme «expert graphologue», etc.
«Il n’y a pas de crimes qui puissent être imputés au Président Habré», a assuré Me Mbaye Sène. «Aucune preuve n’a été apportée aux juges (car) Habré n’a pas donné d’ordre pour tuer, et n’a aucun contrôle effectif sur les hommes qui sont sur le terrain.» A ce titre, son acquittement sans autre forme de procès «ne serait que justice.»
Pour l’issue du procès, les avocats du prévenu ont à l’unanimité demandé à la Chambre de fonder son verdict exclusivement sur l’article 414 du Code de procédure pénale sénégalais relatif à l’administration des preuves à l’audience.
momardieng.blogspot.sn
A l’entame, les avocats de l’ancien chef d’Etat tchadien ont mis en exergue des «éléments de contexte» pour justifier l’autorité avec laquelle Hissein Habré a gouverné un pays où «les particularismes ethniques sont naturellement placés au-dessus de l’intérêt national». Ce à quoi justement il souhaitait mettre un terme le plus rapidement possible.
Du reste, a expliqué Me Ballal, «l’intention de Habré n’a jamais été de faire de la DDS un instrument répressif car ce n’est qu’après six mois de présidence qu’il s’est rendu compte qu’il fallait mettre en place d’autres structures pour des raisons de sécurité intérieure.»
Histoires de viol à la présidence
Les conseils de la défense ont particulièrement fustigé les témoignages «capitaux» de l’accusation, à savoir celui de Khadija Hassan Zidane dite «Khadija la rouge», celui de Bichara Ahmat Hassan, sans oublier le rapport de la Commission nationale d’enquête dirigée par Mahamat Hassan Abacar. Ils leur ont donc dénié toute valeur probante.
Ainsi, «Khadija la rouge», après avoir dit «toute la vérité» lors de l’enquête préliminaire à Ndjamena, a «inventé» «quatre» actes de viol dont Hissein Habré se serait rendu coupable, s’est indigné Me Gningue. «Cette dame a été poussée à dire qu’elle a été violée dans une salle de la présidence de la république», a ajouté Me Sène.
Le dénommé Bichara, lui, aurait multiplié les «invraisemblances et les discordances» à propos du charnier de Ambing, de sa découverte et des circonstances dans lesquelles, blessé en plusieurs endroits du corps, il a réussi à échapper aux massacres de masse perpétrés dans ce village proche de Ndjamena, de même que sur la durée de sa détention.
Au sujet du rapport produit par la commission nationale d’enquête, les avocats de Habré le jugent «partial, non neutre et non indépendant» au regard des conditions dans lesquelles il a été produit sur instigation du président Idriss Deby. A leurs yeux, le constat est d’autant plus grave que ce document «a été la pierre angulaire de toute la procédure» intentée contre leur client, a souligné Me Ballal.
Entre témoignages strictement à charge, procès-verbaux de témoins sans signature, un nombre jugé faramineux de 40 000 victimes, ce document est «manifestement (dépourvu) de valeur scientifique», estiment les conseils de Habré. Me Mbaye Sène croit alors comprendre qu’il existait un «deal», un «pacte d’absolution» dont l’objectif était de pousser les trente agents de la DDS à se «défausser» sur Hissein Habré en échange d’une promesse de recyclage dans les arcanes du régime du président Idriss Deby. C’est pourquoi la chambre d’assise ne pourra se fonder que sur des éléments brandis et discutés devant la barre pour asseoir sa conviction, a plaidé Me Gningue.
Tutelle administrative et supérieur hiérarchique
D’autre part, le trio défenseur de Hissein Habré s’est ému des «tentatives infructueuses» de leurs confrères des parties civiles et du ministère public d’établir «un fil conducteur objectif» qui relierait par imputation des exactions à la personne de Hissein Habré. «Les dépositions de Mahamat Djibrine et Younouss Saleh devant la commission nationale d’enquête vont dans ce sens, a constaté Me Gningue. Mais le supérieur hiérarchique du chef de la DDS n’était pas Hissein Habré.»
Sur ce, Me Sène a rappelé, brandissant le décret de création de la Direction de la documentation et de la sécurité, que la tutelle administrative de cette institution relevait du ministre de l’Intérieur «par délégation permanente». En même temps, «il existait déjà une autorité chargée d’empêcher les massacres et les exactions en la personne de Idriss Deby. C’était lui le commandant en chef des forces armées», a tempêté Me Gningue. Non sans s’émouvoir de la propension des ONG, en l’occurrence Amnesty International et Human Rights Watch, à considérer les pièces retrouvées dans les archives de la DDS comme «un trésor de guerre» auquel il fallait impérativement donner un prolongement politique qui ne pouvait être que Habré.
Et pour montrer que l’autonomie d’action des agents pouvait être une réalité, Me Gningue a donné l’exemple de Baningar Kassala. Ce fonctionnaire en poste au sud du pays, face aux massacres de Ngalo, a tenté d’informer ses supérieurs hiérarchiques sur la gravité de la situation dans ce village. Il a fini par se réfugier à Ndjamena après avoir été menacé de mort.
«Preuves»
Par ailleurs, les avocats du prévenu ont dit avoir relevé plusieurs «zones d’ombre» et «inexactitudes» au cours de la procédure : l’absence de certificats médicaux pour les victimes présumées après la fuite du Président Habré vers le Sénégal, les exagérations liés au «Septembre noir» à la ferme de Déli, les transfèrements assimilés à des déportations, le principe de l’Entreprise criminelle commune (ECC), les «errements» d’un «comparateur d’écritures» présenté à l’origine comme «expert graphologue», etc.
«Il n’y a pas de crimes qui puissent être imputés au Président Habré», a assuré Me Mbaye Sène. «Aucune preuve n’a été apportée aux juges (car) Habré n’a pas donné d’ordre pour tuer, et n’a aucun contrôle effectif sur les hommes qui sont sur le terrain.» A ce titre, son acquittement sans autre forme de procès «ne serait que justice.»
Pour l’issue du procès, les avocats du prévenu ont à l’unanimité demandé à la Chambre de fonder son verdict exclusivement sur l’article 414 du Code de procédure pénale sénégalais relatif à l’administration des preuves à l’audience.
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