Pourquoi la Turquie s'impose-t-elle comme médiateur? Certainement pas pour la paix


Rédigé le Lundi 21 Mars 2022 à 15:54 | Lu 308 fois | 0 commentaire(s)




Pourquoi la Turquie s'impose-t-elle comme médiateur? Certainement pas pour la paix
La paix en Ukraine est proche. C’est du moins ce que prétend la Turquie, bien qu’il y ait de nombreuses raisons de ne pas croire cette affirmation. De plus, une guerre de plusieurs mois profiterait au président Erdogan. Alors pourquoi se tient-il en médiateur, que veut-il atteindre?
 
Le dirigeant turc Recep Tayyip Erdogan voit dans la guerre une opportunité - “une aubaine”, écrit le politologue Pinar Tremblay. L’opportunité de remporter les élections présidentielles de juin prochain. Malgré toutes les astuces juridiques qu’il a déjà utilisées pour plier la démocratie à son avantage, Erdogan est aujourd’hui plus tremblant que jamais. En effet, six partis d’opposition, dont le plus important, ont uni leurs forces, sa popularité est au plus bas et son parti AK se situe entre 25 et 35% dans les sondages, alors qu’en 2018, il a encore remporté 43% des voix. Enfin, l’économie turque est dans une situation désastreuse, l’inflation ayant atteint 54% en février, son niveau le plus élevé depuis 20 ans. Cette situation économique est aggravée par la guerre actuelle. Ne serait-ce que parce que le tourisme turc dépend fortement des visiteurs en provenance de Russie.
Erdogan peut tirer parti de la crainte d’un conflit encore plus grand, qui prévaut également en Turquie. En temps de crise, les électeurs ont tendance à opter pour le choix le plus sûr, pour le familier et pour un leader fort également. Pour Erdogan, la guerre va continuer. La paix ne l’intéresse pas.
 
La Turquie ne peut avoir d’objections morales à la guerre que mène actuellement la Russie car elle s’est battue contre une situation assez similaire pendant des années. La plus grande différence entre le conflit avec les Kurdes est que la ligne de front traverse le territoire turc. Par conséquent, l’armée turque tue non seulement des habitants des pays voisins, mais aussi ses propres citoyens. La Turquie est aussi mise en cause pour son rôle dans la guerre en Syrie.
 
Alors pourquoi la Turquie est-elle si désireuse d’agir en tant que médiateur? Parce que ce rôle lui donne un alibi pour ne pas avoir à prendre parti. Elle semble rendre un grand service aux Ukrainiens en leur fournissant les redoutables drones Bayraktar, mais les contrats pour ceux-ci ont été signés avant le début de la guerre. Il s’agit d’une différence fondamentale par rapport aux livraisons d’armes que de nombreux autres pays ont décidé de faire depuis le début de la guerre.
 
Tirer dans le dos de la Russie
Les Russes ont récemment vendu des systèmes de défense aérienne S-400 à la Turquie. Un État membre de l’OTAN, situé à 200 km de la Russie et disposant de la troisième armée la plus puissante de tous les membres de l’OTAN sur le continent européen. Les États-Unis inciteraient maintenant la Turquie à échanger ces défenses aériennes russes contre des Patriots américains et à donner les S-400 à l’Ukraine. Si la Turquie le faisait, elle tirerait dans le dos de la Russie, mais il y a très peu de chances que cela se fasse.
 
Malgré les apparences, les Russes et les Turcs ne sont pas les meilleurs amis du monde. Ils se retrouvent dans les camps opposés de nombreuses guerres, dont celle de Syrie. Cependant, ils entretiennent une “bonne relation de travail”, dirait-on en termes diplomatiques. D’ailleurs, lorsque le régime turc a été menacé par un coup d’État en 2016, Vladimir Poutine a été le premier dirigeant étranger à appeler Erdogan. Aujourd’hui, Ankara refuse obstinément de se plier aux sanctions contre la Russie, se prêtant ainsi à leur contournement. Il est déjà question que de riches Russes placent leur argent dans des banques turques et que des compagnies aériennes arborent le pavillon turc.
 
La mégalomanie turque
Ce qui compte pour Erdogan, hormis ses élections, c’est de ne pas être du côté des perdants à la fin du conflit. “C’est l’issue de la guerre qui déterminera de quel côté penchera la Turquie”, a écrit Jeffrey Mankoff, chercheur à la National Defense University américaine, dans le magazine Foreign Policy. Si la Russie perd, il est probable qu’Ankara s’alignera de nouveau sur l’Occident. Mais si la Russie l’emporte, elle se détournera encore plus de l’OTAN et de l’UE et, selon l’analyste Selim Koru - lui-même originaire de Turquie - elle pourrait même y voir l’occasion de déclencher elle-même une guerre de conquête.
Après tout, Erdogan rêve aussi fort que Poutine du grand empire qu’était autrefois son pays. Mais cette mégalomanie n’est pas chose aisée. En effet, pour réaliser ce rêve, les Turcs devront d’abord sortir de la sphère d’influence de la Russie. Après tout, les groupes ethniques apparentés aux Turcs, avec lesquels ils pourraient établir un nouvel Empire ottoman, se trouvent en grande partie dans les anciennes républiques soviétiques telles que le Turkménistan, le Kazakhstan et le Kirghizstan. Affirme Vipeoples .


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