Pour les Nigériens, même la pluie qui s'est abattue ce jeudi 4 juillet sur Niamey est un signe de la baraka (bénédiction) divine au moment où s'ouvrent les travaux du Sommet de l'UA. Et pourtant, deux jours avant l'ouverture de cet événement, la mort de 18 soldats nigériens dans l'attaque terroriste d'un camp militaire à Inates, près de la frontière avec le Mali, avait marqué les esprits.
Aux prises avec le terrorisme dans cette région explosive du Sahel, le Niger qui consacre 15% de son budget à la sécurité a voulu conjurer toute psychose en marge de l'accueil de ses hôtes de marque pour le 33e Sommet des chefs d'Etat de l'Union africaine qui se tient du 4 au 8 juillet à Niamey, la capitale «bunkerisée» du Niger. Alors que l'ombre de la menace sécuritaire plane sur le pays, les autorités nigériennes ont déployé un impressionnant dispositif de sécurité force à Niamey.
Précautions sécuritaristes dans une capitale bunkerisée
En uniformes ou en tenues de combat, ce sont 12 000 policiers et militaires armés et presque autant de réservistes qui veillent au grain sécuritaire dans la capitale du Niger. Une partie des effectifs de la Garde présidentielle sera même affectée à la sécurisation des hôtels de la trentaine de chefs d'Etat. Un dispositif similaire devrait aussi permettre d'assurer la sécurité au Palais des congrès rénové
A ces précautions sécuritaristes s'ajoutent des dizaines de check-points pour le contrôle d'identités et des véhicules roulants dans le quartier administratif de Niamey et dans la zone du tout nouvel aéroport Diori Hamani ou ses environs. La circulation routière sera en partie ralentie et par endroits complètement coupés dans la zone du flambant hôtel Radisson et du Centre de conférences Mahatma Ghandi.
Pour compléter la panoplie, la police nigérienne utilise un centre bardé d'écrans pour une surveillance vidéo presque en continu de toutes les artères de la capitale. Le contrôle est plus renforcé avec les conteneurs électroniques mis à disposition par l'Union européenne (UE) et qui devraient verrouiller le dispositif de communication et de contrôle lors du déroulement du sommet. Un pari sécuritaire pour inscrire l'organisation lisse d'un grand événement dans le bilan du mandat finissant de Mahamadou Issoufou, mais aussi replacer le Niger sur la carte des grandes capitales de l'Afrique dont Niamey sera pendant une semaine, la capitale.
450 milliards de dépenses pour un sommet qui fera date
Entre rénovations et inaugurations, le budget de 450 milliards de Fcfa permet à la présidence nigérienne de mettre les petits plats dans les grands. En compagnie des ministres des Affaires étrangères, Moussa Faki Mahamat, président de la Commission de l'UA, a lancé ce jeudi matin les travaux de la 35e Session ordinaire du conseil exécutif de l'UA (4 et 5 juillet) dans un Palais des congrès encore inachevé. Il devrait s'en suivre le très attendu huis clos des chefs d'Etat, le 7 juillet, puis leur déclaration finale à la fin des travaux.
Cette année, une cinquantaine de chefs d'Etat ou leurs représentants sont attendus à Niamey. Les communicants du Palais assurent que près de trente chefs d'Etat devraient faire le déplacement, «un record !», exultent-ils. Dans le lot sans doute, Mahamadou Issoufou devrait compter sur ses pairs de la CEDEAO dont il vient de prendre les rênes. Si la réussite d'un sommet ne se mesure pas au nombre de présidents effectivement présents dans la salle de conférences, le thème devrait quant à lui inscrire Niamey dans l'histoire.
Marquant le premier anniversaire de la signature de l'accord sur la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf), la rencontre de Niamey devrait être le dernier sommet en milieu d'année d'une UA en réforme. Après plusieurs hésitations, Muhammadu Buhari va apposer sa signature sur l'Accord de la Zlecaf pour le compte du Nigeria. Ratifié par 24 pays (52 signataires), l'accord sur la Zlecaf devrait faire de Niamey l'étape de son opérationnalisation après son entrée en vigueur en mai 2019.
Sans barrières douanières ou tarifaires, ce vaste marché commun de 1,2 milliard de consommateurs que l'UA veut mettre en place devrait permettre d'accroître de 15% à 25% les échanges intra-africains. En droite ligne de son Agenda 2063, l'UA estime que la mise en place de la zone de libre-échange devrait accroître la compétitivité et accélérer l'industrialisation sur le Continent. C'est d'ailleurs tout l'enjeu de la réussite du Sommet de Niamey.