Ile mémoire : Gorée porte bien son nom. Trois ans après l’Appel de Limamou Laye, les colons envahissent Yoff à sa recherche. Le saint homme dé¬rangeait leur autorité. S’ensuit un exil à Nguédiaga, qui dura trois jours. Puis vient une tentative de déportation de la part des blancs.
Seulement, ainsi qu’il en avait assuré ses fidèles, le navire ne navigua pas au-delà de l’île de Gorée. Ainsi comprend-on le sens de la parole que Seydina Limamou Laye répétait souvent : «Trois ans, trois jours, trois mois.» Ainsi aussi, Gorée est-elle devenue un lieu de pèlerinage pour toute une communauté.
Sur l’île, on parle de «Keur Monseigneur», pour indiquer le lieu de séjour du Mahdi. Sur la rue Boufflers, à un pas de l’église, se dressent les imposants murs de la fameuse maison. La brise marine qui enveloppe l’île, et le gazouillement des oiseaux confèrent une allure paradisiaque au lieu.
Seulement, cette année, point de pèlerinage. Du moins, c’est ce qu’affirme Kisito qui déambule dans la rue Boufflers. Il affirme aussi ne pas savoir pourquoi. En temps de pèlerinage, soutient-il, les fidèles se rassemblent devant la maison et effectuent leur ziarra. Des prières, dit-il. En ce mercredi 2 mars, à quelques jours de la commémoration de l’Appel, il n’y a que le vent, une rue vide et la solidité du bâtiment pour rappeler qu’à l’occasion du pèlerinage, cette dix-septième rue de l’île baigne dans la ferveur, prise d’assaut par les disciples du Mahdi qui revivifient sa mémoire dans un endroit devenu une des mémoires mondiales de l’esclavage. Par souci de mémoire d’ailleurs, est accrochée une plaque commémorative sur le mur de la maison. On y lit : «Dans cette maison a séjourné Seydina Limamou Mahdiyou Al Mountazar (Psl) en 1887.»
Gorée, une des quatre îles mouhamediennes
Joe Corréa, un autre insulaire rencontré, avait aussi l’habitude de rencontrer les pèlerins en blanc, scandant des louanges et finissant leur pèlerinage par une cérémonie qui se tenait sur le terrain de football de l’île. De lui, on apprend que cela fait deux ans qu’un tel tourisme spirituel n’a pas eu lieu. «La faute au Covid-19», renseigne-t-il. Le jeune homme se remémore. «D’habitude, les Layènes débarquent sur l’île en mi-juillet», enchaîne-t-il.
A la Place de la liberté et de la dignité humaine, un vieux sculpte la pierre. Mody vient de la Médina et travaille depuis trois décennies sur l’île, qui est une des quatre îles qu’il est convenu de qualifier de «mouhamediennes» (selon les écrits layènes), avec Ngor, Yoff et Sarpan. Le cœur de cet homme dont le chef et la barbe ont blanchi sous l’effet de l’âge, s’est sûrement vu sculpté par la foi en Limamou Laye. Sa voix est ponctuée d’un certain lyrisme.
Entre les chants en wolof et les références coraniques, il argumente sa foi. Devant lui, le Musée historique. Ici aussi, il est dit que le saint homme a séjourné. Une affirmation récente, si l’on s’en tient à ce qu’affirme le sculpteur qui se veut prudent. «Je ne peux ni confirmer ni infirmer son passage dans cet endroit», dit-il. Cette même prudence vis-à -vis du «on a dit », est de mise à l’intérieur du musée. Il n’est pas trop sûr que le Mahdi soit passé par la chambre 7 du bâtiment qui fait face à la Place de la liberté et de la dignité.
«On ne peut plus y accéder. La route qui y menait, est coupée et il est dangereux de s’aventurer vers la grotte. A moins de prendre une pirogue.» Il n’a pas la tenue officielle des guides, mais Abou Sow n’en a pas moins de connaissances sur l’histoire de l’île. Près de la mosquée de cette dernière, l’homme d’un âge avancé se porte volontaire pour montrer ce qu’est devenue la grotte, autre lieu de pèlerinage des Layénes.
L’érosion côtière a eu raison du passage, les grosses pierres se sont affaissées et il serait périlleux de s’aventurer vers ce refuge creusé dans la pierre et qui fait face à l’immensité de l’océan. Immense est la joie de M. Sow qui se rappelle que plus jeune, on leur offrait quelques pièces d’argent pour que des camarades et lui aillent dans la grotte : on y trouve de l’eau douce.
C’est avec l’eau de cette grotte coupée des vagues de pèlerins par l’érosion, que le Mahdi faisait ses ablutions, selon Abou Sow. Une raison suffisante pour que le lieu revête une symbolique pour la communauté layène.
Le Quotidien
Seulement, ainsi qu’il en avait assuré ses fidèles, le navire ne navigua pas au-delà de l’île de Gorée. Ainsi comprend-on le sens de la parole que Seydina Limamou Laye répétait souvent : «Trois ans, trois jours, trois mois.» Ainsi aussi, Gorée est-elle devenue un lieu de pèlerinage pour toute une communauté.
Sur l’île, on parle de «Keur Monseigneur», pour indiquer le lieu de séjour du Mahdi. Sur la rue Boufflers, à un pas de l’église, se dressent les imposants murs de la fameuse maison. La brise marine qui enveloppe l’île, et le gazouillement des oiseaux confèrent une allure paradisiaque au lieu.
Seulement, cette année, point de pèlerinage. Du moins, c’est ce qu’affirme Kisito qui déambule dans la rue Boufflers. Il affirme aussi ne pas savoir pourquoi. En temps de pèlerinage, soutient-il, les fidèles se rassemblent devant la maison et effectuent leur ziarra. Des prières, dit-il. En ce mercredi 2 mars, à quelques jours de la commémoration de l’Appel, il n’y a que le vent, une rue vide et la solidité du bâtiment pour rappeler qu’à l’occasion du pèlerinage, cette dix-septième rue de l’île baigne dans la ferveur, prise d’assaut par les disciples du Mahdi qui revivifient sa mémoire dans un endroit devenu une des mémoires mondiales de l’esclavage. Par souci de mémoire d’ailleurs, est accrochée une plaque commémorative sur le mur de la maison. On y lit : «Dans cette maison a séjourné Seydina Limamou Mahdiyou Al Mountazar (Psl) en 1887.»
Gorée, une des quatre îles mouhamediennes
Joe Corréa, un autre insulaire rencontré, avait aussi l’habitude de rencontrer les pèlerins en blanc, scandant des louanges et finissant leur pèlerinage par une cérémonie qui se tenait sur le terrain de football de l’île. De lui, on apprend que cela fait deux ans qu’un tel tourisme spirituel n’a pas eu lieu. «La faute au Covid-19», renseigne-t-il. Le jeune homme se remémore. «D’habitude, les Layènes débarquent sur l’île en mi-juillet», enchaîne-t-il.
A la Place de la liberté et de la dignité humaine, un vieux sculpte la pierre. Mody vient de la Médina et travaille depuis trois décennies sur l’île, qui est une des quatre îles qu’il est convenu de qualifier de «mouhamediennes» (selon les écrits layènes), avec Ngor, Yoff et Sarpan. Le cœur de cet homme dont le chef et la barbe ont blanchi sous l’effet de l’âge, s’est sûrement vu sculpté par la foi en Limamou Laye. Sa voix est ponctuée d’un certain lyrisme.
Entre les chants en wolof et les références coraniques, il argumente sa foi. Devant lui, le Musée historique. Ici aussi, il est dit que le saint homme a séjourné. Une affirmation récente, si l’on s’en tient à ce qu’affirme le sculpteur qui se veut prudent. «Je ne peux ni confirmer ni infirmer son passage dans cet endroit», dit-il. Cette même prudence vis-à -vis du «on a dit », est de mise à l’intérieur du musée. Il n’est pas trop sûr que le Mahdi soit passé par la chambre 7 du bâtiment qui fait face à la Place de la liberté et de la dignité.
«On ne peut plus y accéder. La route qui y menait, est coupée et il est dangereux de s’aventurer vers la grotte. A moins de prendre une pirogue.» Il n’a pas la tenue officielle des guides, mais Abou Sow n’en a pas moins de connaissances sur l’histoire de l’île. Près de la mosquée de cette dernière, l’homme d’un âge avancé se porte volontaire pour montrer ce qu’est devenue la grotte, autre lieu de pèlerinage des Layénes.
L’érosion côtière a eu raison du passage, les grosses pierres se sont affaissées et il serait périlleux de s’aventurer vers ce refuge creusé dans la pierre et qui fait face à l’immensité de l’océan. Immense est la joie de M. Sow qui se rappelle que plus jeune, on leur offrait quelques pièces d’argent pour que des camarades et lui aillent dans la grotte : on y trouve de l’eau douce.
C’est avec l’eau de cette grotte coupée des vagues de pèlerins par l’érosion, que le Mahdi faisait ses ablutions, selon Abou Sow. Une raison suffisante pour que le lieu revête une symbolique pour la communauté layène.
Le Quotidien