Peine de mort annulée pour une jeune Soudanaise
Mariée de force à 16 ans, Noura Hussein avait tué son époux alors qu’il tentait de la violer, selon la défense. Sa peine a été commuée en appel à cinq ans de prison.
Une cour d’appel a annulé, mardi 26 juin, la sentence de mort contre une jeune Soudanaise condamnée pour avoir tué son mari qu’elle accuse de l’avoir violée, a annoncé son avocat. En mai, un tribunal soudanais avait condamné à mort Noura Hussein, reconnue coupable du « meurtre intentionnel » de l’homme que son père l’avait forcée à épouser à l’âge de 16 ans et qui, selon elle, l’avait violée.
La condamnation à mort de la jeune femme, aujourd’hui âgée de 19 ans, a déclenché l’indignation internationale, notamment de l’ONU et de groupes de défense des droits humains. Son avocat, Al-Fateh Hussein, avait interjeté appel de cette décision.
Poignardé à mort
« La cour d’appel a annulé la sentence de mort et a condamné la [jeune femme] à cinq ans de prison » et à une amende de 337 500 livres soudanaises (16 000 euros), a précisé mardi M. Hussein à l’AFP. La peine de prison court depuis la date de son arrestation, en mai 2017.
Des militants avaient lancé une campagne intitulée « Justice pour Noura » après sa condamnation à mort. Selon Amnesty International, Noura Hussein a été mariée de force à l’âge de 16 ans. Lorsqu’elle a refusé de consommer le mariage, en mai 2017, son mari a appelé deux de ses frères et un cousin pour qu’ils l’aident à la violer. Quand il a essayé de la violer une deuxième fois, elle l’a poignardé à mort, selon l’ONG.
Soudan : condamnée pour avoir tué son mari violeur, Noura Hussein échappe à la peine de mort
Placée dans le couloir de la mort, derrière les barreaux de la prison de Omdurman où elle croupit depuis plus d’un an, la jeune Noura Hussein, 19 ans, voit enfin une éclaircie poindre dans son horizon bien sombre, alors que l’ombre de la potence s’éloigne d’elle à jamais.
Héroïne tragique d’un drame contemporain qui s’enfonce dans les ténèbres d’un autre âge, cette jeune femme soudanaise, mariée de force à un cousin en 2014, à l’aube de ses 16 printemps, et victime d’un viol conjugal barbare commis avec l’aide de parents proches de son époux, avait été condamnée au châtiment suprême pour avoir tué, en 2017, celui qui faisait de sa vie un enfer.
Dénoncée par son propre père et accusée de « meurtre avec préméditation » par la justice de son pays, qui ne reconnaît pas le viol dans le cadre du mariage, le destin brisé de Noura Hussein avait bouleversé le monde entier et le récit de son calvaire suscité un immense émoi par-delà les frontières.
« J’ai immédiatement dit à mon époux qu’il n’avait pas le droit de me toucher », confiait-t-elle en début d’année à 7D News, depuis le centre pénitentiaire où elle attendait de connaître le sort qui lui serait réservé avec une extrême anxiété. « J’ai été terrifiée par l’irruption de trois autres hommes dans la maison, j’ai appris plus tard qu’ils étaient des parents de mon mari », expliquait-elle alors, avant de raconter la nuit d’horreur qui a tout fait basculer : « Ils ont d’abord voulu savoir pourquoi je me refusais à mon époux, et ensuite, ils m’ont rouée de coups. Ils m’ont attrapée, m’ont maintenue immobile et ont regardé mon mari me violer avec une grande brutalité ».
Au fil des semaines, à l’approche d’un verdict dont ses fervents et nombreux soutiens internationaux redoutaient qu’il ne soit impitoyable, la mobilisation en faveur de la malheureuse jeune femme, menacée de finir au bout d’une corde, s’est amplifiée. La pétition « N’exécutez pas Noura ! Pour l’auto-défense contre l’homme qui l’a violée! », a notamment fait florès sur la Toile, récoltant à ce jour plus de 1,4 million de signatures.
Aussi la nouvelle de l’annulation de sa condamnation à mort, annoncée en début de semaine par un tribunal soudanais, a-t-elle été accueillie avec un immense soulagement par les groupes de défense des droits de l’homme qui avaient immédiatement fait bloc derrière elle, ne cessant d’appeler à la clémence et à prendre en considération la circonstance atténuante que représente, dans son cas précis, la légitime défense.
Un soulagement en demi-teinte toutefois, car comme l’a expliqué Al-Fateh Hussein, l’avocat de Noura Hussein, dans un entretien à Al-Arabiya : « La Cour d’appel a annulé son exécution et commué sa peine en cinq ans de prison, en obligeant sa famille à payer le prix du sang, soit 12 000 euros ( 337 500 livres soudanaises), en guise de dommages et intérêts pour la mort de son époux violeur ».
Pour Seif Magango, le directeur régional adjoint d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Est, cette première victoire judiciaire doit les inciter à poursuivre le combat, aussi rude soit-il, en vue d’aboutir à la « révision de la loi sur les violences domestiques », afin qu’il n’y ait plus d’autres Noura Hussein au Soudan.