Christine Razanamahasoa, Roberto Tinoka ou encore Hanitriniaina Razafimanantsoa. Le nom du futur Premier ministre de Madagascar, chargé de diriger la politique générale du pays et son calendrier jusqu'aux élections, aurait pu se trouver parmi ces trois personnalités issues du Mapar, le parti de l'ex-président Andry Rajoelina, si son successeur, Hery Rajaonarimampianina ne les avait pas rejetées.
Mahafaly Solonandrasana démissionne avec malice
A un jour de la «cessation des fonctions du Premier ministre au plus tard le 5 juin», selon la terminologie de la Haute cour constitutionnelle (HCC), Olivier Mahafaly Solonandrasana a rendu le tablier. Non sans faire planer le doute sur une possible reconduction. «Je vais remettre ma démission au Président de la République aujourd'hui [lundi 4 juin 2018, NDLR]», résume Olivier Mahafaly Solonandrasana lors d'un point de presse à Antananarivo, la capitale du pays.
«En tant qu'homme d'État, je ne vais pas me présenter comme un obstacle à la vie de la nation (...) J'accepte volontiers et avec joie de démissionner. Je n'ai rien à regretter aujourd'hui et je peux partir la tête haute (...) Je vais partir de ce palais magnifique, je vous dis : "ce n'est qu'un au revoir"», se permet-il d'ajouter.
Le départ de ce Premier ministre sortant intervient à une semaine de l'ultimatum fixé au 12 juin prochain par la HCC pour que Hery Rajoanarimampianina choisisse un prochain locataire de l'Hôtel de la primature au sein du «parti ou groupement de partis majoritaires lors des législatives de 2014». Un choix qui avait donné lieu à une querelle de revendication de majorité entre un HVM (au pouvoir), créé après ces législatives, mais qui a rassemblé les indépendants et débauché quelques députés de l'opposition, et le Mapar de son prédécesseur Andry Rajoelina.
Une route pavée d'œufs
Pour l'heure, Hery Rajaonarimampianina marche sur une route pavée d'œufs. Il s'est d'abord refusé à nommer un chef de gouvernement issu des rangs de l'opposition, ce qui lui imposerait, de facto et à deux mois d'une présidentielle dont il ne s'est pas officiellement président, une cohabitation difficile. Son refus est d'autant plus catégorique que s'il nomme ce Premier ministre dans les rangs du Mapar de Rajoelina -qui a proposé des personnalités de sa garde rapprochée-, il lui livrerait les clefs pour contrôler le scrutin, donc toutes les chances de le remporter.
Par contre, dans la configuration où le président malgache refuse de nommer un opposant ou qu'il reconduise le sortant au-delà du délai imparti, il jetterait de l'huile sur le feu d'une crise dont les braises couvent sous les cendres. Pire, cette décision pousserait la Haute cour à aller jusqu'au bout de sa logique de désavouer, à mots couverts, le locataire d'Iavoloha.
Pour une Cour qui a déjà annulé une partie des lois électorales proposées par Rajaonarimampianina lui impose une présidentielle anticipée en dehors de la saison des pluies et lui demande de former un gouvernement d'union nationale en faisant tabula rasa de tous les événements politiques postérieurs aux législatives de 2014, cela pourrait se solder par l'aboutissement de la procédure de destitution du président.
A quelques mois des élections, la marge de manœuvre présidentielle est bien étroite et l'on voit mal quelle incantation politique il pourrait formuler pour renverser cette tendance désavantageuse. Pendant ce temps, la querelle de leadership semble s'être déplacée entre ses prédécesseurs Marc Ravalomana et Andry Rajoelina, grands gagnants du brouillard politicien qui traverse la Grande île.
Ces derniers ont le remake d'un contentieux à solder, le second ayant poussé le premier hors du Palais. Ravalomana et Rajoelina sont bien déterminés à en découdre, même s'il fallait en passer par un «coup d'Etat constitutionnel» qui ne dit pas son nom et dont ils ont ardemment soufflé sur les braises. Avec le soufflet de la contestation par la rue.