Lutter contre la mendicité, ce me semble, c’est lutter contre la pauvreté sous toutes ses formes, c’est lutter contre l’exode rural, c’est lutter contre l’obscurantisme et c’est enfin, lutter contre l’immigration. Partie membre à la CEDEAO, au nom du principe de la libre circulation des biens et des personnes dans l’espace CEDEAO et du droit d’aller et venir ou de la liberté d’aller et venir, le Sénégal est astreint de garder ses frontières ouvertes.
Aussi, en tant que partie membre à la Convention relative aux droits des enfants, le Sénégal s’est inscrit très tôt dans une dynamique de prévention légale de la mendicité en adoptant la loi 75-77 du 09 juillet 1975 interdisant la mendicité, sauf dans les lieux de culte, c’est à dire quatre ans avant la parution du roman de Mme Aminata Sow Fall la « Grève des Batu » éditée en 1979 relatant l’histoire d’une grève imaginaire de mendiants.
Quarante et un an (41 ans), après le vote de la loi 75-77 du 09 juillet 1975 interdisant la mendicité, sauf dans les lieux de culte, en sa séance du Vendredi 29 Avril 2009 , l’Assemblée nationale du Sénégal a adopté la loi n° 2005-06 relative à la lutte contre la Traite des personnes et Pratiques assimilées et à la Protection des victimes.
Aujourd’hui, (Juillet 2016) sur décision du Président Macky Sall dont il faut saluer le sens de la république et la sensibilité à la condition des enfants de la rue (même si on n’a pas enregistré l’unanimité autour de la question), le gouvernement du Sénégal a engagé une campagne importante visant à retirer les enfants de la rue. Par cet acte, il soustrait en même temps, les enfants des dangers auxquels ils sont quotidiennement exposés dans la rue que sont : la pédophilie, les accidents de la circulation, la vente et la consommation de drogues et les maladies.
A côté de cette décision du Président Macky Sall de retirer les enfants de la rue, qui est l’affirmation d’une volonté politique visant le respect des droits de l’enfant dans notre pays, par ailleurs, il faut noter que, dans le cadre de la prévention légale, il y a la loi n° 2005-06 relative à la lutte contre la Traite des personnes et Pratiques assimilées et à la Protection des victimes qui interdit les enfants d’être dans la rue sous les formes incriminées. Et pourtant, en ce qui concerne les « Serigne Daara » (marabouts ou maitres coraniques) qui organisent la mendicité des enfants en vue d’en tirer profit, qui détournent les enfants pour les livrer à la mendicité, qui exercent une pression sur les enfants pour les inciter à mendier, la loi est claire et sans équivoque. Elle dispose en son article 3 : « Quiconque organise la mendicité d’autrui en vue d’en tirer profit embauche, entraîne ou détourne une personne en vue de la livrer à la mendicité ou d’exercer sur elle une pression pour qu’elle mendie ou continue de le faire est puni d’un emprisonnement de 2 à 5 ans et d’une amende de 500 000 francs à 2 000 000 francs. »
Alors, qu’est ce qui empêche l’application de cette loi ? Ce qui est certain, le Président Macky Sall n’est pas Mour Ndiaye. Parce qu’il est Président de la république. Il n’a autre ambition que servir le Sénégal. Le Président Macky Sall n’est pas Kéba Dabo. Parce qu’il n’est au service de personne d’autre que le peuple sénégalais qui l’a élu, au service de qui, il est, depuis 2012, contrairement à ce que pensent certains.
Sur la question du retrait des enfants de la rue, avons-nous besoin que les américains ou les européens nous disent ce qui est bon pour nos enfants et ce qui ne l’est pas? Bref ! Sommes-nous des automates à la merci des américains et des européens incapables de penser et de raisonnement logique ? Dire que le gouvernement du Président Macky Sall a agi sous la dictée des blancs américains ou européens, est une insulte faite à l’intelligence des sénégalais et à notre condition d’homme doté de raison et de libre arbitre.
Expulsés à deux cents kilomètres de la ville, conscients de la place qu’ils occupent dans la société, les mendiants, dans la « Grève des Batu », se sont organisés dans la solidarité pour refuser la violence et l’humiliation. Ainsi, ils sont entrés en grève. Aussitôt, les conséquences se sont fait sentir. Ironie du sort, après avoir expulsé les mendiants de la ville, Mour Ndiaye a eu besoin d’eux pour réaliser un sacrifice qui aurait pour objectif de lui attribuer le poste de vice-président. Les mendiants refusèrent son offre. En conséquence, Mour Ndiaye a vu son rêve s’écrouler comme un château de carte avec la nomination de Toumane Touré, ministre de l’intérieur au poste de vice-président.
Nous avons tous, souvent entendu les gens dire « seul le travail paye » En vérité, le travail est-il à lui seul, la clé d’un succès ou d’une réussite quelconque ? Si quoique fasse en tant qu’individu, il y a une main invisible appelée à la rescousse par le sacrifice ou par la charité ou, l’aumône à qui il est imputé le succès ou la réussite de l’entreprise, dans ce cas, quelle place devrions-nous accorder au travail et aux efforts personnels dans ce que nous accomplissons tous les jours ?
Des solutions sont mises en œuvre par le gouvernement du Sénégal pour lutter contre la mendicité des enfants et leur maintien dans la rue telles que : la sensibilisation des familles des enfants -mendiants sur leurs responsabilités, sur les risques qu’ils encourent dans la rue et l’aide apportée aux familles d’où sont extraits les enfants-mendiants et les « Serigne Daara » à qui, ils sont confiés pour assurer leur éducation religieuse. Cependant, ces solutions mises en œuvre par les autorités gouvernementales, qualifiées de mesures de prévention ne sont-elles pas de par leur nature, des mesures qui encourageraient le développent de la mendicité des enfants et leur maintien dans la rue ?
En donnant 50.000 F aux familles des enfants- mendiants en plus du savon, du riz et de l’huile, en les faisant bénéficier des bourses de sécurité familiale et des services de la Cmu, en octroyant aux « Serigne Daara » 75.000 F, du riz, de l’huile et du savon, ne sommes-nous pas en train de pousser d’autres à faire la même chose ? Et lorsqu’ils auront épuisé leur dépense mensuelle octroyée, lorsque les projets qu’ils auront mis en place avec l’appui de l’Etat échoueront, dans ces cas, que fera le gouvernement?
L’application et l’amélioration de la loi (la loi n° 2005-06 relative à la lutte contre la Traite des personnes et Pratiques assimilées et à la Protection des victimes), seraient à mon humble avis, plus efficientes que la mise en œuvre de l’ensemble des mesures d’accompagnement combinées à caractère économique. Sur ce, le gouvernement se doit d’éviter d’encourager l’installation d’une culture de l’assistanat chez les cibles dans un contexte de raréfaction des ressources. Jusque maintenant, c’est l’argumentaire économique qui est mis en avant par les autorités. Dans cette situation, le risque serait que les cibles utilisent l’’argumentaire économique comme une condition sine qua non pour ne pas envoyer mendier les enfants dans les rues.
L’assistance de l’Etat aux familles des enfants-mendiants et aux « Serigne Daara » qui les font mendier dans la rue, doit être accompagnée de l’application de la loi en vigueur et de son amélioration, sinon, le gouvernement prend le risque d’encourager la mendicité au lieu de la tuer à l’œuf.
La loi doit s’appliquer. Lex dura lex. Sur ce chapitre, le Président Macky Sall ne peut pas se substituer aux forces de l’ordre, de sécurité et aux magistrats, parties prenantes en charge de son application.
De la fiction de la « Grève des Batu » de Mme Aminata Sow Fall à la brûlante réalité aujourd’hui d’hui, d’une mendicité grandissante, galopante et massive à Dakar et dans les centres urbains contre laquelle le Président Macky Sall est en logique de guerre est venu s’ajouter malencontreusement l’apparition d’un phénomène nouveau qu’est le terrorisme qui ne tergiverse pas à utiliser les enfants comme des kamikazes pour commettre leurs forfaits ignominieux. (Exemples du Cameroun et du Nigéria).
Enfants, vivants dans la pauvreté et le dénuement total, sans défense, ces enfants-mendiants sont à la merci des criminels de tout acabit, qui rodent dans la rue. En effet, est-il nécessaire de le rappeler que les enfants de la rue en cause, au jour d’hui, dans cette campagne, appartiennent sans risque de commettre une erreur à des familles pauvres ou extrêmement pauvres dont certains parents se réjouissent du départ. Bref ! Disons-le sans ambages, dans certaines familles, le départ de l’enfant est malheureusement perçu par les parents comme une bouche de moins à nourrir. Un fardeau, un poids que le « Serigne Daara » à qui l’enfant est confié aura enlevé de leurs épaules. Ce type de parents ont-ils une once de sentiment d’affection pour leurs enfants ?
Grosso modo, la lutte contre la mendicité au Sénégal sera longue et à l’échelle des générations. Elle exige des autorités gouvernementales, d’une part, de donner du temps au temps pour que le changement de mentalité nécessaire chez les populations puisse s’opérer et d’autre part, de combiner plusieurs mesures aux effets fécondants et complémentaires à savoir : la mise en application de la loi en vigueur et de son amélioration, la sensibilisation (négociation et dialogue), l’éducation, la communication et la mise en œuvre de mesures d’accompagnement adaptées et efficaces..
Ce que je crois : les résultats attendus du retrait des enfants de la rue ne seront jamais atteints, tant que nous n’aurons pas appliqué et amélioré la loi (la loi n°2005-06 relative à la lutte contre la Traite des personnes et Pratiques assimilées et à la Protection des victimes en vigueur) ; tant que nous n’aurons pas éradiqué la pauvreté et tant que nous continuerons à croire que nous devons notre promotion au sacrifice ou à la charité.
Le Président Macky Sall n’est ni Mour Ndiaye ni Keba Dabo de la «Greve des Batu » de Mme Aminata Sow Fall. La « Greve des Batu » n’aura pas lieu.
Vive le Sénégal !
Vive la république !
Baba Gallé Diallo
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