Comment préparez-vous la défense de Karim Wade dont le procès est prévu le 31 juillet prochain ?
Avec le bâtonnier Jean René Fartoir et l’ensemble des avocats sénégalais en charge du dossier de Karim, nous voulons aborder d’abord les choses d’une façon consensuelle. Nous disons au Président Macky Sall et à son nouveau Premier ministre, (Mahammad Dionne, Ndlr) que cette affaire ne devrait pas être une affaire politique dans laquelle ils risqueraient de s’enfermer. Nous leur disons que ce dossier judiciaire pose deux grandes difficultés. La première difficulté est qu’au regard des normes internationales juridiques, la Crei n’a aucune légitimité en ce qu’elle a été supprimée par la loi, puis réintroduite par un décret. Ce qui est impossible en droit.
Mais, le concepteur de ce décret dit que la Crei n’a jamais été abrogé…
Elle n’a pas été abrogée. Mais vous avez une loi constitutionnelle qui a mis en place un Code de l’organisation judiciaire où il y a toutes les juridictions, sauf la Crei. Ce qui revient à dire que cette loi constitutionnelle a abrogé la Crei, puisqu’elle ne figure plus dans le Code de l’organisation judiciaire du pays. Et quand une loi abroge, un décret ne peut pas faire revivre. La deuxième chose est que cette Crei oblige la défense à prouver son innocence. Alors que d’habitude dans toutes les grandes démocraties, les grands systèmes juridiques du monde, c’est à l’accusation de prouver les charges qui pèsent contre une personne. Si c’était l’inverse, et c’est le cas avec la Crei, il s’agit d’un renversement de la charge de la preuve, du principe de la présomption d’innocence, de l’exercice des droits humains. Et ce n’est pas juridiquement admissible. La troisième chose est que la Crei autorise l’appel d’un certain nombre de décisions, par exemple, dans la phase d’instruction au Parquet. C’est-à -dire à la partie poursuivante, mais non pas à la défense. Nous sommes dans une rupture d’égalité des droits entre l’accusation et la défense. Et cette rupture d’égalité nous porte un énorme préjudice.
Selon vous, tout est illégal depuis le début. Donc sur quoi vous vous êtes basés pour plaider la cause de Karim devant les tribunaux français ?
Tout est illégal depuis le début de cette organisation judiciaire. Et c’est dommage parce que le Sénégal est un grand pays de droit. Le pays a l’un des plus beaux systèmes juridiques depuis toujours et qui respectait les droits des uns et des autres. Mais, c’est dommage concernant le jugement à venir du fils de l’ancien président de la République, qu’on soit en face d’une fracture de l’Etat de droit. Tous ceux qui admirent et respectent le Sénégal ne peuvent pas accepter cet Etat-là . Il y a maintenant des moyens aussi d’en sortir. En dépit de cette procédure extrêmement dure, contraire aux droits de l’Homme, aux droits de la défense de Karim, nous avons apporté un certain nombre d’éléments qui prouvent son innocence. Le premier élément qui est tangible, c’est la France qui l’apporte.
La France n’a jamais dit que Karim est innocent, mais qu’elle n’a pas d’éléments suffisants pour le poursuivre devant une Cour…
Cela suffit en termes judiciaire et juridique. C’est dire qu’on ne peut pas le poursuivre, on ne peut pas le condamner. Et, par conséquent, on ne doit pas le poursuivre. La France est venue dire qu’il y a un classement à sens unique. Karim Wade a deux pays : le Sénégal et la France. Et s’il avait pris de l’argent au Sénégal, il l’aurait forcément logé en France. Ou cet argent aurait forcément passé par la France ou aurait été dépensé en France. Mais, il n’en est rien.
Karim aurait peut-être compris, en tant que financier, que ce n’est pas vers ce pays qu’il faut aller planquer de l’argent, au vu de la sécurité financière de ce pays.
Quand on a beaucoup d’argent, quand on a volé de l’argent, quand on a planqué de l’argent, on est heureux de dépenser dans le pays qu’on aime où habite sa famille. Ce n’est pas le cas avec Karim. Il a bénéficié d’un classement sans suite en France, contrairement à ce qui a été indiqué par le Sénégal récemment. Il n’y a pas de procédure en cours en France. J’ai été reçu par le conseiller-Afrique du président de la République à l’Elysée qui m’a indiqué qu’il n’y a pas de procédure judiciaire concernant Karim Wade en France. Donc, lorsqu’au lendemain du classement sans suite, le Sénégal est venu dire qu’il y a des affaires en cours. Je dis non.
En tant qu’avocat, pensez-vous que le conseiller-Afrique du président de la République à l’Elysée est la personne la mieux indiquée pour parler d’une affaire judiciaire ?
Evidemment. Lorsqu’il s’agit d’exécution de commission rogatoire, de coopération entre Etats, tout passe à la fois par le biais du Quai d’Orsay, à la fois par la Chancellerie et sous le contrôle de l’Elysée. Aujourd’hui, nous avons l’Elysée, la Chancellerie, le Quai d’Orsay qui confirment qu’il n’y a pas d’affaires en cours concernant Karim Wade. C’est une preuve tangible de l’innocence d’une personne. Si Karim s’était enrichi tous azimuts, on aurait trouvé quelque chose en France. Mais, il n’en est rien. En voyant son père, Abdoulaye Wade, et sa femme dans son petit pavillon de Molière à Versailles, j’ai l’impression d’être en face d’un avocat à la retraite qui vit bien, mais pas dans l’opulence. C’est exactement la situation du patrimoine et de l’existence de toute la famille Wade en France.
Est-ce que avez-vous rencontré Abdoulaye Wade pour préparer la défense de son fils ?
Je ne l’ai pas rencontré. Mais, mes collaborateurs l’ont rencontré, il y a quelques jours, à Dakar. Il est temps de rassembler autour du président de la République, Macky Sall, pour lui demander une justice indépendante et non politique ou policière. Car au cas contraire, nous allons à la catastrophe politique.
On parle de quelque 300 milliards imputés à votre client, qu’est-ce que cela vous fait ?
Ça sort de nulle part. Il n’y a rien qu’on puisse imputer à Karim Wade dans le dossier. C’est à l’accusation de faire la preuve. Mais elle ne rapporte rien. En retour, c’est la France qui apporte la preuve que Karim ne s’est pas enrichi. Je n’ai pas les moyens de vous en dire plus.
N’est-il pas exagéré de dire que si Karim a été blanchi en France, il doit l’être partout, surtout qu’il traîne des casseroles ?
Il est blanchi sur un certain nombre d’affaires. Donc, on ne peut pas lui coller de casseroles. Les casseroles font partie de la diffamation, de l’injure, de la polémique politicienne pour détruire la réputation d’un homme. Vous n’avez rien qui peut condamner judiciairement Karim. Et vous avez tout ce qui permettrait de condamner le Sénégal pour détention arbitraire, pour jugement hors-la-loi. C’est dire qu’un grand pays d’Afrique n’est pas susceptible de s’intégrer dans le consortium des libertés publiques et des grandes démocraties dans ce monde.
Qu’allez-vous plaider le jour du procès ?
Nous allons plaider une certitude et un doute. La certitude est que, si Karim est condamné par la Crei, nous ferons condamner le Sénégal par la communauté internationale juridique. Les plus grands juristes du monde viennent de dire que le Sénégal n’est pas un pays de droit. Et c’est humiliant. Ce message doit être saisi par le Président Macky Sall qui doit garantir les Institutions de la République et non faire passer un procès politique. Car si Karim Wade est condamné, le Sénégal le sera également. Et c’est plus grave pour le Sénégal d’être condamné que pour Karim Wade de devenir une sorte de martyr. Le doute est que je ne sais pas quand on obtiendra satisfaction. Mais, nous obtiendrons satisfaction. Est-ce que ce sera par l’intelligence du Président Macky Sall ou de son Premier ministre ? Je l’espère.
N’êtes-vous pas en train de politiser cette affaire quand vous faites appel à ces derniers ?
L’accusation de Karim est politique. Si c’était une accusation juridique ou judiciaire, on aurait fait appel au droit. Karim est un ancien ministre, donc il devrait être entendu par les juridictions réservées aux anciens ministres. Pourquoi a-t-on cherché une juridiction politique pour le juger ? C’est du lynchage parce qu’on ne respecte pas la présomption d’innocence, le délai de détention légale. C’est du lynchage lorsqu’on demande à la défense de prouver son innocence et non pas l’accusation d’assurer les preuves contre une personne.
Vous avez récemment rencontré Karim, quel est son état d’esprit ?
Karim est combatif, serein. Il est confiant parce qu’il aime son pays. Il est persuadé qu’il va se passer quelque chose dans la vie politique permettant à chacun de se réconcilier. Et nous, les avocats, de saluer l’initiative qui sera prise. Pour nous, c’est toujours facile d’être en face d’un procès illégal pour en trouver l’illégalité. Le Sénégal est un pays de droit, il faut absolument que le Président Macky Sall continue sur cette voie. Et s’il n’y a pas de procès équitable dans l’affaire Karim Wade, le Sénégal fera un grand bond en arrière. Car le pays perdra en crédibilité.
Avec le bâtonnier Jean René Fartoir et l’ensemble des avocats sénégalais en charge du dossier de Karim, nous voulons aborder d’abord les choses d’une façon consensuelle. Nous disons au Président Macky Sall et à son nouveau Premier ministre, (Mahammad Dionne, Ndlr) que cette affaire ne devrait pas être une affaire politique dans laquelle ils risqueraient de s’enfermer. Nous leur disons que ce dossier judiciaire pose deux grandes difficultés. La première difficulté est qu’au regard des normes internationales juridiques, la Crei n’a aucune légitimité en ce qu’elle a été supprimée par la loi, puis réintroduite par un décret. Ce qui est impossible en droit.
Mais, le concepteur de ce décret dit que la Crei n’a jamais été abrogé…
Elle n’a pas été abrogée. Mais vous avez une loi constitutionnelle qui a mis en place un Code de l’organisation judiciaire où il y a toutes les juridictions, sauf la Crei. Ce qui revient à dire que cette loi constitutionnelle a abrogé la Crei, puisqu’elle ne figure plus dans le Code de l’organisation judiciaire du pays. Et quand une loi abroge, un décret ne peut pas faire revivre. La deuxième chose est que cette Crei oblige la défense à prouver son innocence. Alors que d’habitude dans toutes les grandes démocraties, les grands systèmes juridiques du monde, c’est à l’accusation de prouver les charges qui pèsent contre une personne. Si c’était l’inverse, et c’est le cas avec la Crei, il s’agit d’un renversement de la charge de la preuve, du principe de la présomption d’innocence, de l’exercice des droits humains. Et ce n’est pas juridiquement admissible. La troisième chose est que la Crei autorise l’appel d’un certain nombre de décisions, par exemple, dans la phase d’instruction au Parquet. C’est-à -dire à la partie poursuivante, mais non pas à la défense. Nous sommes dans une rupture d’égalité des droits entre l’accusation et la défense. Et cette rupture d’égalité nous porte un énorme préjudice.
Selon vous, tout est illégal depuis le début. Donc sur quoi vous vous êtes basés pour plaider la cause de Karim devant les tribunaux français ?
Tout est illégal depuis le début de cette organisation judiciaire. Et c’est dommage parce que le Sénégal est un grand pays de droit. Le pays a l’un des plus beaux systèmes juridiques depuis toujours et qui respectait les droits des uns et des autres. Mais, c’est dommage concernant le jugement à venir du fils de l’ancien président de la République, qu’on soit en face d’une fracture de l’Etat de droit. Tous ceux qui admirent et respectent le Sénégal ne peuvent pas accepter cet Etat-là . Il y a maintenant des moyens aussi d’en sortir. En dépit de cette procédure extrêmement dure, contraire aux droits de l’Homme, aux droits de la défense de Karim, nous avons apporté un certain nombre d’éléments qui prouvent son innocence. Le premier élément qui est tangible, c’est la France qui l’apporte.
La France n’a jamais dit que Karim est innocent, mais qu’elle n’a pas d’éléments suffisants pour le poursuivre devant une Cour…
Cela suffit en termes judiciaire et juridique. C’est dire qu’on ne peut pas le poursuivre, on ne peut pas le condamner. Et, par conséquent, on ne doit pas le poursuivre. La France est venue dire qu’il y a un classement à sens unique. Karim Wade a deux pays : le Sénégal et la France. Et s’il avait pris de l’argent au Sénégal, il l’aurait forcément logé en France. Ou cet argent aurait forcément passé par la France ou aurait été dépensé en France. Mais, il n’en est rien.
Karim aurait peut-être compris, en tant que financier, que ce n’est pas vers ce pays qu’il faut aller planquer de l’argent, au vu de la sécurité financière de ce pays.
Quand on a beaucoup d’argent, quand on a volé de l’argent, quand on a planqué de l’argent, on est heureux de dépenser dans le pays qu’on aime où habite sa famille. Ce n’est pas le cas avec Karim. Il a bénéficié d’un classement sans suite en France, contrairement à ce qui a été indiqué par le Sénégal récemment. Il n’y a pas de procédure en cours en France. J’ai été reçu par le conseiller-Afrique du président de la République à l’Elysée qui m’a indiqué qu’il n’y a pas de procédure judiciaire concernant Karim Wade en France. Donc, lorsqu’au lendemain du classement sans suite, le Sénégal est venu dire qu’il y a des affaires en cours. Je dis non.
En tant qu’avocat, pensez-vous que le conseiller-Afrique du président de la République à l’Elysée est la personne la mieux indiquée pour parler d’une affaire judiciaire ?
Evidemment. Lorsqu’il s’agit d’exécution de commission rogatoire, de coopération entre Etats, tout passe à la fois par le biais du Quai d’Orsay, à la fois par la Chancellerie et sous le contrôle de l’Elysée. Aujourd’hui, nous avons l’Elysée, la Chancellerie, le Quai d’Orsay qui confirment qu’il n’y a pas d’affaires en cours concernant Karim Wade. C’est une preuve tangible de l’innocence d’une personne. Si Karim s’était enrichi tous azimuts, on aurait trouvé quelque chose en France. Mais, il n’en est rien. En voyant son père, Abdoulaye Wade, et sa femme dans son petit pavillon de Molière à Versailles, j’ai l’impression d’être en face d’un avocat à la retraite qui vit bien, mais pas dans l’opulence. C’est exactement la situation du patrimoine et de l’existence de toute la famille Wade en France.
Est-ce que avez-vous rencontré Abdoulaye Wade pour préparer la défense de son fils ?
Je ne l’ai pas rencontré. Mais, mes collaborateurs l’ont rencontré, il y a quelques jours, à Dakar. Il est temps de rassembler autour du président de la République, Macky Sall, pour lui demander une justice indépendante et non politique ou policière. Car au cas contraire, nous allons à la catastrophe politique.
On parle de quelque 300 milliards imputés à votre client, qu’est-ce que cela vous fait ?
Ça sort de nulle part. Il n’y a rien qu’on puisse imputer à Karim Wade dans le dossier. C’est à l’accusation de faire la preuve. Mais elle ne rapporte rien. En retour, c’est la France qui apporte la preuve que Karim ne s’est pas enrichi. Je n’ai pas les moyens de vous en dire plus.
N’est-il pas exagéré de dire que si Karim a été blanchi en France, il doit l’être partout, surtout qu’il traîne des casseroles ?
Il est blanchi sur un certain nombre d’affaires. Donc, on ne peut pas lui coller de casseroles. Les casseroles font partie de la diffamation, de l’injure, de la polémique politicienne pour détruire la réputation d’un homme. Vous n’avez rien qui peut condamner judiciairement Karim. Et vous avez tout ce qui permettrait de condamner le Sénégal pour détention arbitraire, pour jugement hors-la-loi. C’est dire qu’un grand pays d’Afrique n’est pas susceptible de s’intégrer dans le consortium des libertés publiques et des grandes démocraties dans ce monde.
Qu’allez-vous plaider le jour du procès ?
Nous allons plaider une certitude et un doute. La certitude est que, si Karim est condamné par la Crei, nous ferons condamner le Sénégal par la communauté internationale juridique. Les plus grands juristes du monde viennent de dire que le Sénégal n’est pas un pays de droit. Et c’est humiliant. Ce message doit être saisi par le Président Macky Sall qui doit garantir les Institutions de la République et non faire passer un procès politique. Car si Karim Wade est condamné, le Sénégal le sera également. Et c’est plus grave pour le Sénégal d’être condamné que pour Karim Wade de devenir une sorte de martyr. Le doute est que je ne sais pas quand on obtiendra satisfaction. Mais, nous obtiendrons satisfaction. Est-ce que ce sera par l’intelligence du Président Macky Sall ou de son Premier ministre ? Je l’espère.
N’êtes-vous pas en train de politiser cette affaire quand vous faites appel à ces derniers ?
L’accusation de Karim est politique. Si c’était une accusation juridique ou judiciaire, on aurait fait appel au droit. Karim est un ancien ministre, donc il devrait être entendu par les juridictions réservées aux anciens ministres. Pourquoi a-t-on cherché une juridiction politique pour le juger ? C’est du lynchage parce qu’on ne respecte pas la présomption d’innocence, le délai de détention légale. C’est du lynchage lorsqu’on demande à la défense de prouver son innocence et non pas l’accusation d’assurer les preuves contre une personne.
Vous avez récemment rencontré Karim, quel est son état d’esprit ?
Karim est combatif, serein. Il est confiant parce qu’il aime son pays. Il est persuadé qu’il va se passer quelque chose dans la vie politique permettant à chacun de se réconcilier. Et nous, les avocats, de saluer l’initiative qui sera prise. Pour nous, c’est toujours facile d’être en face d’un procès illégal pour en trouver l’illégalité. Le Sénégal est un pays de droit, il faut absolument que le Président Macky Sall continue sur cette voie. Et s’il n’y a pas de procès équitable dans l’affaire Karim Wade, le Sénégal fera un grand bond en arrière. Car le pays perdra en crédibilité.