En embuscade, le mouvement espère que la rentrée sociale sera la sienne et qu'elle lui permettra d'être à nouveau audible.
On en a entendu parler un peu, puis beaucoup, puis pratiquement plus du tout. Pourtant, s'il a été moins visible ces derniers mois, l'embrasement des «gilets jaunes» ne s'est jamais réellement éteint. Les groupes Facebook et les médias dédiés, toujours actifs, ont permis de maintenir le feu sacré.
Bien sûr, le mouvement s'est essoufflé au fil des samedis et les ronds-points ont été progressivement abandonnés. Mais le coronavirus est passé par-là, et beaucoup comptent aujourd'hui souffler sur les braises encore chaudes de l'une des grognes sociales les plus importantes de la Ve République.
Pour y arriver, les contestataires se sont à nouveau donné rendez-vous, le 12 septembre. Un samedi, évidemment.
Allié inattendu
Référendum d'initiative citoyenne, rétablissement de l'ISF, diminution des taxes relatives aux produits de première nécessité… Près de deux ans après le début de leur mobilisation, les «gilets jaunes» n'ont pas obtenu gain de cause sur une grande partie de leurs revendications.
Moins visible, leur colère noire est pourtant encore bien présente, assurent leurs sympathisant·es.
«Le Covid a prouvé nos propos sur la dégradation du système de santé et les limites du système capitaliste.»
Jérôme Rodrigues, «gilet jaune»
«Force est de constater que l'opinion publique est encore proche de nos revendications, avance Jérôme Rodrigues, à l'initiative de l'appel du 12 septembre. Avec la crise à venir, les gens qui allaient bien financièrement et qui n'ont jamais connu la galère vont se casser la gueule.»
Cette figure des «gilets jaunes» tient le pari: avec la crise sanitaire, le mouvement est plus actuel que jamais. «Ça n'a fait que confirmer ce qu'on balance depuis deux ans. Le Covid a été notre meilleur allié. Il a prouvé nos propos sur la dégradation du système de santé et les limites du système capitaliste», affirme-t-il.
L'exaspération a peut-être même grandi avec l'épidémie et l'aggravation des inégalités sociales qu'elle a générée. L'analyse est en tout cas partagée par beaucoup de «gilets jaunes»: «Le mécontentement s'est élargi avec la mise à nu des mensonges du gouvernement et de ses alliés médiatiques, pharmaceutiques ou financiers, de leur acharnement criminel à continuer les suppressions de lits et à saccager notre système de santé. Et malgré les profits et les milliards donnés aux grands groupes, les licenciements se sont accélérés!», vocifère Sabine, qui vit à Montpellier.
Retour aux fondamentaux
Identifiable et connu hors des cercles des «gilets jaunes», Jérôme Rodrigues a voulu profiter de cette colère et de sa notoriété pour relancer la mécanique.
Les samedis de manifestations, son visage était l'un des plus connus dans la foule –pour son verbe, mais également parce que cet homme à la barbe hirsute a perdu l'usage de son œil droit des suites de violences policières. «Tout le monde a utilisé mon nom, mais pas moi. Alors je me suis dit que si ça permettait de rassembler, il fallait que je le fasse», souligne-t-il.