L’Alliance pour la république du Président Macky Sall n’est décidément pas un parti comme les autres. Les Fédayins de cette formation politique sont sans retenue quand il s’agit de cogner, d’insulter, de menacer, de vilipender ou tout simplement de flétrir des personnages emblématiques (Amath Dansokho) ou de broyer des premiers de classe.
Il faut dire que le Président de la république n’a pas le parti qu’il mérite tant ces Fédayins, dépouillés de toute légitimité politique si ce n’est celle de premiers compagnons, ne cessent de le mettre dans l’embarras. Le comportement de ces éléments inclassables (éléments hors du commun?) tranchent tellement avec l’attitude du Chef que le risque est grand que les Sénégalais, une fois dans l’isoloir, oublient les réalisations du Président Macky Sall pour sanctionner le martyr ou le malaise que leur font subir les Fédayins de l’APR. En 2012, les Sénégalais avaient sciemment ignoré les réalisations de Maître Wade pour sanctionner les décisions malheureuses de son régime ainsi que les comportements maladroits de sa bande.
Les réalisations sont certes importantes en politique, mais il y a une subtilité propre à notre peuple qu’il ne faudrait pas perdre de vue : les Sénégalais, dans leur grande majorité, préfèrent affronter le dénuement matériel au quotidien que de souffrir en permanence du malaise porté par les effluves des discours nauséabonds dans l’espace public. Il s’agit d’un jeu entre pouvoir et opposition me diriez-vous : offensive et contre-offensive. Mais n’oublions pas cet autre péché mignon de notre peuple à avoir tendance à toujours se mettre du côté du faible. Le danger pour le pouvoir est d’emmener l’électeur sénégalais à un point où il sera confronté à une question simple mais combien redoutable : Suis-je prêt à endurer ce même martyr ou un martyr de plus forte intensité pour les cinq prochaines années?
Nous ne voulons priver personne de son droit de défendre le Président de la République et son régime. Mais l’argument et l’injure peuvent-ils faire bon ménage ?
Les quelques rhéteurs et autres logiciens de talent du parti sont devenus inaudibles dans ce brouhaha devenu fou. La preuve : L’idée formulée autour du binôme République et Émergence, qui invite justement à la réflexion, aussitôt émise fut emportée par les salves injurieuses à l’endroit de certains partenaires aujourd’hui voués aux gémonies. C’est la preuve que ces Fédayins de l’APR sont plus disposés à porter l’injure à la bouche qu’à s’engager dans les jeux de l’esprit ou dans un chantier discursif qui exige, un tant soit peu, de se « casser les os de la tête ». Les comportements regrettables des uns et des autres ne peuvent être tous mis sur le compte de la jeunesse de cette formation politique. Si ce parti est jeune, la plupart de ses militants ne sont pas à leur première adhésion dans une formation politique. Et à force de multiplier les maladresses, dans un parti où tout le monde ou presque est porte-parole, ces Fédayins, dont la plupart ne dispose d’aucune base politique avérée, font courir le risque de produire un véritable «Waterloo» autour du Président en cas de deuxième tour à l’élection présidentielle. L’affront public lancé à la figure du Parti socialiste, ces derniers temps, ne saurait faire rêver à meilleure cure de javel pour les militants de ce parti qu’un éventuel second tour à l’élection présidentielle où le Président serait en ballotage et les Socialistes dans la posture de faiseurs de Roi. Dans une élection, la posture intelligente commande de prendre en compte tous les scénarii possibles. Pourtant, quoi de plus de simple que de demander le soutien des Socialistes sur la base de cet argument imparable : Nous avons déjà travaillé ensemble, nous nous connaissons, nous avons réussi de grandes choses ensemble, pourquoi nous arrêter en si bon chemin? Continuons ensemble dans l’intérêt du Sénégal !
Mais les calculs de positionnement politique, n’importe où, n’importe quand, n’importe comment et à propos de tout et son contraire, inaugurent et alimentent sans cesse, avec la transhumance, le versant nocturne de notre démocratie. Encore que la transhumance est un phénomène plus facile à endiguer car il n’y a pas plus docile qu’un transhumant qui, comme l’étranger, s’inscrit forcément, au moins au départ, dans un mode coopératif. Mais le professionnel de l’intrigue en politique n’a que ses intérêts personnels, bassement matériels, en ligne de mire. Il est si concentré sur son objectif qu’il devient inconscient des dangers qu’il fait courir à la République en tirant sur des ficelles même des plus dangereuses.
Certains pour donner plus de gages au Président de la République, tout en lorgnant je ne sais quelle station, essayent de lui vendre l’idée de revenir sur sa promesse de réduire son mandat à cinq ans. Le prétexte est vite trouvé et l’amalgame n’est jamais loin: La constitution est au-dessus de la parole du candidat Macky ou le slogan « Touches pas à ma constitution». Ils ont tout faux car le débat se situe ailleurs. Il s’agit d’un engagement politique entre le Président de la République et son peuple qui exige, certes, dans son application, des retouches à la loi fondamentale. Il s’agit d’une question politique que certains voudraient résoudre dans les rets de la légalité constitutionnelle. Pourtant, il n’existe aucune antinomie entre le respect d’un engagement dû au peuple sénégalais et une modification de la constitution dans le cadre de la légalité républicaine. Faut-il simplement leur rappeler que la constitution ne vote pas !
L’option de coller à la lettre de la constitution existe mais elle est d’autant plus périlleuse que le Chef de l’État peut beaucoup y perdre en termes de crédibilité et d’image aux plans national et international. Un Président aussi bien élu (65%), suite à une alternance démocratique (fait encore rare en Afrique) et qui a volontairement décidé de renoncer à deux ans dans la durée de son mandat-engagement réitéré sur le perron de l’Élysée, lieu symbolique par excellence des rapports entre la France et ses anciennes colonies d’Afrique-, a une image trop lisse qui peut, pour un rien, être sévèrement écornée. C’est pourquoi, le ballon de sonde envoyé par le Ministre Mankeur Ndiaye, fixant la date de l’élection présidentielle pour 2019, fait froid dans le dos. Non seulement le Ministre a omis d’évoquer la possibilité d’un éventuel référendum ou d’une réforme par voie parlementaire, mais il laisse aussi transparaître, de manière subtile, une évolution dans le discours et dans les intentions du régime sur la question de la durée du mandat présidentiel. Autrement dit, même en cas de référendum, le résultat souhaité serait une victoire du Non. Si telle est la nouvelle volonté du régime, elle équivaudrait à un coup de poker car une victoire du Oui fragiliserait irrémédiablement le Chef de l’État.
L’option initiale du Chef de l’État d’organiser un référendum, devenu incontournable, me paraît être la solution la plus sage. Le Chef de l’État sera d’ailleurs gagnant à tous les coups à condition qu’il s’implique personnellement dans la campagne référendaire pour promouvoir l’option du Oui. De plus, le libellé de la question lui revient. En cas de victoire du Oui, c’est sa volonté qui aura triomphé et en cas de victoire du Non, c’est l’amour du peuple sénégalais à son égard qui serait plus fort que tout.
Autrement, c’est donner du pain béni à l’opposition. Il sera plus facile d’expliquer un Wakh-Wakhète du Président à des populations majoritairement analphabètes que les dédales d’une constitution toujours largement inspirée de celle de la 5e République. Plus fondamentalement, les questions d’éthique sont aujourd’hui les plus mobilisatrices au Sénégal. Inversement, l’on peut même soupçonner que si Maître Wade, tribun hors pair, n’a pu mobiliser les Sénégalais pour libérer son fils, c’est en grande partie en raison du paramètre éthique de l’équation.
Si le Président revient sur son engagement à réduire la durée de son mandat et que l’opposition parvienne à mobiliser autour de cette question et que la chienlit s’installe, les conséquences seront incalculables pour notre pays. D’abord, l’exception que le Président Macky Sall représente en Afrique et même dans le monde (vouloir réduire volontairement son mandat) volera en éclats. Ainsi, les images prises sur le perron de l’Élysée, le montrant en train de réitérer sa volonté de réduire son mandat, tourneront en boucle sur les télévisions du monde. Les opinions publiques occidentales qui ne s’embarrassent guère d’explications sophistiquées sauteront à l’inévitable conclusion : Un autre leader africain qui s’accroche au pouvoir !
Ensuite, dans le cadre africain, de donneur de leçons, notre pays sera logé à l’enseigne d’un État comme les autres avec à la clé une perte probable de leadership. L’amalgame sera vite fait avec les situations explosives ou potentiellement explosives sur le continent en rapport avec les projets de bricolage constitutionnel. Notre pays confirmerait ainsi que la règle en Afrique est la multiplication abusive des mandats électoraux et même leur prolongation indue tandis que leur limitation et leur réduction constituent l’exception. Par ce fait, notre pays se priverait de son rôle de médiateur dans les conflits électoraux en Afrique.
Enfin, m’inspirant de la formule de Jean Chrétien, ancien Premier ministre du Canada, à l’effet qu’il n’y a pas plus nerveux qu’un million de dollars, il apparait évident que le Plan Sénégal émergent (PSE) prendrait un sacré coup dans l’éventualité d’une situation insurrectionnelle. Prendre le risque de faire dérailler le PSE, revient à exposer le Président à tous les dangers à l’élection présidentielle.
En conclusion, le Président doit procéder à la reprise en main de l’APR qui, en l’état actuel, pourrait compromettre sa réélection à cause des agissements et comportements excessifs et nocifs de certains de ses militants. En mettant l’accent sur la massification au détriment de la discipline, l’APR court le risque de devenir un géant aux pieds d’argile. Il est d’ailleurs important de rappeler que le Sénégal est un peu à l’image des USA avec les indépendants (les sans partis chez nous) qui déterminent l’issue d’une élection. À cet égard, il est impératif d’avoir un parti discipliné dont les actions sont essentiellement orientées vers la promotion des politiques gouvernementales en vue de la satisfaction des besoins du plus grand nombre. Et sous ce rapport, les Sénégalais ont besoin d’être rassurés en ce qui a trait à l’APR en attendant la suite. C’est d’ailleurs sur un autre terrain que l’on attend le plus cette formation politique : Celui de l’animation dans la promotion du PSE afin de coller aux préoccupations quotidiennes des Sénégalais. Le Doyen Cheikh Hamidou Kâne- auteur du Chef d’œuvre littéraire et philosophique «l’Aventure ambiguë»- faisait allusion, dans une interview récente, de la politique d’animation rurale initiée par feu le Président Mamadou Dia dans les années 60 et qui était en voie d’opérer une révolution dans les campagnes sénégalaises. L’APR doit s’inspirer d’une telle politique, qui fait partie du patrimoine du Sénégal, en s’engageant dans la réflexion utile et l’action constructive et tourner ainsi le dos au débat politique violent dont les mots sanglants ont, parfois, la puissance d’une balle de fusil.
Mamadou Lamine Sylla, PhD, Montréal, Canada
Auteur du livre : Pour mieux amarrer l’Afrique noire à l’économie mondiale globalisée, Éditions L’Harmattan, 2015.
Il faut dire que le Président de la république n’a pas le parti qu’il mérite tant ces Fédayins, dépouillés de toute légitimité politique si ce n’est celle de premiers compagnons, ne cessent de le mettre dans l’embarras. Le comportement de ces éléments inclassables (éléments hors du commun?) tranchent tellement avec l’attitude du Chef que le risque est grand que les Sénégalais, une fois dans l’isoloir, oublient les réalisations du Président Macky Sall pour sanctionner le martyr ou le malaise que leur font subir les Fédayins de l’APR. En 2012, les Sénégalais avaient sciemment ignoré les réalisations de Maître Wade pour sanctionner les décisions malheureuses de son régime ainsi que les comportements maladroits de sa bande.
Les réalisations sont certes importantes en politique, mais il y a une subtilité propre à notre peuple qu’il ne faudrait pas perdre de vue : les Sénégalais, dans leur grande majorité, préfèrent affronter le dénuement matériel au quotidien que de souffrir en permanence du malaise porté par les effluves des discours nauséabonds dans l’espace public. Il s’agit d’un jeu entre pouvoir et opposition me diriez-vous : offensive et contre-offensive. Mais n’oublions pas cet autre péché mignon de notre peuple à avoir tendance à toujours se mettre du côté du faible. Le danger pour le pouvoir est d’emmener l’électeur sénégalais à un point où il sera confronté à une question simple mais combien redoutable : Suis-je prêt à endurer ce même martyr ou un martyr de plus forte intensité pour les cinq prochaines années?
Nous ne voulons priver personne de son droit de défendre le Président de la République et son régime. Mais l’argument et l’injure peuvent-ils faire bon ménage ?
Les quelques rhéteurs et autres logiciens de talent du parti sont devenus inaudibles dans ce brouhaha devenu fou. La preuve : L’idée formulée autour du binôme République et Émergence, qui invite justement à la réflexion, aussitôt émise fut emportée par les salves injurieuses à l’endroit de certains partenaires aujourd’hui voués aux gémonies. C’est la preuve que ces Fédayins de l’APR sont plus disposés à porter l’injure à la bouche qu’à s’engager dans les jeux de l’esprit ou dans un chantier discursif qui exige, un tant soit peu, de se « casser les os de la tête ». Les comportements regrettables des uns et des autres ne peuvent être tous mis sur le compte de la jeunesse de cette formation politique. Si ce parti est jeune, la plupart de ses militants ne sont pas à leur première adhésion dans une formation politique. Et à force de multiplier les maladresses, dans un parti où tout le monde ou presque est porte-parole, ces Fédayins, dont la plupart ne dispose d’aucune base politique avérée, font courir le risque de produire un véritable «Waterloo» autour du Président en cas de deuxième tour à l’élection présidentielle. L’affront public lancé à la figure du Parti socialiste, ces derniers temps, ne saurait faire rêver à meilleure cure de javel pour les militants de ce parti qu’un éventuel second tour à l’élection présidentielle où le Président serait en ballotage et les Socialistes dans la posture de faiseurs de Roi. Dans une élection, la posture intelligente commande de prendre en compte tous les scénarii possibles. Pourtant, quoi de plus de simple que de demander le soutien des Socialistes sur la base de cet argument imparable : Nous avons déjà travaillé ensemble, nous nous connaissons, nous avons réussi de grandes choses ensemble, pourquoi nous arrêter en si bon chemin? Continuons ensemble dans l’intérêt du Sénégal !
Mais les calculs de positionnement politique, n’importe où, n’importe quand, n’importe comment et à propos de tout et son contraire, inaugurent et alimentent sans cesse, avec la transhumance, le versant nocturne de notre démocratie. Encore que la transhumance est un phénomène plus facile à endiguer car il n’y a pas plus docile qu’un transhumant qui, comme l’étranger, s’inscrit forcément, au moins au départ, dans un mode coopératif. Mais le professionnel de l’intrigue en politique n’a que ses intérêts personnels, bassement matériels, en ligne de mire. Il est si concentré sur son objectif qu’il devient inconscient des dangers qu’il fait courir à la République en tirant sur des ficelles même des plus dangereuses.
Certains pour donner plus de gages au Président de la République, tout en lorgnant je ne sais quelle station, essayent de lui vendre l’idée de revenir sur sa promesse de réduire son mandat à cinq ans. Le prétexte est vite trouvé et l’amalgame n’est jamais loin: La constitution est au-dessus de la parole du candidat Macky ou le slogan « Touches pas à ma constitution». Ils ont tout faux car le débat se situe ailleurs. Il s’agit d’un engagement politique entre le Président de la République et son peuple qui exige, certes, dans son application, des retouches à la loi fondamentale. Il s’agit d’une question politique que certains voudraient résoudre dans les rets de la légalité constitutionnelle. Pourtant, il n’existe aucune antinomie entre le respect d’un engagement dû au peuple sénégalais et une modification de la constitution dans le cadre de la légalité républicaine. Faut-il simplement leur rappeler que la constitution ne vote pas !
L’option de coller à la lettre de la constitution existe mais elle est d’autant plus périlleuse que le Chef de l’État peut beaucoup y perdre en termes de crédibilité et d’image aux plans national et international. Un Président aussi bien élu (65%), suite à une alternance démocratique (fait encore rare en Afrique) et qui a volontairement décidé de renoncer à deux ans dans la durée de son mandat-engagement réitéré sur le perron de l’Élysée, lieu symbolique par excellence des rapports entre la France et ses anciennes colonies d’Afrique-, a une image trop lisse qui peut, pour un rien, être sévèrement écornée. C’est pourquoi, le ballon de sonde envoyé par le Ministre Mankeur Ndiaye, fixant la date de l’élection présidentielle pour 2019, fait froid dans le dos. Non seulement le Ministre a omis d’évoquer la possibilité d’un éventuel référendum ou d’une réforme par voie parlementaire, mais il laisse aussi transparaître, de manière subtile, une évolution dans le discours et dans les intentions du régime sur la question de la durée du mandat présidentiel. Autrement dit, même en cas de référendum, le résultat souhaité serait une victoire du Non. Si telle est la nouvelle volonté du régime, elle équivaudrait à un coup de poker car une victoire du Oui fragiliserait irrémédiablement le Chef de l’État.
L’option initiale du Chef de l’État d’organiser un référendum, devenu incontournable, me paraît être la solution la plus sage. Le Chef de l’État sera d’ailleurs gagnant à tous les coups à condition qu’il s’implique personnellement dans la campagne référendaire pour promouvoir l’option du Oui. De plus, le libellé de la question lui revient. En cas de victoire du Oui, c’est sa volonté qui aura triomphé et en cas de victoire du Non, c’est l’amour du peuple sénégalais à son égard qui serait plus fort que tout.
Autrement, c’est donner du pain béni à l’opposition. Il sera plus facile d’expliquer un Wakh-Wakhète du Président à des populations majoritairement analphabètes que les dédales d’une constitution toujours largement inspirée de celle de la 5e République. Plus fondamentalement, les questions d’éthique sont aujourd’hui les plus mobilisatrices au Sénégal. Inversement, l’on peut même soupçonner que si Maître Wade, tribun hors pair, n’a pu mobiliser les Sénégalais pour libérer son fils, c’est en grande partie en raison du paramètre éthique de l’équation.
Si le Président revient sur son engagement à réduire la durée de son mandat et que l’opposition parvienne à mobiliser autour de cette question et que la chienlit s’installe, les conséquences seront incalculables pour notre pays. D’abord, l’exception que le Président Macky Sall représente en Afrique et même dans le monde (vouloir réduire volontairement son mandat) volera en éclats. Ainsi, les images prises sur le perron de l’Élysée, le montrant en train de réitérer sa volonté de réduire son mandat, tourneront en boucle sur les télévisions du monde. Les opinions publiques occidentales qui ne s’embarrassent guère d’explications sophistiquées sauteront à l’inévitable conclusion : Un autre leader africain qui s’accroche au pouvoir !
Ensuite, dans le cadre africain, de donneur de leçons, notre pays sera logé à l’enseigne d’un État comme les autres avec à la clé une perte probable de leadership. L’amalgame sera vite fait avec les situations explosives ou potentiellement explosives sur le continent en rapport avec les projets de bricolage constitutionnel. Notre pays confirmerait ainsi que la règle en Afrique est la multiplication abusive des mandats électoraux et même leur prolongation indue tandis que leur limitation et leur réduction constituent l’exception. Par ce fait, notre pays se priverait de son rôle de médiateur dans les conflits électoraux en Afrique.
Enfin, m’inspirant de la formule de Jean Chrétien, ancien Premier ministre du Canada, à l’effet qu’il n’y a pas plus nerveux qu’un million de dollars, il apparait évident que le Plan Sénégal émergent (PSE) prendrait un sacré coup dans l’éventualité d’une situation insurrectionnelle. Prendre le risque de faire dérailler le PSE, revient à exposer le Président à tous les dangers à l’élection présidentielle.
En conclusion, le Président doit procéder à la reprise en main de l’APR qui, en l’état actuel, pourrait compromettre sa réélection à cause des agissements et comportements excessifs et nocifs de certains de ses militants. En mettant l’accent sur la massification au détriment de la discipline, l’APR court le risque de devenir un géant aux pieds d’argile. Il est d’ailleurs important de rappeler que le Sénégal est un peu à l’image des USA avec les indépendants (les sans partis chez nous) qui déterminent l’issue d’une élection. À cet égard, il est impératif d’avoir un parti discipliné dont les actions sont essentiellement orientées vers la promotion des politiques gouvernementales en vue de la satisfaction des besoins du plus grand nombre. Et sous ce rapport, les Sénégalais ont besoin d’être rassurés en ce qui a trait à l’APR en attendant la suite. C’est d’ailleurs sur un autre terrain que l’on attend le plus cette formation politique : Celui de l’animation dans la promotion du PSE afin de coller aux préoccupations quotidiennes des Sénégalais. Le Doyen Cheikh Hamidou Kâne- auteur du Chef d’œuvre littéraire et philosophique «l’Aventure ambiguë»- faisait allusion, dans une interview récente, de la politique d’animation rurale initiée par feu le Président Mamadou Dia dans les années 60 et qui était en voie d’opérer une révolution dans les campagnes sénégalaises. L’APR doit s’inspirer d’une telle politique, qui fait partie du patrimoine du Sénégal, en s’engageant dans la réflexion utile et l’action constructive et tourner ainsi le dos au débat politique violent dont les mots sanglants ont, parfois, la puissance d’une balle de fusil.
Mamadou Lamine Sylla, PhD, Montréal, Canada
Auteur du livre : Pour mieux amarrer l’Afrique noire à l’économie mondiale globalisée, Éditions L’Harmattan, 2015.