Walfadjri On n’entend plus parler de votre courant politique, Vision pour un Sénégal nouveau (Vsn), l’avez-vous enterré à cause des critiques ?
Habib Sy : Le mouvement est bien là. Vous allez encore l’entendre sous peu. Il est resté dans sa même trajectoire, c’est-à-dire, un mouvement porteur d’un courant au sein du Pds. Je mène le même combat, celui d’une reconnaissance et d’une acceptation des courants de pensée dans le Pds. Nous ne sommes pas un parti dogmatique, encore que même dans les pensées dites «dogmatiques», il existe des différences dans l’interprétation du texte.
A l’occasion de son lancement, vous déclariez : «Je n’ai pas le droit de laisser les choses en l’état sans mettre mon vécu dans l’attelage d’un gouvernement», était-ce un appel du pied en direction du Président Sall ?
Je n’ai pas souvenance avoir tenu de tels propos. Je peux même être affirmatif, je ne l’ai jamais dit. Un tel discours pour vous, voudrait dire que je demande de façon indirecte au président Macky Sall de m’intégrer dans son gouvernement. Autrement, que je veux transhumer. C’est ne pas me connaître. A ce propos, je vous sers une partie de la lettre que mon grand père maternel Birame Seck, formé à l’école des fils de chef de Gorée avait adressée à Senghor quand il lui demandait de quitter la Sfio pour qu’il l’investisse sur sa liste des candidats du Bds aux élections de l’Assemblée Territoriale. Mon grand père disait ceci : «Avec honneur et patience, inlassablement, je continuerai à mener le combat dans les rangs du Parti socialiste. Je ne voudrais pas être absent au rendezvous de ceux qui auront le privilège d’avoir préparé à ce pays les voies de sa libération.» Maintenant, il faut comprendre que je ne fais pas de l’opposition nihiliste. J’ai une vision. J’ai un programme que je ne mets pas dans les tiroirs en attendant de proclamer éventuellement ma candidature à l’élection présidentielle. De temps à autre, je publie mes réflexions dans la presse, dès fois sous forme de propositions. Si elles intéressent le gouvernement, il peut se les approprier ; sinon, je les mettrai en œuvre quand je serai président de la République de ce pays qui s’appelle le Sénégal.
Le congrès du Pds est prévu au mois d’août prochain, envisagez vous d’être candidat à la succession de Wade ?
Au plan de la légitimité historique, de la proximité avec le maître, de la compréhension et de l’appropriation de sa pensée, de la capacité de l’incarner, de la prolonger et de la traduire en acte, je capitalise un avantage comparatif difficilement égalable dans le parti. Il faudrait aussi rappeler que je fus le seul diplômé de l’Ecole nationale d’administration et de magistrature (Enam) à oser militer dans l’opposition pendant les périodes difficiles de la politique au Sénégal. Cela, je l’ai payé par environ cinq (05) mois de prison. Cependant, je me pose des questions sur la capacité du parti à organiser une succession démocratique.
Pourquoi ?
Depuis 1996, le parti n’a pas procédé à de véritables renouvellements. Beaucoup de responsables qui certainement seront au congrès n’ont plus de légitimité. Est-ce que le nouveau secrétaire général national sera le candidat à l’élection présidentielle ? Est-ce que des primaires seront organisées ? Le cas échéant, comment elles le seront ? Je ne peux pas me jeter tête baissée dans des investitures où les dès sont pipés. Nous devons nous arrêter un moment. Nous réorganiser pour mieux fédérer tout le potentiel qui risque de se disperser.
Souleymane Ndéné Ndiaye a dit, ce lundi (l’entretien a eu lieu mardi 13 janvier, Ndlr), qu’il avait le meilleur profil pour le poste, parce qu’il a été «le dernier Premier ministre de Wade». Etes-vous de cet avis ?
Mon ami Souleymane est en train de dérouler sa stratégie de pré campagne. C’est de bonne guerre. Je lui souhaite beaucoup de chance. Je respecte son ambition qui n’est que légitime.
Donc, contrairement à ce qu’il dit, il n’a pas le meilleur profil ?
Ce n’est pas ce que j’ai dit. Mais je peux affirmer que mon profil est unique au Pds. Je suis le seul énarque parmi tous les prétendants. Pendant une dizaine d’années, j’ai été chef de service tant au niveau régional qu’au niveau de l’administration centrale. J’ai été directeur de cabinet de maître Abdoulaye Wade quand il exerçait les fonctions de ministre d’Etatauprès du président de la République dans le gouvernement de majorité élargie d’Abdou Diouf de 1995 à 1998. Je suis le ministre du Pds qui a occupé le plus de ministères : Agriculture, Elevage, Hydraulique, Infrastructures, Transports aériens, Transports terrestres, Assainissement, Télécommunications, Tic, Transports maritimes intérieurs, Fonction publique, travail et Organisations professionnelles, dernier Directeur de cabinet du président Abdoulaye Wade, militant depuis 1974, et je vous épargne tout le reste.
Entre vous deux qui a le meilleur profil ?
Ne me mettez pas dans un jeu de comparaison de profil avec mon ami SN2 pour qui j’ai beaucoup de respect et de considération. Souleymane a son profil, j’ai le mien et d’autres aussi ont leur profil. Mais notre appréciation personnelle de nousmêmes peut ne pas avoir d’importance,dans la mesure où la décision de qui sera le candidat du parti revient aux militants. Mais, il faudrait savoir que la démocratie est un système de gouvernement imparfait. Le candidat choisi par le parti peut ne pas être celui que veulent les électeurs. Le candidat que les électeurs portent dans leur cœur peut ne pas être le candidat du parti. Mais l’investiture ne peut être que l’affaire du parti, et ce n’est pas le parti qui élit le président de la République.
Vous savez, je dis et je le répète, le Président Wade a inculqué à tous ses proches collaborateurs l’esprit de leader ; de telle sorte que chacun parmi eux se croit investi et de la légitimité et de la mission de lui succéder et de devenir président du Sénégal.
Vous avez dit que les «dés sont déjà pipés», doutez-vous de la volonté de Wade d’organiser une succession démocratique ?
Ce n’est pas ce que j’ai dit. J’ai dit qu’à l’état actuel du parti, s’il n’y a pas une réorganisation, je ne vois pas comment on peut organiser une succession démocratique.
C’est-à-dire ?
Il y a des préalables, dont l’un des plus importants et des plus déterminants est la légitimité des délégués qui viendront des fédérations. Ensuite quand même, nous sommes un parti évolutif. S’il y a des candidats qui se déclarent à la candidature, il faudrait qu’il ait des primaires qui devraient être l’occasion pour les éventuels candidats de décliner leur vision et programme. Voilà deux conditions minimales pour permettre aux militants de désigner celui ou celle qui sera le candidat ou la candidate du parti à l’élection présidentielle. Cela suppose qu’il y ait des renouvellements ; ce qui pose un problème plus délicat à résoudre. Donc, pour moi, il ne s’agit pas d’appeler les militants de façon pêle-mêle pour designer un candidat sans ces préalables. vous entendre parler, on a l’impression que les conditions ne sont pas réunies ?
A l’état actuel, les conditions ne sont pas réunies pour une investiture démocratique. Il faut que le parti se réorganise. Faire une investiture dans les conditions actuelles occasionnerait le désordre et la dispersion des potentialités du parti. Cela, nous devons l’éviter. Wade soutient qu’il n’a pas de candidat, mais il ne cesse de dire que Macky a emprisonné son fils pour l’empêcher d’être candidat contre lui en 2017.
Au regard de ces propos, ne pensez-vous pas qu’il a déjà voté Karim ?
Je n’ai pas encore entendu Karim dire qu’il veut être le candidat du parti.
Pourtant, il a dit que Macky l’a emprisonné pour qu’il ne se présente pas en 2017.
Oui, mais à ce que je sache il n’a pas dit qu’il se présenterait sous la bannière du Pds. Ce sont d’autres qui le disent à sa place. Le président Wade lui-même n’a nulle part dit que Karim sera le candidat du Pds. Vous savez, beaucoup de Sénégalais ne savent pas encore lire les discours de Wade, dont la simplicité peut souvent tromper. Karim peut être candidat. Il a le droit d’être candidat. Mais le président Wade ne dit pas que Karim sera le candidat du Pds. Il ne dit pas non plus qu’il soutient la candidature de Karim. Karim est son fils biologique certes, mais
Wade a aussi des fils spirituels.
La politique dans un système de démocratie est plus idéologique, spirituel que biologique. D’où un devoir moral du président Wade de soutenir la candidature de tous ses fils. Je ne peux pas m’imaginer que ma candidature éventuelle à l’élection présidentielle, ou celle de quelqu’un d’autre du parti ne soit pas soutenue par le président Wade. A moins qu’il nous convainc de ne pas nous présenter ; mais cela est un autre problème. A l’état actuel des choses, c’est lui qui devrait avoir des problèmes. Nous autres, nous ne faisons qu’afficher des ambitions.
En tous les cas, comprenez que quoi qu’il advienne, je demeurerai un élève du maître, investi de la mission historique de prolonger sa pensée.
Karim étant toujours empêtré dans le procès de la traque des biens dit «mal acquis», est-il souhaitable pour votre parti qu’il soit candidat au poste de secrétaire général du Pds ?
Attendons qu’il en manifeste l’intention. Pour le moment, nous prions et nous œuvrons pour qu’il soit libéré de son incarcération injuste et arbitraire. S’il a l’ambition d’être candidat à l’élection présidentielle, ce qui serait légitime, les options sont multiples pour lui. Il peut briguer le poste de secrétaire général national ainsi que la candidature du Pds, comme il peut être candidat indépendant. Il peut créer un mouvement ou un parti. En fait, je fais de la spéculation. La décision lui appartiendra. En tout cas, le Pds est un parti déjà compliqué ; il devra bien réfléchir sur ses futures décisions. Ceci étant dit, je dois quand même préciser pour vous que l’élection pré-dentielle n’est pas essentiellement une affaire de popularité. S’il en était ainsi personne ne pourrait être en compétition avec Youssou Ndour. Il serait élu d’office président du Sénégal. Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng et Idrissa Seck étaient plus populaires que Macky Sall en 2012. Si ce n’était que cela, pourquoi ne pas investir tout simplement Farba Senghor qui a aussi son profil comme tant d’autres. Après Wade, il est le plus populaire du parti. J’espère qu’il sera aussi candidat à la candidature.
Que dites-vous d’une formule comme celle du Ps en France. C’est-à-dire choisir un secrétaire général pour gérer le parti et faire de Karim le candidat du parti en 2017 ?
Si nous entreprenons une réorganisation du parti, cette question pourrait être posée.
Vous aviez initié des démarches pour des retrouvailles de la famille libérale, où en êtes-vous ?
Tout à fait. J’avais entrepris des démarches et j’ai rencontré Idrissa Seck, Pape Diop, Omar Sarr, Aliou Sow, Serigne Mbacké Ndiaye, Madické Niang, Doudou Wade, entre autres ; certains à plusieurs reprises. J’ai informé Karim Wade à qui j’ai rendu visite en prison. A l’occasion, j’en ai même parlé à Souleymane Ndéné Ndiaye, Farba Senghor, Aïda Mbodji, Mamadou Seck, Mamouth Saleh, Abdou Fall. Mamadou Seck et Abdou Fall ont été les seuls à émettre quelques réserves. Mais tous m’ont marqué leur confiance pourréussir la mission. C’est l’occasion pour moi de leur exprimer ma sincère reconnaissance.
Certains parmi nous étaient même sur le point de se retrouver quelque part pour poser les premiers jalons. J’ai aussi rendu compte au Président Wade. Une rencontre avec le Président Macky Sall était aussi envisagée. Mais finalement, cela n’a pas abouti pour des raisons que je ne peux évoquer ici. Idrissa Seck m’a même relancé lors de sa tournée à Linguère. Je dois quand même préciser que Mamouth Saleh m’a dit que s’il s’agit de retrouvailles de la famille libérale, il n’est pas partant ; mais que si c’est les retrouvailles de la famille politique du Président Wade, il est preneur. je dois, à la vérité, de dire que je ne pense plus qu’il soit possible d’organiser les retrouvailles de la famille libérale avant le deuxième tour de l’élection présidentielle. J’ai le sentiment que tous les leaders de parti ou de sensibilités politiques issus des flancs du Pds veulent se peser à l’élection présidentielle. Ce qui peut ne pas être mauvais, parce que participant au renforcement de notre démocratie. Mais ce qui peut être certain, à l’issue du premier tour, comme cela fait pour Macky Sall, les libéraux de l’opposition vont se regrouper pour soutenir le candidat libéral qui passera au second tour. C’est comme cela que les choses devraient se faire. Mais avant le premier tour, il faut se rendre à l’évidence ; je ne crois plus à des retrouvailles de la famille libérale.
Vous êtes ancien ministre de l’Agriculture, pourquoi avoir demandé la dissolution de la Saed et de la Sodagri ?
Sans fausse modestie, quand je parle de l’agriculture au Sénégal, j’en parle avec autorité, parce que j’ai été un ministre de l’Agriculture qui a fait des résultats. Si vous vous souvenez bien, c’est quand j’étais à la tête de ce ministère que la croissance du Sénégal a atteint un taux plus de 5 %, grâce aux performances de l’agriculture. Donc, je sais ce que je dis.
Mais vous êtes un cadre du ministère du Commerce…
Oui, mais vous savez un ministre, ce n’est pas une question de spé- cialisation, mais plutôt de capacité managériale. Je dois tout de même reconnaître que j’ai été beaucoup aidé par mes connaissances en matière de commerce international. En tant que cadre du ministère du Commerce, j’ai eu l’avantage de participer à plusieurs négociations commerciales internationales, dont notamment celles de l’Omc. Et vous savez, dans ces négociations, il est beaucoup question d’agriculture. Je ne suis pas agronome, mais je me suis fait entourer, assister et conseiller par une équipe d’agronomes hautement compétents, dont l’actuel ministre de l’Agriculture, Papa Abdoulaye Seck qui a une expertise avérée, reconnue et bien appréciée en Afrique.
Aussi, aurais-je préféré qu’on me prête une oreille attentive quand je parle d’agriculture. Au passage, je vous signale que je suis Commandeur de l’Ordre du Mérite Agricole de la République Française. Je suis aussi l’inspirateur de la recommandation de Maputo demandant aux Etats africains d’affecter 10 % de leur budget à l’agriculture.
A la limite, je ne fais même pas de critique. J’émets plutôt des propositions dans le but de faire progresser l’agriculture de mon pays. Vous savez, la Saed a été créée en 1976 et elle n’a jamais atteint les objectifs qui lui étaient fixés, notamment en termes d’aménagement. Idem pour la Sodagri. J’ai publié récemment un article où j’ai souligné les coûts élevés des aménagements à l’hectare aussi bien de la Saed que de la Sodagri, comparativement à ce qui se fait dans d’autres pays, tels que le Mali et le Burkina Faso.
Quand bien même que nous n’avons pas les mêmes types de sols, je trouve que les coûts sont très élevés au Sénégal. Il s’y ajoute que le président Wade m’avait donné son aval pour leur dissolution.
Et pourquoi ne les avoir pas dissoutes ?
J’avais une vision par palier. Il fallait d’abord regrouper l’Isra et l’Ancarou établir entre eux de nouveaux ponts de collaboration, parce que jeconsidère qu’on ne peut pas développer l’agriculture sans revenir au système d’encadrement. Or, l’encadrement fait défaut au Sénégal. Je me suis inspiré du modèle indien où le paysan est suivi depuis la délivrance des semences jusqu’à la commercialisation.
J’avais constaté à l’époque qu’il n’y avait pas une bonne intégration entre la recherche et l’encadrement. Nous avons même organisé un séminaire à Saint-Louis pour définir les voies de mise en œuvre du modèle de réorganisation de ces deux structures. Bien sûr, il y a eu des réticences. Après, il fallait passer à la deuxième phase consistant à la dissolution de la Saed et de la Sodagri pour les remplacer par une structure plus performante pour les aménagements et l’encadrement des paysans. Entre temps, j’ai quitté le ministère de l’Agriculture pour celui des Infrastructures.
Maintenant, j’ai approfondi ma réflexion relativement à mon expérience. De ma position actuelle, les failles, insuffisances et incohérences sautent encore plus à mes yeux. Je suis certain que si les correctifs ne sont pas apportés, il sera impossible d’atteindre l’autosuffisance en riz dans les délais fixés par le Président Macky Sall.
Pourtant, il compte sur ces deux structures pour ça…
En ma qualité d’ancien ministre de l’Agriculture, je ne peux qu’avertir et indiquer des voies. La responsabilité incombe au Président Macky Sall. Pour avoir des résultats dans les délais fixés, il faut absolument intégrer la Saed et la Sodagri dans une grande Ancar, dont la mission d’encadrement sera renforcée. Les aménagements pourraient être confiés à la Direction du Génie rural qui s’appuiera sur les Directions régionales du développement rural (Drdr). La Css aussi devrait participer aux aménagements sur la base d’un accord avec le gouvernement, car ses coûts sont beaucoup moins élevés que ceux de la Saed. Le Génie militaire aussi pourrait être mis à contribution sur la base du principe Armée -Nation, mais suite à une augmentation du budget du ministère des Forces Armées pour qu’il n’y ait pas d’opposition du ministère des Finances. Enfin, lisez mon article sur Internet si vous voulez savoir toutes les propositions que j’ai faites. Je ne mets pas en cause l’efficacité et la compétence des agronomes de la Saed et de la Sodagri. Ce qui serait prétentieux de ma part. Encore que je n’ai aucune compétence pour le faire. Mais ici, il s’agit de politique de structure de l’agriculture, déterminante pour réaliser les meilleurs résultats. Dans ce domaine précis, mon expérience me permet d’émettre des opinions.
Faudrait-il aussi rappeler que pendant la période des ajustements structurels de notre économie, les partenaires au développement avaient demandé au gouvernement de dissoudre la Saed. Si une structure qui est là depuis 1976 n’arrive pas à atteindre ses objectifs, il faut avoir le courage de regarder la réalité en face et de prendre la bonne décision. Hé bien ! la bonne décision, c’est dissoudre la Saed et la Sodagri.
Une telle proposition pourrait me coûter des voix si, toutefois, je suis candidat à l’élection présidentielle. Mais ce qui est le plus important, c’est d’exprimer ses convictions.
Quelle est votre position sur le débat sur la modernisation des Daara ?
Sur cette question aussi j’ai publié récemment un article relatif à ma vision sur les institutions et dans lequel j’aborde la question des Daara.
J’y développe la thèse selon laquelle, le premier problème du, Sénégal à résoudre est d’ordre institutionnel. Je ne dis pas dans le sens de la Commission de réforme des institutions actuelles. Notre Etat et nosinstitutions ont emprunté une trajectoire d’exclusion de grands intellectuels et penseurs de développement, parce que tout simplement ils sont formés dans la langue arabe ou dans les Daara.
C’est un héritage colonial que nous devons dépasser. Aujourd’hui, nous qui sommes formés à l’école occidentale, nous nous sommes accaparés de l’appareil d’Etat et avons exclu les arabisants et ceux qui sont formés dans les Daara. C’est un énorme gâchis pour notre pays qu’il faut corriger au plus vite.
Vous pensez que ceux qui organisent Tivaouane, Touba, Kaolack, pour ne citer que ceux-là, ne peuvent pas diriger ce pays ?
Tenons-nous prêts. Les arabisants et les «Ndongo Daara» arrivent. La question est de savoir est-ce que l’Etat est prêt. C’est pour cela que, pour moi, la première phase consisterait à dissoudre le Conseil économique social et environnemental et de le remplacer par un Haut conseil religieux auprès du président de la République.
A quoi servirait-il ?
Sur la saisine du chef de l’Etat, il donnerait des avis sur toutes les questions d’intérêt national. Ce conseil coopterait des personnes issues des Daara et des différents foyers religieux. Vous pouvez consulter mon article sur Internet pour mieux comprendre mon idée.
Mais la question est de savoir si on devrait les moderniser ou les laisser en l’état actuel ?
Il faut leur demander leur avis avant d’entreprendre quoi que ce soit. Le président Wade avait entrepris leur modernisation et il n’y avait aucun problème. Qu’est-ce qui se passe maintenant pour qu’il ait une levée de boucliers ? C’est parce que, certainement, ils n’ont pas été associés à la réflexion.
Habib Sy : Le mouvement est bien là. Vous allez encore l’entendre sous peu. Il est resté dans sa même trajectoire, c’est-à-dire, un mouvement porteur d’un courant au sein du Pds. Je mène le même combat, celui d’une reconnaissance et d’une acceptation des courants de pensée dans le Pds. Nous ne sommes pas un parti dogmatique, encore que même dans les pensées dites «dogmatiques», il existe des différences dans l’interprétation du texte.
A l’occasion de son lancement, vous déclariez : «Je n’ai pas le droit de laisser les choses en l’état sans mettre mon vécu dans l’attelage d’un gouvernement», était-ce un appel du pied en direction du Président Sall ?
Je n’ai pas souvenance avoir tenu de tels propos. Je peux même être affirmatif, je ne l’ai jamais dit. Un tel discours pour vous, voudrait dire que je demande de façon indirecte au président Macky Sall de m’intégrer dans son gouvernement. Autrement, que je veux transhumer. C’est ne pas me connaître. A ce propos, je vous sers une partie de la lettre que mon grand père maternel Birame Seck, formé à l’école des fils de chef de Gorée avait adressée à Senghor quand il lui demandait de quitter la Sfio pour qu’il l’investisse sur sa liste des candidats du Bds aux élections de l’Assemblée Territoriale. Mon grand père disait ceci : «Avec honneur et patience, inlassablement, je continuerai à mener le combat dans les rangs du Parti socialiste. Je ne voudrais pas être absent au rendezvous de ceux qui auront le privilège d’avoir préparé à ce pays les voies de sa libération.» Maintenant, il faut comprendre que je ne fais pas de l’opposition nihiliste. J’ai une vision. J’ai un programme que je ne mets pas dans les tiroirs en attendant de proclamer éventuellement ma candidature à l’élection présidentielle. De temps à autre, je publie mes réflexions dans la presse, dès fois sous forme de propositions. Si elles intéressent le gouvernement, il peut se les approprier ; sinon, je les mettrai en œuvre quand je serai président de la République de ce pays qui s’appelle le Sénégal.
Le congrès du Pds est prévu au mois d’août prochain, envisagez vous d’être candidat à la succession de Wade ?
Au plan de la légitimité historique, de la proximité avec le maître, de la compréhension et de l’appropriation de sa pensée, de la capacité de l’incarner, de la prolonger et de la traduire en acte, je capitalise un avantage comparatif difficilement égalable dans le parti. Il faudrait aussi rappeler que je fus le seul diplômé de l’Ecole nationale d’administration et de magistrature (Enam) à oser militer dans l’opposition pendant les périodes difficiles de la politique au Sénégal. Cela, je l’ai payé par environ cinq (05) mois de prison. Cependant, je me pose des questions sur la capacité du parti à organiser une succession démocratique.
Pourquoi ?
Depuis 1996, le parti n’a pas procédé à de véritables renouvellements. Beaucoup de responsables qui certainement seront au congrès n’ont plus de légitimité. Est-ce que le nouveau secrétaire général national sera le candidat à l’élection présidentielle ? Est-ce que des primaires seront organisées ? Le cas échéant, comment elles le seront ? Je ne peux pas me jeter tête baissée dans des investitures où les dès sont pipés. Nous devons nous arrêter un moment. Nous réorganiser pour mieux fédérer tout le potentiel qui risque de se disperser.
Souleymane Ndéné Ndiaye a dit, ce lundi (l’entretien a eu lieu mardi 13 janvier, Ndlr), qu’il avait le meilleur profil pour le poste, parce qu’il a été «le dernier Premier ministre de Wade». Etes-vous de cet avis ?
Mon ami Souleymane est en train de dérouler sa stratégie de pré campagne. C’est de bonne guerre. Je lui souhaite beaucoup de chance. Je respecte son ambition qui n’est que légitime.
Donc, contrairement à ce qu’il dit, il n’a pas le meilleur profil ?
Ce n’est pas ce que j’ai dit. Mais je peux affirmer que mon profil est unique au Pds. Je suis le seul énarque parmi tous les prétendants. Pendant une dizaine d’années, j’ai été chef de service tant au niveau régional qu’au niveau de l’administration centrale. J’ai été directeur de cabinet de maître Abdoulaye Wade quand il exerçait les fonctions de ministre d’Etatauprès du président de la République dans le gouvernement de majorité élargie d’Abdou Diouf de 1995 à 1998. Je suis le ministre du Pds qui a occupé le plus de ministères : Agriculture, Elevage, Hydraulique, Infrastructures, Transports aériens, Transports terrestres, Assainissement, Télécommunications, Tic, Transports maritimes intérieurs, Fonction publique, travail et Organisations professionnelles, dernier Directeur de cabinet du président Abdoulaye Wade, militant depuis 1974, et je vous épargne tout le reste.
Entre vous deux qui a le meilleur profil ?
Ne me mettez pas dans un jeu de comparaison de profil avec mon ami SN2 pour qui j’ai beaucoup de respect et de considération. Souleymane a son profil, j’ai le mien et d’autres aussi ont leur profil. Mais notre appréciation personnelle de nousmêmes peut ne pas avoir d’importance,dans la mesure où la décision de qui sera le candidat du parti revient aux militants. Mais, il faudrait savoir que la démocratie est un système de gouvernement imparfait. Le candidat choisi par le parti peut ne pas être celui que veulent les électeurs. Le candidat que les électeurs portent dans leur cœur peut ne pas être le candidat du parti. Mais l’investiture ne peut être que l’affaire du parti, et ce n’est pas le parti qui élit le président de la République.
Vous savez, je dis et je le répète, le Président Wade a inculqué à tous ses proches collaborateurs l’esprit de leader ; de telle sorte que chacun parmi eux se croit investi et de la légitimité et de la mission de lui succéder et de devenir président du Sénégal.
Vous avez dit que les «dés sont déjà pipés», doutez-vous de la volonté de Wade d’organiser une succession démocratique ?
Ce n’est pas ce que j’ai dit. J’ai dit qu’à l’état actuel du parti, s’il n’y a pas une réorganisation, je ne vois pas comment on peut organiser une succession démocratique.
C’est-à-dire ?
Il y a des préalables, dont l’un des plus importants et des plus déterminants est la légitimité des délégués qui viendront des fédérations. Ensuite quand même, nous sommes un parti évolutif. S’il y a des candidats qui se déclarent à la candidature, il faudrait qu’il ait des primaires qui devraient être l’occasion pour les éventuels candidats de décliner leur vision et programme. Voilà deux conditions minimales pour permettre aux militants de désigner celui ou celle qui sera le candidat ou la candidate du parti à l’élection présidentielle. Cela suppose qu’il y ait des renouvellements ; ce qui pose un problème plus délicat à résoudre. Donc, pour moi, il ne s’agit pas d’appeler les militants de façon pêle-mêle pour designer un candidat sans ces préalables. vous entendre parler, on a l’impression que les conditions ne sont pas réunies ?
A l’état actuel, les conditions ne sont pas réunies pour une investiture démocratique. Il faut que le parti se réorganise. Faire une investiture dans les conditions actuelles occasionnerait le désordre et la dispersion des potentialités du parti. Cela, nous devons l’éviter. Wade soutient qu’il n’a pas de candidat, mais il ne cesse de dire que Macky a emprisonné son fils pour l’empêcher d’être candidat contre lui en 2017.
Au regard de ces propos, ne pensez-vous pas qu’il a déjà voté Karim ?
Je n’ai pas encore entendu Karim dire qu’il veut être le candidat du parti.
Pourtant, il a dit que Macky l’a emprisonné pour qu’il ne se présente pas en 2017.
Oui, mais à ce que je sache il n’a pas dit qu’il se présenterait sous la bannière du Pds. Ce sont d’autres qui le disent à sa place. Le président Wade lui-même n’a nulle part dit que Karim sera le candidat du Pds. Vous savez, beaucoup de Sénégalais ne savent pas encore lire les discours de Wade, dont la simplicité peut souvent tromper. Karim peut être candidat. Il a le droit d’être candidat. Mais le président Wade ne dit pas que Karim sera le candidat du Pds. Il ne dit pas non plus qu’il soutient la candidature de Karim. Karim est son fils biologique certes, mais
Wade a aussi des fils spirituels.
La politique dans un système de démocratie est plus idéologique, spirituel que biologique. D’où un devoir moral du président Wade de soutenir la candidature de tous ses fils. Je ne peux pas m’imaginer que ma candidature éventuelle à l’élection présidentielle, ou celle de quelqu’un d’autre du parti ne soit pas soutenue par le président Wade. A moins qu’il nous convainc de ne pas nous présenter ; mais cela est un autre problème. A l’état actuel des choses, c’est lui qui devrait avoir des problèmes. Nous autres, nous ne faisons qu’afficher des ambitions.
En tous les cas, comprenez que quoi qu’il advienne, je demeurerai un élève du maître, investi de la mission historique de prolonger sa pensée.
Karim étant toujours empêtré dans le procès de la traque des biens dit «mal acquis», est-il souhaitable pour votre parti qu’il soit candidat au poste de secrétaire général du Pds ?
Attendons qu’il en manifeste l’intention. Pour le moment, nous prions et nous œuvrons pour qu’il soit libéré de son incarcération injuste et arbitraire. S’il a l’ambition d’être candidat à l’élection présidentielle, ce qui serait légitime, les options sont multiples pour lui. Il peut briguer le poste de secrétaire général national ainsi que la candidature du Pds, comme il peut être candidat indépendant. Il peut créer un mouvement ou un parti. En fait, je fais de la spéculation. La décision lui appartiendra. En tout cas, le Pds est un parti déjà compliqué ; il devra bien réfléchir sur ses futures décisions. Ceci étant dit, je dois quand même préciser pour vous que l’élection pré-dentielle n’est pas essentiellement une affaire de popularité. S’il en était ainsi personne ne pourrait être en compétition avec Youssou Ndour. Il serait élu d’office président du Sénégal. Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng et Idrissa Seck étaient plus populaires que Macky Sall en 2012. Si ce n’était que cela, pourquoi ne pas investir tout simplement Farba Senghor qui a aussi son profil comme tant d’autres. Après Wade, il est le plus populaire du parti. J’espère qu’il sera aussi candidat à la candidature.
Que dites-vous d’une formule comme celle du Ps en France. C’est-à-dire choisir un secrétaire général pour gérer le parti et faire de Karim le candidat du parti en 2017 ?
Si nous entreprenons une réorganisation du parti, cette question pourrait être posée.
Vous aviez initié des démarches pour des retrouvailles de la famille libérale, où en êtes-vous ?
Tout à fait. J’avais entrepris des démarches et j’ai rencontré Idrissa Seck, Pape Diop, Omar Sarr, Aliou Sow, Serigne Mbacké Ndiaye, Madické Niang, Doudou Wade, entre autres ; certains à plusieurs reprises. J’ai informé Karim Wade à qui j’ai rendu visite en prison. A l’occasion, j’en ai même parlé à Souleymane Ndéné Ndiaye, Farba Senghor, Aïda Mbodji, Mamadou Seck, Mamouth Saleh, Abdou Fall. Mamadou Seck et Abdou Fall ont été les seuls à émettre quelques réserves. Mais tous m’ont marqué leur confiance pourréussir la mission. C’est l’occasion pour moi de leur exprimer ma sincère reconnaissance.
Certains parmi nous étaient même sur le point de se retrouver quelque part pour poser les premiers jalons. J’ai aussi rendu compte au Président Wade. Une rencontre avec le Président Macky Sall était aussi envisagée. Mais finalement, cela n’a pas abouti pour des raisons que je ne peux évoquer ici. Idrissa Seck m’a même relancé lors de sa tournée à Linguère. Je dois quand même préciser que Mamouth Saleh m’a dit que s’il s’agit de retrouvailles de la famille libérale, il n’est pas partant ; mais que si c’est les retrouvailles de la famille politique du Président Wade, il est preneur. je dois, à la vérité, de dire que je ne pense plus qu’il soit possible d’organiser les retrouvailles de la famille libérale avant le deuxième tour de l’élection présidentielle. J’ai le sentiment que tous les leaders de parti ou de sensibilités politiques issus des flancs du Pds veulent se peser à l’élection présidentielle. Ce qui peut ne pas être mauvais, parce que participant au renforcement de notre démocratie. Mais ce qui peut être certain, à l’issue du premier tour, comme cela fait pour Macky Sall, les libéraux de l’opposition vont se regrouper pour soutenir le candidat libéral qui passera au second tour. C’est comme cela que les choses devraient se faire. Mais avant le premier tour, il faut se rendre à l’évidence ; je ne crois plus à des retrouvailles de la famille libérale.
Vous êtes ancien ministre de l’Agriculture, pourquoi avoir demandé la dissolution de la Saed et de la Sodagri ?
Sans fausse modestie, quand je parle de l’agriculture au Sénégal, j’en parle avec autorité, parce que j’ai été un ministre de l’Agriculture qui a fait des résultats. Si vous vous souvenez bien, c’est quand j’étais à la tête de ce ministère que la croissance du Sénégal a atteint un taux plus de 5 %, grâce aux performances de l’agriculture. Donc, je sais ce que je dis.
Mais vous êtes un cadre du ministère du Commerce…
Oui, mais vous savez un ministre, ce n’est pas une question de spé- cialisation, mais plutôt de capacité managériale. Je dois tout de même reconnaître que j’ai été beaucoup aidé par mes connaissances en matière de commerce international. En tant que cadre du ministère du Commerce, j’ai eu l’avantage de participer à plusieurs négociations commerciales internationales, dont notamment celles de l’Omc. Et vous savez, dans ces négociations, il est beaucoup question d’agriculture. Je ne suis pas agronome, mais je me suis fait entourer, assister et conseiller par une équipe d’agronomes hautement compétents, dont l’actuel ministre de l’Agriculture, Papa Abdoulaye Seck qui a une expertise avérée, reconnue et bien appréciée en Afrique.
Aussi, aurais-je préféré qu’on me prête une oreille attentive quand je parle d’agriculture. Au passage, je vous signale que je suis Commandeur de l’Ordre du Mérite Agricole de la République Française. Je suis aussi l’inspirateur de la recommandation de Maputo demandant aux Etats africains d’affecter 10 % de leur budget à l’agriculture.
A la limite, je ne fais même pas de critique. J’émets plutôt des propositions dans le but de faire progresser l’agriculture de mon pays. Vous savez, la Saed a été créée en 1976 et elle n’a jamais atteint les objectifs qui lui étaient fixés, notamment en termes d’aménagement. Idem pour la Sodagri. J’ai publié récemment un article où j’ai souligné les coûts élevés des aménagements à l’hectare aussi bien de la Saed que de la Sodagri, comparativement à ce qui se fait dans d’autres pays, tels que le Mali et le Burkina Faso.
Quand bien même que nous n’avons pas les mêmes types de sols, je trouve que les coûts sont très élevés au Sénégal. Il s’y ajoute que le président Wade m’avait donné son aval pour leur dissolution.
Et pourquoi ne les avoir pas dissoutes ?
J’avais une vision par palier. Il fallait d’abord regrouper l’Isra et l’Ancarou établir entre eux de nouveaux ponts de collaboration, parce que jeconsidère qu’on ne peut pas développer l’agriculture sans revenir au système d’encadrement. Or, l’encadrement fait défaut au Sénégal. Je me suis inspiré du modèle indien où le paysan est suivi depuis la délivrance des semences jusqu’à la commercialisation.
J’avais constaté à l’époque qu’il n’y avait pas une bonne intégration entre la recherche et l’encadrement. Nous avons même organisé un séminaire à Saint-Louis pour définir les voies de mise en œuvre du modèle de réorganisation de ces deux structures. Bien sûr, il y a eu des réticences. Après, il fallait passer à la deuxième phase consistant à la dissolution de la Saed et de la Sodagri pour les remplacer par une structure plus performante pour les aménagements et l’encadrement des paysans. Entre temps, j’ai quitté le ministère de l’Agriculture pour celui des Infrastructures.
Maintenant, j’ai approfondi ma réflexion relativement à mon expérience. De ma position actuelle, les failles, insuffisances et incohérences sautent encore plus à mes yeux. Je suis certain que si les correctifs ne sont pas apportés, il sera impossible d’atteindre l’autosuffisance en riz dans les délais fixés par le Président Macky Sall.
Pourtant, il compte sur ces deux structures pour ça…
En ma qualité d’ancien ministre de l’Agriculture, je ne peux qu’avertir et indiquer des voies. La responsabilité incombe au Président Macky Sall. Pour avoir des résultats dans les délais fixés, il faut absolument intégrer la Saed et la Sodagri dans une grande Ancar, dont la mission d’encadrement sera renforcée. Les aménagements pourraient être confiés à la Direction du Génie rural qui s’appuiera sur les Directions régionales du développement rural (Drdr). La Css aussi devrait participer aux aménagements sur la base d’un accord avec le gouvernement, car ses coûts sont beaucoup moins élevés que ceux de la Saed. Le Génie militaire aussi pourrait être mis à contribution sur la base du principe Armée -Nation, mais suite à une augmentation du budget du ministère des Forces Armées pour qu’il n’y ait pas d’opposition du ministère des Finances. Enfin, lisez mon article sur Internet si vous voulez savoir toutes les propositions que j’ai faites. Je ne mets pas en cause l’efficacité et la compétence des agronomes de la Saed et de la Sodagri. Ce qui serait prétentieux de ma part. Encore que je n’ai aucune compétence pour le faire. Mais ici, il s’agit de politique de structure de l’agriculture, déterminante pour réaliser les meilleurs résultats. Dans ce domaine précis, mon expérience me permet d’émettre des opinions.
Faudrait-il aussi rappeler que pendant la période des ajustements structurels de notre économie, les partenaires au développement avaient demandé au gouvernement de dissoudre la Saed. Si une structure qui est là depuis 1976 n’arrive pas à atteindre ses objectifs, il faut avoir le courage de regarder la réalité en face et de prendre la bonne décision. Hé bien ! la bonne décision, c’est dissoudre la Saed et la Sodagri.
Une telle proposition pourrait me coûter des voix si, toutefois, je suis candidat à l’élection présidentielle. Mais ce qui est le plus important, c’est d’exprimer ses convictions.
Quelle est votre position sur le débat sur la modernisation des Daara ?
Sur cette question aussi j’ai publié récemment un article relatif à ma vision sur les institutions et dans lequel j’aborde la question des Daara.
J’y développe la thèse selon laquelle, le premier problème du, Sénégal à résoudre est d’ordre institutionnel. Je ne dis pas dans le sens de la Commission de réforme des institutions actuelles. Notre Etat et nosinstitutions ont emprunté une trajectoire d’exclusion de grands intellectuels et penseurs de développement, parce que tout simplement ils sont formés dans la langue arabe ou dans les Daara.
C’est un héritage colonial que nous devons dépasser. Aujourd’hui, nous qui sommes formés à l’école occidentale, nous nous sommes accaparés de l’appareil d’Etat et avons exclu les arabisants et ceux qui sont formés dans les Daara. C’est un énorme gâchis pour notre pays qu’il faut corriger au plus vite.
Vous pensez que ceux qui organisent Tivaouane, Touba, Kaolack, pour ne citer que ceux-là, ne peuvent pas diriger ce pays ?
Tenons-nous prêts. Les arabisants et les «Ndongo Daara» arrivent. La question est de savoir est-ce que l’Etat est prêt. C’est pour cela que, pour moi, la première phase consisterait à dissoudre le Conseil économique social et environnemental et de le remplacer par un Haut conseil religieux auprès du président de la République.
A quoi servirait-il ?
Sur la saisine du chef de l’Etat, il donnerait des avis sur toutes les questions d’intérêt national. Ce conseil coopterait des personnes issues des Daara et des différents foyers religieux. Vous pouvez consulter mon article sur Internet pour mieux comprendre mon idée.
Mais la question est de savoir si on devrait les moderniser ou les laisser en l’état actuel ?
Il faut leur demander leur avis avant d’entreprendre quoi que ce soit. Le président Wade avait entrepris leur modernisation et il n’y avait aucun problème. Qu’est-ce qui se passe maintenant pour qu’il ait une levée de boucliers ? C’est parce que, certainement, ils n’ont pas été associés à la réflexion.