Gambie, l'après Yayha Jammeh: Les torturés et leurs bourreaux se réconcilient


Rédigé le Jeudi 20 Mai 2021 à 13:24 | Lu 200 fois | 0 commentaire(s)



Calebasses de colas, accolades, poignées de mains… en Gambie, bourreaux et victimes fument le calumet de la paix grâce la Commission de réconciliation.

Alors que la Commission de réconciliation mise sur pied pour enquêter sur les abus des droits humains commis sous la dictature s’apprête à boucler ses activités, au bout de 2 ans et demi, la structure multiplie les gestes d’apaisement entre bourreaux et victimes avant de remettre ses conclusions au chef de l’Etat, renseigne Emedia.


Ce mercredi, un groupe de bourreaux dont un général radié de l’armée, a fait face à ses victimes pour exprimer solennellement les remords et demander pardon. Comme symbole de cette paix des braves que la Commission veut la plus sincère possible, les bourreaux d’hier ont remis des calebasses de colas à leurs victimes avant d’échanger des mots de remords et poignées de mains devant caméras et micros.

Le général Alagie Martin, radié de l’armée en 2019, fixe pour la première fois, les yeux dans les yeux, son ex-victime, le lieutenant-colonel Baboucarr Sanynag auquel il avait infligé des séances de tortures humiliantes afin de lui soutirer des aveux sous Jammeh. Mais Les temps ont changé, auujourd’hui l’heure est à la repentance et au pardon. L’ex-bourreau l’exprime en ces termes.

« Du fond du cœur je te demande pardon. J’en suis profondément désolé, se morfond l’ancien officier. Je t’ai causé un grand tort. Je n’aurai pas dû le faire mais comme le savez, dans l’armée c’est l’ordre. Je n’ai fait qu’exécuter les ordres du commandement. Je le regrette et je ne le referai jamais. »

Le lieutenant-colonel Baboucar Sanynag, paré de son uniforme de l’armée, rétorque au général qu’il a pardonné mais qu’il ne peut oublier tous les maux qu’il lui a fait subir.

« Au nom de ma famille entière et la société, je voudrai te dire devant tout le monde ici que j’ai accepté sincèrement tes excuses, claironne-t-il le visage grave. » Le plus dur dira celui qui fait partie aujourd’hui de la hiérarchie de l’armée gambienne a été de travaillé sous la tutelle de son tortionnaire durant plusieurs années.

« Comme vous le savez dans l’armée c’est la discipline et l’ordre, regrette celui qui continue toujours de servir l’armée de son pays. J’ai eu à travailler pendant longtemps sous sa direction sans que personne ne soupçonne quoi que ce soit. Cela n’est possible que dans l’armée. Ç’aurait été ailleurs, j’aurai refusé, comprenez cette double torture de rencontrer chaque jour son bourreau d’hier ».

Autre séance de réconciliation durant cette cérémonie retransmise en direct : c’est entre le lieutenant-colonel Lamine Fatty et Alagie Kébé à qui il avait soumis à des traitements inhumains : il avait lié mains et pieds de celui-ci avant de le jeter dans le capot de sa voiture. Aujourd’hui Kébé dira qu’il a tourné la page et pardonné « très sincèrement » son ancien redoutable tortionnaire.


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