Empruntons un raccourci : la première révèle, la deuxième enquête et la troisième juge. Il n’existe aucune relation hiérarchique entre elles, mais, leurs missions convergent. Aminata Touré, Anna Sémou Faye et Nafi Ngom Ndour, respectivement, ministre de la Justice, Directeur général de la police nationale et patronne de l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption, ont la charge d’assister le chef de l’Etat pour l’instauration d’une gouvernance vertueuse.
Macky Sall a pris trois femmes. Il ne s’agit pas d’une affaire de polygamie au sommet de la République. La première dame peut encore dormir tranquille, si tant est qu’elle en perdrait le sommeil, le cas échéant, le chef de l’Etat ne lui a pas encore trouvé des rivales. Marième Faye devra toutefois supporter que son époux de président partage une grande complicité avec trois dames qu’il a fait icônes, en les plaçant à des postes stratégiques de son dispositif pour une gouvernance vertueuse. Les élues se nomment Aminata Touré, Anna Sémou Faye et Nafi Ngom Ndour (ex-Keïta). La ministre de la Justice, le Directeur général de la police nationale (Dgpn) et la patronne de l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac). «Une nouvelle génération de leaders au niveau de l’Etat», opine le coordonnateur du Forum civil, Mouhamadou Mbodji. Trois femmes puissantes.
Ces quinquas au teint ébène supportent bien le poids de l’âge. Elles ne s’encombrent pas de maquillage ou de bijoux flamboyants, mais elles sont fringantes. Par les pouvoirs qui leur sont conférés, elles suscitent la crainte chez certains et l’admiration chez d’autres. Elles sont réputées pour leur compétence, leur rigueur et leur éthique. «Elles ont une bonne base de formation et de compétences, reconnues par tout le monde, fait remarquer Mbodji. Elles inspirent la confiance. Cela montre que si un effort est fait autour des jeunes filles, plus tard, on pourra avoir des leaders de cet acabit. On aura plus de femmes de ce niveau de responsabilités, avec plus d’engagement et de détermination pour la cause commune». Le ministre de l’Education appréciera.
Pourvu que Macky joue le jeu
Ceux qui ont observé leurs parcours professionnels respectifs prédisent le succès à Aminata Touré, Anna Sémou Faye et Nafi Ngom Ndour. A condition, posent-ils, que le chef de l’Etat leur laisse les mains libres et les couvent. Qu’il les protège contre les pressions possibles et les défendent contre les agressions éventuelles ; les soutienne quand les temps seront durs et les appuie lorsqu’elles prendront des initiatives pertinemment hardies, dans le cadre de leur mission.
Ce n’est pas gagné. Les ménages avec les politiques réservent parfois de vilaines surprises. Les lunes de miel virent parfois au fiel. Le meilleur au pire. Au gré de leur agenda, purement politicien, leur humeur a tendance à fluctuer grave. Ils sont doués pour savonner le plancher au plus dévoué des serviteurs de l’Etat, le jour où le malheureux aurait l’outrecuidance de commettre un crime de lèse-majesté. De faire valoir son devoir d’ingratitude. La jurisprudence Macky Sall (justement) qui, en tant que président de l’Assemblée nationale, avait osé réclamer des comptes à Karim Wade, pour sa gestion de l’Anoci, est encore fraîche dans les mémoires.
Aminata Touré ne s’est pas encore ouvertement plainte à ce niveau. Jusque-là, ça a l’air de marcher pour elle. La ministre de la Justice déroule, sans entrave visible, sa croisade contre les délinquants présumés de la République. Elle a balayé toute idée de médiation pénale, réduisant à néant une idée qui germait au sein de la Majorité. Elle s’est même permise de prendre le contrepied du Château, en prônant la divulgation des noms des mis en cause qui ont transigé, dans le cadre de la traque aux biens supposés mal acquis. Ce dernier passage en force n’a pas abouti, mais il est clair que la liberté de manœuvre de la Garde des Sceaux reste intacte. Large.
Cette aubaine dans le cadre de l’exercice de leurs prérogatives, Anna Sémou Faye et Nafi Ngom Ndour en rêvent, sans doute, en douce. Elle a beau être imposée par une opinion publique en quête de justice et éprise des justiciers, le chef de l’Etat la confère à qui il veut. A leur nomination, le président les a assurées de son soutien indéfectible. Ce n’est pas rien. Mais pour autant, elles n’ont pas intérêt à verser facilement dans un optimisme béat. Il vaut mieux attendre Macky Sall au tournant et juger sur pièce sa capacité à traiter le Dgpn et la patronne de l’Ofnac avec les mêmes égards accordés au ministre de la Justice. A placer «ses» trois femmes sur un pied d’égalité, comme un bon musulman polygame avec ses épouses.
AMININA TOURE Dame justicier
Aminata Touré fait un tabac à la tête du ministère de la Justice. Rien ne semble pouvoir l’arrêter. Même pas le chef de l’Etat. Peu de membres du gouvernement peuvent se targuer d’une telle marge de manœuvre. Elle ne laisse personne indifférent, essuyant les reproches des uns et s’attirant la sympathie des autres. Ses détracteurs la soupçonnent de faire de l’activisme et de la politique politicienne. D’utiliser la procédure de la traque aux biens supposés mal acquis contre de potentiels adversaires politiques. Au bénéfice de son parti, l’Apr, voire au service de son propre agenda politique. Ses «amis» écarquillent les yeux, dénoncent un procès d’intention et multiplient les déclarations de soutien enflammées. Les co-présentateurs du JT rappé, les rappeurs Xuman et Keyti, décernent à Mimi Touré la palme. Ils estiment qu’elle a «restitué la vue» à la justice sénégalaise. Le coordonnateur du Forum civil, pour sa part, considère qu’elle «est en train de réussir un dossier qui n’est pas facile». Après avoir longtemps surfé sur la vague de la traque aux responsables de l’ancien régime, la Garde des Sceaux a récemment comme changé de disc. Elle a divulgué un vaste programme de modernisation de la justice comprenant, entre autres points, la réforme du Code pénal et du Code de procédure pénale avec, notamment, la non-éligibilité pour 10 ans des auteurs reconnus de détournements de deniers publics.
NAFI NGOM NDOUR (KEÏTA) «Une lionne»
Admiratif, le coordonnateur du Forum civil ! «Nafi Ngom Keïta est une lionne», s’est enflammé Mouhamadou Mbodji, lorsque Rewmi lui a demandé son sentiment, après la nomination de la patronne de l’Office nationale de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac). Mbodji a loué la «formation et (les) compétences, reconnues par tout le monde», de l’ex-vérificatrice générale, qui a été rendue célèbre par l’affaire des Chantiers de Thiès. Elle avait contribué à enfoncer l’ancien Premier ministre Idrissa Seck, le principal mis en cause dans cette affaire. Elle quitte la tête de l’Ige et laisse la main à François Collin. Ce, après sept ans de service et avoir présenté son rapport au chef de l’Etat. Une première dans l’histoire de l’institution de contrôle, traduction de la volonté du nouveau régime de jouer la transparence. La même volonté a poussé les nouvelles autorités à mettre sur pied l’Ofnac qui a été confié à Nafi Ngom Ndour. Laquelle a pour mission de traquer les auteurs de malversations et de fautes de gestion. Ses pouvoirs son étendus. Ils vont jusqu’à celui de contraindre les établissements financiers à lui fournir toutes informations qu’elle jugerait pertinentes, sans que le secret bancaire ne lui soit opposé.
ANNA SEMOU FAYE Commissaire de peau lisse
Elle est le nouveau Directeur général de la police nationale (Dgpn). Elle remplace à ce poste le commissaire Abdoulaye Niang, éclaboussé par l’affaire de la drogue dans la police. Anna Sémou Faye est chargée de restaurer l’image salie de ce corps. Elle est la première femme à occuper le poste. Mais, en dehors d’un maquillage discret, un chignon bas sous le képi et des talons à la place des souliers, il ne devrait y avoir aucune différence avec ses prédécesseurs du sexe dit fort. La nouvelle patronne des flics devra toutefois se montrer plus regardante que les autres Dgpn. Le contexte est délétère, avec une police minée par la guéguerre entre ses hauts gradés et la corruption. Histoire sans doute de lui donner les coudées franches, le chef de l’Etat, qui l’a reçue juste après sa nomination, l’a nommée Inspecteur général de la police. Grade le plus élevé dans la hiérarchie policière. Lors de son investiture, Anna Sémou Faye avait reconnu que les temps sont gris pour la police. Cependant, elle préconisait à ses pairs «de démontrer que la police sénégalaise est plus forte que jamais et profondément ancrée dans le respect de sa belle devise : ‘’Dans l’honneur, au service de la loi’’.
Par Cheikh Ibrahima FALL
Macky Sall a pris trois femmes. Il ne s’agit pas d’une affaire de polygamie au sommet de la République. La première dame peut encore dormir tranquille, si tant est qu’elle en perdrait le sommeil, le cas échéant, le chef de l’Etat ne lui a pas encore trouvé des rivales. Marième Faye devra toutefois supporter que son époux de président partage une grande complicité avec trois dames qu’il a fait icônes, en les plaçant à des postes stratégiques de son dispositif pour une gouvernance vertueuse. Les élues se nomment Aminata Touré, Anna Sémou Faye et Nafi Ngom Ndour (ex-Keïta). La ministre de la Justice, le Directeur général de la police nationale (Dgpn) et la patronne de l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac). «Une nouvelle génération de leaders au niveau de l’Etat», opine le coordonnateur du Forum civil, Mouhamadou Mbodji. Trois femmes puissantes.
Ces quinquas au teint ébène supportent bien le poids de l’âge. Elles ne s’encombrent pas de maquillage ou de bijoux flamboyants, mais elles sont fringantes. Par les pouvoirs qui leur sont conférés, elles suscitent la crainte chez certains et l’admiration chez d’autres. Elles sont réputées pour leur compétence, leur rigueur et leur éthique. «Elles ont une bonne base de formation et de compétences, reconnues par tout le monde, fait remarquer Mbodji. Elles inspirent la confiance. Cela montre que si un effort est fait autour des jeunes filles, plus tard, on pourra avoir des leaders de cet acabit. On aura plus de femmes de ce niveau de responsabilités, avec plus d’engagement et de détermination pour la cause commune». Le ministre de l’Education appréciera.
Pourvu que Macky joue le jeu
Ceux qui ont observé leurs parcours professionnels respectifs prédisent le succès à Aminata Touré, Anna Sémou Faye et Nafi Ngom Ndour. A condition, posent-ils, que le chef de l’Etat leur laisse les mains libres et les couvent. Qu’il les protège contre les pressions possibles et les défendent contre les agressions éventuelles ; les soutienne quand les temps seront durs et les appuie lorsqu’elles prendront des initiatives pertinemment hardies, dans le cadre de leur mission.
Ce n’est pas gagné. Les ménages avec les politiques réservent parfois de vilaines surprises. Les lunes de miel virent parfois au fiel. Le meilleur au pire. Au gré de leur agenda, purement politicien, leur humeur a tendance à fluctuer grave. Ils sont doués pour savonner le plancher au plus dévoué des serviteurs de l’Etat, le jour où le malheureux aurait l’outrecuidance de commettre un crime de lèse-majesté. De faire valoir son devoir d’ingratitude. La jurisprudence Macky Sall (justement) qui, en tant que président de l’Assemblée nationale, avait osé réclamer des comptes à Karim Wade, pour sa gestion de l’Anoci, est encore fraîche dans les mémoires.
Aminata Touré ne s’est pas encore ouvertement plainte à ce niveau. Jusque-là, ça a l’air de marcher pour elle. La ministre de la Justice déroule, sans entrave visible, sa croisade contre les délinquants présumés de la République. Elle a balayé toute idée de médiation pénale, réduisant à néant une idée qui germait au sein de la Majorité. Elle s’est même permise de prendre le contrepied du Château, en prônant la divulgation des noms des mis en cause qui ont transigé, dans le cadre de la traque aux biens supposés mal acquis. Ce dernier passage en force n’a pas abouti, mais il est clair que la liberté de manœuvre de la Garde des Sceaux reste intacte. Large.
Cette aubaine dans le cadre de l’exercice de leurs prérogatives, Anna Sémou Faye et Nafi Ngom Ndour en rêvent, sans doute, en douce. Elle a beau être imposée par une opinion publique en quête de justice et éprise des justiciers, le chef de l’Etat la confère à qui il veut. A leur nomination, le président les a assurées de son soutien indéfectible. Ce n’est pas rien. Mais pour autant, elles n’ont pas intérêt à verser facilement dans un optimisme béat. Il vaut mieux attendre Macky Sall au tournant et juger sur pièce sa capacité à traiter le Dgpn et la patronne de l’Ofnac avec les mêmes égards accordés au ministre de la Justice. A placer «ses» trois femmes sur un pied d’égalité, comme un bon musulman polygame avec ses épouses.
AMININA TOURE Dame justicier
Aminata Touré fait un tabac à la tête du ministère de la Justice. Rien ne semble pouvoir l’arrêter. Même pas le chef de l’Etat. Peu de membres du gouvernement peuvent se targuer d’une telle marge de manœuvre. Elle ne laisse personne indifférent, essuyant les reproches des uns et s’attirant la sympathie des autres. Ses détracteurs la soupçonnent de faire de l’activisme et de la politique politicienne. D’utiliser la procédure de la traque aux biens supposés mal acquis contre de potentiels adversaires politiques. Au bénéfice de son parti, l’Apr, voire au service de son propre agenda politique. Ses «amis» écarquillent les yeux, dénoncent un procès d’intention et multiplient les déclarations de soutien enflammées. Les co-présentateurs du JT rappé, les rappeurs Xuman et Keyti, décernent à Mimi Touré la palme. Ils estiment qu’elle a «restitué la vue» à la justice sénégalaise. Le coordonnateur du Forum civil, pour sa part, considère qu’elle «est en train de réussir un dossier qui n’est pas facile». Après avoir longtemps surfé sur la vague de la traque aux responsables de l’ancien régime, la Garde des Sceaux a récemment comme changé de disc. Elle a divulgué un vaste programme de modernisation de la justice comprenant, entre autres points, la réforme du Code pénal et du Code de procédure pénale avec, notamment, la non-éligibilité pour 10 ans des auteurs reconnus de détournements de deniers publics.
NAFI NGOM NDOUR (KEÏTA) «Une lionne»
Admiratif, le coordonnateur du Forum civil ! «Nafi Ngom Keïta est une lionne», s’est enflammé Mouhamadou Mbodji, lorsque Rewmi lui a demandé son sentiment, après la nomination de la patronne de l’Office nationale de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac). Mbodji a loué la «formation et (les) compétences, reconnues par tout le monde», de l’ex-vérificatrice générale, qui a été rendue célèbre par l’affaire des Chantiers de Thiès. Elle avait contribué à enfoncer l’ancien Premier ministre Idrissa Seck, le principal mis en cause dans cette affaire. Elle quitte la tête de l’Ige et laisse la main à François Collin. Ce, après sept ans de service et avoir présenté son rapport au chef de l’Etat. Une première dans l’histoire de l’institution de contrôle, traduction de la volonté du nouveau régime de jouer la transparence. La même volonté a poussé les nouvelles autorités à mettre sur pied l’Ofnac qui a été confié à Nafi Ngom Ndour. Laquelle a pour mission de traquer les auteurs de malversations et de fautes de gestion. Ses pouvoirs son étendus. Ils vont jusqu’à celui de contraindre les établissements financiers à lui fournir toutes informations qu’elle jugerait pertinentes, sans que le secret bancaire ne lui soit opposé.
ANNA SEMOU FAYE Commissaire de peau lisse
Elle est le nouveau Directeur général de la police nationale (Dgpn). Elle remplace à ce poste le commissaire Abdoulaye Niang, éclaboussé par l’affaire de la drogue dans la police. Anna Sémou Faye est chargée de restaurer l’image salie de ce corps. Elle est la première femme à occuper le poste. Mais, en dehors d’un maquillage discret, un chignon bas sous le képi et des talons à la place des souliers, il ne devrait y avoir aucune différence avec ses prédécesseurs du sexe dit fort. La nouvelle patronne des flics devra toutefois se montrer plus regardante que les autres Dgpn. Le contexte est délétère, avec une police minée par la guéguerre entre ses hauts gradés et la corruption. Histoire sans doute de lui donner les coudées franches, le chef de l’Etat, qui l’a reçue juste après sa nomination, l’a nommée Inspecteur général de la police. Grade le plus élevé dans la hiérarchie policière. Lors de son investiture, Anna Sémou Faye avait reconnu que les temps sont gris pour la police. Cependant, elle préconisait à ses pairs «de démontrer que la police sénégalaise est plus forte que jamais et profondément ancrée dans le respect de sa belle devise : ‘’Dans l’honneur, au service de la loi’’.
Par Cheikh Ibrahima FALL