Le vigile Demba Kandé, âgé de 30 ans, encourt 2 ans ferme pour viol. Mariée, Fatou Diop a soutenu, mordicus, devant le tribunal de grande instance de Pikine-Guédiawaye, avoir été sodomisée par le prévenu dans la forêt classée de Mbao. Celui-ci dément. Le dernier mot revient au juge.
La mariée Fatou Diop veut laver son honneur. Armée de courage, elle a comparu, hier, à la barre du tribunal de grande instance de Pikine-Guédiawaye, pour étaler les faits de viol dont elle se dit victime. Un récit qui, parfois, a mis le public dans une situation inconfortable. Certains membres de l’assistance ont eu à baisser les yeux ou même sortir de la salle d’audience, quand elle a prononcé des mots qui frisent l’indécence. Le parquetier, lui, a écouté religieusement les débats. Ce faisant, il a expliqué que la plaignante a été cohérente dans ses déclarations, depuis l’enquête préliminaire jusque devant le prétoire. Alors que le prévenu s’est lancé dans des contrevérités et a tergiversé tout au long de la procédure. Que Demba Kandé a déclaré aux enquêteurs qu’il n’avait jamais vu la dame, avant de revenir sur ses propos. Mieux, qu’il leur a fait savoir qu’il est gérant d’une agence chargée de recruter des gardiens et des techniciens de surface. Que nenni, car les gendarmes ont découvert qu’il était vigile au marché de Keur Massar.
Sur ce, le substitut du procureur a requis 2 ans d’emprisonnement contre le prévenu, sous le regard impuissant de son épouse venue le soutenir.
Avant cela, la victime, âgée de 27 ans, est longuement revenue sur les circonstances de son viol. En fait, Fatou Diop travaillait comme domestique à Mermoz. A cause d’une surcharge de travail, elle a décidé d’arrêter. ‘’C’était le mardi 29 mai dernier. Mon patron m’a payé ce qu’il me devait. Ainsi, pour prendre le bus et rentrer à Yeumbeul, j’ai dû marcher jusqu’à l’Ecole normale. Il faisait 17 h 30 mn. Là, j’ai peiné à avoir un moyen de transport, avec le ramadan. Tout d’un coup, Demba s’est approché de moi pour me demander si je cherchais du travail. Il m’a dit qu’il pouvait m’en trouver un dans une usine de mèches, non loin de la forêt classée de Mbao’’, a-t-elle renseigné.
Mise en confiance, la jeune femme a accepté de partir avec lui. ‘’Mais, une fois derrière la Sedima de Keur Massar, loin des regards, il a jeté mon sac à terre et m’a demandé de coucher avec lui. Ce que j’ai refusé et il a menacé de me tuer. Paniquée, je me suis offerte à lui. Il m’a proposé de lui faire une fellation, puis il m’a sodomisée de manière violente’’, a déclaré la dame sans sourciller. Avant de révéler : ‘’Lorsqu’il a fini sa sale besogne, j’ai usé de subterfuges pour m’en sortir. J’ai su établir une relation de confiance entre nous, avant de lui remettre mon numéro de téléphone. Je lui ai dit que s’il me l’avait demandé respectueusement, j’allais m’exécuter sans broncher, puisque je n’ai ni mari ni copain. Je lui ai même dit que s’il voulait, je pouvais passer les weekends chez lui.’’
Arrivée chez elle, Fatou Diop s’en est ouverte à son époux qui était ‘’hors de lui’’. ‘’Parce que, avance-t-il, c’est en voulant l’aider dans les charges familiales que je me suis fait torturer’’. ‘’Après avoir déposé une plainte, les enquêteurs nous ont rassurés que le mis en cause allait me rappeler et que je devais jouer le jeu. Deux jours plus tard, Demba Kandé m’a contactée afin que je le rejoigne au marché de Keur Massar, car il disait avoir un autre travail pour moi. Il pensait que je suis une fille de mœurs légères. Je suis partie avec mon mari et mon beau-frère qui l’ont appréhendé, avant de l’emmener manu militari à la gendarmerie’’.
Prenant la parole, l’avocat de la partie civile a indiqué que le certificat médical a révélé que sa cliente souffrait de lésions anales en voie de cicatrisation. Selon lui, le prévenu est de mauvaise foi. Sur ce, il a réclamé 1 million de francs Cfa en guise de dommages et intérêts.
La défense plaide la relaxe au bénéfice du doute
Placé sous mandat de dépôt depuis le 5 juin dernier, le vigile, âgé de 30 ans, a reconnu devant le juge instruction qu’il a reçu une fellation de la dame qui voulait ‘’un joli teint’’. Que cette dernière a refusé d’avoir des rapports sexuels, vu qu’elle était mariée. ‘’Nous sommes tous les deux dans les liens du mariage. Si je voulais coucher avec elle, je n’avais pas besoin de la pénétrer par derrière. Elle m’a demandé 50 000 F Cfa pour la Korité. Je lui ai dit que ce n’était pas possible et qu’elle devait d’abord travailler jusqu’à la fin du mois. Elle m’a traduit devant la justice parce que j’ai refusé de lui donner cette somme’’, a-t-il raconté.
Face au tribunal, l’ancien militaire, qui a déjà écopé d’une peine assortie de sursis pour détention et usage de chanvre indien, a souligné qu’il n’y a pas eu de viol dans cette affaire. ‘’Fatou m’a trouvé au croisement de Keur Massar. Comme l’endroit était sombre, elle m’a demandé de l’accompagner jusqu’à la gare des ‘cars rapides’. En cours de route, elle m’a emprunté mon téléphone pour jouer. A l’abri des regards, elle s’est allongée sur moi avant de me proposer une partie de fellation et je lui ai remis 2 000 F Cfa’’, a-t-il narré.
Avocat de la défense, Me Baba Diop a signalé que si quelqu’un a caché la vérité dans ce dossier, c’est bien Fatou Diop. ‘’Comment une personne qui doit être traumatisée après ces faits, s’est mise à réfléchir à une stratégie pour faire arrêter le prévenu ? Cette dame n’a pas peur et on la prend pour une sainte nitouche. Elle a vu l’argent que détenait mon client, c’est pourquoi elle a tout manigancé. Nous avons une partie civile dont on ne sait pas la moralité’’, a hurlé le conseil.
Excédé, il a ajouté : ‘’On ne la connait pas et on ne sait pas de quoi elle est capable. A l’entendre parler, on sait qu’elle n’est pas une femme qui se laisse facilement faire. De plus, Demba Kandé n’avait pas d’arme avec lui. Donc, elle n’était pas en danger. Les circonstances de son viol sont invraisemblables. Même son mari peut lui causer ses lésions anales. Cette affaire est une nébuleuse.’’ Me Diop de faire remarquer que le tribunal n’a pas d’éléments pour entrer en voie de condamnation. Raison pour laquelle il a sollicité la relaxe au bénéfice du doute.
Le dernier mot du juge, dans cette affaire, est attendu le 29 juin prochain.
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