Le président turc est de retour en Afrique pour une nouvelle tournée de cinq jours, du 26 février au 2 mars. C'est par Alger où il est arrivé ce lundi 26 février que Recep Tayyip Erdoganentamera sa tournée qui le conduira par la suite en Mauritanie, au Sénégal puis au Mali. A la tête d'une importante délégation d'officiels et surtout d'hommes d'affaires, Erdogan abordera avec ses pairs des pays qu'il visitera, « des questions essentiellement économiques » selon un communiqué de la présidence turque qui a été publié à la veille du déplacement.
A u menu de la visite et pour chaque étape, des visites avec ses homologues mais aussi des échanges avec les acteurs économiques et les investisseurs à l'occasion de la tenue de forum d'affaires ainsi que la signature de plusieurs accords de partenariats et de contrats pour les entreprises turques. « Il s'agit de renforcer davantage les liens étroits qui nous unissent avec ces pays et en particulier conclure de nouveaux accords pour de nouveaux projets, dans le cadre de notre partenariat économique et commercial», a ajouté un porte-parole de l'Ak Saray, la présidence turque.
De quoi donc conforter la présence des entreprises turques qui opèrent sur le continent et dont l'influence, ces dernières années, a connu un développement sans précédent et dans presque tous les domaines (BTP/infrastrcutures, agro-business, industrie, énergie, services, éducation...). Selon les chiffres du ministère turc de l'économie, l'Afrique représente près de 21% du chiffre d'affaires des entreprises turques à l'international avec une part de l'Afrique du Nord qui pèse 19%.
L'Afrique de Ouest, nouvelle priorité de la Turquie en Afrique
En Afrique de l'Ouest et particulièrement au Sénégal et au Mali, la visite du président turc a une forte valeur symbolique. Bien que l'influence de la Turquie ne se dément point au vu de la présence de ses entreprises ainsi que de ses investissements, c'est la première fois qu'il se rend en sa qualité de chef d'Etat dans ces pays, tout comme c'est le cas en Mauritanie. Elle conforte cependant, la place qu'occupe la CEDEAO dans la stratégie d'expansion turque. En 2016 déjà , le président Erdogan était en Afrique de l'Ouest, en Côte d'ivoire, au Ghana, au Nigeria et en Guinée.
La nouvelle tournée en Afrique intervient juste après la tenue, les 22 et 23 février à Istanbul, du premier Forum économique entre la Turquie et la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO).
Erdogan l'Africain
La Turquie continue donc d'étendre son influence économique sur le continent et surtout le président Erdogan n'entend point stopper la voilure. Le 12 février dernier, Istanbul a déjà accueilli la deuxième conférence ministérielle de suivi de la coopération Turquie-Afrique organisée par l'Union africaine (UA) et le ministère des Affaires étrangères turc, ce 12 février à Istanbul et qui en plus de l'état des lieux de la coopération, devrait préparer la tenue du troisième sommet de partenariat entre la Turquie et l'Union africaine qui est prévu en 2019.
La Turquie soigne donc ses relations avec le continent où Erdogan ambitionne de positionner son pays comme l'un des acteurs majeurs, un engagement qu'il porte depuis le tournant des années 2000, à l'époque où il était déjà Premier ministre. C'est sous sa houlette que l'influence turque en Afrique a connu un nouveau souffle qui depuis n'a cessé de prendre de l'ampleur. Ainsi de 2005 à ce jour, le nombre d'ambassades turques en Afrique est passé de 12 à 41 et on compte à ce jour plus d'un millier d'entreprises turques opérant sur le continent dont des poids lourds (Turkish Airlines, Summa &Limmak Holding, Ayka Textile, Arçelik, Agromaster,...). Cette dynamique s'est d'ailleurs accompagnée d'une expansion des investissements turcs en Afrique avec des échanges entre la Turquie qui sont passés de moins de 100 millions de dollars dans les années 200 à plus de 20 milliards actuellement. Istanbul ambitionne désormais de le porter à 100 milliards d'ici les cinq prochaines années c'est-à -dire à l'horizon 2022 et pour ce faire, ne compte pas lésiner sur les moyens.
Afin d'accompagner ces ambitions, le président turc ne ménage point les visites en Afrique. Depuis trois ans qu'il est arrivé à la présidence il a déjà effectué plus d'une vingtaine de visites officielles dans autant de pays du continent comme c'est le cas en décembre dernier où il s'est rendu notamment au Soudan, au Tchad et en Tunisie. Erdogan ne fait d'ailleurs aucun mystère de ses ambitions africaines et à la veille de son nouveau déplacement, il n'a pas manqué d'en planter le décor en réaffirmant sa volonté de renforcer son partenariat avec les pays du continent.
« Bien que notre histoire avec le continent remonte à plus d'un millier d'années, nous avons négligé l'Afrique au siècle dernier. Nous n'avons pas eu l'opportunité de nous ouvrir au continent parce que nous étions occupés à résoudre nos problèmes internes. Au cours des 15 dernières années, nous avons mis fin à cette négligence. Le processus qui a commencé en 2005, que nous avions placé comme l'année de l'Afrique africaine, nous l'avons accéléré. Avec des visites et des échanges mutuels, nous avons soigné nos relations avec nos frères africains. Aujourd'hui, l'Afrique accueille des investisseurs, des coopérants, des organisations humanitaires et des volontaires partout sur le continent. Des étudiants africains étudient aussi dans notre pays où des entrepreneurs du continent viennent aussi faire des affaires. Notre partenariat économique est solide et nous allons l'approfondir dans des domaines tels que le tourisme, la culture, le commerce, la défense, l'éducation. J'espère que nous continuerons dans le même sens à l'avenir" . Recep Tayyip Erdogan.
Dans sa stratégie d'expansion, Istanbul tient particulièrement à mettre en avant le partenariat économique. Cependant, avec son influence de plus en plus grandissante sur le continent, la Turquie étend son positionnement géostratégique alors qu'elle s'affirme de plus en plus comme une puissance régionale en devenir sur la scène internationale. Derrière l'opération de séduction d'Erdogan, des intérêts géopolitiques en jeu puisque d'autres domaines sont également en jeu dans l'alliance que le pays est en train de nouer en Afrique.
En plus des investissements et autres dons ainsi que de son réseau diplomatique de plus en plus étoffé, la Turquie se manifeste aussi sur les questions de défense, avec une base militaire en Somalie et une autre en projet au Soudan. Désormais, elle entend aussi jouer un rôle dans la lutte contre le terrorisme en mettant à profit son expertise en au service de certains pays confrontés au même fléau comme cela sera le cas au Mali où Erdogan abordera la question avec son homologue IBK.