Pour la moindre altercation, on assène des insanités. Que ce soit dans le cercle familial, entre amis, sur la place publique et sur les routes, on profère des insanités avec à la clef un langage grossier et vulgaire.
Le Témoin met le doigt sur la plaie« Kahane Ndière », littéralement le quartier Ndière, est un coin perdu du village de Toglou dans la commune de Diass. Ce quartier abrite le plus grand institut islamique de la zone. Il s’agit du Daara Malick Fall. Pour les étrangers et le voisinage, c’est le quartier des « Ibaadou » où l’on ne badine pas avec les règles de bonne conduite. Le plus petit des enfants n’ose sortir de sa bouche un mot grossier. Ici, personne n’injurie. Personne ! L’indiscipline y est bannie.
C’est la loi de l’éducation collective à la vie collective. Tout le monde participe à l’éducation de l’enfant de l’autre. Point d’individualisme. Si un enfant étranger au quartier tente d’enfreindre la loi, il est corrigé à la minute qui suit. C’est le cas de cette fillette qui, impuissante face à la claque que lui a envoyée une autre avec qui elle se battait, l’insulte de mère. Mine grise, Iliass Ciss, enseignant arabe, la hèle et lui demande de se placer devant lui le plus rapidement possible.
L’homme, la voix tremblotante de colère, l’enjoint de ne plus jamais insulter, si elle ne voudrait pas recevoir une fessée qu’elle ne serait pas près d’oublier.
L’alcoolisme
Pendant que ce père de famille joue la police dans ce quartier des « Ibadous » où on n’insulte jamais, un autre père de famille joue l’irresponsable dans un appartement à l’Unité 16 des Parcelles Assainies à Dakar. Entre d’incessants va-et-vient,sa bouche n’a pas arrêté une seule seconde de propulser des insanités. Comme un soulard, il insulte son épouse etses enfants de mère. « Tu n’es qu’un salaud. Un vrai soulard. A chaque fois que tu te soules, tu viens nous embêter », dit dépitée sa femme en position de guerre, un pilon à la main.
Des voisins venus mettre fin à cette bagarre, tentent de récupérer le pilon. Les enfants, toutes des filles, n’arrêtent pas de pleurer, versant de chaudes larmes comme si le ciel avait ouvert ses vannes. Elles sont animées par un sentiment de honte et de dégoût face à tel comportement « indigne » d’un père. Voire d’un homme responsable. Seulement, les hommes irresponsables, on en compte à la pelle. Entre amis Enseignant dans une école de la place, l’homme est bout du fil.
Alors que son correspondant tarde à prendre son appel, il marmonne : « Wa kii dou nangametaann Ndéyam dieul téléphone bi ». Avant de le luienvoyer à la figure après que ce dernier ait décroché, l’injure à la bouche il lui balance desinsanités. Et l’autre, comme si on venait de lui offrir un billet pour La Mecque, en guise de réponse à cette insulte de mère, choisit de présenter ses excuses les plus plates. Pour lui, « Ceux qui parlent en proférant des injures ne sont pas forcément impolis. Même si cela reste pour beaucoup un signe d’impolitesse. Mon meilleur ami le fait. Il est pourtant très poli. C’est juste pour eux une façon de parler. C’est quelque chose de banal. Rien de méchant.
Ils le font en général uniquement entre potes. Ils le font pour le plaisir ». Un plaisir qui est en train de prendre le dessus sur l’identité culturelle et les valeurs morales. Notamment au niveau du transport. Chez les apprentis et « coxeurs », c’est un bien triste constat ! L’indiscipline des apprentis et chauffeurs Sur le marchepied d’un car « Ndiaga Ndiaye », un jeune garçon, la vingtaine, tambourine sur le flanc droit du car. « Anawaa. Tékk thi brique waay chauffeur. Mou ngui gneuw dééh ».
Une façon pour lui de « doper » le chauffeur du véhicule pour que l’autre transport en commun qui arrive ne le devance. Une action qui va tourner au vinaigre avec un passager. Ce dernier le supplie de faire moins de bruit. « Il dérange cet apprenti la », a protesté le client qui lui crie dessus. En guise de réponse, il récolte une bordée d’insultes. L’apprenti, n’étant pas content du fait que le client le compare à un illettré, sans aucun savoir vivre, dira à ce dernier, qu’il n’est qu’un « fils de pute ».
N’eût-été l’intervention d’autres passagers, le sang allait couler. Ça, c’est entre un apprenti et un passager. Entre apprentis ou chauffeurs, la vulgarité est leur pain quotidien. Aucune crainte. On dirait leur jeu favori. Ils s’insultent de mère ou de mère sans la moindre arrière-pensée. Que ce soit un taximan, un particulier, un gros porteur ou un transporteur en commun, le cœur bouillonne sur les routes. C’est la tolérance zéro. On tente d’apaiser la frustration par une bordée d’injures. « khol you khatt » A l’intersection du célèbre marché Colobane, les scènes de ce genre y sont quotidiennes.
Les vendredis sont réputés être des jours de trafic. En fin d’après-midi, tout le monde disparait. C’est le sauve qui peut. Dès les coups de 16 heures, les bureaux se vident. Les clients des transports en commun occupent les arrêts bus et les garages de « Ndiaga Ndiaye ». Une autre catégorie de travailleurs, « plus aisés », prend des taxis qu’ils hèlent parfois même de très loin. En cette mi-journée, on note un embouteillage monstre à Colobane. Il est 17 heures passées.
Tout est en bouchon ! Le rond-point de ce célèbre marché est bondé de véhicules. Les piétons se bousculent sur le trottoir. C’est la course contre la montre. Les nerfs sont tendus! Le temps leur est compté. Chacun s’empresse de rejoindre son domicile. Que cela soit à pieds ou en monture. Dans une longue file de voitures, un monsieur quitte le siège de son véhicule et se dirige vers le taxi qui se trouve juste derrière lui. Visage enragé, il réajuste le col de son boubou et balance une main en haut avant de pointer son index en direction du propriétaire du véhicule en question.
Ce dernier, d’une manière volontaire ou involontaire, a touché l’arrière de sa voiture en cassant les feux de signalisation. Un choc brutal et inattendu qui l’a fait sortir de ses gongs. Le chauffard se confond rapidement en excuses. « Balma deh. Téyoumako. Ndaw séé daanou laadoon khool », s’est-il empressé pour se justifier, les deux mains en forme croisée collées à la poitrine, la tête baissée. Ce qui ne semble en rien tempérer la colère de ce monsieur tout de blanc vêtu.
Il porte un boubou assorti d’une paire de babouches de même couleur et un bonnet rouge bien vissé sur la tête. Malgré l’attitude « responsable » du taximan, l’homme continue de déverser son amertume sur lui. Il se courbe du côté de la portière du taximan et lui envoie des insanités. « Hey c’est quoi ça ? Pourquoi tu as heurté ma voiture ? Qu’est ce que tu veux que je fasse ? Est-ce que je peux surpasser toute cette file de véhicules pour te frayer un chemin ? Espèce d’indiscipliné … Fils de pute », lui balance –t-il à la figure.
N’eut-été l’intervention des passants qui se sont interposés entre eux, il allait lui donner une de ces « bonnes corrections». L’influence du monde extérieur La vulgarité chez certaines catégories de personnes et irresponsables, sort de l’ordinaire. Les insultes fusent de toute part. Les parents, pères comme mères, ne sont pas épargnés. Certains géniteurs sont d’ailleurs plus insolents. « La faute nous revient en tant que parents et responsables de l’éducation des jeunes.
Pour remédier à cela, il faudra leur inculquer une meilleure éducation. En étant plus présent et les mettre sur le droit chemin », a dit Alassane Ciss, enseignant, selon qui, « si on met de côté notre culture pour copier les Blancs, sans que personne ne s’en n’offusque, on ne devrait pas s’étonner de tous ces travers ».
Il estime que les parents ont démissionné. « On n’apprend rien à nos enfants. Les parents et éducateurs, les vrais et responsables je veux dire, se sont substitués à la télévision et à l’Internet. Les parents ont démissionné. Si vous voyez bien, ils ont comme références et idoles des rappeurs américains, des acteurs de films brésiliens, ils copient le style vestimentaire des Occidentaux. Donc s’ils banalisent l’insulte, c’est parce que l’heure est grave. Et il est vraiment temps de revoir nos comportements, prendre le train en marche, et surtout le remettre sur les rails », a-t-il dit.
Maïmouna FAYE (Le Témoin)
Le Témoin met le doigt sur la plaie« Kahane Ndière », littéralement le quartier Ndière, est un coin perdu du village de Toglou dans la commune de Diass. Ce quartier abrite le plus grand institut islamique de la zone. Il s’agit du Daara Malick Fall. Pour les étrangers et le voisinage, c’est le quartier des « Ibaadou » où l’on ne badine pas avec les règles de bonne conduite. Le plus petit des enfants n’ose sortir de sa bouche un mot grossier. Ici, personne n’injurie. Personne ! L’indiscipline y est bannie.
C’est la loi de l’éducation collective à la vie collective. Tout le monde participe à l’éducation de l’enfant de l’autre. Point d’individualisme. Si un enfant étranger au quartier tente d’enfreindre la loi, il est corrigé à la minute qui suit. C’est le cas de cette fillette qui, impuissante face à la claque que lui a envoyée une autre avec qui elle se battait, l’insulte de mère. Mine grise, Iliass Ciss, enseignant arabe, la hèle et lui demande de se placer devant lui le plus rapidement possible.
L’homme, la voix tremblotante de colère, l’enjoint de ne plus jamais insulter, si elle ne voudrait pas recevoir une fessée qu’elle ne serait pas près d’oublier.
L’alcoolisme
Pendant que ce père de famille joue la police dans ce quartier des « Ibadous » où on n’insulte jamais, un autre père de famille joue l’irresponsable dans un appartement à l’Unité 16 des Parcelles Assainies à Dakar. Entre d’incessants va-et-vient,sa bouche n’a pas arrêté une seule seconde de propulser des insanités. Comme un soulard, il insulte son épouse etses enfants de mère. « Tu n’es qu’un salaud. Un vrai soulard. A chaque fois que tu te soules, tu viens nous embêter », dit dépitée sa femme en position de guerre, un pilon à la main.
Des voisins venus mettre fin à cette bagarre, tentent de récupérer le pilon. Les enfants, toutes des filles, n’arrêtent pas de pleurer, versant de chaudes larmes comme si le ciel avait ouvert ses vannes. Elles sont animées par un sentiment de honte et de dégoût face à tel comportement « indigne » d’un père. Voire d’un homme responsable. Seulement, les hommes irresponsables, on en compte à la pelle. Entre amis Enseignant dans une école de la place, l’homme est bout du fil.
Alors que son correspondant tarde à prendre son appel, il marmonne : « Wa kii dou nangametaann Ndéyam dieul téléphone bi ». Avant de le luienvoyer à la figure après que ce dernier ait décroché, l’injure à la bouche il lui balance desinsanités. Et l’autre, comme si on venait de lui offrir un billet pour La Mecque, en guise de réponse à cette insulte de mère, choisit de présenter ses excuses les plus plates. Pour lui, « Ceux qui parlent en proférant des injures ne sont pas forcément impolis. Même si cela reste pour beaucoup un signe d’impolitesse. Mon meilleur ami le fait. Il est pourtant très poli. C’est juste pour eux une façon de parler. C’est quelque chose de banal. Rien de méchant.
Ils le font en général uniquement entre potes. Ils le font pour le plaisir ». Un plaisir qui est en train de prendre le dessus sur l’identité culturelle et les valeurs morales. Notamment au niveau du transport. Chez les apprentis et « coxeurs », c’est un bien triste constat ! L’indiscipline des apprentis et chauffeurs Sur le marchepied d’un car « Ndiaga Ndiaye », un jeune garçon, la vingtaine, tambourine sur le flanc droit du car. « Anawaa. Tékk thi brique waay chauffeur. Mou ngui gneuw dééh ».
Une façon pour lui de « doper » le chauffeur du véhicule pour que l’autre transport en commun qui arrive ne le devance. Une action qui va tourner au vinaigre avec un passager. Ce dernier le supplie de faire moins de bruit. « Il dérange cet apprenti la », a protesté le client qui lui crie dessus. En guise de réponse, il récolte une bordée d’insultes. L’apprenti, n’étant pas content du fait que le client le compare à un illettré, sans aucun savoir vivre, dira à ce dernier, qu’il n’est qu’un « fils de pute ».
N’eût-été l’intervention d’autres passagers, le sang allait couler. Ça, c’est entre un apprenti et un passager. Entre apprentis ou chauffeurs, la vulgarité est leur pain quotidien. Aucune crainte. On dirait leur jeu favori. Ils s’insultent de mère ou de mère sans la moindre arrière-pensée. Que ce soit un taximan, un particulier, un gros porteur ou un transporteur en commun, le cœur bouillonne sur les routes. C’est la tolérance zéro. On tente d’apaiser la frustration par une bordée d’injures. « khol you khatt » A l’intersection du célèbre marché Colobane, les scènes de ce genre y sont quotidiennes.
Les vendredis sont réputés être des jours de trafic. En fin d’après-midi, tout le monde disparait. C’est le sauve qui peut. Dès les coups de 16 heures, les bureaux se vident. Les clients des transports en commun occupent les arrêts bus et les garages de « Ndiaga Ndiaye ». Une autre catégorie de travailleurs, « plus aisés », prend des taxis qu’ils hèlent parfois même de très loin. En cette mi-journée, on note un embouteillage monstre à Colobane. Il est 17 heures passées.
Tout est en bouchon ! Le rond-point de ce célèbre marché est bondé de véhicules. Les piétons se bousculent sur le trottoir. C’est la course contre la montre. Les nerfs sont tendus! Le temps leur est compté. Chacun s’empresse de rejoindre son domicile. Que cela soit à pieds ou en monture. Dans une longue file de voitures, un monsieur quitte le siège de son véhicule et se dirige vers le taxi qui se trouve juste derrière lui. Visage enragé, il réajuste le col de son boubou et balance une main en haut avant de pointer son index en direction du propriétaire du véhicule en question.
Ce dernier, d’une manière volontaire ou involontaire, a touché l’arrière de sa voiture en cassant les feux de signalisation. Un choc brutal et inattendu qui l’a fait sortir de ses gongs. Le chauffard se confond rapidement en excuses. « Balma deh. Téyoumako. Ndaw séé daanou laadoon khool », s’est-il empressé pour se justifier, les deux mains en forme croisée collées à la poitrine, la tête baissée. Ce qui ne semble en rien tempérer la colère de ce monsieur tout de blanc vêtu.
Il porte un boubou assorti d’une paire de babouches de même couleur et un bonnet rouge bien vissé sur la tête. Malgré l’attitude « responsable » du taximan, l’homme continue de déverser son amertume sur lui. Il se courbe du côté de la portière du taximan et lui envoie des insanités. « Hey c’est quoi ça ? Pourquoi tu as heurté ma voiture ? Qu’est ce que tu veux que je fasse ? Est-ce que je peux surpasser toute cette file de véhicules pour te frayer un chemin ? Espèce d’indiscipliné … Fils de pute », lui balance –t-il à la figure.
N’eut-été l’intervention des passants qui se sont interposés entre eux, il allait lui donner une de ces « bonnes corrections». L’influence du monde extérieur La vulgarité chez certaines catégories de personnes et irresponsables, sort de l’ordinaire. Les insultes fusent de toute part. Les parents, pères comme mères, ne sont pas épargnés. Certains géniteurs sont d’ailleurs plus insolents. « La faute nous revient en tant que parents et responsables de l’éducation des jeunes.
Pour remédier à cela, il faudra leur inculquer une meilleure éducation. En étant plus présent et les mettre sur le droit chemin », a dit Alassane Ciss, enseignant, selon qui, « si on met de côté notre culture pour copier les Blancs, sans que personne ne s’en n’offusque, on ne devrait pas s’étonner de tous ces travers ».
Il estime que les parents ont démissionné. « On n’apprend rien à nos enfants. Les parents et éducateurs, les vrais et responsables je veux dire, se sont substitués à la télévision et à l’Internet. Les parents ont démissionné. Si vous voyez bien, ils ont comme références et idoles des rappeurs américains, des acteurs de films brésiliens, ils copient le style vestimentaire des Occidentaux. Donc s’ils banalisent l’insulte, c’est parce que l’heure est grave. Et il est vraiment temps de revoir nos comportements, prendre le train en marche, et surtout le remettre sur les rails », a-t-il dit.
Maïmouna FAYE (Le Témoin)