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Simone Gbagbo, l`épouse du président Laurent Gbagbo, lors d`une réunion en sa faveur le 15 Janvier 2011 au Palais de la Culture à Abidjan.
Le président de la Coalition ivoirienne pour la Cour pénale internationale, Ali Ouattara, s’est prononcé, samedi dernier sur la décision du gouvernement ivoirien de ne pas extrader l’ex Première dame, Simone Gbagbo vers la Cpi qui la poursuit pour des crimes contre l’humanité commis pendant la crise post électorale de 2011, qui a fait plus de 3.000 morts. Ali Ouattara démontre que la Côte d’Ivoire ne dispose pas des armements juridiques nécessaires pour un procès équitable de Mme Gbagbo à Abidjan. Interview.
Le gouvernement a adopté au terme de son conseil des ministres du vendredi dernier, de ne pas extrader Mme Simone Gbagbo et lui tenir un procès sur place à Abidjan. Quel est votre sentiment à chaud ?
*On attendait cette décision depuis un an et demi, c'est-à -dire depuis le 29 février 2012, date à laquelle, le procureur de la Cpi a émis le mandat d’arrêt contre Simone Gbagbo. Au regard de la coopération exemplaire que les autorités ivoiriennes entretiennent avec la Cour et vu la bonne exécution du premier mandat contre l’ancien président Laurent Gbagbo, nous attendions des autorités qu’elles poursuivent sur leur lancée. Mais cette décision d’introduire une requête en irrecevabilité du transfèrement de Simone Gbagbo, nous surprend. Le gouvernement soutien qu’il dispose aujourd’hui d’institutions judiciaires fonctionnelles et réhabilitées. Nous disons que s’ils veulent juger l’ex Première dame ici, c’est tout à fait légitime parce que le statut de Rome se veut complémentaire des institutions nationales. Mais le cas de la Côte d’Ivoire est très spécial. La réhabilitation des institutions judiciaires est un acte que nous saluons et soutenons, mais force est de constater que les éléments qui peuvent permettre de juger Simone Gbagbo, ne sont pas encore pris en compte, car la Côte d’Ivoire n’a pas encore la capacité de la juger. Dans le fond, rien n’a changé. On peut réhabiliter les bâtiments, on peut doter les infrastructures de matériels, nommer et renforcer les capacités des magistrats, mais le plus important, ce sont les textes. Simone Gbagbo fait l’objet de poursuites internationales pour crimes contre l’humanité. Lorsque vous prenez le code pénal ou le code de procédure pénal, on se rend compte qu’aucune disposition à ce niveau n’est conforme aux Statut de Rome pour connaitre de ces faits. Si au niveau de Simone Gbagbo, la Côte d’Ivoire veut s’approprier les jugements, elle doit renforcer la capacité de ses textes et de ses juridictions. Autre contradiction, concerne l’Article 110 de notre Constitution. Il stipule qu’en cas de haute trahison, le président de la République et les membres du gouvernement sont justiciables devant la Haute cour de justice, or cette institution n’existe pas à notre connaissance. Les autorités doivent faire adopter par le Parlement, une loi de mise en œuvre du Traité de Rome qui permettra de le mettre en conformité avec notre corpus législatif. On peut toujours dans ce même registre citer la peine de mort. Elle a été abolie au niveau de la Constitution de 2000, mais reste toujours en vigueur dans le code pénal. Cela est en contradiction parce qu’à la Cpi, la peine de mort n’existe pas.
Selon votre démonstration, le procès de Simone Gbagbo n’est donc techniquement pas possible à Abidjan ?
Nous réaffirmons qu’au regard des textes en présence, le pays n’a pas encore la capacité. Notre position est que si la Côte d’Ivoire veut connaitre de cette affaire ici, c’est son droit. Mais, en tant qu’Etat-partie, elle doit surtout se renforcer.
Si l’argument juridique ne tient plus, vous êtes donc d’accords avec ceux qui soutiennent qu’il s’agit d’un procès politique ?
Nous ne pouvons pas tirer ce genre de conclusion. La Coalition ivoirienne pour la Cpi veut démontrer que l’armement juridique n’est pas encore constitué dans le cas de la Côte d’Ivoire, et donc nous craignons un procès inique et non équitable. C’est aussi l’avis de la Cpi.
Quel sera donc le sort des victimes pour lesquelles vous vous battez depuis toutes ces années si le procès venait à se tenir ici ?
La décision du gouvernement vient de tomber. Les victimes auraient souhaité que la procédure soit poursuivie à la Haye, parce que cela leur permet un certain nombre de garanties, surtout celle de la réparation des préjudices subis, pour lesquels, la Cpi dispose d’un fonds. Ainsi, tout comme les victimes et vu les arguments énoncés plus haut, le procès de Simone Gbagbo doit se tenir à la Cpi. C’est une question de droit et de justice.
lhebdoivoirien@yahoo.fr
Interview réalisée par T.Evariste
Simone Gbagbo, l`épouse du président Laurent Gbagbo, lors d`une réunion en sa faveur le 15 Janvier 2011 au Palais de la Culture à Abidjan.
Le président de la Coalition ivoirienne pour la Cour pénale internationale, Ali Ouattara, s’est prononcé, samedi dernier sur la décision du gouvernement ivoirien de ne pas extrader l’ex Première dame, Simone Gbagbo vers la Cpi qui la poursuit pour des crimes contre l’humanité commis pendant la crise post électorale de 2011, qui a fait plus de 3.000 morts. Ali Ouattara démontre que la Côte d’Ivoire ne dispose pas des armements juridiques nécessaires pour un procès équitable de Mme Gbagbo à Abidjan. Interview.
Le gouvernement a adopté au terme de son conseil des ministres du vendredi dernier, de ne pas extrader Mme Simone Gbagbo et lui tenir un procès sur place à Abidjan. Quel est votre sentiment à chaud ?
*On attendait cette décision depuis un an et demi, c'est-à -dire depuis le 29 février 2012, date à laquelle, le procureur de la Cpi a émis le mandat d’arrêt contre Simone Gbagbo. Au regard de la coopération exemplaire que les autorités ivoiriennes entretiennent avec la Cour et vu la bonne exécution du premier mandat contre l’ancien président Laurent Gbagbo, nous attendions des autorités qu’elles poursuivent sur leur lancée. Mais cette décision d’introduire une requête en irrecevabilité du transfèrement de Simone Gbagbo, nous surprend. Le gouvernement soutien qu’il dispose aujourd’hui d’institutions judiciaires fonctionnelles et réhabilitées. Nous disons que s’ils veulent juger l’ex Première dame ici, c’est tout à fait légitime parce que le statut de Rome se veut complémentaire des institutions nationales. Mais le cas de la Côte d’Ivoire est très spécial. La réhabilitation des institutions judiciaires est un acte que nous saluons et soutenons, mais force est de constater que les éléments qui peuvent permettre de juger Simone Gbagbo, ne sont pas encore pris en compte, car la Côte d’Ivoire n’a pas encore la capacité de la juger. Dans le fond, rien n’a changé. On peut réhabiliter les bâtiments, on peut doter les infrastructures de matériels, nommer et renforcer les capacités des magistrats, mais le plus important, ce sont les textes. Simone Gbagbo fait l’objet de poursuites internationales pour crimes contre l’humanité. Lorsque vous prenez le code pénal ou le code de procédure pénal, on se rend compte qu’aucune disposition à ce niveau n’est conforme aux Statut de Rome pour connaitre de ces faits. Si au niveau de Simone Gbagbo, la Côte d’Ivoire veut s’approprier les jugements, elle doit renforcer la capacité de ses textes et de ses juridictions. Autre contradiction, concerne l’Article 110 de notre Constitution. Il stipule qu’en cas de haute trahison, le président de la République et les membres du gouvernement sont justiciables devant la Haute cour de justice, or cette institution n’existe pas à notre connaissance. Les autorités doivent faire adopter par le Parlement, une loi de mise en œuvre du Traité de Rome qui permettra de le mettre en conformité avec notre corpus législatif. On peut toujours dans ce même registre citer la peine de mort. Elle a été abolie au niveau de la Constitution de 2000, mais reste toujours en vigueur dans le code pénal. Cela est en contradiction parce qu’à la Cpi, la peine de mort n’existe pas.
Selon votre démonstration, le procès de Simone Gbagbo n’est donc techniquement pas possible à Abidjan ?
Nous réaffirmons qu’au regard des textes en présence, le pays n’a pas encore la capacité. Notre position est que si la Côte d’Ivoire veut connaitre de cette affaire ici, c’est son droit. Mais, en tant qu’Etat-partie, elle doit surtout se renforcer.
Si l’argument juridique ne tient plus, vous êtes donc d’accords avec ceux qui soutiennent qu’il s’agit d’un procès politique ?
Nous ne pouvons pas tirer ce genre de conclusion. La Coalition ivoirienne pour la Cpi veut démontrer que l’armement juridique n’est pas encore constitué dans le cas de la Côte d’Ivoire, et donc nous craignons un procès inique et non équitable. C’est aussi l’avis de la Cpi.
Quel sera donc le sort des victimes pour lesquelles vous vous battez depuis toutes ces années si le procès venait à se tenir ici ?
La décision du gouvernement vient de tomber. Les victimes auraient souhaité que la procédure soit poursuivie à la Haye, parce que cela leur permet un certain nombre de garanties, surtout celle de la réparation des préjudices subis, pour lesquels, la Cpi dispose d’un fonds. Ainsi, tout comme les victimes et vu les arguments énoncés plus haut, le procès de Simone Gbagbo doit se tenir à la Cpi. C’est une question de droit et de justice.
lhebdoivoirien@yahoo.fr
Interview réalisée par T.Evariste