Il flotte un air de désespoir dans plusieurs chaumières logées le long du fleuve Sénégal. Il est sorti de son lit, semant la peur chez les populations installées sur la rive. Ces dernières 48 heures, il recule lentement. Mais l’inquiétude des populations de Bakel, notamment de la commune de Ballou, reste vive.
«Nous avons la peur au ventre. Parce que l’eau peut envahir nos maisons à n’importe quel moment», déclare le piroguier Oumar Traoré. Il est de nationalité Burkinabè. Nous sommes au débarcadère du village d’Aroundou, frontalier à la Mauritanie par Diogountouro et du Mali par Gouthioubé. Mercredi 14 septembre 2022, en cet aprèsmidi, le soleil darde ses derniers rayons sur la pirogue qui assure la traversée du fleuve. Elle vient de débarquer les passagers en provenance du côté mauritanien. Elle vient d’effectuer l’un de ses derniers voyages de la journée sur un fleuve plein
L’eau repart. Mais elle n’est toujours pas complètement sortie des champs de maïs et de mil situés à proximité du cours d’eau. Elle laisse dernière elle, toutes sortes de saletés. Le téléphone de Oumar Traoré n’arrête pas de sonner.
«La pirogue n’est toujours pas venue. Je te ferai signe dès qu’elle arrive», fait-il savoir à son interlocuteur au bout du fil. C’est à quelques jets de pierre du débarcadère que sont installés le jeune Burkinabè et sa famille.
L’eau est située à la clôture de leur demeure. Une maison en terrasse. Le souvenir des dernières inondations le hante toujours. Les pertes étaient énormes, nous confie-t-il. Il raconte que c’était en pleine nuit qu’ils ont été réveillés par les eaux.
«La proximité avec le fleuve nous expose. Il y a tout dans l’eau : des reptiles, crocodiles. Nous sommes ici avec des enfants. Honnêtement, nous ne fermons plus l’œil», confie-t-il.
La situation inquiète également les autorités locales. Samba Bathily est le premier adjoint au maire de la commune de Ballou qui polarise 11 villages.
Il dit : «La commune est complètement isolée du pays. Personne ne sort de chez lui pour aller dans un autre village. Au niveau de l’état civil, depuis 4 à 5 jours, rien ne marche. Nous lançons un appel solennel au président de la République, son excellence le Président Macky Sall, de nous venir en aide.» Et d’ajouter : «Il n’y a pas de routes, pas de réseau téléphonique. L’électricité laisse à désirer. Tout est bloqué ici. Nous demandons de l’aide. Le Sénégal ne se limite pas à Diamniadio. Nous sommes tous des Sénégalais. Nous avons les mêmes droits. Nous sommes laissés à nous-mêmes.»
Doyen d’âge des pêcheurs installés à Aroundou, Sidy Sininta a 72 ans cette année. Son lit est à un crachat du fleuve. Il implore le ciel de stopper l’avancée du fleuve. Il égrène son chapelet, les yeux sur les petits-fils autour d’un bol de riz, près de la grandmère, Aïssatou Kalafo. Dans l’étroite cour, une poule et ses poussins fouinent le sol à la recherche de quoi mettre sous leur bec.
Un calme règne dans cette maison de pêcheurs. Derrière ce semblant de quiétude, se cache une peur bleue : l’avancée du fleuve. «En 2019, 7 chambres ont été détruites par les eaux. Je n’ai reçu que 4 sacs de ciment de l’Etat. Nous avons été obligés d’emprunter de l’argent pour reconstruire la maison. Jusqu’à présent, une partie de la dette n’est pas encore épongée. Nous n’avons pas assez de moyens. Nous sollicitons l’aide de l’Etat», confesse le vieux.
Selon l’adjoint au maire, en cas de sinistre, ils procèdent au recensement des victimes. Mais à «chaque fois qu’il y a des inondations, nous procédons au recensement des sinistrés, après, nous ne recevons rien de l’Etat. Raison pour laquelle certains cultivateurs ne veulent plus être recensés», dit-il.
A Roundois, Salif Kanouté tient un moulin à mil à la berge. La machine est à l’arrêt. Elle est recouverte de résidus de mil. Le propriétaire pense à la montée de l’eau et ses conséquences sur son travail. Il sollicite de l’aide.
Autre lieu. Quartier Modikany. Au bord du fleuve, plusieurs familles de pêcheurs. Salif Salamanta est entouré de ses deux épouses et enfants. L’eau, qui les avait réveillés dans leur sommeil il y a quelques jours, se retire petit à petit. La demeure, une maison en banco, garde encore les stigmates du débordement du fleuve.
«Avec la montée des eaux du fleuve, notre inquiétude est vraiment grande. L’eau a emporté trois de nos filets. Tout s’est passé très vite. J’étais absent de la maison. Il n’y avait que mes épouses et les enfants. Lors de la dernière crue, ma maison a été détruite. Donc vous imaginez la peur qui nous habite présentement», relate le pêcheur les yeux pleins d’anxiété et d’angoisse. Après l’entretien, il enfile sa tenue, le sac en bandoulière, marche à peu près 200 mètres, pour rejoindre sa pirogue. Il part ainsi à la pêche avec une seule prière. Que le fleuve regagne son lit !
Le quotidien
«Nous avons la peur au ventre. Parce que l’eau peut envahir nos maisons à n’importe quel moment», déclare le piroguier Oumar Traoré. Il est de nationalité Burkinabè. Nous sommes au débarcadère du village d’Aroundou, frontalier à la Mauritanie par Diogountouro et du Mali par Gouthioubé. Mercredi 14 septembre 2022, en cet aprèsmidi, le soleil darde ses derniers rayons sur la pirogue qui assure la traversée du fleuve. Elle vient de débarquer les passagers en provenance du côté mauritanien. Elle vient d’effectuer l’un de ses derniers voyages de la journée sur un fleuve plein
L’eau repart. Mais elle n’est toujours pas complètement sortie des champs de maïs et de mil situés à proximité du cours d’eau. Elle laisse dernière elle, toutes sortes de saletés. Le téléphone de Oumar Traoré n’arrête pas de sonner.
«La pirogue n’est toujours pas venue. Je te ferai signe dès qu’elle arrive», fait-il savoir à son interlocuteur au bout du fil. C’est à quelques jets de pierre du débarcadère que sont installés le jeune Burkinabè et sa famille.
L’eau est située à la clôture de leur demeure. Une maison en terrasse. Le souvenir des dernières inondations le hante toujours. Les pertes étaient énormes, nous confie-t-il. Il raconte que c’était en pleine nuit qu’ils ont été réveillés par les eaux.
«La proximité avec le fleuve nous expose. Il y a tout dans l’eau : des reptiles, crocodiles. Nous sommes ici avec des enfants. Honnêtement, nous ne fermons plus l’œil», confie-t-il.
La situation inquiète également les autorités locales. Samba Bathily est le premier adjoint au maire de la commune de Ballou qui polarise 11 villages.
Il dit : «La commune est complètement isolée du pays. Personne ne sort de chez lui pour aller dans un autre village. Au niveau de l’état civil, depuis 4 à 5 jours, rien ne marche. Nous lançons un appel solennel au président de la République, son excellence le Président Macky Sall, de nous venir en aide.» Et d’ajouter : «Il n’y a pas de routes, pas de réseau téléphonique. L’électricité laisse à désirer. Tout est bloqué ici. Nous demandons de l’aide. Le Sénégal ne se limite pas à Diamniadio. Nous sommes tous des Sénégalais. Nous avons les mêmes droits. Nous sommes laissés à nous-mêmes.»
Doyen d’âge des pêcheurs installés à Aroundou, Sidy Sininta a 72 ans cette année. Son lit est à un crachat du fleuve. Il implore le ciel de stopper l’avancée du fleuve. Il égrène son chapelet, les yeux sur les petits-fils autour d’un bol de riz, près de la grandmère, Aïssatou Kalafo. Dans l’étroite cour, une poule et ses poussins fouinent le sol à la recherche de quoi mettre sous leur bec.
Un calme règne dans cette maison de pêcheurs. Derrière ce semblant de quiétude, se cache une peur bleue : l’avancée du fleuve. «En 2019, 7 chambres ont été détruites par les eaux. Je n’ai reçu que 4 sacs de ciment de l’Etat. Nous avons été obligés d’emprunter de l’argent pour reconstruire la maison. Jusqu’à présent, une partie de la dette n’est pas encore épongée. Nous n’avons pas assez de moyens. Nous sollicitons l’aide de l’Etat», confesse le vieux.
Selon l’adjoint au maire, en cas de sinistre, ils procèdent au recensement des victimes. Mais à «chaque fois qu’il y a des inondations, nous procédons au recensement des sinistrés, après, nous ne recevons rien de l’Etat. Raison pour laquelle certains cultivateurs ne veulent plus être recensés», dit-il.
A Roundois, Salif Kanouté tient un moulin à mil à la berge. La machine est à l’arrêt. Elle est recouverte de résidus de mil. Le propriétaire pense à la montée de l’eau et ses conséquences sur son travail. Il sollicite de l’aide.
Autre lieu. Quartier Modikany. Au bord du fleuve, plusieurs familles de pêcheurs. Salif Salamanta est entouré de ses deux épouses et enfants. L’eau, qui les avait réveillés dans leur sommeil il y a quelques jours, se retire petit à petit. La demeure, une maison en banco, garde encore les stigmates du débordement du fleuve.
«Avec la montée des eaux du fleuve, notre inquiétude est vraiment grande. L’eau a emporté trois de nos filets. Tout s’est passé très vite. J’étais absent de la maison. Il n’y avait que mes épouses et les enfants. Lors de la dernière crue, ma maison a été détruite. Donc vous imaginez la peur qui nous habite présentement», relate le pêcheur les yeux pleins d’anxiété et d’angoisse. Après l’entretien, il enfile sa tenue, le sac en bandoulière, marche à peu près 200 mètres, pour rejoindre sa pirogue. Il part ainsi à la pêche avec une seule prière. Que le fleuve regagne son lit !
Le quotidien