Le Parquet a requis hier 20 ans de travaux forcés contre le nommé Birame Diallo dit Pape Bâ, accusé d’assassinat. Ce dernier a poignardé son ami qu’il soupçonnait de draguer sa copine.
‘’Aimer, c’est permettre d’abuser’’, écrit Pierre Riverdy, dans son roman Le vrac paru en 1989. Et Birame Diallo dit Pape Bâ s’est bien permis d’abuser en ôtant la vie à son ami pour les beaux yeux d’une fille. Fou amoureux d’une jeune fille, à sa sortie de prison, il a découvert que cette dernière sortait avec son ami Souleymane Diallo. Aveuglé par la jalousie, Birame Diallo n’a pas hésité à poignarder mortellement son ami et supposé rival. Les faits se sont déroulés aux HLM V, dans la nuit du 29 mars 2009. L’accusé venait d’être élargi de prison quelques jours auparavant.
D’après les témoins, les deux antagonistes se disputaient violemment dans la rue. Séparés, l’accusé est entré chez lui pour en ressortir avec un couteau et s’est mis à la recherche de son protagoniste qui sera atteint au niveau du ventre. Tandis que Souleymane agonisait baignant dans une mare de sang, son tueur a réussi à s’enfuir. La foule voulait l’appréhender mais a dû se résigner à cause du couteau que brandissait Birame Diallo en menaçant tous ceux qui étaient sur son chemin. Une fois qu’il a réussi à s’extirper de la foule, il s’est fondu dans la nature. Birame n’a été appréhendé que quelques mois après à Thiès où il avait été interpellé pour une affaire de vol en réunion. Le juge d’instruction du tribunal d’instance de Dakar ayant appris son emprisonnement à la prison de Thiès a demandé son transfèrement. Entendu à l’enquête et à l’instruction, Birame a reconnu les faits tout en plaidant la légitime défense.
Hier, il a adopté le même système de défense à la barre de la Chambre criminelle. Il a écarté d’emblée la thèse d’un crime passionnel en soutenant que la victime l’a attaqué sans raison. ‘’On se bagarrait car il se disputait avec Modou Thiam. Je suis intervenu et il m’a insulté. Alors que j’avais même oublié l’incident, il est revenu avec un coupe-coupe pour m’attaquer’’, a narré l’accusé. Poursuivant son récit, il a ajouté : ‘’Les personnes qui l’ont vu venir m’ont demandé de courir. Avant même de comprendre ce qui se passait, il m’a asséné un coup au bras, puis un second que j’ai esquivé.’’
La suite, Birame a avoué avoir couru vers le vendeur d’orange pour s’emparer de son couteau et infligé un coup à son antagoniste. A l’en croire, il lui a asséné un coup par instinct de survie sans viser une quelconque partie. Sauf que le coup a occasionné une plaie de 15 cm à la victime qui a fini par succomber et rejoindre dans l’au-delà son père dont il venait de commémorer le 40ème jour de sa disparition la veille. La précision est faite par la mère de Souleymane Mané qui jusqu’à présent souffre de la mort de son fils né en 1984. Malgré cette douleur, elle n’a pas réclamé de dommages et intérêts et a préféré s’en remettre à la décision de la justice. Cependant, contrairement aux déclarations de l’accusé, la dame a confirmé la thèse du crime passionnel mais Adja Ramata Ndao, celle qui était la copine de son défunt garçon l’a contesté puisqu’il n’y a jamais eu de problème de jalousie entre eux.
Quoi qu’il en soit, le substitut Saliou Ngom considère que la victime a perdu la vie pour des futilités. Conforté par les déclarations des trois témoins entendus à l’enquête, il est convaincu que l’intention de donner la mort avec préméditation ne souffre d’aucune contestation. Le maître des poursuites a aussi décrit l’accusé comme ‘’un caïd, un scélérat qui n’a pas l’intention de s’amender’’ puisqu’après son forfait, il est allé fréquenter de mauvaises personnes à Thiès. Compte tenu de ces arguments, il a requis 20 ans pour assassinat.
Pour la défense, Birame Diallo est loin d’être le monstre décrit à la barre. Par rapport aux faits, l’avocat de l’accusé estime que la preuve de la préméditation n’est pas établie dans la mesure où son client a pris le couteau pour se défendre d’un homme qui lui avait donné des coups de coupe-coupe. ‘’Dieu a fait que l’autre est décédé mais Birame Diallo aurait pu y laisser sa vie. C’est un coup instinctif qu’il a donné pour survivre’’, a soutenu la robe noire tout en demandant que les déclarations des témoins soient prises avec des pincettes vu les relations entre ces derniers et les victimes. Aussi a-t-il plaidé une disqualification des faits en coup mortel dans un contexte de légitime défense et d’excuse de provocation.
Délibéré 7 août prochain.
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