Maxime Tandonnet : La catégorie « immigré » n’existe pas en droit ni dans les politiques publiques françaises. Il faut donc parler « d’étranger en France ». Il est absolument faux d’affirmer que les étrangers présents en France bénéficient d’un point de vue général de privilèges par rapport aux Français. Bien souvent, ils cumulent les handicaps sociaux et familiaux, occupent les emplois les plus pénibles, sont installés dans des banlieues excentrées, parfois sordides, de même que les collèges où sont scolarisés leurs enfants. Le taux de chômage des étrangers « non communautaires » atteignait 23% en 2009 selon l’INSEE. Ce sondage ne me semble pas poser la bonne question qui est celle de la maîtrise du flux migratoire. Tout État quel qu’il soit, européen, américain, africain, a le droit sinon le devoir de maîtriser son immigration, de lutter contre l’immigration illégale, de faire en sorte que le nombre des nouveaux arrivants n’excède pas ses capacités d’accueil sur le marché du travail, le logement, les services publics. Quand il échoue dans cette mission, son échec favorise les fractures, aggrave l’exclusion et crée un potentiel de malheur et de frustrations dramatique. C’est le sentiment que l’Etat ne maîtrise pas suffisamment l’immigration qui peut favoriser des réactions d’exaspération comme celle qui s’exprime dans ce sondage.
Fabrice Madouas : Ce sondage comporte plusieurs items : 86% des Français estiment aussi "qu'il faut passer d’une immigration subie à une immigration choisie", 37% seulement que "l'immigration est une chance pour la France" et 24% que "les pouvoirs publics luttent efficacement contre l’immigration clandestine". Il traduit un durcissement de l’opinion publique sur ce sujet : les Français étaient beaucoup plus partagés sur ces questions il y a quelques années. En avril 2006, ils n'étaient que 40% à penser qu'"on en fait plus pour les immigrés que pour les Français". La hausse est de 27 points en sept ans. Elle concerne surtout les sympathisants de l’UMP (+ 41 points) et du Front national (+ 27 points) mais aussi ceux du parti socialiste (+ 8 points). L'ampleur de cette évolution ne s’explique pas seulement par les péripéties de l’affaire Leonarda, désastreuse pour l'exécutif. De plus en plus de Français – cette "France des invisibles" qui vit en province, dans de petites villes et à la campagne – ont le sentiment d’être exclus des politiques sociales et plus généralement, des politiques d’aménagement du territoire. La démographe Michèle Tribalat souligne avec raison, dans son dernier livre (Assimilation : la fin du modèle français), que "la réforme générale des politiques publiques a démuni nombre de territoires où ils vivent : fermeture de classes, de postes de gendarmerie, d’hôpitaux, de bureaux de postes" mais aussi de tribunaux et, depuis plusieurs années, de garnisons qui font vivre de nombreuses villes. C'est aussi le constat qu'a fait le géographe Christophe Guilluy dans divers ouvrages. Cette désertion des services publics provoque une diminution des emplois publics et, indirectement, une destruction d’emplois privés, surtout dans le commerce. Dans le même temps, l'État consacre, depuis la fin des années 1990, plusieurs dizaines de milliards d’euros à la rénovation des "quartiers populaires" où vivent de nombreux immigrés (600 millions d’euros, par exemple, pour les villes de Clichy-sous-Bois et Montfermeil, en Seine-Saint-Denis, soit environ 40.000 euros par habitant). C'est la confrontation de ces deux évolutions qui nourrit le sentiment que "l'on en fait plus pour les immigrés que pour les Français" – même si beaucoup d'immigrés ont aujourd’hui la nationalité française. Quelles sont les différentes aides dont peuvent bénéficier les personnes immigrées en arrivant en France ? Maxime Tandonnet : A leur arrivée, ils ne bénéficient d’aucune aide en particulier ! Ils ont l’obligation de signer un « contrat d’accueil et d’intégration » qui leur assure une journée d’instruction civique, le passage d’un test de qualification professionnelle, et une formation à la langue française de 300 heures s’ils en ont besoin. Je ne peux pas dire autre chose car il n’y a rien d’autre. Une exception toutefois, celle des demandeurs d’asile qui peuvent obtenir un hébergement ou une aide pécuniaire, minimum de survie le temps de l’examen de leur dossier. A cet égard, la France est tenue par la Convention de Genève sur les réfugiés et le droit européen. Le seul moyen de limiter l’ampleur de ce phénomène serait une accélération drastique de la durée d’examen des dossiers de demande d’asile qui atteint les deux ans en moyenne. Fabrice Madouas : Tout dépend des raisons de leur arrivée. La situation d’un demandeur d’asile n'est pas celle d’un étudiant, ou d'une épouse que son mari fait venir en France dans le cadre du regroupement familial. Un demandeur d'asile, par exemple, pourra bénéficier de plusieurs prestations : hébergement en centre d’accueil (même s’il manque des places en raison du nombre des demandes d’asile : plus de 60.000 l’an dernier), couverture maladie universelle, allocation temporaire d’attente (336 euros par mois) ou allocation mensuelle de subsistance (311 euros pour un couple, mais la somme varie selon la composition de la famille). L'accueil que la France réserve aux demandeurs d’asile n’est donc pas indigne. Le père de Leonarda, Resat Dibrani, a d'ailleurs choisi de quitter l’Italie, où la famille a séjourné, pour venir en France car il se plaignait de ne pas percevoir de prestations là -bas. La France n'a pas cessé de l’aider après le rejet de sa demande d'asile : il a conservé la jouissance du logement attribué par le centre d’accueil des demandeurs d’asile, le conseil général lui versait 350 euros par mois et veillait au renouvellement de la CMU. Les services sociaux de la mairie lui attribueront des bons d’alimentation et l’Office français d’immigration et d’intégration lui a proposé 10 000 euros pour son retour au Kosovo. Par ailleurs, les étrangers en situation irrégulière peuvent bénéficier de l’aide médicale d’Etat (AME) après trois mois de résidence en France.
Fabrice Madouas : Ce sondage comporte plusieurs items : 86% des Français estiment aussi "qu'il faut passer d’une immigration subie à une immigration choisie", 37% seulement que "l'immigration est une chance pour la France" et 24% que "les pouvoirs publics luttent efficacement contre l’immigration clandestine". Il traduit un durcissement de l’opinion publique sur ce sujet : les Français étaient beaucoup plus partagés sur ces questions il y a quelques années. En avril 2006, ils n'étaient que 40% à penser qu'"on en fait plus pour les immigrés que pour les Français". La hausse est de 27 points en sept ans. Elle concerne surtout les sympathisants de l’UMP (+ 41 points) et du Front national (+ 27 points) mais aussi ceux du parti socialiste (+ 8 points). L'ampleur de cette évolution ne s’explique pas seulement par les péripéties de l’affaire Leonarda, désastreuse pour l'exécutif. De plus en plus de Français – cette "France des invisibles" qui vit en province, dans de petites villes et à la campagne – ont le sentiment d’être exclus des politiques sociales et plus généralement, des politiques d’aménagement du territoire. La démographe Michèle Tribalat souligne avec raison, dans son dernier livre (Assimilation : la fin du modèle français), que "la réforme générale des politiques publiques a démuni nombre de territoires où ils vivent : fermeture de classes, de postes de gendarmerie, d’hôpitaux, de bureaux de postes" mais aussi de tribunaux et, depuis plusieurs années, de garnisons qui font vivre de nombreuses villes. C'est aussi le constat qu'a fait le géographe Christophe Guilluy dans divers ouvrages. Cette désertion des services publics provoque une diminution des emplois publics et, indirectement, une destruction d’emplois privés, surtout dans le commerce. Dans le même temps, l'État consacre, depuis la fin des années 1990, plusieurs dizaines de milliards d’euros à la rénovation des "quartiers populaires" où vivent de nombreux immigrés (600 millions d’euros, par exemple, pour les villes de Clichy-sous-Bois et Montfermeil, en Seine-Saint-Denis, soit environ 40.000 euros par habitant). C'est la confrontation de ces deux évolutions qui nourrit le sentiment que "l'on en fait plus pour les immigrés que pour les Français" – même si beaucoup d'immigrés ont aujourd’hui la nationalité française. Quelles sont les différentes aides dont peuvent bénéficier les personnes immigrées en arrivant en France ? Maxime Tandonnet : A leur arrivée, ils ne bénéficient d’aucune aide en particulier ! Ils ont l’obligation de signer un « contrat d’accueil et d’intégration » qui leur assure une journée d’instruction civique, le passage d’un test de qualification professionnelle, et une formation à la langue française de 300 heures s’ils en ont besoin. Je ne peux pas dire autre chose car il n’y a rien d’autre. Une exception toutefois, celle des demandeurs d’asile qui peuvent obtenir un hébergement ou une aide pécuniaire, minimum de survie le temps de l’examen de leur dossier. A cet égard, la France est tenue par la Convention de Genève sur les réfugiés et le droit européen. Le seul moyen de limiter l’ampleur de ce phénomène serait une accélération drastique de la durée d’examen des dossiers de demande d’asile qui atteint les deux ans en moyenne. Fabrice Madouas : Tout dépend des raisons de leur arrivée. La situation d’un demandeur d’asile n'est pas celle d’un étudiant, ou d'une épouse que son mari fait venir en France dans le cadre du regroupement familial. Un demandeur d'asile, par exemple, pourra bénéficier de plusieurs prestations : hébergement en centre d’accueil (même s’il manque des places en raison du nombre des demandes d’asile : plus de 60.000 l’an dernier), couverture maladie universelle, allocation temporaire d’attente (336 euros par mois) ou allocation mensuelle de subsistance (311 euros pour un couple, mais la somme varie selon la composition de la famille). L'accueil que la France réserve aux demandeurs d’asile n’est donc pas indigne. Le père de Leonarda, Resat Dibrani, a d'ailleurs choisi de quitter l’Italie, où la famille a séjourné, pour venir en France car il se plaignait de ne pas percevoir de prestations là -bas. La France n'a pas cessé de l’aider après le rejet de sa demande d'asile : il a conservé la jouissance du logement attribué par le centre d’accueil des demandeurs d’asile, le conseil général lui versait 350 euros par mois et veillait au renouvellement de la CMU. Les services sociaux de la mairie lui attribueront des bons d’alimentation et l’Office français d’immigration et d’intégration lui a proposé 10 000 euros pour son retour au Kosovo. Par ailleurs, les étrangers en situation irrégulière peuvent bénéficier de l’aide médicale d’Etat (AME) après trois mois de résidence en France.